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REVUE
DES
LANGUES ROMANES
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REVUE
DBS
LANGUES ROMANES
PUBLIEE
PAR LA SOCIETE
POUR L'ÉTUDE DES LANGUES KOMANES
Tome XLV
(Ve Série — Tome VII)
MONTPELLIER
AU BUREAU DES PUBLICATIONS
DE LA SOCIÉTÉ
POUR L'ÉTUDE DBS LAXQCBS HOMANK3
Rue de l'Aucieu-Courrier, 2
PARIS
G. PEDONE-LAURIFL
Libriire-Édilear
13, RUE SOUPFLOT
»
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1. 1+5
REVUE
DES
LANGUES ROMANES
UNE NOUVELLE EDITION
DU ROMAN DE FLAMENCA '
Le volume qui fait l'objet de la présente étude n'est que le
premier et ne constitue que la moitié de la 2e édition, depuis
longtemps attendue, de Flamenca. Il comprend seulement le
texte du poème, précédé d'un court avant-propos, et le voca-
bulaire. L'introduction, la traduction, qui cette fois sera com-
plète, et les notes composeront le second volume.
La première édition de Flamenca parut en 1865. Il est
naturel que celle qui nous est offerte aujourd'hui réalise sur
celle-là un progrès considérable. C'est dans la traduction que
ce progrès devra surtout se marquer, car, outre les lacunes
qu'on regrettait d'y trouver, elle laissait à désirer plus encore
que le texte lui-même.
Ce texte, dont nous avons donc seulement, aujourd'hui, à
nous occuper, se présente à nous sous un aspect autrement
satisfaisant qu'autrefois. L'éditeur l'a revu soigneusement sur
i Le roman de Flamenca, publié d'après le manuscrit unique de Car-
cassonne traduit et accompagné d'un vocabulaire. — Deuxième édition,
entièrement refondue, par Paul Meyer, membre de l'Institut. Tome I.
Paris, Emile Bouillon, 1901. Bibliothèque Française du Moyen Age,
t. VIII.
xlv. — Janvier-Février 1902.
6 UNE NOUVELLE EDITION
le ms. unique, ce qui lui a permis de corriger un très grand
nombre de fautes de lecture qui le dénaturaient dans la
première édition. Il a de plus introduit dans ce même texte,
ainsi rétabli selon la teneur du ms., mais visiblement altéré
en mille endroits par un scribe négligent, les plus heureuses
corrections. Enfin le vocabulaire , qui dans la première
édition, malgré le louable effort dont il témoignait, était resté
par trop insuffisant, a reçu, dans celle-ci, un accroissement
et des améliorations qui en font un ouvrage tout à fait nou-
veau. M. Meyer, du reste, n'en est plus à faire ses preuves en
ce genre de travaux. Si le glossaire actuel, pas plus que ceux
de la Croisade, de Daurel et Béton et de Guillaume de la Barre,
n'est partout exempt d'erreurs, et, s'il présente même quel-
ques lacunes, on ne peut qu'en louer la richesse et, en géné-
ral, l'exactitude.
On aurait, peut-être, en décernant à cette première partie
de la nouvelle édition de Flamenca les éloges qu'elle mérite,
à faire quelques réserves sur la méthode et les procédés de
critique de l'éditeur. Je crois devoir, aujourd'hui du moins,
m'en abstenir, parce qu'il est possible — c'est du moins ce
qu'un passage de l'avant-propos laisse entendre — que l'in-
troduction et les notes présentent une justification acceptable
de ce qu'on serait autrement porté à blâmer.
Mais, il faut le dire dès aujourd'hui, car il n'est pas néces-
saire d'attendre l'apparition du second volume, pour se pro-
noncer sur ce point, la nouvelle édition du texte de Flamenca,
si considérable que soit le progrès qu'elle réalise sur la pre-
mière, si nombreuses qu'y soient les habiles restitutions de pas-
sages corrompus, n'est point encore l'édition , je ne dis pas
définitive (il n'y en a guère de telles, et il ne saurait y en avoir
dans des conditions pareilles à celles du cas présent), mais l'édi-
tion aussi parfaite que possible, ces conditions étant données,
qu'on était en droit d'attendre de M. Paul Meyer. Aussi ne sau-
rais-je souscrire sans réserve au jugement qu'il émet lui-même
sur son travail :« Je crois, dit-il, avoir fait rendre au manuscrit
tout ce qu'on en pouvait tirer. » Eh bien ! non. On en pouvait
tirer davantage, et M. Meyer le pouvait mieux qu'aucun autre.
Il lui suffisait d'y appliquer, avec une attention plus soutenue et
plus réfléchie, et aussi avec quelque défiance de son propre sens,
DU « ROMAN DE FLAMENCA » 7
surtout de la justesse de ses premiers aperçus, cette critique
si éveillée d'ordinaire, qui l'a rendu justement redoutable, et
ces rares qualités de c'airvoyance et de pénétration qu'on
admire en lui, et dont il sait si bien user, — non parfois sans
un surprenant mélange de légèreté, — quand il s'agit de juger
les travaux d' autrui.
Cette remarque, je le répète, ne porte et ne peut porter
que sur l'établissement du texte. Une appréciation générale
ne sera possible que lorsque nous en aurons tous les éléments,
c'est-à-dire quand le second volume aura paru. Je me borne-
rai donc, dans les pages qui vont suivre, à soumettre au lec-
teur et à l'éditeur lui-même, qui en acceptera peut-être quel-
ques-unes, les corrections qui me paraissent pouvoir être
proposées en certains endroits du texte, et en général les
observations que m'a suggérées une lecture attentive, en
même temps que les résultats d'une collation minutieuse
que j'ai faite du ms. et dont je parlerai tout à l'heure.
Je me suis autrefois beaucoup occupé de Flamenca, et
j'avais même commencé dans la Revue rfes langues romanes,
il y a déjà vingt-cinq ans1, la publication d'une série de notes
consacrées à la critique et à l'interprétation du texte de ce
charmant poème. Cette publication fut interrompue et fina-
lement abandonnée, pour des motifs qu'il est inutile d'exposer
ici. Mais j'ai conservé mes notes et plusieurs d'entre elles
ont pu encore être utilisées, les passages qu'elles visaient
n'ayant pas reçu dans la nouvelle édition les corrections dont
ils me semblaient susceptibles.
Depuis, ayant obtenu de M. le Maire de Carcassonne, par
l'obligeant intermédiaire de son collègue de Montpellier, qui
était alors M. Castets, doyen de la Faculté des lettres, com-
munication du manuscrit, j'ai pu, grâce à la collation très
attentive que j'ai faite du texte imprimé, corriger un grand
nombre de fautes de lecture. De ces fautes plusieurs ont per-
sisté dans la nouvelle édition, et il y en a çà et là quelques-
unes de nouvelles. Je relèverai, des unes et des autres, celles
que j'ai pu constater avec certitude.
Au lieu de ranger mes remarques sous des chefs différents,
1 Tome IX, pp. "24 et suiv.
8 UNE NOUVELLE EDITION
il m'a paru plus simple et plus commode de les présenter dans
Tordre même des vers du poème, qu'elles s'appliquent aux
leçons du ms., à l'établissement du texte, ou à son interpré-
tation, c'est-à-dire au vocabulaire. On pourra trouver plu-
sieurs de ces remarques minutieuses. Mais le Roman de Fla-
menca occupe d ins la littérature provençale et, en général,
dans la littérature médiévale, un rang si élevé, c'est pour
l'histoire de la civilisation un document d'une telle importance
que tout effort, si bumble qu'il soit, tendant à en rendre le
texte plus intelligible et plus correct, paraîtra devoir être
encouragé. L'éditeur lui-même, qui se fait, ajuste titre, un
mérite d'avoir indiqué en note «toutes les particularités gra-
phiques qui ne pouvaient être conservées dans le texte », ne
me saura pas mauvais gré d'avoir noté celles ou une partie
de celles qui ont échappé à sa révision.
M. Antoine Thomas a publié dans le cahier de juin dernier
du Journal des Savants, sur la nouvelle édition de Flamenca,
un article très important, rempli d'observations judicieuses
et de conjectures pour la plupart aussi ingénieuses que plau-
sibles1. Dans un certain nombre de passages, j'avais déjà
corrigé les mêmes fautes ou fait les mêmes observations que
lui. Je n'ai pas cru devoir supprimer de mon article les notes
concernant ces passages.
Vers 18. «Si Flamencha deven esclava. » Pourquoi ne pas
écrire ici Esclava, avec une majuscule, puisque plus loin
(v. 36) on écrit ainsi Fsclaus, qui en est le masculin?
30. « pot ». Le ms. porte poc.
65. « e demandet ». Corr. e[l] d.
71. « si a bon plag ». Corr. ci, puisque l'éditeur ramène
systématiquement à l'orthogr. étymologique les particules
si et ci et leurs composés. Et c'est le seul cas, pour le remar-
quer en passant, où il agisse ainsi, malgré l'inconséquence
qu'il y a à ne pas généraliser le procédé.
i Je signalerai particulièrement elles qui concernent les vers 1096,
2717, 5236, 6097. — Quant aux vers 1194-1199, je ne saurais être de son
avis, sauf en ce qui concerne l'observation sur fenera et sabra.
DU « ROMAN DE FLAMENCA » 9
73. « Ben par que no t'iest feinz. » Lire no t'i est, en sup-
primant que?
79. « que i ponhem » = que nous tardions. Le vocab. ne
donne pas cette acception, qu'on retrouve au v. 6842 et qui
est encore en usage.
147-8. a Consi a venir s'aparella Tais cortz... ». Venir doit
paraître ici un peu surprenant. Aussi n'est-ce pas ce qu'il y
a dans le ms. On y lit nemur = Nemours (san< s, comme au
v. 1077) ; et c'est justement ce que le contexte exige.
153. « Ane Archirabautz gos non retenc». Ms. Ans, qui ne con-
vient pas ; mais anc ne convient guère mieux. Corr. Ens. Le
nom de ce personnage est partout ailleurs précédé de l'article
honorable. Je remarquerai à cette occasion que presque partout
où l'éditeur imprime En A. ou d'En A., il faudrait imprimer
e N'A. ou de N'A., selon, d'ailleurs, l'indication constante,
ou presque constante, du ms.
154. « avant ». Ms. avan.
104. « sufr' el cors.» M. Meyer, à Verrata, supprime avec
raison l'apostrophe. Mais il devrait aussi rétablir la leçon du
ms. sufril, qu'il a le tort de changer en su/rel, car su/ri (3e
pers. sing. ind. prés.) n'est pas une forme incorrecte.
175, note. Us de tostz est exponctuée dans le ms.
256. « De part Flamenca saludet. » Cor. Flamencal.
274. « si en leis. » Ms. ses (sesi, avec Vi exponctué), à
rétablir. C'est une forme bien connue, et dont il y a d'autres
exemples dans ce texte.
309. Supprimer la virgule. La construction doit être: a de
ren que cor saupes pensar que boca etc. »
311. « Archimbaut[z]. » Rétablir Archimbaut. « On servit
(serviron) Archambaut et le comte. » On ne s'expliquerait pas
que le comte et surtout Archambaut, son hôte, fissent le ser-
vice. L'emploi de coms, comme régime, ne doit pas faire dif-
ficulté. Les exemples ne sont pas rares d'une pareille infrac-
tion à la règle des cas, pour les noms de personne ou de
dignité. Cf. Revue, X, 277.
327-28. « maïstre : mal istre. » Corr. maestre : mil eslre,
car, s'il n'y a pas d'objection à faire à maïstre, je ne crois
pas qu'on puisse accepter istre comme une forme régulière.
387-388. « deneir[s], drapfs], cullier[s], enap[s] ». Pourquoi
10 UNE NOUVELLE EDITION
ces s? Ce sont là des nominatifs pluriels. Ou alors pourquoi
aur et aryen sans s ? Il n'y avait rien à changer à la leçon du
ms.
400. « Ni l'autra carn ja meins non valgra ». Le con-
texte, ce me semble, repousse ici l'idée du conditionnel. Il
audraitdonc donner à valgra sa signification étymologique,
et entendre : « les autres viandes (bœuf, mouton, etc.) ne
valaient pas moins », à savoir que la volaille et la venaison
dont l'énumération précède. On sait qu'un pareil emploi de
l'ancien plus-que-parfait, rare à la vérité et archaïque, n'est
pas sans exemples en d'autres textes. Il serait intéressant
de pouvoir le constater ici.
401. « a fag ». Ms. ha f.
429. « moutaspessa ». Corr. moût espessa. Je ne crois pas
que le féminin mouta ait jamais été employé devant un
adjectif, dans la fonction de moût, pour exprimer le super-
latif, comme il est dit au vocabulaire.
433. « ques fo eissitz A. l'encontre. » ques fo est pour que fos
du ms. Bonne correction; mais mieux vaudrait quel fo.
469. « paubre[s]. » Pourquoi cette correction? Le pluriel
convient mieux ici que le singulier.
473. « Es anc per el non s'amermet ». Corr. per al? L'édi-
teur propose per ren, qui revient au même, mais s'éloigne
bien davantage de la leçon du ms.
488. « Ben lo feiran el cais gelar ». Corr. il.
570. « tantareva ». C'est bien par a fantaisie, idée saugre-
nue, absurdité » que ce mot rêva (voirie vocabulaire) doit se
traduire. Il existe encore avec des acceptions diverses, dont
celle-ci. On dit, par exemple, à Montpellier : « Quanta rêva
te pren ? » Quelle lubie te prend? « Aco's una rêva que i a pas-
sât per la testa. » Ce même mot s'applique aussi aux épidémies
ou à leur cause inconnue. De l'influenza, du choléra, on dira:
o C'est une rêve qui passe. » Une servante disait dernière-
ment, à propos d'une maladie qui sévissait dans mon quartier :
« Moi, je ne prends pas facilement les rêves. » Faut-il voir là
une expression métaphorique, analogue à celle de « payer
son tribut à la maladie », si fréquemment employée ? On sait
([uereva, en provençal comme en bas-latin, et comme rêve
en français, est le nom d'un certain impôt.
DU «ROMAN DE FLAMENCA» 11
573. « baizar es estreiner. » M. Meyer indique, avec doute,
au vocabulaire, la correction esteinar, qui paraît sûre. Mais
il faut aussi corriger baizar en baissar. Ces deux mots baizar
et estreiner étant naturellement associés (cf. 5941), la première
erreur du scribe a entraîné la seconde.
588. « conseillers... » Ce mot signifie coussin, ou quelque
chose d'analogue. M. Meyer en a trouvé, dans un inventaire
de 1288, un exemple qui, joint à celui qu'a relevé Raynouard,
ne laisse aucun doute sur sa vraie signification. Mais il paraît
bien difficile d'admettre que ce soit « une expression méta-
phorique dérivée de conseil, au sens d'entretien privé. » Il
existe en provençal à côté de coissiun autre substanr.if de signi-
fication analogue, sinon identique, qui est cosser, féminin cos-
sera1. Serait-il trop téméraire de supposer un dérivé cos e-
rier, qui aurait pu facilement devenir cosselier? Mais d'où
vient cosser?
681. « Que l'vras trobet a l'uisset. » Dans la première
é lition on lisait Lyras. Ce Lyras devient aujourd'hui un nom
commun, sans que le glossaire nous éclaire sur sa significa-
tion. Les notes du second volume le feront sans doute. En
attendant, on ne peut, semble-t-il, le traduire que par Cafflûjé
ou l'irrité. Je ne sais, quant à moi, quel est le personnage de
roman ainsi désigné.
710. « en bala. » A cette expression, que M. Meyer traduit
très justement, à ce qu'il semble, par en bloc, ensemble, on
peut comparer anias o, aujourd'hui si usité, qui a ce même
sens.
736-737. 11 doit y avoir une lacune entre ces deux vers.
Les idées, de l'un à l'autre, ne paraissent pas se suivre, et le
v. 737 est très obscur.
739. « a cascus ». Corr. cascun.
T.VJ. « Mais Cobezesal venc comtar ». Comtar paraît ici
assez impropre. Corr. conortar, en supprimant Mais?
1 On en trouvera un exemple, en morne temps que de cosseillier, au
tome XXXII de la Revue, p. 193. Une variante est cocena (Rayn. II
127) à qui, comme à cossera, paraît convenir plus spécialement la s
fication de matelas ou de couette. C'est d'ailleurs de cocena [cossena) que
cossera paraît provenir, comme cosser de cossen. Mais je n'ai pas ren
tré cette dernière forme.
12 UNE NOUVELLE EDITION
755. « Oi ! oi! » Oi, interprété simplement par exclamation,
doit signifier ici oui, comme en d'autres endroits du poème
qui seront signalés plus loin.
810. « Que lamanega no[n] i es gap ». Corr. plutôt, car la
grammaire exigerait gaps, que la rime repousse : no i es
[per] gap.
816. « li di[s] sos cors ». Ms. se cors. M. Meyer, qui accepte
ailleurs l'article féminin sa, aurait pu ne pas rejeter ici ce se,
qui est la forme masculine suj. sing. du même article. « Le
cœur lui dit. » L'adjectif possessif, en de telles phrases, n'a
pas besoin d'être exprimé.
823. « Neis antreseinz... » L'édit propose la correction ni.
C'est nés {ne -J- s euphonique), qui est ici naturellement indi-
qué.
823-4. « deia... torneia. » C'est sans doute par distraction
que M. Meyer écrit ici ces deux mots par ï, car ailleurs il
emploi le >. Cf. vv. 519-20, 2238-9, etc.
870. « sen. » Corr. fen (= fenh) ? Cf. v. 875.
890. « Lo reisvol ». Le ms. porte Le, qu'il faut naturelle-
ment rétablir.
952. « vos». Ne peut-être ici le pronom personnel, ni, sera-
ble-t-il, voz (vocem). Le vocabulaire, sans citer pourtant ce
vers, n'indique d'autre signification que celle de voix. Je
pense qu'ici il s'agit de vœux. S'il fallait une correction, als
serait tout indiqué.
976. « a despes. » Ms. ha d.
980. « dures. » Voir la note. Le ms. porte durelz.
1024. « Oi! lo mal aion...» Lire Oi loi Mal aion... C'est une
réponse à la question qu'Archambaut se faisait à lui-même
au vers précédent. Oi est une forme , déjà signalée plus
haut v. 755, de l'affirmation {=oc avec c vocalisé), encore fort
usitée en divers lieux (Montpellier, Alais, etc.), et lo est le
pronom neutre sujet, inexprimé, comme à l'ordinaire, dans
la proposition à laquelle celle-ci répond. Cf. v. 2579, 6187.
1038. « Deforas art, dedins acora. » Corr. atora (il gèle),
que le contexte semble exiger. Voy. Mistral Tor, Sauvages
Toura, et les glossaires des diverses éditions de Goudelin.
1072. « aital doner! » Que signifie cela? Il faut un mot
pouvant rimer avec enquer ou enquier. La correction dongier
DU « ROMAN DE FLAMENCA » 13
ou donier se trouve ainsi toute indiquée. C'est le français
dangier, avec son acception ordinaire chez les romanciers et
les lyriques.
1073. Virgule après leis.
1078. « Mi euh eu be que la sentis ». J'écrirais l'asenlis
(—lia.), du verbe asseniir, qui manque à Raynouard, mais
qu'on peut voir dans Mistral.
1079. « Asaborada la savia ». Cette forme savia, admise
au vocabulaire comme imparfait de saber, paraît inadmissible.
Je lirais: la s'avia: « il se l'avait savourée ».
1125. « geus ». Pourra vos, est-il dit au glossaire. J'en
doute. Je lirais gens avec un point d'exclamation à la fin du
vers. Cette particule qui accompagne d'ordinaire la négation,
est aussi employée au positif, comme explétive, et il y en a,
dans notre poème, des exemples certains. Voy. le vocabulaire
et ajoutez aux exemples cités giens 5528.
1129. « forfes. » Est-ce bien la vraie leçon? La lro édition
portait forses, ici comme plus loin (3579), et je n'ai pas, en
ces deux endroits, relevé de faute, dans ma collation. Cette
forme d'ailleurs existe encore Çnâ forsei en Limousin).
1147. a Malaus balli ». Ms. falli; la correction salli est
mieux indiquée, et le contexte n'y répugne pas, à condition
de sous-entendre quelque chose comme cela (ce mot, cette
parole)? Cf. v. 0022, où un sujet neutre est également sous-
entendu.
1152. « tan s'i pert ». Corr. tems i.
1162. « Que semblon Flamencha espinat ». Il ne s'agit cer-
tes pas ici, malgré la majuscule, de l'héroïne du poème : fla-
mencho, d'après Mistral, signifie (oison en Dauphiné ; quant
à espirat, qui suit dans le ms., c'est vraisemblablement un
autre substantif, qu'on pourrait traduire par buisson, tas
d'épines, en adoptant la correction très plausible de M. Meyer.
1192. a que nom folleja. » Corr. non. Le pronom réfléchi
de la l'e personne n'a rien à faire ici. Le sujet du verbe est
Flamenca, et non Arcbambaut, comme le suppose assez sin-
gulièrement l'éditeur (voir le vocabulaire), o Je la crois inno-
cente, quoique je me plaigne d'elle; mais il faut être sur ses
gardes. Et que ferais-je si un misérable l'avait fait succom-
14 UNE NOUVELLE EDITION
ber?... » La contradiction des paroles du personnage est
l'expression naturelle du désordre de ses idées.
1-17. « [D'] aisso. .. » Correction inutile: aisso est régime
direct de blasman, comme que, qui le remplace, de lauzar ;
me, dans le premier quem, comme dans le second (où il ne
peut y avoir doute), = mihi.
1218. « Petit sap fors de castiar.» Le ms. a fort. D'après
la première édition, où on lit for[s], j'avais cru que la leçon
du ms. était for; et c'est la bonne, comme je l'ai dit il y a
longtemps.
1222. a Mais am [mais]... » Cette répétition de m .is est un
peu choquante. Dans la première édition, M. Meyer avait
adopté une autre correction: Mais am[ieu], peut-être préfé-
rable. Ou vaudrait-il mieux, corriger, si on tient à la conjonc-
tion adversative, [Mas] triais ami
1224. « a Bolonha. » Le ms. porte na Bolonha, ce dont
l'éditeur ne parle pas. On peut conserver ce na, sauf à écrire
n'a. Et comme la tournure de la phrase paraît s'accommoder
mieux du parfait composé que du parfait simple, je supplée-
rais un second a, ce qui donnerait: « Apres n'a a Bolonha, o
bon? », avec élision de l'a final de Bolonha. « Il en a appris, de
la chicane, à Bologne ou ailleurs ! »
1236. « so trobet en espéra. » Par des procédés mathé-
mathiques, est-il dit au vocabulaire. Il faut plutôt entendre
par l'astrologie. Cf. un des exemples cités parRaynouard.
1237. « qui m'o sabria. » Je mettrais après ce mot plu-
sieurs points (il n'y a aucun signe de ponctuation dans l'édi-
tion) et un point d'interrogation à la suite.
1255. « cachutz ». Corr. cajutz pour cazutz.
1275-6. « miellers: piegers. » Simples assonances, à moins
qu'on n'admette un déplacement peu vraisemblable de l'accent.
On ne voit pourtant pas de correction à proposer, et le contexte
n'en réclame pas.
1312. « nom [fai] demora. » Lire non i et supprimer fai.
1315. « E fes li faire aital pertus ». Pourquoi écrire aital,
puisque les deux premières lettres sont grattées dans le ms.?
1330. « Quan la fort gelosial tocha ». Corr. cocha.
1334. « Non escriurian los motz nils vers. » Ce vers doit
DU «ROMAN DE FLAMENCA» 15
rimer avec Mes (la ville de Metz). Corr. vetz (défenses) ? Cf.
5428 et devesa 1776.
1411. « per son jausimen ». Au vocab. « jouissance ». Corr.
ckausimen, qui est certainement le mot qui convient ici.
1423. a E de davan es el ac messa ». Leçon du ms. a con-
server, soit qu'on lise ainsi (es étant pour etx)% soit qu'on pré-
fère e sel (= en ce/), «pour celer». Cette même expression se
retrouve plus loin, v. 1552. Le Donal provençal traduit cel
par cautela, qui convient très bien à ce dernier exemple.
1426. « Hon i sezia. » Corr. simplement i[[\.
1480. « cascus. » 11 y a cascuns dans le ms.
1493-4. Mettre le point à la fin du second vers, et une vir-
gule seulement après le premier. Cf. v. 1901.
1502. « Ni [ljeis si descaus... » Correction inadmissible,
leis ne pouvant être sujet. Le ms. porte Nieis qui suggère
Nieil 2 = m il, comme niei(v. 5102) = ni i, comme siei (v.
4294) =si ï, et par conséquent la correction Ni il. Sur ces
formes et des pareilles cf. Revue XIV, 116.
1540. « Pas ai, fai s'el, las mas e mort ». Lire posai en un
seul mot (cf. anai 7361) et corr. els 7nas se mortl
1546. «Geus bainas plus soven que nos. » Lire Gens. « Vous
vous baignez bien plus souvent que nous ! » Cf. la note sur
v. 1125.
1552. « car estet en cel De sa mollier ». estar en cel veut
dire ici être en surveillance, plutôt que se tenir en cachette,
comme il est dit au glossaire. Cf., à la fin d'une charte que
M. Meyer a publiée dans son Recueil d'anciens textes (p. 173) :
« Aquist cofraire nos tenont en sel e en regart deus avers e
daus cors... » Voir ci-dessus la note sur 1423.
1557. « E tôt o fes digastendons ». Ce dernier mot, qui
reparaît plus loin (v. 2441), et dont la signification précise
est incertaine, n'a été signalé nulle part ailleurs. Comme c'est
évidemment un mot composé, M. Meyer propose, avec doute,
de le décomposer en digas t'en donz, sans l'expliquer autre-
ment. Ce doit être, dit-il, « une expression populaire, indi-
1 Pour cet emploi pléonastique de et, d'ailleurs bien connu, cf. plus
haut 1040 et plus loin 1511.
2 Rien de plus commun dans le ms. que la confusion de l et de s.
16 UNE NOUVELLE EDITION
quant un état d'esprit». Pourquoi pas aussi bien une attitude
physique ? Je me demande, quant à moi, si nous n'aurions
pas dans digas, où M. Meyer voit, à ce qu'il semble, l'impératif
du verbe dire, une autre forme de gigas, jambes. Pour la
réduction de gi [djï) à di, cf. Revue des l. r., VI, 293, et Guil-
laume de la Barre, introduction p. lxxv-lxxvi. Le tout signi-
fierait alors : Donne t'en des jambes! et cette expression, dont
il y a tant d'analogues en provençal (cf. p. ex. a no m'en cal),
surtout dans le provençal moderne, reviendrait à dire « à la
course », « à la hâte », et, par une extension assez naturelle,
« brusquement ». — On peut encore supposer que le mot a
été forgé par l'auteur lui-même, sur le modèle des expressions
adverbiales telles que de genoillons, pour peindre plaisam-
ment l'attitude raide (litt. à jambes tendues) d'Archambaut,
l'aspect rude et sévère qu'il voulait se donner.
1678. « gabar ». Le voc. n'indique d'autre acception que
moquer (se), railler. Ce verbe a aussi la signification de louer,
ici louer avec exagération. Borel, dans son dictionnaire, sous
gaber, qu'il traduit par se moquer, donne deux exemples en
ancien français de cette signification, et ajoute: «Au con-
traire ce mot signifie louer dans les montagnes du haut Lan-
guedoc. »
1729-1730. « En l'an cen ves en un jorn tan Com a de
renda en tôt l'an. » Une correction est évidemment indis-
pensable. En lai (là-bas) pourrait convenir. Ou suffirait-il
d'écrire En lan, où lan serait le la nasalisé qu'on a dans la
locution lanquanï
1756. Je corrigerais fora en fos et rétablirais per supprimé
par l'éditeur, en dépit de la grammaire.
1762. a lo ver ». Ms. per ver, que je préférerais.
1764. « Cant legit ac totz los auctors ». Cant, ici, a la
signification de puisque, car. Cette acception, connue des dia-
lectes modernes, et que Raynouard n'a pas mentionnée, n'a
pas été relevée dans le vocabulaire. On la retrouve plus
loin, v. 3035.
1765. Supprimer la virgule à la fin du vers.
1877. « bel les ». Lire beil (= be lï) les, avec le ms.
1881. Lire pros kom W plusleial,
DU « ROMAN DE FLAMENCA » 17
1915. Lacune après ce vers? Cf. v. 1917: En pauc de temps
es fort cregutz. Or on n'a pas dit l'âge de Gui liera.
1921. « alajet. » Corr. alachet. Plus loin v. 4540 co/'atz, où
le même affaiblissement de la chuintante se remarque, a été
justement corrigé cochatz.
1944. a qu'en son cor ha. » Corr. que ? Cf. les trois vers
suivants, surtout 1916-7 et encore lOiVJ.
1966. « E la tor. » Corr. De lu toi !
1981. « ben Bai. » Paraît avoir ici déjà la signification du
moderne bessai (peut-être).
1985. « per aquest ». A quoi se rapporte cet aquestl Corr.
aiga ? C'est-à-dire par les bains.
1992. « non garisqu'els bainz Ab sol que lo perque s'i
bain. » Rimes incorrectes. Corr., au premier de ces deux vers
ou el bain, ou, mieux peut-être, nol gariscol bain.
2049. « Sin aissim » Ecrire si'n(si en aùsi), la préposition
en ne se liant pas avec si, comme l'ad verbe-pronom en ou ne,
dans les textes correctement imprimés.
2088. « Quar pauc n'i a e par non dura. » Rétablir l'ordre
des mots comme dans le ms., en corrigeant: « Quar par no
i a e pauc madura » ?
2091. Corr. et ponctuez : « Qui Pi met, Pus o l'autre mor. »
2109. «Quesvan... gaban. » Se vantant, et non pas se
moquant. Cf. v. 1678.
2164. « Ben cug valgues unas daveras. » Corr. ne valgues
an ? Le copiste, trompé par la finale de l'adverbe, aura donné
à un la flexion du féminin pluriel et supprimé ne pour réta-
blir la mesure. Ou vaut-il mieux ne rien changer ici, et, au
vers précédent, substituer joia à plazersï
2168-2169. Ces deux vers sont terminés par le même sub-
stantif plazer, de signification identique aux deux endroits.
Corr. voler au second.
2203. « Si ben hom tant non la tirera». Corr. las. « Il n'eût
pas porté de chausses de saie, si bien qu'on les eût tirées
(aussi collantes qu'elles fussent). » La construction est un
peu embarrassée; ou faut-il une autre correction? Cf. le
v. 5827.
2216. a Be Paiga ». Corr. De l'aiga. v. Cf. 3884, 5666.
2224. « Abtant lai venc En Peire Gui. » Le ms. a lo venc,
2
18 UNE NOUVELLE EDITION
qui pouvait rester, soit qu'on considère ce mot comme pronom
neutre, sujet explétif, soit qu'on préfère y voir un adverbe
de lieu. Cf. pour le premier cas, Romania IV, 342 ; pour le
second, Revue des L /*., IX, 357, et X, 210.
2213. «la». Ms. lo, à rétablir; se rapporte à argen.
2304. « ben moût sabes orar. » Corr. moût ben.
2309-10. « no m'en fas Ges ara trop gais ni trop leri. »
Corr. gai, pour mettre cet adjectif d'accord avec le suivant,
que la rime ne permet pas de modifier.
2314. « ben meut ne vales mais. » Corr. e moutl
2349. « Guillem non au ni ve ni sen ». Ms. Non aus nives,
et de même ailleurs, p. ex. 2750 ves, également rejeté. Pour-
quoi ces corrections, puisque l'éditeur a renoncé, il le dit
lui-même, « à régulariser la graphie », et que ces formes
peuvent être caractéristiques du dialecte de l'auteur ou de
celui du copiste ? Il y en a d'ailleurs de pareilles en d'autres
textes, p. ex. la Vie de Sainte Douceline. Voy. Revue des l. r.
XVIII, 21, note 1.
2355. « qu'el cor li reveilla ». Lire quel cor. Reveillar, que
je sache, n'a jamais été neutre.
2381. « E ja nol toc hom trop suau. » La correction pro-
posée [sil toc) fausse le sens, qui est et doit être, comme le
contexte l'indique suffisamment: « On le frapperait rudement
qu'il ne sentirait pas le coup. »
2399. « P.erque so vos mi celavatz ?» M. Meyer lit ici comme
le ms. lui-même ; mais je crois qu'il aurait mieux valu écrire
Perçues o.
2424. « Al meins baissera lo nasil. «Non pas le nez, comme
traduit l'éditeur, mais la bande qui le cachait. L'auteur ap-
pelle ici cette bande nasil, peut-être par plaisanterie, comme
nous appelons cache-nez une cravate qui n'a pas pour em-
ploi de cacher le nez plus que la bouche ou le menton.
2442. «mal aceutz ». Ce mot, où M. Meyer voit aujour-
d'hui avec raison le représentant d'acceptus (en catalan
accepte, castillan acepto), figure, sous la forme aciout, dans le
dictionnaire de Sauvages, qui le traduit par dispos, alerte.
2483-4. « Le cappelas ab l'isop plou, Lo sal espars per miei
lo cap. » La ponctuation indique que l'éditeur ne donne pas de
régime kplou. Je crois que c'est à tort, et qu'il faut supprimer
DU « ROMAN DE FLAMENCA » 19
la virgule. «Le prêtre pleut (fait pleuvoir), avec le goupillon,
l'eau bénite sur la tête de Flamenca. » Le mot sal est ici mas-
culin, contrairement à l'usage général de la langue d'oc (comme
man en plusieurs endroits du poème), ce qu'on n'a pas noté au
vocabulaire, non plus qu'on n'y a relevé la signification d'eau
bénite, qu'il a évidemment en ce passage, soit à lui seul, soit
avec l'adjonction du participe espars qui le suit (sal sparsum
[in aqua]^) ', et qui, dans le cas contraire, serait là seulement
pour donner plus de précision à l'idée exprimée par plou.
2501. Virgule après ce vers.
25*20-1. « Et ab la ma qes fon seinada Ac baissât un pauc
lo musel ». Ce mot musel reparaît plus loin .'U33, et dans les
deux cas M. Meyer le traduit par « museau, bas du visage ».
Ce qui, à mon avis, est inexact. Je pense que le poète veut
désigner la bande qui recouvre le bas du visage de Flamenca
et que plus haut, comme on l'a vu v. 2 124, il appelle nasil.
Le contexte s'accommode du reste beaucoup mieux de cette
signification que de celle que M. Meyer suppose ; car
Flamenca n'avait pas besoin de s'aider de la main pour baisser
la tête. Un synonyme de mus, d'où vient musel, proprement
ce qui enveloppe le mus (muselière), et par extension le mus
lui-même, est mourre, dont nous avons en limousin le dérivé
mourreu qui a exactement la signification du musel de notre
texte. On appelle ainsi, par exemple, un mouchoir plié en
forme de large cravate dont on s'entoure en partie le visage,
lorsqu'on y souffre d'un mal quelconque, spécialement du mal
de dents ou du mal d'oreilles.
2554. Il faut un point, ce me semble, au lieu d'une virgule
après ce vers.
2568. « de si don. » Corr. si dons.
2577. « per quan sim costa. » Cela ne donne pas un sens
1 II existe à Montpellier un verbe d'un fréquent usage signifiant as-
perger, arroser, mais qu'on n'applique pas, ou qu'on n'applique plu-, à
l'aspersion de l'eau bénite. C'est issala (de exsalareÇ?), comme issir de
e.rire). Pourrait-on trouver là un appui à l'hypothèse de sal = «
bénite » à lui seul? On n'ignore pas que la langue de l'Église a fourni à
celle du peuple nombre d'expressions métapboriques, souvent emplo;
d'une façon peu respectueuse de ses cérémonies et de ses mystères.
20 UNE NOUVELLE EDITION
satisfaisant. J'écrirais qu'ansim et corrigerais gosta. Gustar
s'emploie encore ainsi, en catalan, comme en castillan, dans la
signification de agréer, plaire. Cheville pour cheville, celle-ci
est plus acceptable que l'autre. La confusion de c et de g est
constante dans le ms.
2579. « Seiner, oilo. » Ecrire oi lo, en deux mots, puisqu'on
écrit de même o el (v. 7061). C'est la réponse à la question du
vers 2575 : Ha i comtier, où le pronom neutre sujet n'est pas
exprimé, selon l'habitude, tandis qu'il l'est dans la réponse.
Cf. ci-dessus 1024, et plus loin 6187.
2728. Virgule, au lieu d'un point, après ce vers.
2701-68.
Per son part lo cors el cor laissa,
Car cel non vol ben segre [en] laissa,
E[l] cors pensa que l'esteisses,
Sel forsava que s'en mogues
Entro que lo n'aia gitat
Cil on ha tan lonc teras musat;
Mas cant ha conogut e vist
Q'us autre ha cel hos conquist...
Ce passage est, ainsi écrit, à peu près incompréhensible.
Il faut, au premier vers, lire laissa et mettre un point après ;
au second, supprimer en et corriger segre[l}\ au troisième, au
lieu de corriger e[f], substituer car à cora/au cinquième, écrire
lo s'aia, d'après le ms. ; au sixième, mettre un point, et au
huitième corriger cel hos en celheis.
2793. « festa rica en als. » La correction proposée en note
est inutile. Lire enals pour anals = fête solennelle (annuelle.)
Voyez Sauvages festonaou, et les autres lexicographes.
2805. « E preguet li : « Sius plas, merce ». On lit de nou-
veau sius plas au vers suivant. Voyez la note. Corr. « E preguet
li suau : « Merce » ?
2831. « non sai coraus m'i veirai ». Il faut écrire mi évi-
demment, et non nii {quando vos mihi videbo.) Que signifierait
quando vos me ibi videbo? Dans la première édition, M. Meyer
n'avait pas fait cette faute.
2843. La correction proposée en note {Ni anc ni re mais ) ne
saurait être acceptée; car, à quoi serviraient les deux ni? Du
reste, le texte ne paraît pas en exiger.
DU « ROMAN DE FLAMENCA » 21
3013-4. « Et autre mal an qualques ora[s] : aboi'a[s]. »
Corrections fâcheuses. Us qui termine quu'ques n'est pas la
flexion du pluriel, car c'est à quai qu'elle devrait s'attacher.
C'est sans doute l'orthographe du français moderne qui a
induit M. Meyer en cette erreur.
3035. « Quan ». Pourquoi corriger quar, mot qui est plus
loin dans la même phrase? Quan, ici, signifie puisque.
3054-5. « Per so nom meravil eu ges Si Guillems era fort
laisatz ». M. Meyer propose en note la correction lassatz, et
non sans motif, le verbe laisar, s'il faut lui laisser sa signifi-
cation propre et, à ce qu'il paraît, constante, de souiller, ne
pouvant en effet convenir loi . Mais le même verbe se trouve
déjà au v. 1831, où il présente la même difficulté d'interpré-
tation, et là, il n'est pas possible de lui substituer lassar. Il
faudrait donc admettre pour ce verbe, à côté de la signification
ordinaire de souiller, celle de rendre malade, faire du mal.
3070. « Vel vos si 1jl4 e clar ». Ms. ci. Pourquoi cette cor-
rection, puisque ci est justement la forme qui convient? Vous
le voici. Cf. 272 où l'éditeur s'est mieux gardé de cette faute,
car il a lui-même corrigé en veci la leçon (vesi) du ms.
3072. « Ben pograbeure. » Corr. Be i ?
3102. « Mais [sol] nom cominal avion. » J'aimerais mieux
Mais [que].
3108. Il n'y avait pas, ce me semble, lieu d'hésiter à intro-
duire dans le texte la correction proposée en note, sauf à
écrire seladon'intret, et non si la, qui n'expliquerait pas aussi
bien la bévue du copiste.
3110. « Venc [E]n Archimbautz, fera guida ». J'aimerais
mieux : « Venc N'Archimbautz, trop fera guida ».
3124-25 a Baissai musel tan que gausir Poe ben Guillems
tota la boca. » Voir la note sur le v. 2521, où j'ai déjà fait
remarquer que musel est non le museau, mais ce qui le
recouvre. Comment Guillaume, qui regardait à ce moment
Flamenca par son pertuis, aurait-il pu voir (car gauzir ici est
certainement pour causir, comme ailleurs agabar pour aca-
bar, csgolas pour escolas, etc.), comment, dis-je, aurait-il pu
voir la bouche de Flamenca, si celle ci avait, sans la décou-
vrir, simplement baissé la tête ?
2 2 UNE NOUVELLE ÉDITION
3195. « Mas so es d'Amor sa dreitura. » Corr. natura. Cf.
le vers suivant et le v. 3193.
3232. « quel seras son fâchas. » La correction proposée en
note est à rejeter. Sera est masculin, comme j'ai eu occasion
il y a déjà longtemps de le faire remarquer, en rendant compte
ici-même d'une autre publication de M. Meyer. Voy. Revue
XIV (1878), p. 117.
3312. « An[s] s'en recrusa e pejura. » Dans sa première
édition M. Meyer avait laissé sans correction la leçon du ms.
(Ans en r.), et il aurait dû la conserver. Recrusar, que par
parenthèse Raynouard explique mal, n'a nul besoin du pro-
nom réfléchi. Sa signification est évidemment celle du latin
recrudescere.
3414. «Nulla ren d'aiso c'ar mi pes». Il serait plus correct
d'écrire car, sans apostrophe : « quem sia bes... car mi pes
nulla ren d'aiso ».
3591. « E car seran mil ves baisât ». Corr. can [quantum) ?
Ou corn?
3606. Virgule après plas.
3618. « E fes lor del plorar giquir. » Le ms. porte los, qui
vaut mieux, et que l'éditeur n'a pas mis en note.
3619. « Oimais ploras ! » Corr. Si mais et remplacer par
une virgule le point d'exclamation?
36-10. « Mais que non a fagra fag en très. » C'est la leçon,
évidemment corrompue, du ms. M. Meyer a corrigé que non
agra. Mais l'idée de ici doit être exprimée : « Il aura en deux
ans plus appris qu'il n'aurait fait ici en trois. » La leçon du ms.
suggère naturellement sa. Corr. que non sa'gra fag? Une con-
traction pareille me paraît devoir être admise au v. 6480
(bentaular, au lieu de ben entaular du ms.), et peut-être en :ore
au v. 6978 (qui^s, pour qui es).
3681. «quem cobri. » Corr. cobra. Cobri, de cobrir, ne peut
être une forme de subjonctif, et ce mode est ici indispen-
sable.
3705. « E pot li ben ara gabar.» Lire ar'agabar, pour acabar.
« L'amour en peu de temps l'avance ; il peut bien maintenant
le mener au bit. » Cf. v. 782 1 : « Qaant pauc enanson et
acabon!» Ls vers suivant devrait, peut-être, être corrigé:
« Qu'il [l']a fah en clerc ordenar. »
LE « ROMAN DE FLAMENCA » 2 î
3873. « que li faza. » Corr. si? Cf. w. 4311, 4313, 7352.
3899. « quan tal ». Ms. qu'aitnl, leçon qu'il n'y avait pas
lieu de rejeter, et qui n'est pas relevée dans les notes.
3928. « neisa pas donar. » Corr. nei[s] (ni eîs) sa? ou sim-
plement rieisa? neis pas [li] donar serait encore plus satis-
faisant.
3965. « E fes parer los salms i vis. » Corr [ç]uis?
3997. « Lo cors. » Ms. le que les notes ne mentionnent pas,
et qu'il faut rétablir.
4001. Suppr. liane ai rétablir mali. Le féminin est habituel,
sinon de règle, dans les formules de ce genre.
40 J8. « ad home ». Corr. a domna?
4011. « Non sai qui donc, Amors, quet va] ? » Je crois qu'il
faut mettre un point et un tiret après gui, et supprimer les
deux virgules suivantes ; qui serait ensuite avantageusement
corrigé en quai, comme l'éditeur le propose.
4046. « beu la m'eu eis. » J'écrirais plutôt beu lam eu eis.
4078. « sufïris si. » Corr. suffri. C'est un prétérit.
4134. « gra[n]s ». Pourquoi cette correction ? « Il n'est pas
malade, mais beau et gras », c'est-à-dire bien portant.
4135. « Nos es. » Ms. Non, que le sens exige et qu'il faut
rétablir. Peut-être est-ce une faute d'impression, car il n'y
a pas de note sur ce vers.
4178. « Sa vines, ma douza piuzella. » Formule encore
usitée, surtout en Gascogne [sabietz, au singulier sdbi, avec
déplacement de l'accent). M. Meyer corrige inutilement sa
en sa[i]. Au contraire, aux vv. 892, 3516, il conserve sa.
Son édition est pleine de pareilles inconséquences.
4190. Je mettrais un ? à la fin du vers. La phrase a tout à
fait la tournure interrogative.
4219. « Aici es vers. » Corr. plutôt aissi que aisso proposé
en note.
4233. a Ans [nos] coven. » Ans ne convient guère ici. Corr.
simplement yl n[o]<.
4257. u lo destreiuna. » Il faut une rime en ina. Corr. lont
destina, dont le contexte s'accommoderait assez bien1 ?
1 Cf. pourtant vv. 5973-4, où ansina (=ensenJicC\ rime avec /ina, et v.
1136, estrinz =estreinz. Faudrait-il admettre la légitimité de pareille3
2 4 UNE NOUVELLE EDITION
1277. « que no. » Corr. il no ?
4293. « Qu'om nol pusca. » Corr. non.
4304. « E[l] dis. » Le manuscrit porte bien El.
1325. « si poc. » Corr. si moc et modifier la ponctuation
en conséquence.
4364. « Nom pert una ». Corr. Non[no en) = il n'en pert
pas une.
4392-5. Les pronoms vos et nos sont confondus dans ces
quatre vers. Voici comme il me semble qu'il faut les lire :
Parlât vos ha una vegada
Amors ; hoimais es sobre vos
De respondre, quar davan nos
Vos a tornada la pilota
Aicil que ben garda e nota
Et entent so ques hora li dis.
11 faut après ce dernier vers un point ou du moins un point
et virgule.
4425. «en tota ren.» La rime exige la correction en totas res.
4136. Ponctuation à modifier. Il faut mettre une simple
virgule après dis, et supprimer la majuscule à ben, le membre
de phrase qui commence ici continuant, après l'incise (lui dit
r amour), le propos du vers précédent.
4449. « Gran angoissa e grans martires. » Ms. Grans an-
goissas. Il fallait garder grans.
4474. «Voles o vos domna?» Corr. doncas, et mettre un
tiret au commencement du vers. C'est une question de Fla-
menca, comme le montre la réponse qui suit.
4527. «envejos». Ms. enujos, qu'il n'y a aucun motif de
changer en envejos, à côté degilos qui précède immédiatement.
4571. « qu'ieil diga ». Corr. qu'ieul (= que ieu lo). Il n'y a
pas place ici pour le datif.
4575. Mettre un tiret devant ce vers. C'est Alis qui parle.
4582. « De malesa coma sas pelz.» Corr. toma, du même verbe
que le français tumer: secouer, jeter de côté et d'autre. C'est
aussi le sens que conjecture M. Meyer. Mais il propose une
formes, et, par suite corriger destrina au v. Î257 ? M. Meyer ne l'a pas
cru, car, au v. 5973, il a corrigé aisina.
DU « ROMAN DE FLAMENCA > 2ô
correction beaucoup plus éloignée du texte. Le catalan a
conservé cette acception à tombar, autre forme du même mot.
1589. «non [a] pausa ni fina. » Je corrigerais plutôt mm si
pausa.
4640-1. Il n'y a point ici de lacune : il faut seulement
mettre un point après le premier de ces deux vers, et un
point d'interrogation après le second. Guillaume s'interrompt
ici, au milieu de son monologue, pour se réfuter lui-même,
et il constate par sa propre expérience que ce n'est pas
la pitié, mais l'amour qui donne son prix à « merci » .
4653. « E per tôt bon.» Corr. E de totben? Cf. vv. 2890
et 0277.
4722. Virgule après clisses ses, qui suit, et que M. Meyer
propose de changer en ques, est la conjonction se ( = si ),
accrue de Ys euphonique, comme déjà ci-dessus, v. 274. Cf
aussi 5130. Il n'y a pas lieu à correction; il faut seulement
écrire Qu'o.
4724. « Celar lan dei a mon semblait. » Il faut une virgule
après dei, et une autre virgule seulement après semblan: la
de lan se rapporte à lauzenga du vers suivant, à la fin duquel
il faut un point et virgule.
4727. Virgule après ment a va.
4728. « lam mandava ». Corr lom.
4730. « Ben son maïstre de l'obrar ». Ms. siu, qu'il fallait
conserver: siu est ici la 3e pers. plur. de l'imparfait, que le
contexte ne repousse nullement; au contraire.
4741. «Tal colp que fassa gap ni b[r]uis». Il n'y avait pas de
correction à faire. Buis reparaît au v. 7211 où l'éditeur le
laisse sans changement. Le même mot est dans Sancla Agnes
v. SOI, sous la forme buh, que M. Bartsch, commettant la
même erreur que M. Meyer, a corrigé bruk.
474C). «Qu'anc i toques ». Le sujet manque. Corr. Qu'ont?
4700. « Que d'als pens' e non fai parvent. » Corr. penses?
17N7. « le cor ». Il faudrait lo, le substantif étant régime,
et c'est en effet ce que porte le ms.
4811 . « aibida. » La leçon du ms. cabida (= pourvue), non
indiquée en note, et qu'il faut rétablir, est bien préférable.
La première édition donne cubida.
4*26. « Ans es vizis. » Ms. utizis. La correction est peu
5 6 DNE NOUVELLE EDITION
satisfaisante. Il faudrait un participe ou toute autre épiihète.
La lre édition offrait aunitz, très acceptable pour le sens, mais
trop éloigné de la leçon du ms. Corr. vilzis (vilzilz, avili .
4851. Remplacer le point à la fin du vers par une virgule.
4873. « Le jous de Roasos a tersa » Ms. Lo dijous. Il fal-
lait évidemment conserver lo, le substantif n'étant pas au
nominatif ; et il n'était peut-être pas indispensable de rejeter
dijous, car fioasos devait pouvoir être dès lors, ad libitum, disyl-
labique, comme il l'est devenu, par exemple en Limousin, où
l'on dit las rasous,oa devenu diphtongue, comme je suppose
qu'il ait pu l'être ici déjà1, s'y étant réduit à a.
4875. « Non vol per ren sa pas ad esme. » Je crois que
vol est cuit et non volvit, comme le suppose M. Meyer. Et
comme il faut une rime en erme,je corrigerais saderme, sub-
jonctif prés, du verbe adermar, qui signifie (f laisser en fri-
che », métaphoriquement « négliger » ; sa passerait non pour
sa paz, qu'on lit déjà au v. précédent, mais pour sa pars. Le
sens serait en gros : « Il ne veut pas manquer son rôle, n Cf.
vv. 4514, GU76.
4992. Point d'interrog.à la fin de ce vers, et un autre après
le v. 4rJ E .
4998. « Quar si ». Corr. Qu'aissi?
5021. a mas geins. » Corr. ma[/]s geins.
5024. (( respondet. » Corr. respondelz.
5046. Mettre deux points (ou un seul?) à la fin du vers.
5067. « ni tôt V la re qu'aves. » Le ms. porte ques aves.
Corr. donc plutôt tôt l'(j[i]re ques aves; d'autant plus que tota
la re étonne tant soit peu.
5068. « S'avias neis. ...» Le vers est incomplet et M. Meyer
propose, pour le parfaire, l'hémistiche tôt quan feses. Mais H
faut une rime en e cuvei t. La correction d'un lecteur du XVe s.,
indiquée en note, peut mettre sur une voie meilleure: « dos
tans o dttz », au lieu de très, qui a le même défaut que feses.
5080. « Car plus no i gitarTal pe». Pourquoi cette correc-
tion? gitara, ici, = gitera, et c'est justement le conditionnel
i II faut pourtant remarquer qu*à un autre endroit du poème v. 1 ± i - »
où ce mot figure, il reste tri ;e.
DU «ROMAN DE FLAMENCA» 27
passé qui convient. Pour d'autres formes pareilles (en ara
au lieu de era), cf. 3695, 7 178.
5 122. « Que poguesson » Corp. Quo (C<>, Coût ?
5147. « posca trobar. » Corr. pose [s] (posca se).
5164-5. Je mettrais une virgule après le premier de ces
deux vers et supprimerais le point à la fin du second. La con-
jonction Otte est sous-entendue devant celui qui suit.
5-17. « Pren li, car s'el eis non lui pren ». Ecrire /ï(=lo i)
et de même au v. 5230, et corriger lui, où M. Meyer, par je
ne sais quelle distraction, semble vouloir trouver un équi-
valent de lo\ en loi [lu i).
5265 0. « Pero sens es... Zo que sens vol. » Corr. quAmors
vol.
5279. (i Je soupçonne ici une lacune d'au moins quatre
vers, le premier terminé par les mots pren Ci, que Flamenca
à ce moment devrait prononcer.
5284. « laboca el morsol. » Je n'ai vu morsol nulle part ail-
leurs ; mais ce ne peut être la bouche, comme il est dit au
vocabulaire; il faut probablement entendre par ce mot le bas
du visage. La signification propre paraît être mâchoire (de
mors).
5321. « A pessat venc corn pogues far. » Corr. Apessalz
« 11 avait pensé à moi avant de venir; ce n'est pas ici et su-
bitement {desopte que l'idée lui est venue de me secourir. »
5352-3. « .Malaventura Deus li don Qui mais vos arnara
qu'eu sia». Passage des plus difficiles. M. Meyer propose,
avec doute, de corriger vos en nos et qu'eu enquea, qui serait
1 Voy. le vocalnlaire, sous Lui. Il n'est pas moins surprenant de voir
le savant éditeur écrire, dans le vocabulaire également, en tète de l'arti-
Li : « Li, l'orme abrégée de lui », car il peut moins que personne
ignorer que /(' n'est autre chose que le latin Mi. Se serait-il fait en ce
moment sous sa plume une confusion entre ce li, datif, et un autre li,
qui est en effet une forme abrégée, ou mieux contractée, mais à peu
- exclusivement française celle-là, non pas de lui, mais de liei, et
qui n'est que féminine? Dans ce même article, renvoyant aux deux li
- dans la note ci-dessus, M. M rit : «Dans pren li. il faut
peut-être écrire Vi. » Il n'y a lieu ici à aucun «peul-étre ». Suppose-t-il
■ qu'on ait jamais pu dire pren îi(ce qui serait encore plus extr.
dinaire que pren lui), au lieu de pren lo, en parlant de n'importe quoi?
28 UNE NOUVELLE EDITION
pour quin/i. Je propose à mon tour, sans prétendre avoir
mieux trouvé, la correction suivante pour le second vers, en
mettant une vigule à la fin du précédent : « Qui mais vos am,
cora qu'en (ou que?) sia? » C'est-à-dire: « Malheur à qui vous
aimerait, n'importe quand ! » Flamenca désigne par vos les
chevaliers des terres de son père et de son mari (cf. v. 5335,
5330) dont elle vient de se plaindre amèrement.
5407. « Deves tôt la re consentir. » Ce vers, tel qu'on le lit
ici, ne signifie rien, à moins de supposer que l'auteur parlait
une langue barbare. Je ne propose pas de corriger Ta[/Jre,
comme je l'ai fait pour le vers 50G7, parce que je pense que,
malgré l'apparente identité des mots, le cas n'est pas le même.
Je crois qu'il faut simplement lire Pare (li are) où are (en un
seul mot ou en deux) est la locution encore fort usitée, surtout
dans le composé adere, qui signifie « successivement, sans
cesse ». Le sens est donc: « Vous devez consentir à tout ce
qu'il va désormais vous demander. »
5423. « Honors e jois, precs e jovens ». Corr. prêts (pretz).
Rien de plus commun dans le ms. que la confusion du t et du
c. Ainsi au v. 249, au lieu de tel on j lit cel, ce qui n'est pas
indiqué en note.
5424. «Domnei ». Corr. Domneis.
5425. Supprimer le point à la fin du vers.
5437. « prendes. « Corr. prend[r}es.
5453. La correction proposée en note paraît inacceptable,
car comment Guillem pourrait-il être du conseil dont il
s'agit? C'est de l'Amour, naturellement désigné par le féminin
aquil, qu'il est question, assas us du vers précédent est obscur,
et rien au vocabulaire n'indique comment l'éditeur l'entend.
Une correction paraît s'imposer ; mais laquelle ?
5482. « Pos luec no[n]s fug quel jorn vos diga a. Il faudrait
une virgule à la fin du vers précédent, et une autre après fug.
Mais pourquoi corriger nons (no nos) plutôt que nous (no vos) ?
Cette phrase d'ailleurs, qu'on lise nons ou nous^ ne satisfait
point pleinement. On attendrait quelque chose comme : Puis-
qu'il vous a dit le lieu, qu'il vous dise le jour : Pos luec vos
dis'?
5488. « o demanda ». Répétition de la rime précédente.
Corr. c manda ?
nu « ROMAN DE FLAMENCA » 29
5407. « lo coven. » Corr. coven[c], il fallut. Seul exemple
(avec celui du v. 2224? voy. ma note) de ce pronom neutre
sujet, en dehors de la locution oi lo. Il aurait dû être relevé au
vocabulaire.
5499. « jorn breu e gent. » Cette réponse de Guillem pa-
raît longue, dans la circonstance, outre que e gent y a l'air
d'un pur remplissage. Ne faudrait-il pas écrire : «que «jorn
breu», e gent Pueis s'ostet... » (et s'éloigna ensuite genti-
ment)?
TmOI . Remplacer le point, à la fin du vers, par une virgule.
Faute d'impression évidente.
5513-11. « Car noi amas deman el mieg, Quant al respon-
dre, mis respieg. » M. Mever interprète el mieg « au milieu
du jour. » A tort, ce me semble. La phrase est embarrassée
et assez mal construite ; mais le sens paraît clair : « Car il n'y
a, pour répondre, mis répit, dans l'intervalle, que demain. »
Cet emploi du participe mis, avec un sujet neutre, paraît, à la
vérité, un peu singulier; mais c'est parce qu'il n'est pas habi-
tuel; remplacez-le, je suppose, par accordé, et la pbrase ne
cboquera pas. Cf. le vers 6822 qui offre, avec une meilleure
tournure, une phrase construite grammaticalement de la
même manière.
5518. Mettre une virgule à la fin du vers.
5527. « Mais ara ven tota la forsa. » Il faut, ce me sem-
ble, écrire ar aven = maintenant convient. Cf. v. 1345 :
l'aven del gilos a suffrir: v. 5635: mais pos vei qu'a suffrîr
m'ave. Ne faudrait-il pas aussi corriger ma forsa ?
5515. « L'un'es de ser, autra de fueill. » Corr. de fer? Ce
qui reviendrait à dire :« L'une est pesante, l'autre est légère. »
5563. « lorn dis Amors. » Corr. som. Le copiste confond
souvent les deux lettres s et /.
5600. «E si passa .xxi. an ». Corr. passo; avec passa il
faudrait corriger ans et au vers précédent avans.
5613. «Pos er mescabada per jor.i. » Cette locution per
jorn, traduite au vocabulaire par u% jour, paraît signifier
plutôt jour à jour, chaque jour.
5617. Ici s'interrompt le monologue de Flamenca, qui le
reprend seulement au v. 5622. Il faut donc mettre des guille-
30 UNE NOUVELLE EDITION
mets à la fin de 5G17 et supprimer ceux qui précèdent les
quatre vers suivants.
5621. « Vis oils si pren, teunamen plora. » « Elle est prise
par les jeux», dit l'éditeur. Il faut traduire: « Elle s'en prend
à ses yeux », jolie expression encore en usage, pour dire :
Toute sa ressource, toute sa consolation est de pleurer.
5032. « Neis ». Corr. nés ou nis [ne ou ni -\- Y s euphonique).
Cf. niz 3348.
5637. «Cou». Lis. C on.
5642. « Vos sera cambra et ostal ». La rime et la grammaire
exigent ostals. C'est d'ailleurs la leçon du rns.
5616. La correction proposée en note pour ce vers doit
s'appliquer plutôt au précédent. Peut être y a-t-il une faute
d'impression,
5668. a El 'obrils oilz ». obri, ici, est au présent, et non pas
au prétérit, comme il est dit au vocabulaire.
5673. «d'aquest[al ».Corr. plutôt d'aquest [mal].
5683-85. « Quel luna es a recontorn E il sera del tôt
ferma ja. » S'agit-il bien du dernier quartier de la lune, comme
il est dit au vocabulaire ? Je penserais plutôt au premier quar-
tier, quand la lune se recoutourne, commence à reprendre sa
forme ronde, et alors il faudrait peut-être corriger formada au
v. 5685. Cf. d'ailleurs les vv. 3259 60: « El luna sera deman
nona, E bainar m'ai en ora bona. » Or le neuvième jour de
la lune, donné là comme favorable à qui veut prendre un bain,
correspond précisément au premier quartier.
5739. Mettre une virgule après ausent el.
5780. « cabeissa ». Ce ne peut pas être un capuchon, comme
le suppose M. Meyer. Le contexte l'indique assez. Ce mot,
encore usité, s'applique aux tiges herbacées de certaines
plantes : en limousin la ckabesso d'une rave, d'une carotte,
d'une pomme de terre. En catalan cabessa désigne au contraire
les racines des plantes bulbeuses, ou du moins les bulbes de
ces racines.
5790. « Car tôt égal i conoissia Alcun pertus com far so-
lia. » Alcun pertus ne paraît pouvoir être qu'une incise, à
mettre entre deux virgules, et qui exige une correction. On
pourrait proposer, en supprimant far: [Ses] negun j/erlus.
5820. « affars ». Crr. a/fans?
DU «ROMAN DE FLAMENCA» 31
5827. « on si ten ». Correction peu satisfaisante : s' a tain,
leçon du ms., mais que la rime repousse, convient ici on ne
peut mieux. Je soupçonne une lacune de deux vers.
5842. « Tan bes [tain] ». Pourquoi pas fais, puisque les
autres verbes (estet, semblet) sont au parfait ?
5936-7. « De nulla ren mais non s'esmaia Mas que lo puesca
pion servir», lo est une correction de l'éditeur, qui a eu ici la
main malheureuse. Le ms, porte nol, qu'il faut rétablir, a Fla-
menca n'a d'autre crainte que de ne pouvoir assez le servir. »
6007-9
Amdui si ploron coralmen
E l'aiga que del cor deissen
Mesclou ensems e pueia la bevon.
Voilà un de ces traits qu'on regrettait que M. Meyer eût
omis autrefois dans sa traduction. Notre auteur qui savait,
comme tant d'autres passages en témoignent, son Ovide par
cœur, pensait peut-être, en écrivant ces vers, à celui-ci de
F Art d'aimer II, 32(3) :
Et sicco laciïmas combibat ore tuas.
G064. « enn aut.» Pourquoi ne pas lire en naut, puisque naut
est une forme connue ?
G074. « Oimais ren [alsj pron nol tenra. » Corr. plutôt 0
j{a]mais ren pron nol tenra. Voici, dans le ms., la disposition
des premières lettres : 0 i tuais, ce qui suggère immédiatement
la correction que je propose.
6125. « Ans dorm ades». Ce verbe dorm est contradictoire
au contexte, car Flamenca ne dort pas; elle s'agite dans
son lit. Corr. toim' adrs.
6102. « D'aisso qu'an dig ac trop gran juec ». Ms. dig ''cor-
rigé de dif, non de dis, comme il est dit en note) an, ce qui
suggère la correction dig fa, préférable d'ailleurs à celle de
l'édition.
6187. « per Dieu, oilo. » Écrire oi h. Cf. 2579.
6238. Manque ici un vers dont l'éditeur propose en note
une restitution qui ne convient pas grammaticalement au
contexte. Suppléez plutôt, : E que ju tant non li fara.
&S UNE NOUVELLE EDITION
62 13. o E prega Dieu qui ja la cre ». Coït. E perga Dieu.
Cf. v. 1032.
6248. « por ». Faute d'impression. Lis. pot.
G257. « 0 per amie d'ams cuminal ». amie, correction de
l'éditeur, forme avec le vers suivant un pur pléonasme, car
il est clair que l'ami commun de deux personnes ne veut mal
à aucune d'elles. Pourquoi ne pas accepter la leçon du ras.,
en corrigeant toutefois, comme l'a fait l'éditeur an en ams, et
lire o per uutr 'ad ams ? Le sens serait : « ou par toute autre
personne de leur société ».
6264. a Qu'en ren so tenga. » Lire s'o tenga.
6277. « Parer de son amie nol quilla. » Doit rimer en eilln.
Il faut donc une correction. Celle qui est indiquée en note,
de l'aveu même de l'éditeur, est inacceptable. Je pense que
nol cueilla peut convenir. Il y a d'autres exemples de l'emploi
du simple coillir pour le composé acoillir. On pourrait aussi
penser à vueilla. Quant à cette construction avec l'ablatif
d'une part et l'accusatif de l'autre, elle est bien connue.
6300-1. Corr. plutôt si[m] podia, Per si far aucire, guérir.
Avec la correction de l'éditeur, il faudrait au moins si[s] podia.
6340. « Sis pieu per lui, un autre clerc. » 11 faut une virgule
après pieu. Cette expression sis pieu ne paraît signifier rien de
plus, ici, que s'il lui plaît '. Cf. N' At de Mons:
Mas de failhir se plevon tant (les rois)
Que blasme toi al laus son cors.
Raimbaut d'Orange:
Qu'a far Ter, sis pieu, per me.
Voir aussi Revue, X, 312, où l'on cherche à établir l'iden-
tité de pleure etde plevir, contestée par M. Meyer.
6345. « So qu'il manda ». Corr. qu[e]>l= que li. Cf. 65-SO.
il ne pourrait pas d'ailleurs se rapporter à un nom masculin.
6369-70. « c'om mogut y agues... mogut s'en es.» M. M.eyec
propose là correction anat pour le second vers. J'aimerais
1 C'est ainsi que le traduit .M. Meyer dans sa première édition, mais
en renvoyant à- un passage où pieu a sa signification ordinaire.
DU ROMAN « DE FLAMENCA » 33
mieux eissitz. On pourrait aussi penser à mudat pour le pre-
mier, et le second resterait tel qu'il e>t.
0380. « Que nuilla re. » Lire Qu'e nuilla re.
6424. « Mant' angoiss[a] ». Répétition du vers précédent.
M. Meyer propose manta dolor. J'aimerais mieux E man
(rebail.
6430. « que s'entramesson. » Ne vaudrait-il pas mieux écrire
avec apostrophe s'entr'amesson?
6439. « Mais tan vos plaz faitz vostre albir ». Les mots sou-
lignés sont une correction; il en faut une; mais celle-ci ne
convient guère. Le contexte suggère plus naturellement los
venir, à savoir les deux écuvers que Guillaume a demandé à
Flamenca la permission de lui présenter.
< » 179. « ferai. » Corr. forai.
6480. « lo pogr'om ben taular ». Corr. pogron et écrire
be'ntaular.
0503-4. « volon... dolon. » Corr. voillon... doillon. Le sub-
jonctif est ici de rigueur.
G506-7. « Soven envidon e revidon Lo jorn la mostra e la
presa». Ms. /ors, qui pouvait rester. Lojors est ici considéré
comme un adverbe et muni en conséquence de Vs adverbiale.
Ce cas est fréquent. Autres exemples dans Flamenca même:
quad' ans [v. 3402), de nugz, (v. 6280), guada sers (v. 7131).
6589. « simples et purs. » Corr. blos, pour rimer avec saboros.
6592. « Si totz tems i dévia entendre ». Entendre termine
aussi le vers précédent. Corr. atendre (s'appliquer). Cf. les
vers 3114 et 3179.
6598. « Non s'asauton d'aitals esgolas. » Il est surprenant
que M. Meyer n'ait pas reconnu ici le mot escolas, averti
comme il l'était, par lui-même', de l'échange fréquent dans
le ms. des lettres c et g. Il le traduit par bagatelles, ce qui est
d'ailleurs un sens approchant.
6600. « Le joi d'amor. » Corr. Lo. C'est un régime.
0614. uL'us en l'autre ». Corr. L'un. Mettre une virgule à
la fin du vers suivant.
6)17-18. <(On lur désir los fai venir, Baisar, abra^ar e
tenir. » Suivent immédiatement deux autres rimes en ir, ce
1 Voyez la préface do la première édition, page xxxn.
3 4 UNE NOUVELLE EDITION
qui fait supposer une lacune entre les deux paires de rimes,
ou une altération du texte. On pourrait proposer, dans cette
dernière hypothèse, de remplacer venir par parer et tenir par
tener, qui serait d'ailleurs plus régulier.
6678. «mi agues » {habuistis). Pourquoi corriger accès
{habuissetis)lNi le sens ni la rime ne l'exigent.
6795. « tutz mi. » Il faut tut, et c'est en effet la leçon du ms.
6730. « Car non ac talen ques mogues. » Ce devrait être
justement le contraire. Aussi une correction s'impose-t-elle :
lezer est celle qui se présente le plus naturellement.
6759. «foran.» Ms. foron, qu'on pouvait conserver. Cf. v.
6724. où tolgron, forme assurée par la rime, est aussi un
second conditionnel.
6842. « A[l] revenir mot loue tems poina ». Pourquoi cette
correction ? Revenir ici n'est pas pris substantivement ; il est
employé dans sa fonction verbale ordinaire. « Guillaume
tarde beaucoup à se remettre.» Car il ne faut pas perdre de
vue que poinar, ici, signifie tarder, acception déjà notée au
v. 79. Cf. locha, même sens, au v. 3944, comme le remarque
l'éditeur.
6852. « Jaes[t] vos. » Pourquoi cette correction, puisque
es = etz est plus régulier? Cf. 2839, où ce même es n'en souf-
frirait d'autre que etz, étant en rime avec enqueres {...etz).
6864. « Tan co[m]plitz. » La correction aibïtz, proposée en
note, car il en faut une, ne convient pas ici. Corr. offlitz,
part, passé de afflire.
6872. « non colon ». Ne chôment pas. C'est aussi le même
verbe et le même sens qu'on a aux vers 620 et 5940, pour
lesquels j'avais autrefois proposé, à tort, les corrections lolc
et toi. Icilamêtne erreur n'était pas possible, et je trouve, dans
mes notes, à l'appui de cette acception, dans son sens mé-
taphorique, cet exemple tout à fait probant ,
Tiriaca, jes vostre pretz non col
De meillurar, c'uoi valetz mais que hier.
(A. de Peguilain, Gedichte de Mann, 344,6.)
6880. «E d'els acniliir. » Ecrire dels {de los) acuillir.
6905-G. « ella[s].. domna[s].. donzella[s].. » On ne voit pas
l'utilité de ces corrections. Le vers 6908 d'ailleurs les con-
DU « ROMAN DE FLAMENCA » 35
damne. Au v. 6905, vau du ms. a été corrigé van. Pourquoi,
puisque vau est une forme connue et que M. Meyer en admet
ailleurs de pareilles, p, ex. 728-8 estarau : venrau , 1761 et
4315 aun, 1151 trobarau ?
6959-60. a fe que dei vos... s'el es daus vos. » Corr. nos au
second vers? Il est naturel que le beau-père d'Archambaut
dise ici de notre, aussi bien que de votre (été.
6970. Mettre une virgule après ce vers, et un point et vir-
gule après le suivant.
6978. « E qui [sj'alegri ni gau senta. » Le ms. porte alegra.
Ne vaudrait-il pas mieux conserver cet adjectif et lire « E
qui's (=qui es) alegra ni gausenta » ? Cf. ci- dessus, note sur
le v. 3640.
7012. « Non y ajudava .n. botos. » C'est la leçon du ms.
Le vers étant trop long d'une syllabe, M. M. a corrigé No.
11 vaut mieux conserver Non et corriger ajuda, le présent
convenant ici beaucoup mieux que l'imparfait.
7015-16. « fer y tant gent Que cavalliers pren e reten. »
Leçon du ms. qui appelle une correction, la rime étant fausse.
Mais il vaudrait mieux corriger gent en ben qu'intervertir
l'ordre des deux derniers mots du second vers, comme l'a fait
l'éditeur, car de sa correction, outre qu'elle renverse l'ordre
logique des termes, il résulte une série de quatre rimes en
ent, ce qui est choquant et serait dans tout le poème un
cas presque unique.
7024. « ab lo dous avrei. » Ce mot est traduit par avril au.
vocabulaire, ce qui est inacceptable, puisqu'il rime à tornei.
Lire simplement aurei. Cela d'ailleurs revient au même pour
le sens. Cf. A. de Mareuil ; ab lo dous aurei Quem reven lo
cor aissi. Il s'agit de la brise printanière.
7026. « Que a son tornej[amen] fos. » J'aimerais mieux,
pour rendre au vers les deux syllabes qui lui manquent, sup-
pléer el si.
7065. Virgule après ce vers.
7067. « qu'el ». Lire quel (que lo).
7075. «Flamenca dis: «E dis! bel seiner». Corr. Flaw.nca
ris e dis: « Bel seiner.
7106. « !o[s] » Le ms. porte bien los.
7143-7144. « sentis : esgauzis». Corr. sentisca: esgnuzisna
3 6 UNE NOUVELLE EDITION
ou simplement sentissa: esgauzissa. Pour ces dernières for-
mes, cf. plus loin vv. 7549-50.
7154. Ms. quieil. C'est ce que la note devait indiquer ; mais
on y a oublié le premier i. Faute d'impression.
7163. «si so sap.» Lire s'o.
7204. « Pobles alberga tôt entorn. » Lire Poble s' alberga.
Cf. v. 7203. Mais on voudrait l'article. Corr. I e poble albergas
( = alberga se)? Poble, que M. Meyer n'a pas relevé au
vocabulaire, signifie ici ville, bourg. Acception conservée
en catalan et en gascon. Cf. castillan pueblo.
7255. « Fes bom [un] gran escadafals.» Mettre une virgule,
au lieu d'un point à la fin du vers, et corriger us grans. Cf.
v. 7276.
7265. « Car be i a[c] cavallier[s] tal mil ». Ms. tais. On ne
s'explique pas le rejet de Y s dans ce dernier mot, lorsqu'elle
est justement rétablie dans le précédent.
7321. « So dis le rei. » Il faudrait rets, mais la rime s'y
oppose. Faute surprenante chez un auteur aussi correct. On
ne voit pas de correction possible, et le contexte ne laisse
pas soupçonner de lacune.
7331. «per lur ves». L'édit. propose de corriger per lur ops.
Pourquoi ne pas entendre à leur tour ? L'emploi de per ici
serait-il si extraordinaire ?
7337-8. « E dis suau antre sas dens : Sempre pesca qui una
pren. » Rimes fausses. Corr. si una prens? pesca, naturelle-
ment, serait un impératif.
7404. Corr. Qiïom tôt lo près del mon li dona.
7434-5. «Lur ueilz e lur bocas revenon D'aitan con podon,
e lur nas. » On ne voit pas bien le rôle du nez dans cette
galante conversation. Corr. mas (les mains). L'auteur a déjà
dit plusieurs fois qu'elles ne restaient pas inactives, et il le
répétera plus loin.
7440. « E cant Gruillems...» Corr. Abtant, en mettant un
point à la an du vers précédent?
7497. Sur aiz et son origine (voy. le vocabulaire), il me
sera permis de renvoyer aussi à la Revue des langues romanes,
XVI, 378, et au glossaire de Deux mss. provençaux, p. 181.
7514. « ben deu ». Le contexte exige dei (debeo), et c'est en
DU « ROMAN DE FLAMENCA » 37
effet la leçon du ms., deu y ayant été corrigé en dei, par
l'exponctuation du second jambage de Vu.
7548. « dueilla ». Corr. tueilla.
7530. « Com leva l'us ». Corr. Can (quart)?
7551. « [so] ». Lire plutôt s'o.
7582. a tenti ». Corr. vesti ?
7614. « Que dunquec o. C'est la leçon du ms. Corr. quad
unquec, comme le veut le contexte, et non que unquec, comme
a fait l'éditeur.
7629-30. Les signes de ponctuation (: et ,) ont été transpo-
sés à la fin de ces deux vers. Faute d'impression évidente.
7635. « que so prenda ». Lire s'o.
7642. 11 semble qu'il y ait une lacune après ce vers. Pour
quoi n'est-il question que d'un couple, quand il y en avait
deux? Pourquoi très au v. 7643?
7647. « a leur guisa ». Corr. lur. Faut3 d'impression.
7648-9. J'avais pu lire moi-même, sans réactif, la seconde
moitié et même un peu plus de chacun de ces deux vers,
qu'un lecteur trop scrupuleux avait grattés, et qui étaient
restés en blanc dans la première édition; savoir :
blisaus •ni camisa
de lur benenansa 2
Pour le reste j'avais fait les mêmes conjectures ou à peu
près que M. Meyer.
Ques anc ni...
Non tolcren...
7655. « consi l'acueilla. » Corr. consil[s] a.
7680. « Aissi cos fes ». Lire coffes et écrire co fes ? Le pro-
nom réfléchi ne convient guère ici.
7687-8. « Maritz que son despendre cuja Que mullier ad
amie estuja. » La correction proposée en note serait loin
d'améliorer le texte. Il faut simplement mettre les deux ver-
bes au subjonctif {cuje: estuje). Le sens est : « bien fou est le
mari qui pourrait croire qu'il dépend de lui de cacher 3 une
' M. M. a lu blisaut. — 2 M. M. a lu benanansa.
Proprement « mettre dans un étui, serrer, renfermer».
38 UNE NOUVELLE EDITION
femme à son amant. » Pour cette construction et cet emploi
substantivé de l'infinitif, cf. w. 1731, 3655, 4712.
7705. « baït ». Il existe en Saintonge et en Poitou un verbe
basi, qui signifie disparaître, mourir. Aurions-nous ici le même
verbe? Ou faut il corriger blaït, qui serait pour blasit (flétri) ?
Voir Mistral sous blesi, et aussi Raynouard, blezir et blahir.
7802. « ab blatons. » Corr. ab latons. C'est évidemment un
diminutif de lata, baguette longue et plate. Le copiste aura ici
redoublé le b comme il fait ailleurs l'a, 17, etc. — Sesmar, qui
suit, n'exige aucune correction. Ce verbe signifie disposer,
arranger, et le contexte n'en demande pas plus.
7818. «la meillers [r]^s. » Ms. le. Il fallait donc plutôt cor-
riger li, forme qui est de beaucoup la plus fréquente pour le
nominatif singulier féminin.
7840. « De son jovens ni [de] sos vieils. » Ce vers, tel que
le donne le ms., est inadmissible à tous égards. Je ne sais
comment l'éditeur l'entend. Je crois, quant à moi, qu'il faut
corriger : « De nos jovens ni de ocs vieils » ; c'est-à dire :
« des non de la jeunesse ni des oui de la vieillesse », ce qui
s'accorde on ne peut mieux avec ce qui précède, et spéciale-
ment avec les vers 7837 et 7838. .
Je remarquerai à cette occasion que notre auteur, qui se
plaît aux jeux de mots (voir entre autres les passages où il
joue si curieusement sur sol et solalz, vv. 4592-6 et sur miuj
et mot (4675 et suiv.), ne doit pas avoir employé sans inten-
tion de ce genre l'épithète noada (v. 7829) et le substantif noz
du v. 7832.
7849. Mettre un point à la fin du vers. Autrement il fau-
drait corriger au vers suivant, consi nos penses.
7855. a de corre que. . . » Lire de corr e que. . .
7863. « com hom vesa. » Corr. que hom?
7886. «Turton. » Le ms. a turcon, qu'il faudrait corriger
trucon, mot qui convient fort bien ici. Raynouard n'a que le
substantif correspondant, truc. Mais voy. Mistral.
7896. « De cal guisa l'obras menet. » Lire lo bras. Guil-
laume montra la force de son bras.
7941-42. « deslivre: livre ». Lire desliure: Hure.
7968. Lacune. Mais c'est plutôt avant le vers 7967 qu'il
fallait la marquer, car ce dernier se lie parfaitement avec
DU « ROMAN DE FLAMENCA » 39
celui qui le suit dans le ras., à condition de traduire poino par
s'efforcent, en rapportant cette forme -kpoinar. M. Meyer au
contraire la rattache à poiner (pungeré).
7986. « Que non vougues totz los arsos. o Faut-il corriger
voiges de voïar? Ou rapporter cette forme à volgere? Cf. Diez
sous voto II a. Dans tous les cas, ou n'y peut-être que diph-
thongue. On ne saurait penser, à cette date, à la voyelle sim-
ple que le prov. mod., comme le français figure par ow, et que
présentent les formes actuelles vouja, bouja.
8017. « D'aqui on s'es. » Ecrire ses en un seul mot (sedet).
Cf. ves [videt\ ans {audit), etc.
8041. « On estavan bon feridor ». La syntaxe réclame ici
l'imparfait du subjonctif, et le contexte un adjectif de quantité
devant bon (estessontanbon?). Maisla mesure du vers nepermet
pas cette correction; fossnn tan conviendrait très bien. Si l'indi-
catif présent pouvait être ici admis l, la correction n'exigerait
que l'insertion d'un t dans Testa watt du ms., devenu ainsi estau
[t]an. On pourrait aussi penser à estiu tan. On aurait bien là
un subjonctif, mais ce serait toujours le présent.
S(;65. «Non val unas». Non pas, ce me semble, un as,
comme l'éditeur le suppose, mais unis ( trescas ), non étant
pour no en. Cf. v. 8002.
8083-4. «Si tu me plais, ce nés': pas tout en cheveux et en
joues», c.-à-d. «ce n'est pas seulement par tes charmes
extérieurs » Ainsi me paraît devoir être interprété ce passage
Je lirais, bien entendu, si nïazautas, au lieu de sit m. Ce t
sera venu spontanément sous la plume du scribe, qui pensait
à tu, et qui aura oublié de l'exponctuer.
8089. « Troban Jaufre de Laisina. » Troban est pour troba
en (l'article honorable), ce qu'il eût été bon d'indiquer, car
il n'y a pas d'autre exemple dans le poème de la contraction
de cet article avec un verbe.
C. C.
P. -S. — Le présent article n'ayant pu paraître dans le
numéro de Novembre-Décembre de la Revue, je profite de ce
retard forcé pour joindre aux remarques qui précèdent un
1 Cf. pourtant, v. 4, </ue m'es, où l'on attendrait quem sia.
4 0 UNE NOUVELLE EDITION
certain nombre d'observations nouvelles, faites au cours d'une
seconde lecture.
2456-7. « Mais langui, plais, fol desplazer : vezer. » La
grammaire voudrait desplazers, que la rime repousse. Corr.
fel ci. ? ou ac desplazer, ou encore del desplazer, en suppri-
mant la virgule après plais ?
2478. «don' avanz. » Apostropbe inutile.
2631. « De prohome s'aver lo poc. » Corr. s'amar ?
2655. « entendet s'i ». Lire plutôt si, car à quoi se repor-
terait i ?
3878. « Aqui la mes, quar ben l'adesa. » Outre la significa-
tion de toucher, seule indiquée au vocabulaire , le verbe
adesar devait avoir celle de « serrer, mettre en lieu sûr », et
c'est celle qui conviendrait ici. Ce verbe existe au«si en
catalan, et le dictionnaire de Labernia l'interprète par « posar
alguna cosa en lloch segur.» Je soupçonne dans Dame z que
du vers précédent une altération d'une leçon meilleure, que
je ne sais pas retrouver.
3991-2. «Et e menz d'oral camja cor... Las! con no mor. »
Le ms. a cors et mors que je voudrais rétablir. Guillaume,
dans le second de ces deux vers, s'adresse à lui-même, et na-
turellement à la deuxième personne, ce qu'il fait très souvent.
Cf. p. ex., un peu plus bas, vv. 4011 et suiv. La forme de la
première personne ne serait pas d'ailleurs, régulièrement,
mor, mais muer.
4053-4. « Quar aissim pren bona sabor Lo bon saber qu'om
a d'amor. » M. Meyer propose de corriger Del bon saber. La
seule correction à faire, car aissim est pour aissin [aissi ne)
et non pour aissi me, est de donner au sujet du verbe une
forme régulière, en écrivant Le bons sabers.
4066. « E Fus per l'autre. » Corr. l'un. Saborir signifie, ici
du moins, non pas devenir, ma.\s rendre savoureux.
4103. « Si davaus mi donz gauh nom ve.» Le mot gauh
est déjà au vers précédent et reparaît au suivant. Il serait ici
avantageusement remplacé par une particule (yes?)
4100. « conort. » Il faudrait un mot exprimant l'idée con-
traire. Co:r. dolors?
4215-16. « gran aventura : s'aventura. » Ecrire plutôt sa
ventura.
DU « ROMAN DE FLAMENCA » 4 1
4300. « Si merces i fai captenensa. » Corr. no i fai? Cf.
v.5186.
4549. « Qu[e] ieu non vis ». La correction Qiïieu non vis
[mais] serait à mon avis préférable.
4763. « Lo mot e met en cor prion. » Corr. el met en c. Le
ms. porte El mot e mot.
4831. « E cel que non sap ni volria ». Leçon du ms. L'édi-
teur corrige ni en molt. Ce n'est pas là que la correction
devrait porter, principalement du moins ; c'est sur non. Lis.
«E cel que moll sap ne volria. «Avec la correction deM.Meyer,
ancar du vers suivant s'expliquerait mal.
4944. « es so abetz. » La traduction de abetz au vocabulaire
(tromperie, fourberie) ne saurait convenir ici. C'est tout au
plus « ruse » ou mieux encore « raillerie » qu'il faut entendre:
« Elle se moque sans doute en me demandant pour qui »
51 ST. « E vos a merce connoissetz. » Corr. cossentetz?
5243 5. « Ben vai l'affars ; Nuls affars non fora plus cars
Aora d'aquest estornut.» Le deuxième affars est certainement
une répétion fautive ; mais la correction est indiquée par le
contexte même. Alis vient d'éternuer, ce qui est de bon
augure. Corrigez donc agurs.
5287-8. Le sens paraît être (pie Flamenca fixa ses yeux
sur Guillaume plus longtemps que lui-même ne faisait sur elle.
Corr. en conséquence ou Ques el lais, ou el esgarda. Au vers
suivant il suffit d'écrire lion {on) au lieu de nom.
5412. <( Cossi poeses far quel plagues. » Corr. placses? ou
pogues et queus ?
5435. Supprimer le point à la fin du vers.
5173. « Que de tal guisa [sia] fait. » J'aimerais mieux [oaia]
fait.
5536. « E negun pensier. » Corr. IJer?
5561. « Nos feiron. » Corr. No feiron.
5567. « Si[l] toi vergoina ni temensa. » On ne sait à qui
rapporter le pronom (/== l>) suppléé par l'éditeur, non plus
que le verbe toi. Corr. « Cel cuitol vergoina e (ou o) temensa. » ?
5610-11. « Car si mescaba una ves, En autr'afar pot reve-
nir. » Afar ne parait guère convenir ici. Le ms. offre une
autre division autra far: En autra pourrait signifier une
autre fois, et il faudrait chercher une correction pour far.
4 2 UNE NOUVELLE EDITION
Peut-être sai: « Je sais bien qu'elle peut une autre fois reve-
nir de son erreur, mais... »
5781. « Quar las canas foron fumadas ». Cela ne signifie
rien ; aussi l'éditeur propose-t-il une correction, fermadas,
qui ne paraît guère satisfaisante. Je crois que suilladas con-
viendrait, et paléographiquement et pour le sens. Cf. v. 6713.
5911. « Per lur sen ni per lur parlar. » C'est la leçon du
ms. Comme il faut une rime en <?>, l'éditeur corrige saber. Je
crois que parer vaudrait mieux.
5997. « Non la[s] cuja. » Cette addition d'une s (= sibi)
paraît ici assez inutile.
6045. « Quel fronz. un pauc si remulliet. » Corr. front ï
6159. « Cui Alis fai papiejar. » M. Mejer, au vocabulaire,
voit dans ce mot le même verbe que l'ancien français papier
qui signifie balbutier, en observant avec raison que ce sens
ne convient guère ici. Il y a dans le provençal moderne un
autre verbe qui conviendrait au contraire on ne peut mieux,
et dont la leçon d\: ms.ne s'éloigne pas beaucoup ; c'est patejar,
moins usité que arpatejar, signifiant l'un et l'autre a piétiner,
aller et venir, tourner surplace ». C'est le dernier qu'il fau-
drait ici pour la mesure du vers. Mais on pourrait corriger
Qu 'Âlis fai [aissi] patejar, ce qui peut-être vaudrait mieux.
6472. « E podon las ben solassar. » Corr. la ou lai.
6507. <( la mostrae la presa. » « Termes de jeu », est- il dit,
simplement, au vocabulaire. N'est-il donc pas possible d'in-
terpréter ces mots d'une façon moins vague ? Il me semble
que la mise (ou Y invite) et le gain (l'acte de gagner) pourraient
les traduire.
6952. « Al tornei sai quel veirem doncs. » Voilà déjà le
moderne saique = probablement, peut-être ; car Arcbambaut
n'a à cet égard aucune certitude. Cf. les vers suivants. —
Voir ci-dessus, v. 1981, la note sur ben sai, aujourd'hui bessai,
dont saique est le synonyme.
7028. « m 'i métrai ». Lire plutôt mi.
7307. « A vostra dona. » Corr. nostra? Cf. v. 5708.
7734. « Quar a cel portai. » Corr. Ques a. Cf. v. 7755-6.
7912. « Don vos n'ires. » Corr. donc? Ou faut-il considérer
don comme un vocatif pluriel (domini) ? Le vocabulaire est muet
sur ce point.
DU « ROMAN DE FLAMENCA » 4 3
8000. « El fer son tost .l'outra passât. » Corr. tôt?
8015. « E l'estreup. » Corr. Eis estreups. Ou vaudrait il
mieux corriger peitral au v. 8013? Ces formes de nominatif
pluriel s'expliqueraient par une anacoluthe.
8027. « Non la pogra. » pogran du ms. est il vraiment une
faute, comme on le dit en note? J'en doute pour ma part,car
ce mot peut très bien se traduire par « on n'aurait pu. »
Qu'il me soit permis, en terminant ce long examen, d'ex-
primer le vœu que M. Paul Meyer, avant de mettre sous
presse son second volume, veuille bien revoir le texte avec
un redoublement d'attention, et s'efforcer d'y introduire plus
de correction et de clarté, afin que sa traduction de Flamenca
puisse être l'image la plus nette et la plus fidèle de ce déli-
cieux poème. Nul mieux que lui, je l'ai déjà dit, ne peut le
faire; et j'oserai ajouter que la reconnaissance lui en fait un
devoir. C'est sous les auspices de Flamenca qu'il fit si heu-
reusement ses premiers pas, dans une carrière encore peu
fréquentée et mal aplanie. C'est grâce à elle, grâce à la
séduction de ses charmes, qu'il fut partout accueilli d'emblée
avec faveur. Et puisque, après trente-cinq ans, il conserve
encore à l'aimable personne qui lui valut ses premiers succès
toute la tendresse d'autrefois, il lui doit bien de faire tout ce
qui est possible pour rafraîchir sa parure et la nettoyer com-
plètement des taches qu'une main maladroite et peu soigneuse
y a répandues.
C. Chabaneau.
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
(Suite)
165
GAUCELMS FATDITZ
(= B. Gr. 167, 14)
I. Chascus hom deu conoisser
[e entendre
Qe richeza ni prez ni cor-
[tezia
Res qe sia.nons pot de mort
[défendre
Cal iorn com nais coraensa a
[mûrir
5 E qi mais vin plus ponha de
[fenir
Donc ben es fouz cel qen sa
[vidas fia
Si bes pessa de prion sa
[folia
En nos es tos los gentil cors
[faliz
Duna valen contessa biatris.
II. Donc neguns hom nos pot
[per dreih contendre
Oimais mas tan con deus ten
[en bailia
Non puescha om sa part de
[valor tendre
Desseignamen ni daut cor
[dont dei dir
5 E pos dieus se de mort non
[vole garir
Qi totz los bes del mon com-
[plitz auia
Ja non fara als autres se-
[gnioria
Qe tuit murrem e qi mais er
[grazitz
Ni plus ama cest1 segle miels
[ner trahitz.
III. Con auzam donc aqesta mort
[atendre
Canadobat troban2 chascun
[dia
Qe nostra mort podem en
[vida rendre
Car dieus qe la men s lai ser-
[uir
5 Ont el fo mortz per nos sal-
[uar garir
Aqi morir e qui per lui
[morria
Cobran son dreih ca perdut
[en suria
Ab gran razon venria gen
[garnitz
Al iutzamen lai on er ihesu
[cristz.
IV. Qui per dieu vai lauer el
[cors despendre
De paradis 1er uberta la
[via
E qi non vai deu baissar e
[descendre
» /. : amal — - 1. : Irobam a — 3 l. : d. nos ditz qe l'anem
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
45
De tôt honor car tem qe dieu
[lair
5 Qi rema sa ni pot anar gar-
[uitz
Qeu sai daitals cauers ni ma-
[nentia
E diables (p. 161) e pechatz
[e bauzia
Za retengutz .c. ' fais auars
[aunitz
Guerriers de dieu e de totz
[Les partitz.
V. Ben se eugen en las terras
[estendre
E sara conqis mas autramen
[eug sia
Mas dieus lo reis sap sar-
[halesta tendre
E tra cairel trenchan perben
[ferir
5 E negus om al colp non pot
[gandir
Cant el sirais e ue com nos
[chastia
Mas qil dopta ni vos lui su-
[melia
Aqel aura cbapdeu saint es-
[peritz
E qi non fai er en effern
[puniz.
VJ. A totz degra de dolor lo cors
[fendre
Del dezeret al fil sancta
[maria
Mas cornai lair qi ves3 los
[autres pendre
Sesforsa plus del mal ses
[repentir
5 0 4 mau segle don dieus nos
[lais issir
A saluamen si cou opa nos
îeria
E monthesaurqelaisenlom-
[bai'dia
Don dieus salut car de totz
[nos es guitz
E dels crozatz los cors els
[esperitz.
166
GAUCELMS FAID1TZ
(= B. Gr. 167, 54)
I. Si tôt nonqa ses grazitz
Tan can sol chanz ni solatz
[gais
Non er qttcu lauzens 5 no
[meslais
Dun vers far don soi enqe-
[zilz
5 Car cel qa bon escienza
Deu far . zoqapres sagenza
Non deu celai*, son saber ni
[cubrir
Lai on coue a mostrar ni a
[dir
Qen totz luecs val adrecha
[captenenza.
IL E non taing qestei plus mar-
[ritz
Ni vir mon fin cuer en biais
Pero truep michargeiGgrieu
[fais
La bella falsa enjanairitz
5 Qe totz fui mortz em par-
[uenza
Mas er nai trobat garenza
Tal qi ma gen desliurat de
[morir
1 /. : Als r. com — - l. : far — 3 /,: M. com laire qi ve — 4 c. en : A. —
3 c. en: iauzens — 6 L: charget
4ô LE CHANSONNIER DE
Qel ' la genzer qom puescha
[el mon chauzir
Ez il reraa fazen sa pene-
[denza.
III. Don fui cortczamen garitz
Qenqer nai en la bochal bais
E la dolza sabor el iai'-
Con fui gen baizan acullitz
5 Per lei cane non fei faillenza
E pos tan gent mo comeresa
Ane la douzors del bais nos
[poc partir
De ma bocha ia nô deu mais
[faillir
Ni far ni dir nulla desaui-
[nenza.
IV. Car3 anc nestei iorn faiditz
De lei veer on beutatz nais
Ni qel fols cens al nô satrais
Ez il siâ perdoz e guitz
5 Er vauc mon gran tort ses
[tenza
Adrechurar en proenza
E si anc re qe fezes agrazir
Agui de lei de lui a 4 ses
[faillir
E de nagouL e de saconois-
[senza.
V. (p. 162) De re non es om
[tan saziz
Ni on tan leus iois ni es-
[mais 3
Ni nô porta om ta greus
[eschais
Con damor qi ame comqz«is
5 Camors a poder qe venza
E qant be nai souinenza
Adont0 consir qe miels mi
[degra aucir
BERNART AMOROS
Qeu anc sofris qe men po-
[gués partir
Can vi lamor. e la gram be-
[volenza.
VI. Mes vers voirai qe sia vitz.
[auzitz ''
Per mon beu thesaur par
[clauais
Qil es de pretz clardatz e
[rais
Ez an 8 can er. de lui partitz
5 An rie de ioi a prezensa
Dir qen sobeiras dargenza
E ma dona ma fag de lai
[venir
Car si per eus no fos a9 ses
[faillir
For eu lombartz de cenh e
[de valenza.
167
GAUCELMS FAIDITZ
(= B. Gr. 167,33)
I. Lommtz10 iauzens sers
[ "]
Venc mot bel lespers 12
Gen complit I3 matendenza
5 Mi torna en plazers
Ab douza souinenza
Em fai chanzos faire
Don mi cuiaua estraire
Car ben es razos
10 Qieu chant gais e ioios
Pos cil cui sui amaire
Qi es la genzer cane fos
Vol me e mas chanzos.
II. Qel sieus plazers pros
1 /. : Qes — - 1. : iais — 3 1. : E car — 4 /. : de lai lai — 5 l. : ni esmais —
c c. en : Adonc — " l. : sia a. — 8 /. : E tan — 9 /. : or. — 10 c. en : Lonratz
— H /. : On tant bella paruenza — l4 L : mos bel espers — 13 L : com])lir
LE CHANSONNIER DE
Francs cbauzitz de bonairc
Francs e chars e bos
Gentils e daut afaire
5 E li ' uil amoios
Qun saub toi2 coratraire
Assa lunvolenza
Don io plei :t ves proenza
Man tan aut azers
10 Qe ries soi et esders
Sol vostra couinësa
Sia complitz lezers
Que noi failla poders.
III. Car adreh sabers
E valens conoissenza
E humils parera
E precs ab graa valf'sa
5 Beutatz genz teners
Son en lei don magensa
En son gais chantaire
Per sas valors retraire
Fil grazis los dos
10 Fis plazers saboros
El afan qweil vi traire
Al grieu cotnnjat doptos
Ab sospirs engoissos.
IV. Per soil tain ; perdos
Car tarzei pauc ni gaire
De tornar coltos s
Ves lai dins son repaire
5 Don degenoillos
Li soi leials preiaire
Qe nierces lam venza
Em perdo la faillenza
Courars ni valers
10 Ni baizars. ni iazers
NO te sai nî bistenza
Sol noil sia temers
Lafanz nil mais poders.
BERNART AMOROS 4 7
V. Pero sil mouers
Qeu fau per penedenza
Lai on dieua lo vers
Près veraia naisenza
5 Les al cor dolers
Noi deu auer temenza
Ca totz bos veiaires
Es liens ,; bos prezlomaiers7
Qi sans delechos
10 Vai al rei glorios
Seruir qi es vers saluaire
Car el cel e saios
Len ve ries gazardos.
VI. (p. 163) Oimais es sazos
Danar ain dieu lo paire
Qi près mort per nos
Sia chapdelaire
5 Ez als compaignos
Qi son nostre cofraire
Per obedienza
Aider me lor crezenza
Eus cors eus auers
10 Can es sieu seruir ders
Teinha en sa prezenza
Eil sià douz vezers
Lafanz el mais paders.
168
GAUCFLMS FAIDITZ
( = B. Gr. 243, 2* )
I . De leis 8 cui am de cor e de
[saber
Domne segnior et amie vol-
[rai dir
E ma chanzo sil platz. qe
[voilla auzir
1 /. : Eil — 2 /. : Qim saub lo — 3 c. en : soplei — 4 /. : tain — 5 c. en :
coitos — (L: de — ' /. : maire.
* Voyez le texte donné par M. Appel dans sa Chr. Prov. p. 75 d'après
la thèse de M. O. Dammann Breslau 1831, p. 1 ss. — 8 /. : Celeis
4? LE CHANSONNIER DE
Del menor tenz * damor son
[gran poder
5 Perzo car nés 2 princeps
[ducs e marqes
Comtes e reis e lai on sa
[cortz es
Non sec razon mas plana
[volontatz
Ni ia nul temps noi sera
[dreitz vitjatz 3.
II. Tant es sotils com nô la
[pot vezer
E cor tan tost. qe res noil
[pot fugir
E fer tan fortqeres noil pot
Tgandir
Ab dart dacier com nos pot
[escremir i
don fai colp de plazer
5 On non ten pro auzbes 5
[fortz ni espes
Si lanza dreg e pois trai de-
[manes
Sagetas daur ab son arc
[estezat
Pois lanza un dart de plomp
[gent afilat.
III. Corona daur porta per son
[deuer
E non ve ren mas lai on
vol ferir
No fail nul temps tan gen
[si sap aizir
E vola leu e fai si molt temer
5 E nais desaur c qe ses ab
[loi enpres
E can fai mal sembla qe
[sia bes
BERNA HT AMOROS
E viu de gang e defen e
[combat
Mas noi gara paratge ni
[rictat.
IV. E son balais lai on se vai
[iazer
A .V. portais e qil dos pot
[ubrir
Grieu passais très man" non
[pot leu partir
Mas ab gang uiu cel qei
[pot remaner
5 E pujai hom per .1111. gras
[moût les
Mas non intra vilas ni mais
[après
Cap los fais son el barri
[alberjat
Qe ten del mon plus de luna
[meitat.
V. For al peiro on ela vei 8 se-
[zer
A .1. tauler talcon sai deve-
nir
Qe neguns om noi saup nul
[ioc legir
Las figuras noi trop a son
[plazer
5 Ezai mil poins mas gart qe
[noi ades
Om malauzatz. de lah iogar
[mespres
E li [loin 9 de veire trasgi-
[tat
E quin fraiu10 un part son
[iuec e mudat".
VI. (p. 164) Ai tant con mais
[ui tra I2 pot tener
i l. : tertz — * l. : ve??s — 3 c. en : iutjatz - W. : Ab d. dacier
ausbers— 6 c. en : desaut, /.: dasaut— 7 /.: mas — 8 c. en: vai
point son — '° c. en: train — '•/.: onnuidat — ,s l.: terra
s t.
9 l.
49
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
Ni soleils par si fai * tôt
[seruir
Los uns fai viure els autres
[fai morir
Los uns ten bas els autres
[fai valet
•" Pois estrai leu so qe gen a
[promes
E vai nuda. mas can dua
[pauc dorfres
Qe porta seinh. e tuit sa pa-
tentât -
Naisson de fuec de qe son
semblât,
VII. Al segon reis tam 3 franqeza
[e merces
El sobeiranz es de tan gran
riotat
Qe sobre cels essaia son
[rognât.
169
GAUCELMS FAIDITZ
( = B. Gr. 167, 2 )
I. Er consir e plaing
En chantan mon dampnatge
Dun ioi qem sofraing
Per mo meteus folatge
5 Qen pais estrain
Fui '* ne no vei messatge
De leis oui soplei
Don eu nom recrei
Cades on qeu sei
10 Laclin ses cor volatge
Se tôt non la vei.
II. Mi donz sui acliuz
Vas on qeu vau ni vegna
Eviers lo pais
0 ill estai e regnja
5 Sola ma conqis
La bella qi nom degna
E no sai per qe
Me destreing anc se
Qeu lasegur be
10 Qe ia dautra non fegna
Mas il la uô cre.
III. Moût fes bel gazain
Can 8 près mon homenatge
Per qeu non remain
En autrui segnoratgc
5 Ne a mi nos tain
Qieu seg autre viatge
Ni qieu ia desrei
En autrui domnei
Car sos sers mautrei
10 Humils ab franc coratge
:■
■j
IV. Amors qe farai
Saissim desasegura
Qil mauci desmai
E de me non a cura
5 Ai gelos sauai
E auolz genz tafura
E fais lausengior
Son damor guerrer
Per qa ieu qerir "
10 Qil don malauentura
E mal encombrior.
V. Meils foram sufris
De leis cui iois manteignha
Qe ia non la vis
Cattalz8maltraigz men re-
[gnha9
5 Soauet mi aucis
1 /. : fai a— 2 l. : parentat — 3 l. : Al s. rei tain.— 4 I. : Sui— s c. en :
Tan — s /. : Qautra non enuei — 7 .. : que iesu qier — * /. : Caitals —
9 /. : vegnha
50 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
II. Ben man trahit seu bel oill
[amoros
E sos gentz corse sos azautz
Ab la fais antresegnha
Cant per sa merce
Mi retenc ab se
Car no len soue
10 Tant ma obs qem reuei -
[gnha
[•• '1
VI. Joios ben sescbai
Caia de ioi frachura
Cel qa ioi verai
Et a lui non satura
5 Qel laz mos cors estai
Loing de bona uentura
En grant consireir
E mon centongier
Vei damor premier
10 Si ia sa ioia dura
Beil vai a sobrier.
170
GAUCELMS FAIDITZ
(=B. Gr. 167,3b)
I. (p. 165) Maintas fazos - es
[nom plus volontos
De zo don mal e dan li deu
[venir
Qe de son ben. e uoil lo per
[men dir
Car ieu meteis manei mètre
[cochos
5 En tal poder. don aran
[vauc plagnen
Qem fai languir, e suspirar
[souen
Qe qan ne3cug ben auer
[ieu nai dan
E torn atraz qan cug anar
[enan.
[garnitz 4
Sos gentz parlars. e sos
[gens acuillirs
Sos bels solatz sos auinens
[respos
5 Mala vi anc sa gran beutat
[valen
Don ieu cugei auer mon cor
[iauzen
Mas aram vau plagnen e
[sospiran
E nom i val merces qeu lai
[deman.
III. Anc non cugei qe nuilla
[domna foz
Tan grâ beutatz qen fos
merces a dir
Qon plus li clam merce nom
[deg nauzir
Anz ma son cors ades plus
[orgoillos
5 Per qe mos mais mi vai ades
[creissen
& es mi piegz ci deus mi
[sal per vn cen
Per leis car ten ihas de mal-
[estan
Qe per lo mal qeu nai ni per
[lafan.
IV. Lo mais qieu trac mi fora
[bels e bos
Bella domna sol qel pogues
[suffrir
Car ses afan non pot hom
[enreqir
De null afar qe sia chabal-
[los
' /. : Nil membra de me. — i :. en: sazos — 3 l. : eu — 4 c. en
— B l. : ren ni a.
LE CHANSONNIER DE REUNART AMOROS
51
5 & zo qe hom onqier ab
[gran turmen
Ten hom plus car plus celât
[e plus gen
Que zo que ha tôt iorn a son
[talan
Qar leu despen qi de leu ha
[gazaing.
V. De zo don plus cugei esser
[ioios
Soi plus iratz e nai mais de
[conzir
Per qom nous deu per gang
[trop esiauzir
Ni per ira esser trop an-
[goissos
5 Mas ieunon puesc ges esser
daital son
Qen malegrei trop al co-
[menzamen
Domna per uos mas eram
[vau ploran
Qon hom marritz que ren
[non sap on san.
VI. Sa ma domna plaguesson
[mas chansos
Naurella mont mestera bel
[egen
Car ia enan non aurai mon
[talen
De nulla ren ni puesc far
[bel semblan
5 Tro que de leis aia zo qeil
[deman.
171
GAUCELMS FAIDITZ
(= B. Gr. 167, 19)
I. (p. 166) Del gran golfe de mar
E dels enois los x portz
E del perillos far
Soi merce dieu 2 estortz
5 Don pose dir e cOdar
Qe main ta malananza
I liai Buffert e maint turmen
E pos a dieu platz queu 3
[torn men
En limozi ab cor iauzen
10 Don parti ab pesanza
Lo tornar e lonranza
I,i grasisc pos el mo cossen.
II. Ben dei dieu merceiar
Pos vol qe sanz e fortz
Puesc el pais tornar
Un val mais uns paucs doir*
5 Qe dantra terrestar
Ries ab gran benananza 5
Qar sol li bel acuillimen
Eil onrat fag eil ° dig plazen
De nostra domna il " prezen
10 Damorosa coindanza
E la douza semblanza
Val totqan autra terra, ren.
III. Ar hai dreg de chantar
Pos vei ioi e deportz
Solatz e domneiar
Qar zo es vostra cortz 8
5 E la font el ris 9 clar
Fan mal cor alegranza
Voyez les éditions de cette chanson données par M. Chabaneau, dans
la Rev. des l. r., IV s., t. II, p. 550 s. et par M. Appel, dans s i P>'o-
venzalische Chrestomathie, p. 112. — U. : enoios (Ch.), enois dels [A) -
* Ch.: deu -3(7/i.: que-* l.:ovlz(Ch. et A.) - 5 Ch. : benan[an /..
— 8 Ch. et A. : eil— * l. : eil {Ch. et A.) - M. : vostr'acortz {Ch.) — '■> l. :
las fontz el riu {Ch. et A.)
52 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
Prat1 e vergier qar tôt mes 1
[gen
Qera nô dopti mar ni ven
Garbe 3 maistre ni ponen
10 Ni ma naus nom balanza
Ni nom sai 4 mais doptansa
Galier 8 ni corsier corren.
IV. Qi per dieu gazaignar
Pren daitals desconortz
Ni per sarme 6 saluar
Ben es dregz 7 non ges tortz
5 Mas cel 8 qi per rubar
E per mal acordanza
Vai per mar un hom tan
[mal pren
Em pauc dora sauen souen
Qe qan cujom puiar deissen
10 Si qab desesperanza
11 laissa 9 tôt eslanza 10
Larme lo cor " e 12 laur e
[largen.
Finis coronat ojnis.
(p. 166*:) Argumenta den folqetz
de marssilia [voy. devant n° 97].
(p.1663 : ) Argumenta de gaucelms
faiditz [voy. devant n° 138].
(p. 166*:) Copie partielle d'un
planh catalan (B.Gr. 461, 2) publié
d'après un autre ms. complet par
Torres Amat à la p. 369 de son
Dictionnario critico de los escri-
tores catalanes (Voy. une note de
M. C. Chabaneau, dans le vol.XVHI
de la Rev. des 1. r., p. 18 s.). Le
texte incomplet de a a été imprimé
dans la préface de mon édition des
deux plus anciennes grammaires
provençales, p. VII et era scritto
inanzi al principio del originale
nelle carte che si soglion lasciar
1 Ch. : Prai — 2 Ch. : mos — 3 ch
et A.: Galea — « Ch. ecA. : s'arma —
ces — s /. : Eslaissa ou El /. (Ch.) —
11 /. : Larm'el cors (A.)—i* Ch.:[e).
biancbe per conservare i libri cosi
imperfetto.
(p. 164') 1588. Jaques Tessier de
Tarascon.
Concordato 1589.
Riueduto Antonio Martelino.
(p. 1666) ARGUMENTO DEN PEIROLS
Peirols si fo us paubres caua-
liers daluergne dun castel qe a
nom peirob qes en la terra del
dalfin a pe de rochafou e fo cortes
hom e auinenz de la persona. el
dalfin daluergne sil ténia ab se el
vestia el daua cauals & armas, el
dalfiz si auia una soror qauia nom
sail de claustra bella e bona e
molt presiada & era moillier den
beraut de mercoir dun gran baron
daluergne. en peirols si lamaua
per amor. El dalfis si la pregaua
per lui e salegraua molt de las
châzos qen peirols fazia de la
seror. e molt las fazia a plazer a
la seror e tant qe la dona li uolia
ben. eil fazia plazer damor a sau-
buda del dalfin e lamors de la
domna e don peirols monta tant
qel dalfiz sengelozi delà car cudet
qela li fezes plus qe non conuenis
ad ella. e parti peirols de si e loi-
gniet e nol uesti nil armet. don
peirols non sen pot mantener per
caualier, e uenc ioglars. & anec
percortz ereceup delsbaros. draps
e diners e cauals.
Ce texte se retrouve tel quel une
seconde fois au f° 32 v° de la der-
nière partie du ms.
et A.: Garbi — '■* c. en : fai — 5 Ch.
7 Ch. : Ben e saregz — 8 Ch. et A.:
i° l. : e 'slanza (.1.), en lanza(C/t.) —
LE CHANSONNIER DE BERNA UT AMOROS
172
EN PEIROLS
(= B. Gr. 366, 22)
I. (jp. 167) Nuls boni non
[sauci tan gen
Ni tan douzamon
Non fai son dan ni folleia
Con cel qen amor senten
5 Pero nai eu bon talen
Sitôt amors me guerreia
Nim destrein greumen
Car per mo ' voler mal pren.
II. Cuna domn am finamen
Don mon escien
Mer a morirab leuera2
Tant es de rie pretz valen
5 E si plus nonca naten
On qieu steia lai sopleia
Vas lei franchamen
Mos cors qi la uez 3 souen.
III. Estraigz cossirers men ve
E si gairem te
Conois cades mi sordeia
Tort nai eu meteus de qe
5 Car nom am si cos coue
Tal dôna camar mi deia
Car il per ma fe
Nô deu sol pêsar de me.
IV. E pero can sesdeue
Qieu li par len rei l
Ges mas paraulas nom veia b
Anz uei gescouta6 las be
5 Del repropeher mi soue
Qi non contraditz autreia
Auran doncs merce
Tant o voil qie nô lo cre.
V. Pel bel semblan qelam fui
Vol qem tenga gai
E qem bon respeg esteia
Mas de sa valor mesmai
5 Ai bol la donna si us plai
La vostra francheza veia
Lo greu mal (peu trai
Don ia senz vos non guerrai.
VI. Chanzos Baludar lam vai
Ver teil mandarai
Qeil re-; es qe plus me greia
Car tau loing de mi estai
5 E pos enaissi seschai
Sobre tôt cant es lam preia
Qe il soueigna lai
Dezo. dont ieu consir sai.
VII. Bella dona de vos ai
Tal dezir e tal euueia
Qe ren del 7 mon mai
Al cor a mi nom estai.
173
EN PEIROLS
(= B. Gr. 366, 31)
I. Si ben son loing et entre
[gen estraigna
Eu mais consir damor ab
[qem conort
E pens dun vers consil fasse
[lacort
Tal qe sia bons e plazens e
[fil
5 E car hom mais mon chan-
[tar mi grazis
Adoncs dei miels gardar qe
[nom mesprenda
Ni diga ren don sauis me
[reprenda.
1 /. : mal — 2 /. : l'e/mcia — * l-
— 6/. : qescouta — 7 /. : de tôt lo.
ue
* l. : parlen re — 5 c. en: neia
54
LE CHANSONNIER DE BKRNART AMOROS
II. Non os nuils iornz qe mon
[cor non descenda
Una douzors qem ven de
[som pais
Lai iong mas mans & lai
[estauc aclis
E sapchas ben qeu volgra
[esser fort
5 Près de mi donz sitôt sa vas
[mi tort
Cab bel sclatz & ab douza
[compaguia
Mi dauret gen zo qe ara
mestragnja.
111. (p. 16'S) Ben ai assatz qe
[suspir e qe plaigna
Ca pauc lo cor nô part cant
[mi recort
Del bel solatz. del ioi e del
[déport
E del plazer qelamfei e qem
[diz
5 Ai con fora garitz. sadonc
[moris
Qwe can la prec que de mi
merceil prenda
Sol veiaire non fai qella
[mentenda.
IV. Ben es razons qieu suffra e
[alenda
Con atendrai pos lieis nô
[abeillis
Miels mi fora som cug qe
[men partis
Partir non ges. trop nai
[près lonc acort
5 Bona domna vostrô sui tôt
[a fort
E non cudes lamor e mj
[remaigna
Qen vos amar tem qe temps
[mesoffraigna.
V. A lieis non fail res qa prô
[dôna taigna
Com nô la ue qe de lieis
[laus nom port
Coîde gai es e pros \>er qieu
[lam fort
E doncs amorscui tos temps
[soi aclins
5 Plagues li ia cuna ves men
[auzis
Agestal1 qeirper don e per
[emenda
0 si non mais gnizardon nô
[mi rôda.
VI. Dautre trebail prec dieu
[qellam defenda
Mas vn sol iorn volgra qella
[sentis
Lo mal qeu trac per leis ser
[e matis
Qen grieu perilh ma laissât
[loïg del port
5 E non voil ges qwautra men
[ai estort
E sa leis platzqe ia vas me
[safraigna
Ane no fes om damor genzor
[gazaigna.
174
EN PEIROLS
(=B. Gr. 366,12)
I . Del sien tort farai emenda
Leis qwem fes partir de se
Anqer ai telan qeil renda
Sil plai mas chanzos e me
* l. : Aqestal.
LE CHANSONNIER DE
5 Ses respeig dautra nierce
Sol suffra qen lieis men-
[tenda
E qel bel mea atenda.
II. Ges per negun mal qem
[prenda
De samistat nom recre
Anz sufraicades mentenda1
La pen el dan qe men ve
5 Fairem degra qalqe ben
Mas non tain qeu lan re-
[prenda
Si tôt ses ver qill mes-
[prenda.
III. Moût i consir nueg e dia
E no men sai conseillai"
Pero si sesdeueuia
Gran talent ai cunbaizar
5 Li pogues tolr o emblar
E si pois sen iraiaaia
Volun tiers lo li rendria.
IV. (p. 169) Ben conosc qieu
[non poiria
Mon cor de samor ostar
Per ira ni per feunia
Ni per autra domn amar
5 No mo cal plus essaiar
Caissi con li plaira sia
Qieu lamarai tota uia.
V. Qel mon nom es hom qe
[teigna
Tan apoderat amors
Qe ges non vol qneu reteina
Los plazers ni las honors
5 Cauia trobat aillors
Anz vol qede sai mestreigna
Per zo qenô vol nim degnia.
VI. Bella dôna en cui reigna
Senz e beutatz e valors
Pos suffretz caissim des-
"treigna
BERNART AMOROS 0 5
Lo dezirers e la dolora
5 Si vais dels plazers menors
Mi faitz tan don iois mi
[veigna
Sol ca uos non descoueigna.
VII. Chanzoneta vai de cors
Dir a mi donz qel *reteigna
Pos mi retener non deigna.
175
EN PEIROLS
(= B. Gr. 366, 14)
I . Dun sonet vau peusan
Per solaz e per rire
Qeu non chantera ogan
Estier per mon consite
5 Dont mi conort chantan
Camors mauci desmai
Car ma trobat verai
Plus de mil3 autr aman.
II. Las con muer deziran
Sos hom e sos seruire
Qieus iria celan
Maintas ves men azire
5 E die per maltalan
Qe totz men partirai
Aqwei mezeua trop lai
Mon cor on eran tan.
III. Ges per autrui nol man
La ren qe plus dezire
Qeu mezeus tan la blan
No len auzi ren dire
5 Anz can li soi denan
Maîtas vetz can seschai
Die dona que farai
Nom respont mas gaban.
IV. Sivals4 vai daitan
Qe ges nom pot aucire
A tan onrat afan
1 c. en : men renda — - L: qet. — ' l. : nul — 4 /. : Sivals bem
5G
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
E progresser que miels fora
[apreza
Ni ab tan bel martire
5 Catal donam coman
Qes la genzer qeu sai
Bos mes lo mais qeu trai
Mas il na pechat gran.
V. Si ' oilh el cors mestan
Vas lois caillors nos vire
Si cades on qeu man
La vei e la remire
5 Tôt per aital semblan
Con la flors com retrai
Qe totas vias vai
Contrail soleil viran.
VI. Si marnes ni2 tan ni qan
Ja for eu totz iauzire
Sapchatz nô es dengan
Qe souen en sospire
5 Dôna per cui eu chan
Una ren vos dirai
Saquest vostrom decbai
Antal3 auretz e dan.
VII. Chansonetta ab aitan
Dreit a mi donz ten vai
E digas li sil plai
Qe temprenga et chan.
VIII. {p. 170) Damor ai fin talan
E fin dezirer nai
E ia daqui en lai
On plus no men deman.
176
EN PEIROLS
(=B.Gr. 366, 20)
I. Mentencion ai tôt en un
[vers messa
Con valgues mais, de chan
[qieu anc fezes
Chanzonetta sieu faire la
[volgues
5 Mas chantars torn a leuja-
[ria
E bon vers qi far lo sabia
Qes 4 semblan qe degues
[mais valer
Per qieu i voil demonstrar
[mon saber.
II. Amors mauci tan ses emen
[apreza
Greus mes lafanz el trebails
[on ma mes
Tôt na perdut déportai- e
[gaieza
E sanc nai ioi era non sai qe
[ses
5 Per mi donz suspir noit e
[dia
Mi donz cai dig con lapel
[mia
Dir lo puesc eu caitan nai
[em poder
Mas ill nô vol nim degna re-
[tener.
III. La gran beutat de lieis e la"
[drecheza
Non es nuls hom que truep
[lauzar pogues
Ieu qe pro 5 silles bell e
[cortesa
Anz mueir per leis e noil
[en pren merces
5 Per qel faz ieu ia trobaria
Autra domna qe mamaria
Mas er sai eu qel reprocher °
[diz ver
1 /. : Li — 2 l. : marnes
* c. en : reproches
3 L : Antai. — * /. : Q.a — 5 proiai —
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
Tostemps vol hom zo qe
[nom ' pot auer.
IV. Ja non creirai qeu non la-
[gues conqurzci
Seu ualgues tan qe amar
[mi degues
Las qe farai amar lai sa
[leis peza
E suffrirai mO doua uon eu
[ges
5 Mas per merces la preiaria
Qe noil pezel 2 si noil plai-
:i i
Qe nulla ren nom pot da]
[cor mouer
Lo désirer qem destrein el
[voler.
V. Emperairis volgra fos o
[marcheza
O reina cela qe me ten près
E tôt lauer del mond e la
[richeza
Volgra eu plus qeu non sai
[dir agues
5 Qe peraitan non maueiria
Mas sa beutatzmauciemlia
Car es tan granz e tan sap
[far plazer
Son bel semblan car le laira 3
[vezer.
177
EN PEIROLS
(=B.Gr. 366, 6)
I. Camjat ai mon consirer
Camger * ai faig damia
Don ai fin ioi vertadier
Mais cauer non solia
5 E nô es de prelz sobrier
Ieu per qe mentiiia
Car so dis el reprocheir
Qui nô troba non tria
E qi pren nos fadia.
II. Entendrem fazi amor
Kn folla richaudia
En la riijessa auzor
Don mal mon grat sufïïia
5 Penas e dmns e dolor
Si qe tôt io" moiia
Gardatz sera ben folor
Qe con plus i perd'ia.
E miels mi entendia.
III. {p. 171) Per qem sui ame-
[suratz
E tieng ma dreita via
Qor qe fes ma vohintafz
Plus aut qe non deuria
5 Ben degresser castiatz
Per danz qe men venia
Qe zo es dobla foudatz
Dôme qi nos chastia
Pos conois sa folia.
IV. Lai on ai mon bon esper
Matrait amorz em lia
Don nom pueis ni auz mouer
Mon consirnuit ni dia
5 Ben pot ma dona saber
Quer eu lam ses bauzia
Qe ien contrai seu voler
M os cors non pensaria
Nil bocha nol diria.
V. Ara sai eu et enten
Qes bona côpagnia
Candos samon fînamen
Per leial drudaria
5 E chascuns tôt franchamen
Vas son par sumelia
Qe amors non vai qeren
Null autra segnioria
Mais merce tota via.
1 /. : non — * /. : pezes — 3 /. : se laisa. — * c. en: Camget
58
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
VI. E zo sai qestora ben
E fora cortesia
Qe ia hom non âmes ren
Mas zo qe lamaria
5 Preiar seschai es couê
Qe mesura i metria
Mas sapchatz qi trop sen-
[ten
Pois me sembla qe sia
Enuegz eustania1.
VII. Leu chanzoneta plazen
Vai ten ta dreita via
A lieis oniois eiouen
Renouella qec dia
5 Digas lim ca leis mi ren
Vas la cal part qe sia
Car eu non ai 2 talen
Del autra segnioria
Nis tain qeu plus en dia.
VI II. Miels me val mon bon es-
[per
Ten chanzon dreita via
A la bella on qe sia
E dil qiel faz a saber
5 Cautra no voil qe sia
De mon cors garentia.
IX. Oils vos ren e boch e cors
Ma bella douz amia
De totz bos aibs conplia.
178
EN PE1ROLS
( = B. Gr. 366, 27 )
I . Pos de mon ioi vertadier
Si fan aitan voluntier
Deuinador e parlier
Enoios elauzenjer.
5 Segon la fazenda
Couen qeu mi atenda
Qe gieinzmi a mestier
Ab qieu mi defenda
Qe neguns...3 aprenda
10 Mon celât consirer.
II. Demi donz aie de premier
Lon veia '* el dezirer
& ab grâ esfortz sobrer
Mi ten qe ren mais noi qier
5 Mas conque menprenda
Mos cors me diz qatenda
E sofra e sofrier
Ver qeu crei qesmenda
Men faz amors em renda
10 Qalqe plazer leuger.
III. [p. 172) Tal vetz es nom
[puesc suffrir
Cab mi mezeus nô azir
E voill men aitan partir
Qen altre domnei me vir
5 Ver zo si remucîa
Malautes. qar miels cuida
En altra part guérir
Mas ren no maiuda
Anz fas loita perduda
10 Cades torn sai morir.
IV. Ai can douzamen dezir.
Si pogues esdeuenir
Qamors menfezes iauzir
Aissi com lam fe chauzir
5 Trop lai atêduda
Mas la flam escôduda 5
Es grieus a esmortir
Tôt es remazuda
Lesperanz e vencuda
10 Qem soli esbaudir.
V. Pero ades mi soue
Camors deu atrair a se
Franc corag a bona fe
Miels cab nulla autra re
1 1. : e uilania — 2 1. : ai ges. — * l. : non — * c. en: Lenveia
ascenduda
s L :
LE CHANSONNIER DE
5 E cil on seslanssa1
Tota ma desiranza
Pos mon cor sap e ve
Nom torn e viltanza
Caitan col rei de franza
10 Soi eu ries damar ben.
VI. E pois autre pron nom te
Preiarai lanquar de me
Cauzit ai retrair anc se
Qe las si ve qis recre
5 E sai ses doptàza
Qe ades esperanza
Qant hom troba meice
Dobla lalegiâza
El ioi el benananza
10 A cel cui esdeue.
Vil. Dalfi senz doptanza
Joi e pretz vos enanza
Miels camors nô fai me.
179
EN PEIROLS
{= B. Gr. 70, i5)
I . Tuit cil qem pregon qieu
[chan
Volgran saubesson lo uer
Sieu vai2 aize ni lezer
Chantes qi chantar volria
5 Qeu nô sai ni chan ni via
Pos perdei ma beneanza3
Per ma mala destinanza.
II. Ailas con muer de talan
Qeu nom dorm mati ni ser
Anz la nueg can vau iazer
Lo rossigniols chante cria
5 Et ieu qi chantar solia
Muer denvei e de pezanza
Can aug ioi ni alegranza.
BERNART AMOROS C9
III Ainors bous iet* a mon dan
Cautre pro noi puesc auer
Ja mais baizar ni temer
Nous qier cadoncs vos per-
[dria
5 Ren es fols qin vos se fia
Cab vostra bella semblanza
Maues tragses desfinanza5.
IV. Damors vos puesc ieu 6 dir
[aitan
Qi ben la pogues auer
Res non la pogra valer
Certas moût fon bon amia
5 Mas nom duret mas un dia
Per qels fols qi ses fer-
[manza
Met en amor sesperanza.
V. [p. 173) Lemozi adeucoman
Leis qi nom vol retener
Oimais pot il ben saber
Qe vers es so qeil dizia
5 Qen terr estragna niria
Pos dieus ni fez ni fianza
No mi val ni acordanza.
180
EN PEIROLS
(=z B. Gr. 366, 9)
1 . Coi a qem fezes doler
Amors nim dones esmai
Eiram ten iausent e gai
Per qeu chant de mon pla-
cer
5 Car ai plus rie ioi conquis
Cami nous taignia
Per qe mos chanz sumelia
Cumelitatz menreqis.
1 c. en: seslaussa. — 2 c. en : nai — 3 /. : beneanza
desfianza — 6 /. rjpuesc.
4 prec — 5 l. :
60
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
II . Mi donz merci e grazis
Del benananza qeu ai
Ni ia nô loblidarai
Los plazers qem fes nim dis
5 Qen mi non a mais poder
Sill qamar solia
Qem plus franca segnioria
Voil ses enian remaner.
III. Darenan mer a tener
Al reprocher com retrai
Nos moua qi ben estai
Non farai ia eu per ver
5 Que'd flama camors noiris
Mart la nueg el dia
Ver qeu remain tota via
Con fai laurs el fuec plus
[fis.
IV. Molt magrad e mabeillis
De dos amies cant seschai
Qe samon dun cor verai
E luns laltre non trais
5 E sabon luec e lezer
Gardar tota via
Que lurbona compagnia
Non puesc enoios saber.
V. Souen lanera uezer
La plus auinen qeu sai
SU deuinamen qon fai
Nom avengues a temer
5 Pe?'o mos cors es aclis
Vas leis on qe sia
Qe fin amors ioing e lia
Cor part1 loindan pais.
VI. Ser outra la cros del ris
Don nuls hom non torna sai
Nô crezatz qem pogues lais
Retener nuls paradis
5 Tant ai mo voler assitz
0 ma douza amia
Que senes leis nô poiria
Nul autre ioi retener.
Vil. Chanzos oimais potz rener2
Vas mi donz ta uia
Queu sai be quela. volria
Te auzir e mi vezer.
VIII. Dalfi sauzes mon voler
Dir a ren qe sia
Tant am vostra compagnia
Qe vos en saupras lo ver.
181
EN PEIROLS
(= B. Gr. 366, 34)
I. (p. 174) Tuit mei dezir son
[damor e de chan
En aqwetz dos mestiers gais
[e cortes
Ai mon engien e mon coratge
[mes
E pois amors ab douz pla-
[zers menanza
5 Bë deu esser mos chanz fis
[e valenz
Qar tant ma faitz ma dona
[ries couenz
Per qa totz iornz viu en
[bona esperanza.
II. Maltraitz damorno sera3 tan
[granz
Qautre dos mais noi estec
[cals qe bes
Qwestiers nô crei qom suffrir
[ la ' pogues
E qan seschai com na gran
[benananza
5 Ja tan non er segura ni
[plazens
Cades noi trop, angoissos
[pensamenz
' l. : part de — * c. en : tener. — 3 /. : s.
mais
*L: lo
LE CHANSONNIER DE HERNAHT AMOHOS
61
Q*<estreignion lo ioi e lale-
[granza.
III. Qant ieu premier la vi mi
[plat ' aitan
Qe de mon cor retener uon
[poic ges
Totz fo a leis. & enqera
[si 68
Mout i trobet amoroza coin-
danza
5 E grâ solatz e fin enseigna-
[menz
Mas si tôt sui de samistat
[iauzenz
Qar mes trop loing nai dolor
[e pezanza.
IV. Pero ben sai can se son dui
[aman
Fort adirat e lur es gran
[mal près
Pois los plaideia.franchesa
[e merces
Molt lor es douza e bona
[lacordanza
5 Cadoncs lur nais nouels
[esiauzimenz
Mas ieu no veil qec iorn
[adiramenz
Mo ioi segur torn en aital
[balanza.
V. Envers mi donz ai tos temps
rbon talan
L
E lamarai oui qe plassa nil
[pes
Caissonon pot vedar neguna
[res
Qe can recortsos digtz e sa
fsemblanza
5 Con ilh es belle coinde aui-
[nenz
Tostemps serai en samor
[atendenz
Car ieu nô ai en au tic ioi
| fizanza.
182
EN PEIROLS
(= U. Gi\ 366, 33)
1. Tôt mon engien e mon
[saber
Ai mes en un ioi qem soste
Quan mi remembra nimsoue
Tam bona domnam fai chan-
[tar
5 Adoncs mi deuri esforsar
Con pogues far mon chant
[valer
Si ben trac greu martire
Damor cui sui seruire.
II. Amors ma si en son poder
Qel ma fait comensar. tal
[ren
Qieu non puesc a mal ni a
[ben
Trair a cap plus cal cel
îuûtar
5 Per la genzer com pot tro-
[bar
Gardatz sim deuri eschazer
Qieu lam tant e dezire
Caillors mû cor nô vire.
III. [p, 175) Ieu lam maiz qe
[non faz parer
En parli mais qe nos coue
E voil qem aucizatz de se
Si iamais men auzetz parlar
5 Ni a dreig semblan deuinar
Tan sai cubertamen tener
1 /. : plac.
0 2
LE CHANSONNIER DE
E celar mon albire
Ab solatz e ab rire.
IV. La nueg qaut ieu mi vauc
[iazer
El iorn maintas vez esdeue
Consir com li clames merce
Qant ieu poiria ab leis parlar
5 Adoncs mo sai ieu ben pen-
[sar
E bos motz chauzir e vezer
E ma razon assire
E lai nô sai qe dire.
V Lo repprocheirs non diz ges
[ver
Qe cors oblida cueils nô ve
Anz a ben faillit endreit me
Qeu nom la puesc entrob-
[lidar
5 La bella cui non auz preiar
Tan tem faillir al sieu voler
Ver qieu plaing e sospire
Ai amors nom aucire.
VI. Ai las qeu cudaua auer
Calqe pron en ma bona fe
On plus sui desperatz ' cre
Qe merces mi puesc aiudar
5 Era nô sai aconseillar
Mas atendrai lo sieu plazer
Grieu er damor iauzire
Si non es francs suffrire.
VII. El vers na ten2 a dire
Ses qi bel sapcha dire.
183
EN PEIROLS
{— B. Gr. 366,21)
I. Moût mentremis de chantar
[voluntiers
BERNART AMOROS
E dalegranse de ioi man-
[tener
Domenz qeu fui damor. en
[benesper
Eras. noi vei nom 3 pron ni
[noi enten
5 Ni de midons mais socors
[non aten
Tais desconortz e tais esmais
[me ve
Qe per un pauc de tôt ioi
[nom recre.
II. Gran mal mi fes lacoinda-
[menz primera
Eil bel semblan qe ies non
[eran ver
Cane pueis non puec mon
[coratge mouer
Tuit mei dezir son en lei
[solamen
5 Ni de ren als granz enueia
[nom pren
E pos noil platz. qe nai autra
[merce
A suffrir mer. lo trebail qe
[mer. ve.
III. Ja non partrai de leis mos
[cossirers
Permalqem fassa1 noil pues
[mal voler
Car tan la fai senz e beutatz
[valer
Segon lafan folei sauiamen
5 Va fol cai dig anz folei fola-
[men
Cane nerceus 5 qan vi lombra
[de se
Si bes mori no fo plus fol
[deman 6.
i /. : desesperatz — 2 c. en : ren. — » /. : mon - • l. : f. eu — 8 l. : nar-
cissus — * l. : de me
LE CHANSONNIER DE BERNANT AMOROS
63
IV. Qatressim muer entre loncs
[de/.irers
Qem fan souen sospirar e
[doler
Per leis qe ma gitat a non
[chaler
Loing desperans e de re-
[fraingnemen
5 Qesquiuat ma soin priuat
pai'lamen
& eu am la tant a la mia
[fe
Cant vei mon dan ies mi
[mezeis non cre.
V. {p. 176) Ben fai cals ver1
[totz mos cosseils derriers
Pos del partir nô ai gen ni
[saber
Senz sos pensais farai lo
mieu plazer
Amarai leis midonz per tal
[couen
5 Qel cor aurai lamoros pen-
[samen
E la bocha terai ades el fre
Qe als per ren no lin dirai
[mais re.
VI. E estarai cornai pcneden-
[siers
Qe ren non qierde zo qevol
[auer
Ai com tarza qieu nom la
[vau vezer
Irai lai doncs morir mon
[escien
5 Hoc caital mort amarai ieu
[souen
Qestraignamen a gran plazer
[qi ve
So cama fort ia non ai autra
[be.
VII. Lo uers tramet mi donz per
[tal couen
Qa tôt lo meinz Bautreproz
[no men ve
Cant lauzira li membrara
[de me.
184
EN PEIROLS
(= li. Or. 366, 16)
I. Eu non lauzarei ia mon
[chan
Mais sius agrada ni bons es
Lamors qi ma el seu coman
En sapchas grat cami non
[ies
5 Car amors me guida e me-
[nanza
Si bem da trebail mi 2 pezanza
Eu viu iauzenz. can mor
[aman.
II. Ja drutz non conosca son
[clan
Sesser vol sauisni cortes
Ni fassa parer ni tWan
[Qe ren] contra son dan. li
[pes
5 Car cel enqiersa malananza
Qe per orguoil cuida ven-
[janza
Père aqi on hom nol blan.
III. Mi donz per sa francheza
[gran
Plas qel receup me nome-
[nes J
Em fes em donet em dis
[tant
Qieu non cuiei com mi val-
[gues
1 c. en : sai c. ner. — 2 /. : ni — 3 l. : mon omenes
i.-J
LE CHANSONNIER DE DERNARÎ AMOROS
5 Mais er ai paor e doptanza
Qe per noncur o per mu-
[tanza
Nom oblit em torn en soan.
IV. Molt fui aut vas qe vai bais-
[san
E puesc dir qenaissi mes
[près
Com celui qi vai ioi som-
[gniat1
E qan ressida non es res
5 On trouarai iamais fîanza
Ni neguna bella semblanza
Pos qeu* aqesta trop enian.
V. Truep die non puesc als qe
[mort mau
Atendrê bellas merces
Que farai donc deserenan
Partirai men hoc sieu po-
[gues
5 Mas mentre mestaucemba-
[lanza
Si men luegna desesperanza
Sin 3 amors mapropeh atre-
[tan.
i l. : somgnia?i? — * c. en : qen — 3 c. en: Fin.
E. Stengel.
{A suivre.)
I DODICI CANTI
épopée romanesque nu x.viB siècle
CANTO UNDECIMO
{Suite)
[F0 130v°'98. Deh, vedi, Christo, corne la tua chiesa
E data in preda delli rei Tithani
Et corao dalla gente Collonesa
Pria, et poi dalli maligni Lutherani
Fu divorata, et malamente offesa
Da traditori Ausoni et da marani
Celtiberi et crudei Thedeschi insieme,
Ch' ognum quanto più puô la stratia et prieme !
99. Da quei, che falsamente del tuo nome,
Signor, gioiscon, la Barca di Pietro
Si cerca di somerger con le sorae
Del loro vitio et lor peccato tetro,
Et hanno le sue forze tanto dôme,
Che quasi perso haveva il degno scetro,
Ma venne Paulo poi ch' in picciol brando
Ne fe vendetta, o fatto memorando !
100. Ma corne potrà Paulo quella fede,
Signor, di Pietro conservar illesa,
S'alli nemici di tua santa fede
Chi solea diffender la tua chiesa
Èssi appoggiato ? et, se si è fatto herede
Délia setta de Lutero suspesa,
Chi tenuto è di prender l'armi in mano
Per conservarla da Turco et pagano?
66 I DODICI CANTI
101 . Hai tu, signor del ciel, gli ochi si chiusi
Che non vogli veder tutti i progressi
Che fauuo quei, che la tua chiesa ha esclusi
Da se per li soi tanti et gravi escessi?
Deh, chi fia che del non poter ti scusi,
Signor, purgare questi error successi?
Purgali, signor mio, quai l'or si suole
Purgar, tu, che sei di giustitia il sole !
102. Presta tanto favor al tuo vicario
Et fal da morte al mon tanto invincibile
Ch' a ciaschedun, ch' a tuo nome è contrario,
Sia come Giosuè forte et terribile ;
Ma non, che '1 sol faccia il suo corso varie,
Chieggio, signor, quai vedi, et sei invisibile,
Ogni secreto che nel cor dilatasi,
Perché da l'ochio tuo vivace guatasi.
[F0 131 r°] 103. Di cio più. Volcano accende il fuoeo
Et, su l'incudin l'infocato ferro
Stendendo, lustra tutto il scuroluoeo.
Un dei compagni, chiamato Zifferro,
La mazza batte et cosi a poco a poco
Fal'armi tutte, et l'altro, Brugiaferro
Nomato, scolpe l'albero et il nome
Che Guerino a chi legge aperto prome.
104. Fatto l'usbergo et tutta la corazza
Con l'albero di Giove dinanzi et dietro,
Fa il fabro zoppo una ben grave mazza
Da far ogni lorica un fragil vetro,
Non atta a ogniun se non di forte razza,
Degno d'impero o almen di régal scetro ;
Poi fece il fabro si minuta maglia
Ch' a' riguardanti lo vedere abaglia ;
105. Li braccial, i schineri, il gorzerino
Coi spalaccie icosciai, poi duo'spron d'oro,
Uno elmo perfecttissimo accialino
Ch'intorno havea le ghiande d'oro ;
Per tutto è scritto il nome di Guerrino.
Et per cimier vi è una quercetta d'oro;
Di accia' il scudo a ghiande lavorato
Et d'una bella quercia in mezzo ornato.
CANTU UNDECIMO 67
106. Un brando fece « 1 ï chi la lama era
Délie più belle ch' ochiohuman vedeasOj
(Et tutti' fur temprate in l'acqua nera
Di Stige, che fortezza tal le imprease
Che ogni altre arme parean di pura cera
Apresso a queste, che la maga ellesse,
Anzi far fece per il suo Guerrino)
Et riccamente ornato di oro fino.
107. Scritto havea nella lama il braodo altiero :
« Pygra son di Guerin sempre veloce. »
Ht vera [mente] fn si nmaro et féru
Che fu chiamato poi la Pygra atroce.
Pygra amara vuol dir, se punto il vero
Mostra il Greco al Latino in piana voce,
Ht fu si atroce il brando et fu si amaro
Ch' a chi l'hebbe contra goslô caro.
rF°131 v°] 108. Non contenta di rpiesto ancor la saga,
Perché non sempre un huon si truova armato,
Essendo délia lia sorte presaga
Che devea haver Guerrin privo del stato,
Vollelo inoffensibil con la maga
Arte sua far; a ciô da nullo lato
Habia a patir da pictra, ferro o fuoco
0 legno, lo ridasse al cavo luoco.
109. Et, denudatol, tutto in l'acqua dove
Furno temprate l'armi lo somerge
Fuora che il piè, ch' in man tiene ella, et, Giove
Invocando, il fanciul fuor de 1' acqua erge,
Dicendo : « O Dio del ciel, se pietà muove
La tua immensa bontà, poichè si asperge
Con l'acqua Stigia ai Dei per sempre sacra,
Fa che a Guerin sia dolce e agli al tri acra ! »
110. Poi diceva più cose in su la conca
Ove era l'acqua Stigia, scongiurando
1 spiiti délia Tartarea spelonca,
Pregando et astringendo et comandando
Che non havesse con lafalce adonca
Morte podestà o per lancia o per brando,
Nel suo Gerrino, o per legno o per pietra,
Né Giove con li strai di sua pharetra.
68 I EODICI CANTI
111. Et sette volte nel predetto modo
Tuffo il fanciullo nelle incantate acque,
Quai poi divenne cosi duro et sodo
Quai alla maga divenisse piacque;
Ne in legno mai fu tanto fisso chiodo
Quanto Guerino in lei, ne di lei nacque
Figliuol che tanto amasse ella giamai
Quanto lui, che di se l'ama più assai.
112. Pur per veder se impenetrabil riede
Ella Guerin, poichè l'ha bene asciutto.
Cou un coltello lievemente il fiede
In questo et in quel luogo, et pruoval tutto
Con pietra et fuoco similmente, et vede
Che quai statua di marmo si è ridutto,
Di che ringratia il padre di Volcano
Che col figliuolo le sia stato humano.
[F0 132 r°] 113. Doppoi voile esperir l'armi incantate
Et su la incudin dà col brando ignudo
Quai regge aile gran botte dispietate;
Et con la grieve mazza pruova il scudo,
Onde ne trahe faville si infiammate
Che lustra l'antro oscur col colpo crudo.
Dal'elmo et da l'altre armi ancor trahe fuoco
Tal che fa chiar di lume il scuro luoco.
114. Quando ha de l'armi vista la bontade,
La gentil maga i spiriti licentia,
Conpatto pur che con celleritade
Ritornin richiamati a sua presentia,
Et li ringratia con humanitade
Lodando i fabri di loro eccellentia.
Si parton quei,lassando l'opra vaga
Alla pietosa, degna et gentil maga.
115. Dentro a un forzier le serba et tan ta cura
N'ha quanto haver si debbe a gran thesoro,
Et ben le cela nella tomba scura,
Più che se fusser gemme, argento et oro,
E il fanciullin nudiir doppoi procura
Con somma diligentia e animo soro ;
Ma Naparro et Madar privi del stato
Pensano ogni hora far qualche trattato.
CANTO UNDECIMO 09
116. Qualche trittato pcnsano i germani
Per ilis.vt'i'i.ii- Mi Ion délia duchea,
El l'an certi secreii capitani
Che vadino a far genti in la Morea.
Il ivea Milone fatto far christiani
Tutti quellich1 baver possuto havea;
Chi per L'ainor di Dio, chi per paura
Presa havean del battesmo la figura.
1 17. Fra gli al tri batezzosi un Finnadusto
Non per amor[di] Dio, non per timoré,
Non perche fusse pià degli altri giusto,
Ma per posser più usar del traditore
Che non havea di nostra fede il gusto
Ne dal bon spirto confirma to il core.
Costui segretamente Btimulava
Naparro et alla guerra il [eccitava].
[F" 132 v°; 1 18. Fa far giostre Milon dentro Durazzo
Per l'alegrezza del nato fanciullo.
Pei balli et suon va sozopre il palazzo,
Si prende ciaschedun grato trastullo,
Fassi in corte di vino un amplo sguazzo ;
Délie confetioni è il numer nullo,
Anzi infinito, et cosi in tutti i luoghi
Délia cita si fanno feste et giuoghi.
119. Havea Milon per un mese ordinato
Tal feste et giuochi, et ei corte bandita
Teneva a ciaschedun guerrier pregiato ;
E i terrazzani e i forastieri invita
Liberamente di quai voglia stato,
Che la cita le par dar di gioia unit a.
Dimostra Finadusto esser più lieto
D'altrui, tenendo il mal pensier segreto.
120. A costui j>ar ch'[h]or sia congruo il tempo
Di dar priacipio al discacciar Milone.
Perô avisar Napar non perde ei tempo
Et con lettere manda un suo gaizone,
A piè, senza armi, a quel ch'aspetta il tempo.
Corne faceste voi con quel leoif'.
Con quel leone a chi lassaste el stato,
Et poi a tornarvi il tempo vi fe lato.
7 0 I DO ni CI CANTI
121 . Quando fu il tempo di tornar, tornaste,
Signor, et, se non foste a Fabriano
Stato tradito da quei che menaste
Infidi, che v' usor si del marano,
Non bisognava che voi consumaste
Più tempo nel paese Marchiano,
Che mai non fora stata in la memoria
Humana la più degna et gran vettoria.
122. Non si vantô Léon, non Lorenzino,
Sir, al dassezzo poi di loro tempre,
Ne possedette la duchea d'Urbino
Come in l'animo suo posséder sempre
Si crese, che '1 valor vostro divino
Arditamente dimostraste, e, mentre
Stesti in campagna, deste da pensar[e]
Ai popul tutti da l'un l'altro mare.
[F0 133 r°] 123. Hor Finadusto avisa in la cittade
Posser entrar ben venti cavallieri,
Di quai si voglia lontane contrade
0 di propinque, a dimostrar gli altieri
Animi invitti et lor alta bontade
Ne l'armiggiar, el cor gagliardi et feri,
Et che egli venghi et che egli meni seco
Qualche guerrier perfetto o Turco o Greco.
124. Naparro il Turco sta gioioso et lieto
Dentro Dolcigno che '1 fratel possiede,
Cui dimostra la lettra e âpre il segreto,
E loda Finadusto di sua fede ;
Rimanda il messo coi bei duon quieto,
Et scrive a Finadusto et lo richiede
Che non li manchi mai, che verra presto
O a rihaver la patria o a far del resto.
125. Poi se ne va a truovar Astiladoro
Subito in poste, e il tutto aprendo scuopre,
Et senza far colegio o coneistoro
Lodalo ad eseguir tutte queste opre,
Offerendole genti, argento et oro,
Per mandar i christiani indi sozopre ;
Et detteli un figliol per capitano
Et per compagno chiamato Ottomano.
CANTO UNHECIMO 7 1
126. Era valente cavallier costui
In arme et in consiglio et molto altiero.
Acompagnato che si fu con lui,
Naparro diventù più forte et fero,
Eterano valentianco amendai,
Che disprezzano ogni altro cavalliero.
Pur tolgono iliciotto in eompagnia
Ch' havean grau nome in la cavalleria.
127. Et quai dui servi tor, quai tre ne piglia,
Homin perô ne l'armi signalati
Corne se fusser tutti una famiglia.
I cavallier sopra gli arcioni armati
Ne van verso Durazzo a lenta briglia,
Et son settanta tutti anoverati ;
Ma, signor mio, di lor tutto il soccesso
Ne l'altro cantar mio vi sarà espresso.
Ferdinand Castets.
(A suivre.)
IV
DOCUMENTS SUR LES RELATIONS
DE
L'EMPEREUR MAX1MILIEN ET DE LUDOVIC SFORZA.
en l'année 1499
(Suite)
11
Marchesino Stanga au duc de Milan
(Inspruch, 3 mai 1499)
Illmoet exmosignoremio obsermo, heiï arrivai in questoloco scontiato
fora de la terra dal R. do preposito de Brixina et M. Gualtero Stradion,
quale de ordine de questi signori regenti e consilieri me venerono in-
contra et accompagnorno fin allô allogiamentomio. Questa mattinaho
visitato li predicti Regenti in nome de la E. V. e declaratoli quanto
haveva in commissione. De la quale visitatione cum parole molto ac-
commodate et amorevole hano ringratiato laE. V., dimonstrando reco-
gnoscere bene non solo la observantia sua verso la Maestà Cesarea,
ma le opère et effecti quale reusciscono da epsa ad beneficio de la
predicta Maestà.
El vescovo de Brixina non si tiova qua, ma e ad Brixinono ; per il
quale loco essendo io passato nel venire mio qua, et havendo inteso
chel se ritrovava li alquanto indisposto, andai ad visitarlo in nome de
la E. V. ; e li usai tutte quelle amorevole parole che judicai ad propo-
sito per certificarlo bene de la dispositione sincera de la Ex. Vra
verso la Maestà Cesarea e dell' affectioneche particularmente epsa ha
alla persona de sua Signoiïa. Non poteria explicare cum quanta tene-
reza el me ricolse, e quanto se dimonstri servitore alla Ex. Vra. Le
parole sue furono ultimamente che la Cesarea Maestà unicamente
amava la E. Vra., e sipeva che poche persone erano amate più da S.
Maestà de quello che epsa era.
Ioera per scrivere qualche cosaa la E. V., de quello che in questo
loco haveva inteso de la Cesarea Maestà e de le occurentie de questa
MAX1MIL1EN ET LUDOVIC SFORZA 7 3
guerra, ma essendo arrivato uno cavallaro expedito da Augustino
quale vene a laE. V., et havendo aperto le Iettere et inteso più chiara-
mente li avisi di quelle cose, me ne remette» ad quello che lui scrive ;
sapendo che ritrovandosi lui in facto, el scrivere suo è più fundato
sopra el vero che non poteriano esser li avisi miei, quali non sono
nisi de auditu. Questo non omettero già che non è toccato da Augus-
tino, como, etc '
12
Ludovic Sforza à Giovanni Colla
ambassadeur Milanais en Allemagne2
(Milan, 5 mai 1491)
Zoanne, dal cavallaro quale arrivé hei'i matina, havemo recevute
le tue de' 24 e 26, et inteso quanto ne scrivi, restamo molto satisfato
del officio per te usato Con medesmo studio continuarai per havere
bona e vera noticia de quanto occorrera alla giornata et tenercene
avisati particularmente. E perche volendone tu avvisare di cossa
alcuna sécréta mente el possi fare, te mandamo uno scontro de zifra
como hai domandato, del recevuto del quale ne darai aviso; accio sel
ne occorrera ancoranoi volerti scrivere cossa coperta.el possiamo fare;
le poste non ce pare di mettere perche non vorriamo dare suspec-
tione a questi Alamani de qua et mettere a periculo che le Iettere pas-
sando per Monbraia fossero intercepte.
A quellirevdi emagci regenti, perla risposta quale te hano facto, dirai
che non se punto de la observantia et amore quai se per-
suadeno portamo allô Ser. mo Re nostro, quale è tanto che non porria
essere maiore ne più cordiale, e che intese le due peticione ne fano,
alla prima dicemo che havendo noi mandato nostrinuncii a Coyra et a'
Suiceri, con la commissione che hano inteso, con significa tione del desi-
derio nostro che le cosse se agenisseno, et offerirli, se li parevausare,
Topera nostra, non sapessimo che consilio dare aile loro Signorie se non
che, essendo epse prudentissimeet havendo avisato dil tutto la Maestà
Cesarea da la quale rasonevolmente deveno hora havere resposta se
1 Milan A. d.S. Potenze Estere. Germnnia. Copie. «Exemplum littera-
rum D. Marchesini Stange ad illustrissimum. D. ducem Mediolani. — La
suite de cette lettre est imprimée par Motta, Battaglia di Calven e Mais,
doc. IX.
i Milan Ibid. Minute originale. Peut-être inachevée: le texte remplit
exactement quatre pages et finit au bout de la quatrième.
7 4 MAX1MILIEN ET LUDOVIC SFORZA
remettemo a loro, e se melio sapcssimo che dirli el fariamo como sel
fosse nostro intéresse pavticulare.
Quanto alli 20m.fiorini de Reno,qualine domandano in prestito, li
dirai che voluntera vorriamo trovarce in ter mi ni de posserli in tutto
satisfare e che se ben siamo in le guerre e spese gravissime che sai, co-
mo ne scrive haverli declarato et le dirai de novo, nondimeno è taie la
observantianostra verso la Cesarea Maestà, (conla fortuna de laquale
è sempre stato et è in noi proposito firmissimo de haverli accompa-
gnata lanostra),che se bennonpossemo havere tutto quello vorriamo
e se sforzemo fare più che possiamo e siamo contenti prestarli per
adesso 12 m. fiorini de Reno, a termino fin a Natale, quando le cosse
non siino assetate et se continui la guerra : ma li pregarai voglino
tenere in se la cossa secretissima, et essere contenti per satisfactione
nostra giurare di non lassarla intendere ad alcuno altro se non alla
Maestà Cesarea sola, per evitare el periculo e maie quale se ne porria
hora seguire, quando Grisani e Suiceri lo intendessino; trovandone noi
haverli confinanti al stato nostro in tanti loci quanti tu sai, con faci-
lita de voltarse a nostri damni; e per questo, acio che in lo dare questi
dinari non se scoprisse la cossa, voglino vedere sel fusse quando a
Milano qualche mercadante o altro per mezo del quale se li possino
fare havere secretamente questi denari,quali noili daremo, o che altro
modo li pare servare acio non se possi intendere. Advertendo le
Sigoorie sue che per la restitutione ne siino mandate obligatione in
nome de la Cesarea Maestà e di quello consilio de Hispruc, como ce
hai scriptoesserte da loro offerto, et ce ne li ricercarai a fare; dicen-
doli appresso che vorriamo et cossi pregamo le Signorie loro ad
poner quando occorresse che questi Alamani intendessino l'aiuto nostro
contra loro e per questo ne movesseno guerra, epse sarano in nostro
aiuto: subjungendoli tu che quando N. S. Dio ce facia gratia che le
cosse de qua se acquetiuo e succéda lo accordo de le cosse de Pisa,
per lo quale lo ill.mo sre duca de Ferrare va de présente a Venetia et
insieme oratori fiorentiniet uno nostro, anche noi usaremo ogni studio
acio reusc....se quelli movimenti contra la Maestà Cesarea.
13
L'impératrice Bianca Maria à Ludovic Sforza '
(Fribourg, 4 mai 1499)
Bianca Maria, etc. Ill.me princeps patrue, etc. Per haver nui usato
moite volte del opéra del honorevolc prête Zoanne de Tonsis, prepo-
' Milan. Ihid. Original.
MAXIMILIEN ET LUDOVIC SFORZA
. .>
sito de Gallerate, in Bollicitare a Roma expéditions nostro spéciale et
anche de nos tri familiari, e quel la trovata promptae fidèle, meritàmente
loamiamo e siamo inclinatead favorirloin ogni suo honesto dcsiderio.
Per tanto, intendendo como lui desidera baver licentia de la Sig. V«
di posser usar in Milano de le expectative per osso impetrate.ce parso
ricomandarlo a quella;e cossi la exhortiamo et pregamo che, a com-
placentia nostra,gli ae voglia corapiacere; persuadendosi che, per essor
dicto preposito persona ben mérita de nui, concedendoli la Sa V. questa
spécial gratia, ne fara cosa molto grata.
Ex Friburgo, îv maii 1409.
Ge. Gadius.
14
Le duc de Milan à Maximilien '
(G mai 1499)
Questus est graviter apud me Eneas de Gerenzano, filius Nicholai,
civis et mercator noster mediolanensis, ablatam fuisse superioribus
mensibus ex locis Francie per Nicholaum Stand, nuncupatum Felicem
de Nerimbergo, subditum sacri imperii, certam pecuniarumquantitatem
ipsius mercatoris mei, et ab eo nunquam pecunias ipsas consequi po-
tuisse; et prwterea supplicavit mihi ut eum Cesaree M.ti V.re pro oa-
rum assecutione comendem ; itaque cum mihi obscurum non sit quod
displicent M.ti V.re quae indebite fiunt, hune mercatorern meum et
quantum enixius possim comendamus, rogamusque eam ut ei, juslicie
causa et mee intercessionis respectu, imperare dignetur ut comporta
veritate crediti hujus mercatoris mei contra ipsum Nicholaum de No-
rimbergo, ipse cogatur ad eam restitutionem seu satisfactionem quee
justaet conveniens fuerit, una cum legitimis impensis, sicuti Majesta.
tem Vestram facturam plane confidamus.
15
Ludovic Sforza à sa nièce Bianca Maria*
(Milan, 9 mai 1499)
Sono avisato che la M. V. hascripto al R.mo et ill.mo s.re vicecan-
cellaro mio fratello et ad altri, in favore de uno per la coadiutoria in
! Milan. Ibid. Minute originale « Sermo régi Romanorum ».
: Milan. Ibid. ; minutes originales. * Régine Romanorum. »
7 6 MAX1M1LIEN ET LUDOVIC SFORZA
lo vescovato de Gurza, la quale è stata promissa al exe. M. Petro da
Triesta, ad instantia del ser.mo signore Renostro,se bendopoi el cardi-
nale Gurcense, quale sponte haveva domandato coadiutore, se sii mu-
tato ; delche la Cesarea Maestà non è mancato de opéra alcunaper fare
fare laexpeditione in M. Petro, e non volendosi inclinare el cardinale,
epso ha facto tore in se lifructi deldicto vescovato et lifadareaM. Pe-
tro. Credo se la M. V. havessehavuto noticia di questo inche è firmata
la volunta de la Cesarea Maestà, non haveria scripto contra M. Petro, si
per conformarse ad epsa, si per esser M. Petro bon servitore et affec-
tionato a V. Maestà, et anche per respecto mio.sapendo quanto l'amo
e quanto li sono debitore. Et pero, ultra quello chel ser.mo signor suo
consorte ha più volte scripto a Roma per M. Petro, corne ho facto
ancora io et opéra de continuo per fare reuscire questo effeeto,
prego la Maestà Vestra che vogli scrivere al p.to signor vicecancelaro
et alli altri a chi havesse scripto per alcuno circa dicta coadjutoria,chel
ha facto non intendendo quello chel ser.mo suo consorte ha scripto
per M. Petro, e che non volendo lei se non quello piace a sua Cesarea
Maestà anzi desiderando con epsa che M. Petro la habia per lamor
li porta, pregi se vogli fare omne opéra acio non se differischi più la
expeditione di epsa coadjutoria, et in questo la Maestà V. fara etiam
a me singulare piacere.
(Milan, 12 mai 1499)
Non è stato fora delà expoctatione nostrache la Maestà Vra se sia
recordatade nui,giuncta che lafu al ser.mo signor suo consorte e mio
signore, e che lhabia facto quello bono officio quale me sciive, per-
che l'amore quale sempre li ho portato me fa certo de dovere expec-
tare da lei bona correspondentia e pero resto consolato de tuto
quello che la mi ha scripto, certificandomi del bon animo de la Cesarea
Maestà verso mi, alla quale io ancora sono per esser sempre obse-
quentissimo. Ringratio la Maestà Vra del bono officio suo e pregola
quando li accade la opportunita ad continuarlo, perche la sene trovera
sempre ben contenta [e se di qua li e cosa che la desidera non mi
po fare magiore piacere corne di rieercarme, perche me sera sempre
grato fare cosa che li piacia, e cosi expecto per la proxima caval-
cata la mi ricerca de qualche cosa] '.
i La partie entre [ ] est d'une autre main que le reste de la minute, et
d'une écriture beaucoup moins lisible.
MAXIMILIEN ET LUDOVIC SFORZA 77
16
Ludovic Sforza à. Marchesino Stanga i
(Milan, 14 mai 1499)
M. Marchesino, havendo noi mandate» el nostro in Ast per quella
differentia de Astesanicum Genoesi,quale, comosetiinformato,cercamo
de assettare per via de compositione,epso ne ha mandato H inclusi
exenipli de lettere scripte da Tedeschi a M. J.Jacomo, e ne ha scripte»
uno discorso factoli de epso cou significatione de avvisi havuti de
Franza,como si contene in la copia similmente qua inclusa. Del tutto
fareti participatione alla Cesarea M. ta, secundo havemo facto noi qui
al II. M. Petro, e li direti che, quanto al discorso de M. Jo. Jacomo,
non gli facemo gia significare, perche la veda li stimuli havemo de
accordarsi col Re, col quale non porriamo fare tanto bene che non
lo chinassimo inante, essendo lo immutabile proposito nostro de
seguiresolo la volunta de sua Cesarea Maesta, ma perche da la persua-
sione quale voria fare M. Jo. Jacomo ad dictoaccordovedesil'animosuo,
e cheseben cognoscemo el periculo inloqualese mettemocumFranza,
essendo el Re di la mala dispositione e proposito che se sa di
faine contra, et havendo dal altro canto Suiceri e Grisani indignati
verso noi, como da ogni canto siamo certificati e voi vedereti per li
avisi vi mandamo per qnesto cavalaro et in scripte» per li predicti
exempli, in liquali se cognoscera le minatie quale fin adesso ne fano
per la prohibitione li havemo facta de le victualie e per le altre cosse
facemo perla Maestà Cesarea corne non diremoessendolinoi del'affec-
tiuiie e servitù che siamo et havendo havuto questo stato da lei, siamo
anche per exponerlo ad omne periculo, non havendo rispecto alcuno
ne a minacie de Francesi ne de Todeschi ne de altiï; e lo facemo e
per l'obligo e per amore, confidandone che non manco amorevolmente
la M. ta Sua non habia in qualuncha travaglio ne occorresseabbando-
narne, ma conservare galiardamente quello ne ha dato. Ce pareria
ben e molto a proposito ece saiïa gratissimo che epsa in questa dicta
se ha fare a Uberling facesse in nome de S. M ta e de tutti electori
ne fosse scripto, demonstrando che, sapendo quanto siamo affectio-
nato e bono et obsequente principe del imperio, ne amano, et che
facendo noi quello che facemo in questi movimenti como siamo stati
ricercati li e gratissimo e ne certificano e prometteno che, da qua-
luncha travaglio ne sequesse per questo, ne in altro chi ne volesse
1 Milan. Ibid. Minute originale «D. Marchesino Stange.»
7 8 MAXIM ILIEN ET LUDOVIC SFORZA
offendere adesso o in altrî tempi, ne haverano aempre in singolare
protectione e galiardamente fara al ainto e defensione nostra, et père
ce coufortano stiamo de boni) animo: laquai lettera dirai alla Cesarea
Maestà che a noi giovara assai e crederno, intendendosi questadisposi-
tione e proposito del imperio verso uoi, chi ce ha mal animo dovera
andare più retenuto et anche in Italia ne dara reputatione; laquale
quanto sara maior, sara tanto più ;i suo proposito1.
La Cesarea Maestà ultimamente ha scripto ad M. Pietro e
factonescrivere da Augustino, como haveti veduto; e, seben estimamo
poco necessario replicare piùquesto, non dimeno, la importantia de la
cossa ne strengapur a dirlo che di novo pregamo Sua Maestà ad farne
intrare in la lega de Suevia et fare che, in qualun :ha appunctamento
se facesse con Suiceri e Grisani e cum Francesi, noi siaino inclusi e
restiamo con sicureza de non havere sentire travaglio e recto de
intrare in la liga di Suevia; el dicemo tanto più che, quando Suiceri
facesseno pensiere [difare?] questi movimenli verso di noi per vin-
dicarsi, sapiano che haveriano contra et Suevi et Imperio, e pero
fossero necessitati abstenersene.
E perche in dicti avisi e li altri havuti de Savoia.è significato quello
vederetide lo illustrissimo archiduca, noi estimamo esserestato pruden-
tissima consideratione de la Cesarea Maestà laverli lassato di la al fine
che in dicti avisi de Savoia è giudicato, non di meno ne sara grato ne
chiariati bene de la cossa como è, e sel archiduca havera mandato a
far qualche ambassata in Franza como è scripto, o pur solamente
parole générale, e si nondimeno sii et habii essere col padre quello
che deve, e tutti li di passati è stato afferma to chel saracolui.
17
Marchesino Stanga à Ludovic Sforza 2
(Lindau, 17, 21, 23, 28 mai 1499)
111. mo et ex. mo signor mio obser. mo, la causa per laquale la Cesa-
rea Maestà me ha ricerchato è stata, secundo che epsa me ha dicto,
per volere declarare et aprire alla E. V. lo intrinseco suo e demonstrar-
li che de la conservatione sua e del stato ne la quella memoria e cura
che ha del'anima de Sua Maestate e de le cose proprie, e cossi me ha
1 II y a ici cinq lignes effacées par l'humidité.
* Milan, A. d. S. Pot. Est. Germania. Dépêches originales. La première
(la plus longue) est brièvement résumée par Motta. Battaglia di Calven
e Mulz, n» 16, p. xvm.
MAXIMILIEN ET LUDOVIC SFURZA 79
significato che, havendo di continuo portato amore singolare alla E.
V.ra e continuando in questo più che raay, sapeodo di certo e vedend i
chel Redi Franza èdeliberato di oceupare el stato délia E. Vra,ha bene
considerato ed in se exarninato tutti li inezi et modi cum liquali epsa
possa redimere questa vexatione, cum assicurarsi per sempre ; et perho,
vedcndo la Maestà sua che ley è extenuata per le pressure de le
guerre passate, e per queste che de présente ha cou Suiceri, non po
per via alcunadare aiuto alla E. V.,como séria el desiderio suo, et sa-
pendo che ne per via del duca di Burgogna suo fiolo po dare contrapeso
alcuno al Re di Franza, oe dal imperio se po expectare soccorso alcuno,
(perche, se bene la Maestà sua è imperatore, non di mancho ha solum
lo tituloet la dignitàet non la obedientia), dice non vedere altroremcdio
quale sia apto ad poterla salvare, cha a fare lega e confederatione cum
la liga de Svevia : la quale essendo de la potencia che è, et havendo de
présente con questa guerra che ha con Suiceri, tutta volta che la E.
V. sia colligata seco, oltra che la ruina de Suiceri se possa tenere certa,
quando accordio havesse mai ad seguire, sera cum conditione tanto
ferme et stabile che el Re di Franza non potera mai valersi de Suiceri ;
et quando Suiceri non attendessero le conventione, seratalmente capi-
tulato cum la lega de Svevia che mettendosi Suiceri alla offensione
del stato de la E. V., la Lega li movera sempre guerra ad loro ;
extendendosi la Maestà sua supra questo molto longamente, cum dire
che non saperia se non confortare et amorevolmente ricordare alla
E. Vra ad fare questo effecto, senza el quale si como epsa posseva
tenere certa la ruina del stato suo, essendo el Re di Franza de la
potencia che è, cossi facendolo posseva assicurarsi de havere remedio
al caso suo et estimare de liberarse del Re di Franza e de' Suiceri in
uno tracto, perche Francesi senza Suiceri non erano homini da fare
impresa, et havendo Suiceri contrapeso de la qualita che è la lega de
Svevia, havevano de gratia ad rem an ère in casa et cultivare li paesi
loro, senza cerchare stipendio ne movimenti de guerra, e cossi sopra
questo la Maestà sua volse che io scrivesse quello li pareva se havesse
ad fare per venire a lo effecto de questa liga. La quai scriptura io
feci secundo lo ditato de S. M. e sera qui alligata ; e finito che io la
ebbi, epsa me disse li volesse declarare quello me ne pareva e quello
me persuadeva che la E. V. dovesse fare. Al che io respose : che
essendo questa una propositione de la quale non havendone la Ex.
Vra noticia alchuna, non me ne posseva etiam havere parlato ; non
sapeva ne posseva fare judicio de l'animo etintencione sua, per quello
mo che ad me occorreva improvisamente, diceria che la E. V. inten-
dendo la cura e studio quale metteva la Maestà sua alla conserva-
tione del stato suo, ijuesto séria collocato appresso al cumulo de le
altre infinité et immortale obligatione che la E. V. si senteva havere
SO MAXIMILIEN ET LUDOVIC SFORZA
alla Maestà sua, non dovendo esserede minore consideratione appresso
ley che la cerchasse conservarli el stato che el rispecto de havergelo
concesso. Subjungendoli che, se bene la Maestà sua diceva de non
potere dare aiuto alla E. V. alchuno, nondimeno epsa sperava, ed io
me persuadeva che tutto quello la potesse fare e cum la forze e cum la
auctorità, lo faria; et descendendo poi al particulare de le conditione di
questa lega, io disse che, se ben sapeva che la E. V. vederia volunteri
et consideraria le propositione di sua Maestà, nondimancho quanto ad
me le giudicava impossibile epericulose; impossibile perche, havendo
la E. V. Francesi aile spalle, la nécessita la stringeva ad prepararsi
senza dilatione et ad dovere provedere aile gentedarme sue ; e prove-
dere alli denari che la Maestà sua tocha in le propositione, sapeva
certo non esserli modo ne via peiiculosa; perche, essendo Suiceri de la
natura che sono e tanto vicini alla E. V., quando epsa facesse démon.
stracione de arme contra de loro, poteriano munire li loci quali sono
verso Sua Maestà per starne sicuri, e de l'altio canto mettersi alla
offensione de la Ex. V. ; laquale séria de tanto magiore momento
quanto che da una banda se trovasse havere Francesi in casa e de
l'altra Suiceri; concludendoli che, per intiare in la lega de Svevia,
sapeva che la E. V. ne séria contentissima quando la potesse intrarli
cum le condicione e qualità che li sono inclusi li altri principi ; e più
oltra li affirmava che, quando la S. M. parti cularmente volesse cosa
alchuna de la E. V., se senza essere ricerchata epsa havevasubvenuto
li soi in questi bisogni, molto mazoremente et più voluntera lo faria,
intendendo la volunta de Sua Maestà. Ad questa mia resposta, epsa
replicô che ley per lo peso de questa guerra de Suiceri, non poria aiutare
la E. V., ne de Burgogna ne dal Imperio bisognava che epsa expec-
tasse succurso alchuno; che, quello la poteria fare cum la auctorità
lo faria, si corne faria cum le forze quando potesse, ne per el particulare
suo voleva cosa alchuno ; perche se la E. V. li desse denari a ley tutta-
volta che li occorresse bisogno di essere aiutata, non possendolo fare
la Maestà sua se reputaria a grandissiino caricho havere tolto li soi
dinari e non aiutarla, e perho che ad questa lega confortava la E. V.
per bene suo e non per altro rispetto, dicendo che se Francesi li
movevano guerra, bisognava che la spendesse e stesse in periculo de
ruinare ; e se adesso spenderia bene unopocho foradel bisogno suo, ne
posseva expectare securita, et farelo quale sentiria omne dicrescere
ad magiore beneficio suo. Et havendomi la Maestate suarichiesto chel
parère mio quale lihavevadicto ad bocha lo volesse mettere in scripto,
perche lo potesse examinare, io lo fece et seraqui incluso. Et havendolo
la M. S. tenuto uno di,me mando poi a dire per el Langh che per
omne modo persiste va nel proposito suo, che la E. V. facesse quello
che epsa li ricordava e proponeva.
MAXIMILIEX ET LUDOVIC SFORZA g]
In questo rasonamento havendomi la Maestà sua resposto che quelle
poteria fare ad benrfitio de la Ex. V.ra. cum la auctorita lo faria,
mi parse ad proposito tocharli due cose; l'uua sopra el particulare
de lo Papa, e l'altra sopra la venuta de quattro ambasatori francesi
quali aspettaS. M. E quanto a le cose del Papa, li disse che epsa do
veva havere inteso le pratiche quale erano state fin qui cum Sua Sau-
tità per tirarlo al benefitio de le cose de Italia e fare lega cum Sua San-
tità, Re Federico, la E. V.et Fiorentini, e che havendo dicontinuo dal
bone parole e da l'altrocanto sollicitato el Re di Franza alla Lmpresa
de Italia, e continuando in questo più clie mai, se bene Béera fin qui
expectato de intendere la finale dispositione sua, non di mancho a' ■
era anche peusato como poterli levare el modo e la via de fare uiale,
quando se vedesse che oltra chel sia iusti-uinento de la ruina de Italia,
volessc mettersi alla executione del suo malo animo e perho che ha-
vendo la E. V. consultato insieme col Re Federico la provisione neces-
saria per assicurarsi de Sua Santità in caso che Francesi passasseno
in Italia, giudicavano et havevano rasonatosehavessino ad temptaro le
arme spirituale e temporale per levarli l'adito di far maie ; e quando
al spirituale, havendo lo Re di Spagna facto ijuello che la Maestà sua
doveva havere inteso, se la Maestà sua cum lo imperio facesse lo mede-
simo, pareva potesse cedere ad graudissimo proposito per moderare li
desordinati appetiti del Papa. Quanto al temporale, eravano in pen-
siero, como se mettesseno Francesi adpassare, de assecurarse de sua
Santitàcum la forza, e deliberando la Maestà sua mandare homo ad
Roma, se epsa mandasse homo de auctorita et armigero, quando
havesse facto la opéra spirituale e non giovasse, poteria ad nome de S.
M.e de lo imperio mettersi alla executione del temporale cum le gente
del Re Federico e de la E. V., che séria senza spesa de Sua Maestà,
e tutta la reputatione séria la sua e del imperio; cercha la venuta de
li ambasatori francesi, li disse che, essendo per li avvisi venuti ben
chiara la mala dispositione loro contra la E. V. et quasi in facto le
preparatione sue, la Maestà sua posseva declararli che intendendo e
vedendo quello se voleva temptare contra Milano, li certificava che
cum la persona propria e cum la forze sue e del sacro imperio, era per
pigliare la protectione de la E. V., lassando tutte le altre imprese da
canto, e che non seriano tanto presto alla offensione sua, che cossi pres-
to la Maestà Sua non fusse e cum le forze e cum la persona in aiuto
del stato de la E. V. Et in questo li rechay el rasonamento facto in
Brera col Rdo M. Petro da Trieste, ricordandoli che adesso séria lo
tempo e la occasione, magiore che may in alcuno tempo se pot
expectare, de moderare la ambitione de Venetiani et ampliare la
dignità e stato de Sua Maestà cum farli intendere che la E. V. non
havendo ad guardarsi indreto faria cognoscere alla Maestà sua quanto
6
82 MAX1MILIEN ET LUDOVIC SFOKZA
la desideri la exaltacione sua, e cum quale forze et vigore aiutaria
questa impresa, distinguendoli la facilita d'epsa impresa cosi per la
nécessita ne laquale se trova la Signoria de Venecia, anichilata de
denari, de gente darme e cum lo timoré del Turco, como per la via
quale haveria la E. V. de mandare le gente d'arme sue fin sopra le
porte di Verona, e perho che in questa venuta depsi ambasatori fran-
cesi doveva vedere se la posseva introdure qualche tregua per doi o
tre anni col Re de Franza la quai fusse de qualita che la Ex. V.
potesse starne secura ; e poi la M. S. se mettesse in questa impresa
perche gli ne reusciria tal fructo che quando poy la volesse lare
contra el Re de Franza, haveria tanti aiuti e modo da per se
che quello poteria essere difficile adesso séria facile ad allro
tempo.
LaMaestà sua, sopra le cose del Papa me respose che le opère diSua
Santità erano veramente aliène da quello chel debito del officio suo
recerchava, ma che, trovandosi adesso epsa in questi frangenti de
guerra, non li pareva de irritarsi el Papa, ma expectare de temptare lo
spirituale in altro tempo ; la quale cosa confessava spectare al officio
suo e volevafarlo; equanto a temptare el temporale, disse che, facen-
dosi movimento de arme contra el Papa, judicava fusse bene consi-
dérais che questo non movesse più el Re di Franza alla pertuibatione
de Italia, quali potevano pigliare colore de fare contra la Ex. V. per
aiutare el Papa; cercha la venuta de li ambasatori francesi,la Maestà
sua molto largamente rispose che la faria lo effecto per me ricordato,
in farli intendere che la era per mettere la persona e le forze per
aiutare e defendere la E. V. E quanto al procurare de fare tregua per
fare quello altro effecto, me rispose che Francesi cento volte le have-
vano offerti partiti grandissimi e volevano lassarli Venetiani in preda,
lassando la Maestà sua la E. V. e che may li havevavolutoconsentire;
cum dire che, quando de novo volesse attendere aile propositione sue,
lo fariano più che mai, ma che la intencione sua è sempre stata et è
de non lassare V. E. ad discretione ; et se bene sapeva che parlando
de questa tregua non ne cavaria el fructo che la E. V. desidera et ley
voria, non dimeno lo voleva temptare de novo, dicendo che e questo e
tutte le altre cose quale potesse fare per dimonstrare la grandeza del
amore suo alla Ex. V., lo faria promptamente et de bon core, tochando
in fine che questo che haveva proposto delà liga era la salute sua. e
ch'io dovesse da parte de S. M. significarlo alla E. V. ; in bona gratia
de laquale continue me ricomando.
Ex Lindo, 17 mai 1499.
Exe. me 111. me Dominationis vestre minimus servitor
Marchesinus Stanga.
MAXIMILIEN ET LUDOVIC. SFORZA. 83
Post ecripta: Sopraqueste propositione de la Cesarea Maesta, io ho
resposto quello che la E. V. vedera, e me è parso depingerle impos-
sibile e periculose; perche, oltra che cossi sia el débile judicio evedere
mio, lo havere da me improvvisament<- riaposta in questa forma, dara
mancho carico alla E. V. in non acceptarle quando non li piaciano,
como credo non farano e perche nel scrivere non si po cossi extesa-
mente distinguere tutti li rasonamenti, ho anche parlato in modo
che la Maesta sua non resta se non bene edificata de la Ex.tia V.ra;
e quando epsa non acceptasse gia quello che ha proposto, credo non
habia ad restarne con mala opinionc, excusando la cosa cum quelli
modi e termini che la E. V. per la prudentia sua sapera fare. lo non
sono voluto intrare in rneriti de pratichare questa cosa per abazarla,
azio la Maestà sua non si fusse persuasa chio havesse el parère de
la E. V. in pecto et havesse voluto merchantarla, benche più prin-
cipalmente lo habia facto per non parlare ne pratichare quello de
che non ho commissione, e perche nel parlare mio propose alla
Maestà sua, se particularmente voleva cosa alchuna,lo déclarasse che
la Ex. V.ra lo faria. Io mi mossi ad questo per levarla fora di
questa propositione,e tractare cum lei quella offerta che me haveva
commisso la Ex.tia V.ra li dovesse fare, ma havendo la Maestà Sua
dimonstrato essere in tutto aliéna da questo, se ley vora mo con-
vertire quello ch' io doveva offerire in questa propositione e fare o
piu o meno questo stare allô arbitrio e deliberatione sua, havendo ad
essere le parte mie, sforzaromi cum quello pocho ingenio che Dio et la
natura me hanno dato de satisfare allaE. V., laquale, sein quello che
fin qui è stato tractato, restasse pocho satisfacta. ascrivera el tutto
ad ignorantia et non alla dispositione mia; laquale in le cose delà
E. V. è quella che deve havere uno chi lo essere suo ricognosca da
chi lo ha havuto dopo Dio.
Questo posso certificare alla Ex. V. che sel acordio se fara mai
cum Suyceri, epsa li sera inclusa per havere serra te le victualie
secundo l'ordinatione e volunta del imperio ; et appresso, sel se havera
per alcuno ad fare praticha di questo accordio, la Ex. V. lo fara o in-
tervenerano segni soi al tutto, perche cossi me ha certificato la Cesa-
rea Maestà ; laquale, per quanto posso comprendere e conjecturare de
l'animo e dispositione sua, non è per fare ne cerchare accordio
alchuno se prima non prova in qualche bona bataglia quello possa
sperare di questa impresa, et benche el Langh dicesse ad Augustino
Somenzio che la Maesta sua era contenta che la Ex. V. ra ne disse
quello la posseva fare in la praticha de questo accordio; nondimcno
io trovo la Maestà sua alienissima da questo, salvo se extrinseca-
mente non dimonstrasse una cosa, nel pecto ne havesse un altra ; che
non credo.
84 MAXIMILIEN ET LUDOVIC SFORZA
El discorso de la lettera longa la E. V. lo potera liberamente
communicare ad M. Petro da Trieste, perche cossi mi ha dicto el
Langh da parte de la Cesarea Maestà ; et alla 111. S. V. me ricpmando
Data ut in litteris.
Idem servulus.
(Lindau, 17 mai 1499)
In Lindo die 17 maii 1499.
Serenissime et invictissime Cœsar,
Visis et bene consideratis articulis propositis per sacratissimam
Majestatem Vestram in negocio Lige Suevie, quoniam de his quœ tan-
gunt ill. mum D. Ducam menm sententiam meam in médium afferre
Majestas Vestra jussit, et si illustrissimi Ducis iste partes sint nec
ego deliberationem Excellente Suae in rébus novis neque intellectis
nec sciam nec recte judicare possim ; ac tamen Cesarese Majestatis
V. mandatis parère volens, qua3 mihi occurrunt explicabo: hoc unum
pro certo habens illmum Dominum ducem proposita per serenissimam
Majestatem Vestram reverenter auditurum et intellecturum. Duo sunt
in Liga Suevie per Ser. main M. tem V.ram proposita : obligationem
ill. D. ducis coucernentia, scilicet quod Elvetiis claudat victualia et
contra Elvetios ponat sex milia bellatores, quattuor Italicos et reliquos
Alemanos, et quod donec isti sex milia bellatores sint in ordine, det
quinquaginta milia ducatos modo Lige Sua\ie.
Super commeatibus Helvetiis impediendis, Ser. ma M. tas Vestra
proxime intellexit ill. d. ducem, audita Majestatis Vestra? etSacri im-
perii deliberatione et voluntate, se ejusdem sacri imperii principem
obedieutissimum ostendisse ; sperans quod, cum ejus sacri imperq
membrum sit, si cum Helvetiis aliquo tempore res componerentur et
concordia fieret, Ser. mam Majestatem V.ram ac sacrum imperium in
omni compositione sui rationem habituram, et in conditionibus et ca-
pitulis firmandis securitatem Ex. tie sue inclusuram.
Super capitulo sex milium bellatorum et quinquaginta milium duca-
torum, cum ill. mus dominus dux meus bellum régis Francie ante oculos
habeat, judicio meo impossibilia sunt quse proponuntur et in novo pe-
riculo res sua? constituerentur ; posset enim eodem tempore et régis
Francie et Helvetiorum bellum expectare,qui, cum in limitibus Domini
ducis sint, cum parva manu dominium suum invadere possent, et in
uno die incendere.
Et quoad L. milia ducatos, cum Dominus Dux ad bellum contra
Gallos sustinendum se preparet, non bene video quomodo ista simul
MAXIMILIEN ET LUDOVIC SFORZA 85
s tare et coavenire possint. Hoc tamen bcîo quod Dominus dux si in
Liga Suevie poterit indu li eo modo quo alii imperii principes inclusi
sunt, cxcellentiam suam [iortionem sibi Bpectantem quam honeatam
esse putaverit libenter satisfacturam.
(Lindau, 21 mai 1 190)
Illra0 et exm0 sig. mio obsermo,
lo credo che la Cesarea Maestà have?se desiderio de parlarmi de
la fiola; laqnale cosa non ha facto, perche M. Matheo Langh in dicorso
<li parlare, questa ultima volta che è stato a lo alogiamentomio, me ha
dicto chel bisognava che uno di lui et io dessimo moliere a V. Extia:
laquale parole indubitatamente me ha usate per attaccarmi, e per
vedere como mi moveva ad questa propositione : quello ch'io li ho
resposto è stato che son certo la E. V.trovarsi in dispositione de non
accompagnarsi mai più, e persuadermi che lo habia facto per voto ; et
li ho subjuncto como non pensando altro la E. V. che fare cognoscere
alla Cesarea Maestà quale sta la observantia sua verso epsa e quanto
la desideri, clic è per li tempi presentie per li futuri, si cognoscaessere
una cosa medesima el stato de la Ex. V.ra cum quelle che hano ad
veniie dreto ad Sua Maestà, me ha commisso li debia parlare per fare
parentato cum lo archiduca di Burgogna per mezo de la fiola nel ill
sig. conte de Pavia ; quando alla Maestà sua paresse questo havers
ad fare ad satisfactione sua. Al che me lia risposto che ne debia
per omne modo parlare alla Cesarea Maestà. Laquai cosa io faro como
mi accada la opportuuita, e me è parso dire questo al predicto M. Ma-
theo, perche, cognosceudo me haveva usare quelle parole per vedere
como mi moveva, possa referire quello li ho dicto et exeusare la prima
propositione.
Alla 111. S. V. continue me raccomando.
Ex Lindo, 21 mai, 1499.
E. IUme D. V. minimus servitor Marchisinus Stangha. *
1 Suscription : Illmo principi et exm# dno Dn° meo unico Dno Duci Me
diolani. In manibus propriis.
(A suivre.)
L.-G. PÉUSSIER.
VARIETES
La Société des « Langues Romanes » à Bonn
Mon cher Directeur,
La. Société des Langues Romanes m'avait chargé de la repré-
senter au jubilé universitaire de notre confrère, M. W. Fœrs-
ter. Ce n'est pas le lieu de dire ici pour les austères lecteurs
de la Revue les menus incidents du long voyage de Montpellier
à Bonn. Tout au plus me permettrai-je de dire que le soleil du
Midi m'a accompagné jusqu'au bout et que les vallées de la
Sambre et de la Meuse étaient bien belles, par une après-midi
d'octobre, avec leurs frondaisons multicolores. Un mot encore
au sujet de la diffusion du français : à Herbesthal, au moment
du départ, le conducteur allemand nous invita à monter dans
e train par cette formule : Und jetzt, Meine Herren, en avant
deux! Cette expression de troupier et de maître de danse,
transportée au-delà de la frontière, m'amusa beaucoup, et
comme je le félicitais sur sa connaissance du français, il ajouta
après le hertig sacramentel : on parti Nouvelle surprise; mais
je n'en eus pas d'autre de c; genre jusqu'à Cologne: c'était
tout son bagage de fnnçiis et nous ne conversâmes plus que
par gestes ou en allemand.
La fête universitaire, qui eut lieu le 26 octobre, fut des plus
simples; c'est à l'insu du jubilaire qu'on l'avait préparée.
M. Fœrster fut très sensible à l'attention qu'avait eue la
Sociétédes Langues Romanes. Il avait reçu à l'occasion de son
jubilé de nombreux télégrammes et de nombreuses adresses:
parmi ceux de ses collègues étrangers il fut tout heureux de
me montrer ceux de M. Gaston Paris et de M. A. Thomas. Le
Félibrige Latin avait envoyé une longue poésie — du poète
Charles Gros, si je ne me trompe ; notre confrère y était anobli
et s'y appelait Wendelin de Fœrster et des strophes harmo-
nieuses, en pure langue du Clapas, lui rappelaient son séjour à
VARIETES 87
Montpellier et ses excursions à Saint- Gudhem et dans les
enviions.
Les anciens élèves de M. Fof.rster lui offrirent une très
belle adresse sur parchemin : la première feuille contenait
d'admirables reproductions des miniatures des manuscrits de
Chrestien de Troyes : parmi les signataires on remarquait les
professeurs Mohrsbach (Gottingue), Biilibring (Bonn), docteur
Steffens (Bonn), Lenz (Santiago du Chili), docteur Zacher, cor-
respondant de la Gazette de Francfort à Rome, présenta la fête ;
parmi les signataires français le docteur Gaufinez, professeur
de littérature française à Bonn, le docteur Frierlel (Paris) et
moi-même. Le Sénat Académique vint en corps présenter au
professeur Fœ'ster les félicitations de ses collègues de l'Uni-
versité et le Rector Magnifiais rappela, dans an langage élevé,
ses nombreuses contributionsàlascience. Enfin, unedélégation
du Neuphilologenverein en costume de gala — bottes vernies,
dolman et rapière — vint aussi présenter ses hommages à son
président d'honneur.
Un gran 1 banquet réunit le soir dans la Leslhalle autour de
M. Fœrster ses collègues, ses élèves et ses amis. Le profes-
seur Schaarschmidt, conseiller secret, ancien bibliothécaire en
chef de l'Université, rappela en quelques parole3 émues les
services rendus à la philologie romane par son collègue. Invité
à parler, je prononçai les paroles suivantes:
Cher Monsieur Fœrster,
La Société des langues romanes a bien voulu me déléguer
pour vous apporter ses hommages et ses félicitations. Il
n'aurait pas été difficile à la Société de choisir dans son sein
des membres plus dignes que moi de cette mission : je ne sais
si elle en aurait trouvé dont l'estime fût plus profonde et la
sympathie plus sincère.
J'ai appris à vous connaître dans notre Midi ensoleillé, dans
cette bonne ville de Montpellier où vous comptez tant d'amis.
Vons n'étiez nullement dépaysé dans ce miliieu de méridio-
naux. Votre gaité et votre belle humeur étaient égales à la
nôtre. Aussi ma première visite en Allemagne fut pour vous.
Ce n'est pas le lieu de rappeler ici l'accueil sympathique que
j'ai trouvé auprès de vous et de vos collègues de l'Université
3 8 VARIETES
de Bonn : qu'il me suffise de dire que ces souvenirs suffiraient
à expliquer nia présence ici.
Des liens plus profonds nous rattachent à la Société des
langues romanes. Vous avez été un de ses amis de la pre-
mière heure. Vous avez connu en pleine activité quelques-
uns de ses membres les plus éminents. Vous avez assisté aux
efforts qu'elle a dû faire pour faire naître si loin de ce grand
foyer intellectuel qu'est Paris , le goût de la philologie
romane. Vous savez qu'elle y a brillamment réussi, grâce à
l'activité de tous ses membres, grâce, surtout, aux travaux
de deux hommes dont l'un, Boucherie, fut trop tôt enlevé à
la science, et dont l'autre, M.Chabaneau, est resté un de vos
meilleurs amis. Vous avez vous-même contribué au succès de
la Revue des langues romanes en l'honorant, à l'occasion, de
votre collaboration : inutile de vous dire combien nous regret-
tons vivement que d'autres occupations ne vous permettent
pas de nous continuer cette précieuse collaboration.
Nous le regrettons moins pourtant depuis que nous avons
de vous ce travail magistral qui s'appelle l'édition des œuvres
de Chrestien de Troyes. Nous savons les efforts qu'il vous
a coûtés et que, même au prix de votre santé, vous n'avez
pas reculé devant l'œuvre ei.treprise.
Grâce à vous nous pourrons lire, dans un texte correct,
l'œuvre longue et dfficile, mais si charmante et parfois si fine,
de notra poète champenois. Nous verrons les transformations
de «ette poésie courtoise qui , née dans notre Midi, s'est
répandue dans notre littérature grâce à la renommée de
Chrestien de Troyes et de ses imitateurs.
Elle s'est répandue aussi dans la vôtre ; vos M 'innesinger ont
connu nos trouvères; le Chevalier au Lion a trouvé de bril-
lants interprètes dans votre littérature. Heureux temps que
celui où deux grands peuples ne rivalisaient que pour les
lettres et les arts !
De si longs travaux vous donneraient le droit de vous repo-
ser ; mais vous nous paraissez aujourd'hui vous ressentir si
peu des dures souffrances des dernières années, que nous
espérons encore beaucoup de votre infatigable activité.
Vous nous avez dit ce matin que votre foi dans la science
est restée la même qu'au début de vos travaux : nous vous
VARIETES 89
souhaitons de retrouver une partie de cette ardeur qui vous
animait il y a plus de trente ans, lorsque, modeste profes-
seur dans un lycée de Vienne, vous commenciez à vous ini-
tier, seul, aux secrets de la philologie romane.
Encore une fois, au nom de la Société des Langues Romanes,
et en mon nom personnel, je vous adresse mes meilleurs
vœux et mes plus sincères félicitations.
Dans une chaleureuse improvisation, M. Fœrster répondit
aux discours qui avaient été prononcés. « Cj matin, dit-il, le
ciel était pâle et brumeux ; quand j'ai vu arriver un méri-
dional, j'ai cru voir un rayon de soleil dans les plis de ses
vêtements ; puis à mesure que mes amis sont venus, le jour
m'a paru plus clair et plus gai. » Il se sentait rajeuni par
cette fête, et si jamais il avait eu quelques doutes, il était sûr
maintenant que son enseignement n'avait pas été stérile.
Puis s'adressant dans un français très correct au délégué de
la Société des Langues Romanes, il me pria d'être son inter-
prête auprès de ses amis de Montpellier et de leur dire com-
bien il avait été touché de leur attention. Il me rappela la
soirée théâtrale à laquelle il avait assisté dans la loge muni-
cipale avec son ami, M. Castets; il rappela qu'il avait « frotté
la Salamandre ' » sur les bords de la Méditerranée, et qu'il
avait gardé de notre Midi un souvenir inoubliable. Il nous le
prouverait d'ailleurs en revenant le plus tôt possible voir le
Clapas.
Nous souhaitons de tout cœur que cette promesse se réalise ;
M. Fœrster sait plus que tout autre avec quelle sympathie il
sera accueilli ; elle ne peut avoir d'égale que celle avec
laquelle j'ai été reçu à Bonn 2.
J. Anglade.
1 Que les lecteurs de la Revue ne se mettent pas martel en tète pour
cette expression : il s'agit d'une manière plutôt bruyante de boire de la
bière : Salamander reihen.
2 L>> Neuphilologenverein en particulier — dont j'étais membre il y a
deux ans — a fait au délégué de la S un accueil cordial et cha-
leureux, et il me faudrait do longues pages pour décrire les exercices
variés que les Fùchse exécutèrent en son honneur.
BIBLIOGRAPHIE
Meyer-Liibke (W-\ — Einfiihrung in das studium der romanischen
sprachwissenschaft. Heidelberg, C. Winter, 1901 [X, 224 p.], 5 m.
S'il est des livres que le critique expédie en quelques lignes parce
qu'ils ne méritent pas un compte rendu plus long, il en est d'autres
sur lesquels il n'est guère moins bref parce qu'il ne trouve pas moyen
d'en commenter les divers chapitres autrement que par ces simples
mots : « Bien, très bien ». Tel est l'ouvrage que nous offre aujour-
dui M. Meyer-Lùbke et qui introduit d'une façon si alléchante dans
le domaine des langues romanes une série de grammaires, d'istoires
de la littérature et de dictionnaires.
Après avoir déterminé les limites du domaine roman et donné une
classification des langues romanes, l'auteur étudie dans une première
partie les éléments constitutifs de ces langues, élément latin, élément
celtique, élément germanique. Puis il consacre la seconde partie à
l'examen des modifications de toute sorte qu'a subies le roman depuis
ses origines jusqu'à nos jours.
Tous les problèmes du romanisme, et ils sont nombreux, sont indi
qués avec des exemples nets et caractéristiques ; toutes les questions
sont résumées d'une manière généralement excellente. Voyez par
exemple les gg 31 et 32 sur les mots empruntés, les gg 42-48 sur les
mots d'origine germanique, leur date et leur dialecte originaire, et
tant d'autres chapitres que l'on citerait si l'on n'en était empêché par
l'embarras de choisir.
Ce n'est pas à dire que tout doive être aveuglément accepté et que
tout soit définitif et indiscutable. Ainsi le chapitre intitulé « Dauer
und klang», p. 100-112 est surtout une suite d'ipotèses. L'auteur le
donne du reste comme tel, et la question est tellement difficile et
tellement complexe qu'elle ne comporte guère autre chose que des
constructions problématiques. On doit ajouter d'ailleurs que les ipo-
tèses de M. Meyer-Liibke sur ce sujet en valent d'autres et qu'elles
valent même mieux que beaucoup d'autres.
Il i a forcément aussi dans le détail quelques erreurs, quelques
oublis, quelques faiblesses. Ainsi on ne voit pas comment, p. 16.
l'auteur parcourant le domaine roman de l'est à l'ouest rencontre le
portugais avant le sarde. On ne comprend pas pourquoi dans l'énu-
caération des dialectes français, p. 22, ne figure pas celui de l'Ile-de-
BIBLIOGRAPHIE 91
France ou francien, ni parmi les dialectes espagnols le castillan et
l'aragonais. On lit p. 36 que arepennis n'est représenté qu'en français;
que faire alors de v. esp. arapende ? Des différentes explications rap-
portées au $ 83 pour l'accentuation de tenébrae, coliibra, intégra,
cathedra, alécru et mots analogues aucune n'est satisfaisante. Il ne
s'agit pas là d'un déplacement roman de l'accent; ces mots ont con-
servé l'ancienne accentuation latine fixée pendant la période italique,
à une époque où l'on disait encore 'patres (plus tard pa-tris), comme
Homère disait irar-pô'ç 'plus tard na-rpéç) et comme disait d'une ma-
nière générale l'indo-européen. Cette accentuation une fois établie a
subsisté durant toute la latinité et se retrouve encore dans les re-
présentants modernes des mots latins qui la possédaient. L'accen-
tuation pâlpebra, intégra, etc., n'est apparue qu'à la période du latiu
classique, surgissant par une analogie presque obligatoire, mais à
aucune époque elle n'a pu éliminer l'accentuation ancienne et n'a
jamais eu à côté d'elle qu'un caractère exceptionnel et plus ou moins
savant. Voyez sur ce point A. Meillet, Revue bourguignonne de ren-
seignement supérieur, t. V, p. 232 (article très important).
Nous terminerons en émettant le vœu que les autres volumes de la
collection soient dignes de celui qui ouvre si brillamment la série.
Maurice Grammont.
Marchot (P.). — Petite phonétique du français prélittéraire (vie-xe siècle).
Première partie : Les voyelles, Fribourg (Suisse), B. Veith, 1901
[39 p.].
La brochure de M. Marchot a la malchance de paraître en môme
temps que YEinfiïhrung de M. Meyer-Lubke. Ce dernier étudie tout
le domaine roman, tandis que le premier se borne à la fonétique du
roman de la Gaule du nord et aux débuts du français. Presque toutes
les questions abordées par M. Marchot sont traitées par M. Meyer-
Lù'jke, mais avec une autre sûreté et une autre largeur de vues.
La « Petite phonétique » comprend deux Chapitres : 1° Remarques
sur le vocalisme du latin vulgaire de la Gaule du Nord, 2° Les voyelles
dans le français prélitléraire. On sait quelle obscurité règne encore
sur un grand nombre de fénomènes fonétiques qui se sont accomplis
durant la période qu'étudie l'auteur; mais on doit reconnaître pourtant
qu'il abuse un peu des ipotèses, et que si certaines méritent d'être
prises en considération, comme celle qui prétend expliquer l'évolution
de l'a tonique libre (p. 29 et suivantes), il i en a beaucoup qui sont
trop contestables.
Le «; 1 traite de l'accent. L'ipotcse relative aux mots intégru, tonitru,
palpétra et analogues se détruit d'elle-même. Voyez les renseigne-
92 BIBLIOGRAPHIE
ments que nous donnons sur ce point dans notre compte rendu de
1 Einfuhrung (ci-dessus, p. 91). — La question de paréte est des plus
ténébreuses ; mais l'explication de M. Marchot n'est pas recevable ;
d'après lui parïcte serait devenu 'parèète à l'époque où ï est devenu é
(e fermé) en roman, ce qui suppose que le changement roman de ï eu
é est antérieur à celui de ï en jod devant une autre voyelle; c'est
contraire aux faits. Puis ce * parèète serait devenu * parèète « par
attraction de la voyelle accentuée sur l'atone » ; mais si l'ï était de-
venu é il n'avait plus de raison pour perdre l'accent. Enfin * parèète
serait devenu paréte « par contraction » ; mais la contraction de deux
voyelles ouvertes ne donne pas une voyelle fermée. Le cas de cohorte
devenant carte n'est nullement comparable ; en latin deux voyelles
brèves en se contractant donnent une voyelle longue, dont le corres-
pondant roman est forcément une voyelle fermée. Mais le roman ne
connaît plus de voyelles longues ni de voyelles brèves ; il n'a que des
voyelles ouvertes et des voyelles fermées. — Pour l'accentuation des
formes qui ont donné naissance au mot foie et à ses frères romans,
voyez l'article de M. G. Paris dont il a été rendu compte ici même,
p. 186. — Pour sécale, voyez Meyer-Lûbke, Einfuhrung, p. 98. Pour
* pûlicella (§ 4), voyez Revue des langues romanes, 1898, p. 287. Cum
à côté de quum (§ 7) n'a rien de comparable avec le cas de nil à côté
de nihil. — Mortu, cocu (non coqu), anticu (non antiqu), etc., sont dus
à une évolution latine, et non pas romane. De même tus, sus, etc. —
Une étape ' laquju n'a aucune espèce de vraisemblance. — Fr. dès
ne peut pas sortir de ' de-ex car Yx = es et n'entrave pas, et d'autre
part certaines formes dialectales comme Dampiichard do prouvent
que l'e était fermé ; v. fr. ades qui a un e ouvert ne peut pas non plus
remonter à * ad-de-ex ; nous reviendrons sur cette dernière forme en
temps opportun.
Nous bornerons ici nos observations ; elles suffisent à montrer
avec quelles précautions on pourra utiliser l'ouvrage de M. Marchot.
La seconde partie, Les consonnes, est annoncée pour 1902.
Maurice Grammont.
Bartoli 'M.). — Ueber eine studienreise zur erforschung des altroma-
nischen Dalmatiens. (N° V des Vorlàufige berichte der Balkan-com-
mission, en vente chez Gerold /?/?, Vienne. C'est le tirage à paît d'un
article paru dans YAnzeiger der philosophisch-historischen classe du
'29 novembre 1899. [Académie impériale des Sciences de Vienne]).
M. Bartoli, chargé par l'Académie des Sciences de Vienne d'aller
étudier surplace l'ancien dialecte roman de Dalmatie, est revenu avec
les matériaux d'un ouvrage considérable qui ne pourra paraître que
BIBLIOGRAPHIE 93
clans quelque temps. En attendant il nous donne un résumé des lui
vaux qu'il a accomplis dans sa mission et des faits (pi'il se propose de
mettre en lumière.
Le Dalmate est un dialecte jusqu'à présent très mal connu et dont
les sources sont maleureusement limitées; on ne voit pas trop ce
qu'on pourrait ajouter plus tard à celles dont a disposé M. Rartoli,
car la dernière personne qui parlait le végliote est morte en 1898, et
les archives des notaires de la ville de Véglia ont été presque entiè-
rement détruites par un incendie. Pourtant nous en possédons assez
pour nous rendre compte du caractère très particulier de cette langue
et du aut intérêt qu'elle présente à différents égards.
Dans le consonœilisme on remarquera surtout le traitement des « gut-
turales »:c devient c devant l, e, û, mais il reste c (k) devant ë, ï comme
devant a, o, îî; qui devient de même ci tandis que que est représenté
par /ce; et, es deviennent pt, ps (en gaulois c'est le contraire: pt, ps
deviennent et, es) ; la sonore g a un traitement parallèle.
Dans le vocalisme on notera que les produits de û supposent une
fase U, (pie a tonique devient e dans certains cas, qu'en végliote les
voyelles toniques libres se diftonguent toutes, et les voyelles toniques
entravées seulement lorsqu'elles sont ouvertes.
Au point de vue etnographique et istorique il sera fort instructif d'é-
tudier d'une façon précise et approfondie les rapports du Dalmate avec
'e roumain et l'albanais, avec l'italien, avec le rétique, avec le slave et
avec le germanique (la plupart des idées qui sont rendues dans la
majeure partie des langues romanes par des mots germaniques le
sont ici par des vocables latins : haiptare « garder »,juàlb « blanc»).
Ces recherches ne contribueront pas peu à éclaircir la « question illi-
rienne ».
On voit par ces indications quelle sera l'importance de l'ouvrage
annoncé par M. Bartoli.
Maurice Grammont.
CHRONIQUE
M. Haguenin, professeur agrégé de l'Université, a été nommé pro-
fesseur extraordinaire de fiançais moderne à l'Université de Berlin.
Les journaux allemands, eu annonçant cette nomination, font remar-
quer que tout à fait exceptionnellement le nouveau professeur n'a pas
eu à perdre sa qualité de français.
Nos lecteurs connaissent sans doute les deux notes publiées par la
Romania et les Annales du Midi dans leur dernier cahier et relatives
'.M CHRONIQUF.
à la découverte du manuscrit contenant la vie de Sainte Foy d'Agen.
Ce texte sera publié dans un des plus prochains numéros de la Roma-
>iia par l'heureux auteur de cette découverte, M. Leite de Vascon-
CELLOS. Poussé par un sentiment des plus honorables, M. de Vascon-
cellos publiera le texte avec des notes et une introduction en por-
tugais.
Nous croyons savoir — il n'y aura sans doute plus d'indiscrétion à
le dire quand ces lignes paraîtront — , que c'est à la bibliothèque de
Leyde, dans un manuscrit classé comme contenant des textes catalans
(il en contenait en effet), que M. de Vasconcellos a découvert son
poème.
M. Koschwitz, professeur de philologie romane à l'Université de
Maibourg, a permuté avec son collègue de l'Université de Konigsberg.
*
M. Gaston Paris publie dans le Journal des Savants (octobre 1901)
un compte rendu de l'Histoire de la littérature française, publiée par
MM. H. Suchier et Birch-Hirschfeld. Il annonce en note (p. G46) un
Tableau de la littérature française au moyen âge qui contiendra le
tableau de la littérature provençale. « Une esquisse faite sur un plan
différent [de celui de 1888-1890], embrassant l'époque intermédiaire
(1327-1500) et la littérature provençale, paraîtra prochainement: en
anglais d'abord, puis en français. »
Du Litteraturblatl far germanische und romanische Philologie :
M. Freymond, professeur de philologie romane à l'Université de Berne,
a accepté une nomination à l'Université de Prague.
Le docteur Jeanjaquet a été nommé professeur de grammaire com-
parée des langues romanes à l'Académie de Neufchâtel.
Au mois de juillet 1901 s'est fondée à Rome une Société philolo-
gique romaine. Elle publie un bulletin et des documents sous la direc-
tion du professeur E. Moxaci. Parmi les documents qui seront publiés
dans les premiers volumes, on annonce les suivants :
Il Canzoniere Vaticano 3793, reproduction diplomatique.
I documenti d'Amore, avec le commentaire, de Francesco da Rar-
berino, édition complète d'après les deux manuscrits originaux de la
Bibliothèque Barberinienne.
II Codice Vaticano 3196, contenant l'original du chansonnier de
Pétrarque.
Les secrétaires de la Société sont le docteur F. Hermanin et le
professeur A. Silvagni. L'administrateur est le docteur E. Modigliani.
Pour tous renseignements, s'adresser à ce dernier : Rome, Corso Vitt.
Emm. 20'.).
«
• *
Maoruelone excite les historiens et inspire les poètes. Voici qu'an
d'entre eux, M. E. Renaud, vient de lui consacrer de beaux vers. Il
CHRONIQUE 0 5
nous fait assister aux luttes héroïques de Maguelone contre.
Les Pirates d'Alger, montrant leurs faces blêmes.
Puis Maguelone est devenue
Une femme hautaine en son voile de deuil.
Un étranger, dont la cuirasse étincelle, viendra un jour la consoler:
0 douce Maguelone, il presse ton corps vierge
Celui que tu cherchais par les vagues effrois
De l'hiver, quand ses pieda heurtaient les galets froids
Que l'écume insensée a vomis sur la berge.
Le poème, qui est d'inspiration panthéiste, renferme, cà et là, de
jolies strophes.
Ce ne sont pas, d'ailleurs, les premiers vers de M. E. Renaud II
a publié, cette année également, chez Lemerre, un volume de poésie
intitulé : Amours Barbares. Comme sous-titre : Impressions cévenoles ;
et allemandes pourrait-il ajouter, car plusieurs des poèmes qui foi -
ment ledit volume ont été composés pendant un séjour de l'auteur
en Allemagne.
Le poème de Maguelone est dédié à l'auteur des Flammes Mortes.
C'est le titre d'un volume de vers, publié également chez Lemerre, en
1901, et dont l'auteur, M. Martin Paoli, est professeur d'italien au
Lycée de Montpellier. La muse universitaire ne chôme pas à Montpel-
lier, car le nom de l'auteur de Maguebme la Morte n'est que le pseu-
donyme aux trois quarts transparent d'un des plus distingués profes-
seurs de langues vivantes du Lycée.
Notre collaborateur M. A. Gasté, professeur de littérature fran-
çaise à l'Université de Caen, vient de prendre sa retraite. 11 a pour
successeur M. Maurice Souriau, précédemment professeur de litté-
rature et d'art normands à Caen.
M. W. Fœrster a été nommé membre correspondant de l'Académie
des sciences de Gottingnc. Il était déjà membre de l'Académie de
Munich depuis de nombreuses années. Toutes nos félicitations.
La librairie Niemeyer, de Halle, prépare une importante collection
de manuels de philologie romane. Nous remarquons en particulier dans
la liste annoncée: Manuel d'ancien provençal (langue et littérature) ;
Manuel de provençal moderne langue et littérature). Un de ces
manuels {Introduction à l'élude de l'ancien français, parM.VoRETzeH)
a déjà paru.
1 Maguelone la morte, méditation poétique, par Etienne Renaud,
Montpellier, impr. Firmin et Montane, 1901, in-8°, 12 p.
96 CHRONIQUE
On annonce un Précis de phonétique expérimentale par l'abbé
Rousseloï et M. F. Laci-ottr, qui fera suite aux principes de pho-
nétique expérimentale du premier de ces deux auteurs: la deuxième
partie de ce dernier travail vient de paraître à la librairie Welter.
Notre éminent secrétaire général, M. Chabaneau, vient d'être
nommé professeur honoraire à la Faculté des lettres de l'Universi é
de Montpellier.
La Société se réjouit d'une distinction qui, tout en attestant combien
les longs services de M. Cbabaneau sont appréciés par le Ministère,
l'attache par un lieu durable à cette maison qui fut si longtemps
sienne et qui ne l'a vu s'éloigner qu'à regret.
M. Maurice Grammont, chargé du cours de philologie à la Faculté
des lettres, ancien président de la Société pour l'étude des Langues
Romanes, vient d'être nommé professeur de linguistique et gram-
maire comparée à l'Université de Montpellier (chaire créée).
M. J. Vianey, maître de conférences de littérature française à la
Faculté des lettres, notre collaborateur, vient d'être nommé professeur
de littératures modernes comparées à l'Université de Montpellier
(chaire créée).
La Société des Langues Romanes adresse ses félicitations les plus
sincères aux nouveaux professeurs et à M. le Ministre de l'Instruc-
tion publique.
Dans sa séance du jeudi 5 décembre 1901, le Comité directeur de
la Société a procédé à l'élection de son Bureau pour 1902: M. Max
Bonnet, professeur à la Faculté des lettres, correspondant de l'Ins-
titut, passe, selon l'usage, de la vice-présidence à la présidence.
M. F. Fabrège, l'historien de Maguelone, a été élu vice-président,
en reconnaissance des services qu'il a rendus aux Etudes méridio-
nales et de l'hospitalité si gracieusement offerte aux féhbres et aux
romanistes à Maguelone, lors de la Santo Estello 1900. MM. Lam-
bert, Grammont et Pélissier sont continués dans les fonctions de
trésorier, bibliothécaire et secrétaire de la rédaction. En remplace-
ment de M. Chabaneau, M. Grammont a été en outre nommé secré-
taire général de la Société.
M. Chabaneau, correspondant de l'Institut, professeur honoraire à
la Faculté des lettres de l'Université de Montpellier, a été nommé,
par acclamation, président d'honneur de la Société pour l'étude des
Langues Romanes.
Le Gérant responsable : P. IIamklin.
LA DANSE DES TREILLES
NOTICE
« Les Treilles », aussi haut qu'on peut remonter, ont été
dansées à Montpellier en 1503, devant l'archiduc Philippe,
gendre de Ferdinand le Catholique, quand il retournait dans
ses Etats de Flandre, avant de conclure à Lyon, où il s'arrêta,
un traité avec Louis XII. Il est dit dans nos archives locales
que les Consuls, « pour festoyer ledit seigneur, de toutes
sortes, firent danses et « bails de la Treille », qui fut très hien
dansé et triomphantment ».
On les a aussi dansées en 1504, pour la troisième fête de
Noël, en présence du roi Charles IX, de passage en notre
ville. Dans son « Recueil et discours du voyage de CharlesIX »,
Abel Jouan dit (et le fait est confirmé, d'après ce que nous
communique M. Emile Bonnet, dans les Mémoires manuscrits
de Serres — Bibliothèque du Séminaire) — , que les habitants
de Montpellier « donnèrent plaisir au Roy, en un grand
carro}- qui estait devant son logis, d'une danse que l'on appe-
lait « La Treilhe » « et dansaient au son de trompettes,
tenans en leurs mains des cerceaux tous fioris, et les dan-
seurs tous masqués et revestus qu'il faisait beau voir »
Abel Jouan parle de trompettes ; c'est le hautbois qu'il veut
désigner, car la musique des Treilles n'a sa véritable adap-
tation que sur le galoubet augmenté du tambourin.
En 1830, on les a aussi exécutées devant la duchesse d'An-
goulème.
En 1852, nos Grisettes,q\ii les dansèrent devant le prince
Président, eurentle don d'exciter par leur charme ses applau-
dissements et son sourire. On sait qu'il n'en était pas pro-
digue.
Les Treilles constituèrent, en 1878, le principal attrait des
xlv. — Mars 1902. 7
98 LA DANSE DES TREILLES
«Fêtes Latines». On les a reprises à la venue du Président
Carnot, en 1890, à l'occasion de la commémoration du VIe
centenaire de l'Université de Montpellier. On les dansait
récemment à Marseille, à Pézenas, et partout elles ont le
don d'attirer la foule. A Toulouse, on les appelle la danse du
« Ramelet » ; mais on ne les danse, croyons-nous, correcte-
ment et historiquement, ajouterions-nous presque, qu'à Mont-
pellier, où leur caractère exclusivement bachique et lascif
est conservé, par opposition aux variations et déformations
apportées à leur simplicité dans le but d'en embellir l'en-
semble.
La danse du Chevalet '
Avec moins d'agitation mais non sans autant de grâce et
d'agilité, vient derrière la Danse du Chevalet. Une pieuse
croyance que les habitants de Montpellier ont conservée
attribue l'origine de cette danse célèbre dans tout le Midi,
où la propagation des scènes pittoresques comme aussi du
chauvinisme est si rapide, au rapprochement conjugal de
Pierre II roi d'Aragon avec la douce Reine Marie de Mont-
pellier, issue de la famille des Guilhem; à la suite de ce rap-
prochement, vint au monde Jacmes le Conquérant, vainqueur
des Maures et des Sarrazins d'Espagne 2.
1 La Danse du Chevalet est inséparable des Treilles.
Ce divertissement a été réglé en 1325 par une ordonnance de Ray-
mond de Miintaner. On le reprit plus tard au Louvre pour distraire le
roi Louis XV, pendant une convalescence.
Vingt-quatre danseurs partirent de Montpellier pour aller exécuter
cette danse devant sa Majesté et la Cour. Le Mercure, qui rend compte
de cette cérémonie, assure que le Roi fut très satisfait.
D'Aigrefeuille dit <- que le peuple ne manque point, dans toutes les
réjouissances publiques, défaire sortir le «Chevalet», c'est-à-dire qu'un
jeune homme, monté sur un petit cheval en carton, proprement équipé,
lui fait faire le manège aux sons des tambourins et du hautbois, tandis
qu'une grande troupe de danseurs, avec des grelots aux jambes et des
tambours de basque à la main, font semblant de lui présenter de
l'avoine pour le détourner de son exercice, ce qu'il évite avec beaucoup
d'agilité et toujours en cadence. » (Histoire de Montpellier.)
2 La plupart des auteurs de l'histoire du Languedoc s'appuient pour
LA DANSE DES TREILLES 99
Sans vouloir toucher à une légende aussi chère, puisque le
nom d'un héros et d'une reine aimée y sont attachés, qu'il
nous soit cependant permis de signaler que la Danse du Che-
valet pourrait bien remonter à une origine plus ancienne et
se rattacher aux coutumes du paganisme. On a retrouvé dans
les fouilles de Délos, il y a une trentaine d'années, et l'on
conserve au musée de Béziers', un vase de forme élégante
et peu commune, composé d'une terre très fine, d'un ton jaune
clair. La peinture en est rouge et noir; on distingue très bien
ces deux tons à la loupe. Le dessin représente un cheval pos-
tiche porté par un cavalier armé d'une lance : « Les deux
» pieds du cavalier s'appuient à terre, dans deux espèces de
» fourreaux qui ont l'air de deux jambes de cheval. L'esprit
» humain n'est pas tellement inventif, que la Danse du Che-
» valet, c'est-à-dire une danse dans laquelle figure nécessai-
» rement un cheval postiche de bois ou de carton n'ait pu
combattre la légende de la naissance de Jacme Ier roi d'Aragon, sur le
silence de ce roi lui-même, qui n'en dit mot dans les Mémoires qu'il a
laissés de sa vie. D'autre part, on trouve dans la Description historique
de quelques parties de la France, par Dulaure, qu'en mémoire d'un évé-
nement arrivé à Lyon en 1403, on y dansait, le jour de la Pentecôte, « Le
Cheval Fou *. Un homme portait» à sa ceinture un mannequin en forme
de cheval, lequel était couvert d'un vaste caparaçon qui descendait jusqu'à
terre et couvrait ses deux jambes; deux autres jambes postiches sem-
blaient enfourcher le cheval, et l'homme, avec tout cet attirail, paraissait
faire de l'équitation Il sautait, gambadait, se trémoussait en avant, en
arrière, de manière à imiter les allures d'un cheval qui caracole.
Il est plus que vraisemblable, en rassemblant les diverses danses où le
cheval joue un rôle, tel le « Pouli de Pézénas », dont l'invention n'excé-
derait pas la naissance d'un poulain dans les écuries du Prince de Conti,
pendant un séjour qu'il fit dans cette ville, où il appela Molière, le « Chivau
frus d'Aix », « le cheval fou » de Lyon et la touchante légende de 1' « Ane
deGignac », que l'origine de ces démonstrations quasi aristophanesques
remonte à des causes qui nous sont inconnues.
On peut lire enfin, dans un article du Journal des Débats (2i mai 1831)
à propos du Dictionnaire philologique publié par Noël et Garpentier, qu'on
exécutait à Naples, une « Pantalonnade » rappelant le « Chevalet ».
En Angleterre, au dernier siècle, on dansait le « Hobby-Horse », ou
danse mauresque, « Morris dance; » le cavalier du t Hobby-Horse » por-
tait son cheval tout comme dans le chevalet.
' Plume et Pinceau. — Par M. Jules Troubat. Lizeux, Paris 1878.
100 LA DANSE DES TREILLES
» naître à des époques différentes dans plus d'une localité. Il
» suffisait d'une circonstance où le cheval jouait un rôle pour
» donner lieu à une manifestation de ce genre, et il a pu s'en
» produire une chez les Grecs, à l'occasion du fameux cheval
de Troie. »
De nos jours, le ton s'est radouci; le Chevalet n'est plus un
instrument de guerre, mais un poulain modeste quoique astu-
cieux, autour duquel marchenten dansant, dansenten marchant
« sus l'api, sans cauciga lou grelx » des jeunes gens, nouveaux
éphèbes, qui cherchent à lui donner l'avoine dans un tambour
de basque aragonnais... 2 Ah! la chose n'est pas facile, car la
bête en gaieté remue sans cesse, et envoie des ruades, présen-
tant la croupe quand on essaie de lui prendre la tête, tandis
que les chansons s'égrènent comme d'un chapelet sans fin 3.
1 Expression languedocienne tellement pittoresque qu'elle n'a pas
d'équivalent en français.
2 On sait que la Maison d'Aragon a longtemps régné à Montpellier.
3 Voici, bien que l'usage en soit passé, la chanson très primitive que
chantaient les danseurs autour du cheval : Elle n'a pas de nom connu
d'auteur :
Dona la cibada aou paoure chibalet
Qu'es mort de fam, qu'es mort de set
La flatta
La gratta
Et lou riban vert
A la moda de Vaouvert
En sas abadessas
Et sous abbadis
A la moda de Paris
Si Nimès savien dansa lou chibalet,
Vendrien pas quèré Dupounet (célèbre danseur)
La flatta
La gratta etc., etc. ..
LA DANSE DES TREILLES
101
Cansou de las Treilhas'
Chanson des Treilles
I
Lh ! io tant là !
Passa se vos passa,
Passa dejout las treilhas.
Eh! io tant là!
Passa se vos passa,
Très cops sans t'arresta !
Il
Cap de Jouvent,
Que vas couma lou vent,
Espéra ta poulida!
Cap de Jouvent!
Que vas couma lou vent.
Espera-la que ven !
111
Lou mes de mai
S'espandis fies e gaï,
La rosa es espélida!
Lou mes de niai
S'espandis fres e gaï,
Tout canta mai que mai'.
IV
Lous aucelous,
Sus lous aubres en flous,
Disou sa cansounetta ;
Lous aucelous,
Sus lous aubres en flous,
Kendou moun cor jalons.
I
Et en avant ! — Passe si tu
veux passer, — passe sous les
treilles. — Et en avant! — Passe
si tu veux passer, — trois fois
sans t'arrêter !
II
Chef de la jeunesse, — qui
vas comme le vent, — attends ta
jolie compagne! — Chef de la
jeunesse, — qui vas comme le
vent, — attends, la voici qui
arrive !
III
Le mois de mai — s'étend frais
et gai, — la rose est épanouie.
— Le mois de mai — s'étend frais
et gai, — tout chante à qui mieux
mieux
IV
Les petits oiseaux — sur les
arbres fleuris — disent leur chan-
sonnette. — Les petits oiseaux,
— sur les arbres fleuris, — rendent
mon cœur jaloux.
1 Paroles du félibre Louis Rouinieux. composées pour les fêtes latines
de 1878. Cette poésie, de date relativement récente, a été précédée de
plusieurs autres, où les auteurs, tous populaires, mêlaient la politique et,
plus d'une fois, la critique conjugale à la manière des « cours coculaires » ;
mais comment les recueillir? Ceux qui les chantaient sont morts, et
elles n'ont jamais été imprimées.
102
LA DANSE DES TREILLES
Coum'elos, ieu,
Angeta dau bon Dieu,
Se vos de poutounettas,
Coum 'eles, ieu,
Augeta dau bon Dieu,
Que n'en fariei... bon Dieu !
De même qu'eux, moi, — petite
ange du bon Dieu! — Si tu veux
des baisers. — De même qu'eux,
moi, — petite ange du bon Dieu!
— Que je t'en ferais!... bon Dieu!
VI
Brave galant,
Sen pas au jour de l'an,
Gardas vostras brassadas,
Brave galant,
Sen pas au jour de l'an,
Fourvia vous de davan !
VI
Aimable amoureux, — nous
ne sommes pas au jour de l'an;
— gardez vos baisers ! — Aimable
amoureux, — nous ne sommes pas
au jour de l'an. — Ecartez-vous
de devant moi !
VII
Au mes d'amour,
Poutounejou toujour
Dos amas embrasadas,
Au mes d'amour
Poutounejou toujour
La nioch amaï lou jour!
VIII
S'acos antau,
Vendres à moun oustau,
Vous ie serai proumessa.
S'acos antau,
Vendres à moun oustau,
Moun paire es pas brutau !
VII
Au mois des amours, — s'em-
brassent toujours — deux âmes
enflammées. — Au mois des
amours, — elles s'embrassent
toujours — la nuit comme le jour !
VIII
Puisqu'il en est ainsi, — vous
viendrez à la maison, — on vous
promettra ma main. — Puisqu'il
en est ainsi, — vous viendrez à la
maison, — mon père n'est pas
brutal.
IX
Ma bella enfan !
Per ameïsa ma fam,
A ici la taula messa!
Ma bella enfan,
Per ameïsa ma fam,
De qu'cspera dernan !
IX
Ma belle enfant! — Pour apai-
ser ma faim, — regarde la table
est mise! — Ma belle enfant! —
Pour apaiser ma faim, — pourquoi
attendre à demain.
LA DANSE DES TREILLES
103
Ses pas countent,
Adissias, beii jouvent,
Passas bona la festa !
Ses pas countent.
Adissias beii jouvent!
M'en vau qu'ai pas lou temps !
XI
Oh! jour charmant !
Mignota! prend maman,
Pus tard veiren lou resta !
Oh! jour charmant,
Mignota! pre a 1 ma man
Embé moun cor aimant.
Puisque vous n'êtes pas con-
tent ! — Bonjour, beau jeune
homme! — Que la fête vous
légère! — Puisque vous n'êtes
pas content! — Bonjour, beau
jeune homme ! .— Je m'en vais,
car je suis pressé*-!
XI
Oh! jour charmant! — Chère
petite! prends ma main, — plus
tard nous parlerons d'autres cho-
ses. — Oh! jour charmant! —
Chère petite! prends ma main —
avec mon cœur plein d'amour.
KXECUTION CHORÉGRAPHIQUE DE LA DANSE
DES TREILLES
AVEC FIGUKES ET PLANS DESCRIPTIFS *
La Danse des Treilles2 est ainsi appelée parce qu'au début
elle a dû emprunter sa décoration et ses accessoires à la
la vigne, pendant la période des vendanges, alors que les
sarments sont verts, chargés de pampres et de fruits.
Plus tard, quand on a voulu la danser à d'autres époques,
au printemps, par exemple, on a substitué aux sarments
1 Par M. Antoine Troubat, attaché à la questure du Sénat.
* Nous avons essayé de résumer, non sans considérer combien grande
était li difficulté de paraître clair sur un sujet des plus spéciaux, les
seignements relatifs à L'exécution de la Drmse des Treilles que nous a
fournis un modeste et intelli ivrier de notre ville. Nous le remer-
cions bien vivement ici d implaisance et de son obligeant empres-
sement. Son goût passionné pour celte danse locale, qu'il a pour ainsi
dire ressuscitée, puis fait exécuter aux applaudissements de la foule,
i Montpellier, pendant de mémorables fêtes, soit à Marseille, où il
fut appelé à l'occasion de fêtes de charité, a mis un titre de plus à ceux
qu'il possédait déjà comme maître de ballets populaires.
10 1 I.A DANSE DES TREILLES
des cerceaux enrubannés, agrémentés de fleurs naturelles ou
artificielles, mais le nom primitif est resté.
Son caractère est essentiellement bachique.
Elle se décompose en douze figures, aussi gracieuses les
unes que les autres, précédées elles-mêmes d'une introduction
ou marcbe préparatoire, d'un ravissant effet, et se termine
par un salut final aux spectateurs.
L'ensemble de son exécution doit durer de quinze à vingt
minutes.
On la danse au son du hautbois et du tambourin.
Une vaste place, propice aux évolutions au milieu de la
foule, est indispensable à ses mouvements d'ensemble, qui ne
peuvent produire d'effet agréable à l'œil, qu'à la condition de
s'effectuer avec ordre, régularité et précision, trois qualités
susceptibles de lui assurer de la giâce.
Deux groupes ou couples, chefs de file intelligents et bons
danseurs, un en tête, l'autre en queue, véritables choryphées
ou entraîneurs, sont aus.-i une garantie indispensable de succès.
Enfin, un bon chef, directeur de l'ensemble des mouve-
ments, agissant seul, en dehors du groupe des danseurs, est
aussi nécessaire, pour donner les signaux de départ et d'arrêt,
préciser les mesures d'accord avec la musique, en somme
pour assurer les effets, et guider l'ensemble chorégraphique
exposé quelquefois aux bousculades, et qui plaît d'autant plus
que le nombre des exécutants est plus nombreux.
C'est ainsi que le nombre des danseurs pour les treilles, qui
doit être au moins de douze, peut être porté jusqu'à cent.
Introduction et marche préparatoire
Les spectateurs s'étant rangés en un vaste cercle autour
des danseurs, pendant que ceux-ci s'organisent et se placent
en rangs de deux, ou par files convenues et numérotées
d'avance, le tambourin exécute un roulement de batterie.
Le hautbois sonne un np/>e/, deux ou plusieurs fois répété.
Aussitôt les groupes se forment comme pour un cortège,
le danseur à gauche la danseuse '• droite. Le cavalier saisit la
danseuse à la taille ; celle-ci appuie la main gauche sur l'épaule
LA HANSE DES TREILLES 105
de son conducteur et la treille est élevée jusqu'à Inutcur de tète,
tenue par la main gauche du danseur et la main droite de la
danseuse*.
Chaque groupe se place à un mètre environ de distance du
groupe voisin, et s'aligne correctement. La musique joue un
intervalle de quatre temps, pen 1 an t lequel les danseurs enla-
cés, la treille tlottant au vent, marchent quatre pas.
Au cinquième temps, la colonne entière s'ébranle, les dan-
seurs partant du pie l droit, les danseuses du pied gaucfa.
Chaque danseuse doit relever la tête et fixer son cavalier
'l'un regard aimant, tandis q'ie celui-ci, sans perdre de vue
sa ligne de distance, et son alignement par files, simule avec
sa danseuse une tendre causerie.
Ainsi disposés, les groupes constituent de vrais types de
Watteau, s>) us leur costume léger, enrubanné et pastoral
autant que possible.
La musique in lique que tout le ballet doit exécuter ainsi
quarante-trois pas de marche préparatoire. Dès que ces qui-
rante-trois pas sont exécutés, et au moment où le hauthois
prend une allure plus vive et plus sautillante, précurseur de
la véritable danse qui va commencer, les danseurs changent
la treille de )/iain, les groupes se désenlaccnt, tournent sur eux-
mêmes, et forment une treille plus élevée et plus largo appelée
Grande Treille. Ils la tiennent, dès lors, très élevée pour que le
passage puisse s'effectuer librement au-dessous, par les dan-
se 1rs, chacun à leur tour, et toujours par groupe de deux.
Cette première introduction bien exécutée forme, nous ne
saurions trop insister, un tableau délicieux d'ensemble qui
dispose favorablement l'attention des spectateurs.
Ce mouvement de passage sous la treille commence simul-
tanément et sans interru[it:on dès que le dernier groupe, c'est-
à-dire le groupe de queue, a formé la grande treille. Les autres
groupes suivent jusqu'à ce que la grande treille se soit refor-
mée en petite treille pour l'exécution d'une autre figure.
1 Nous avons vu, pendant L'exécuti m d'une /> <i nse dus Treilles, certains
groupes porter, par un mouvement gracieux cl naturel leur cercle enru-
banné derrière leur tète, appuyé sur leurs épaules; c'était charmant et
rappelait par certains cotés le groupe gracieux de « Pendant l'oragi
ilu peintre Cot, originaire, comnu» on sait, de Rédarieux.
106 LA DANSE DES TREILLES
COUPLE SOUS LES TREILLES COUPLE HORS DES TREILLES
PETITE TREILLE GRANDE TREILLE
J#*1
Planche I Planche II
Promenade sous la grande treille
Disons tout d'abord que le pas invariable de cette danse se
décompose en deux mouvements : un pour poser le pied à
terre, deux pour faire un léger sursaut sur le pied quel qu'il
soit, en accélérant l'allure selon que l'indique la musique. Au
dernier temps de l'introduction, les danseurs tombent du pied
droit, les jeunes filles du pied gauche, les groupes se meuvent
en avant en conservant leurs distances, pendant que le haut
bois joue deux reprises.
Dès que le guide de tête est passé sous toutes les treilles, les
bras se détachent ; chaque groupe fait une pirouette en avant,
Toujours en marquant le pas sauté, et garde la treille dans
lamême main. Par ce mouvement, le guide de tête se trouve
placé derrière celai de queue, et ainsi de suite, en conservant
autant que possible les distances jusqu'à ce que tous les
couples soient passés sous leur propre treille.
Quand la colonne entière a défilé sous la treille que tien-
nent élevée les guides de tête, ceux-ci reprennent leur marche
en avant, suivis de tous les danseurs qui se trouvent de nou-
veau replacés comme avant l'exécution de cette figure, c'est-
à-dire en forme de cortège.
Ce mouvement peut être renouvelé par les guides de queue,
comme il a été exécuté par ceux de tête ; l'évolution se fait
LA DANSE DES TREILLES 107
alors comme dans tous les mouvements oh la gauche devient
tète de ligne.
FIGURE DU PASSAGE SOUS LES TREILLES
^^V »
pi. m
Promenade hors des Treilles
Le plan chorégraphique reste le même, c'est-à-dire toujours
une ligne droite, parallèle à une rue, un boulevard.
Nous avons laissé les danseurs en marche sautée, la tète de
queue gauche en avant (en supposant que le mouvement ait été
exécuté par la gauche, ad libitum).
Dès que la dernière file est passée sous la treill , le chef
directeur, agissant en dehors des groupes, laisse terminer la
reprise du hautbois et, au signal qu'il donne, tous les groupes
108 LA DANSE DES TREILLES
reviennent sons la treille, sans changer le cerceau de main, en
donnant le bras droit à leur danseuse, comme cela a dû se faire
dès qu'ils en étaient sortis. La colonne fait face en arrière, et
les danseurs se trouvent placés comme à. l'introduction. Seu-
lement, au lieu d'être enlacés par la taille et sur V épaule, ils se
donnent le bras.
Jusqu'à la fin de la reprise du hautbois, ta colonne continue
de se porter en avant. A ce moment les guides de tête, rede-
venus chefs de file, ouvrent le passage hors des treilles, en disjoi-
gnant l s bras sans changer la tre lie de mains, par un demi-
cercle en avant, et faisant face en arrières, afin que chaque
danseur puisse passer sous la grande treille, ainsi reformée
successivement par chaque groupe de danseurs, quand ils
sont passés.
Lorque toute la colonne a ainsi défilé, chacun ayant grand
soin de ne pas perdre de vue le guide de tète; au signal que
donne celui-ci, chaque danseur (end de nouveau le bras droit à
sa danseuse et se porte en avant.
A un nouveau signal du chef, tous les couples font face en.
arrière, par un demi-tour en dedans, changent la treille de
main, et chaque cavalier offre de nouveau te bras gauche à sa
danseuse.
Le guide de queue redevient guide de tête et se porte en avant
suivi de la colonne entière, sans jamais interrompre le pas sauté.
A la fin de la reprise du hautbois, il exécute à son tour (ad
libitum comme pour la première figure), le passage des treilles,
gauche en tête, dans ce cas, opérant cette fois le mouvement
de gauche à droite pour les danseurs et de droite à gauche pour
les danseuses, hu moment de sortir de la grande treille, et le
contraire pour y rentier.
Quand tous les groupes ont effectué le passage hors des
treilles, la colonne se reforme comme elle était avant, c'est-
à-dire que le guide de queue se retrouve placé chef de file en tête,
attendant soit la reprise de la musique pour recommencer la
figure quand le public la redemande, ou pour se porter en
a vant sur un signal du chef.
LA DANSE DES TREILLES
109
FIGURE DU PASSAGE HORS DES TREILLES
PI. IV
Double cercle en forme de huit
Cette figure très gracieuse, quand elle est bien rendue, est
celle qui présente le plus de difficultés pour son exécution.
Les groupes doivent, autant que possible, être en nombre
pair, soit trente groupes, par exemple, pour que l'ensemble
offre un caractère suffisant.
La colonne se divise en deux groupes qui, mentalement, se
numérotent, celui de tète et celui de queue formés de quinze dan-
seurs pour chaque.
Ils se formant, d'abord, en cercle, de la façon suivante : Au
no
LA DANSE DES TREILLES
moment où tous les danseurs sont en ligne sous la treille, le
guide de queue en tête, les couples nos 13 et 16, lettres A et B,
pour la simplification de la planche que nous donnons plus
loin, étant au centre de la ligne, opèrent au signal du chef
leur séparation, et forment :
Le 1er groupe de tête, de 1 à 15, et le 2e groupe de queue, de
16 à 30. "
Le guide de tête fait opérer à son groupe un mouvement de
face en arrière, les danseurs changent la treille de mains, la
prennent de la main gauche, et donnent le bras droit à leurs dan-
seuses.
Le deuxième groupe exécute le même mouvement en sens
inverse, et la séparation est formée comme dans la figure
ci-dessous.
SEPARATION DE LA COLONNE EN DEUX GROUPES
té jt
w\
*5Çt *&+ -A, H-
Pl. V
Dès que la séparation des deux groupes est opérée, les deux
guides de chacun, sans trop élargir le plan chorégraphique, se
mettent en mouvement d'une façon circulaire par une conver-
sion respective, le groupe de tête par la gauche, celui de queue
par la dro te, et marchant à la rencontre l'un de l'autre, suivis
des files, sans cesser toujours de sauter en cadence en mar-
chant.
Au momentoù les deux guides se rencontrent et se coudoient,
les cercles doivent être à peu près formés.
LA DANSE DES TREILLES
Il 1
FIGURE POUR LA FORMATION I>KS CERCLES
*
PI. VI
A /«/r rencontre, choque guide vient passer par le centre ju?-
q u'à ce que chacun ait pris sa distance respective, derrière la
dernière file de chaque groupe.
Au point de contact, qui s'opère par cette nouvelle conver-
sion vers le centre, les guides peuvent se trouver quelque
peu confondus ; mais il suffit d'accélérer ou de ralentir l'allure
de part et d'autre, pour que la rencontre s'opère régulière-
ment au centre, point de contact, et les deux cercles se trouvent
formés comme dans la figure ci-après.
i
DIVISION DU GRAND CERCLE EN DEUX EGAUX
I
^■i#
*****
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ç
i
*
PI. VII
i
ê
\J
112 LA DANSE DES TREILLES
Au moment où les deux guides opèrent leur rencontre au
point de contact, celui du groupe de têle abandonne les files
qui suivaient, entre dans le cercle du groupe de queue. Celui-ci
(chef du groupe de queue) opère le même mouvement dans la
treille formant la dernière file du groupe de tête, et ainsi de suite
pour tous les groupes, jusqu'à ce que la figure en forme de 8
soit formée comme dans la figure ci-dessous :
FORMATION DU CHIFFRE 8
k j? 4 /*■
PI. VIII
Cette figure, très gracieuse, et contre laquelle on ne saurait
se rebuter à cause des difficultés qu'elle présente, plus diffi-
cile du reste à expliquer qu'à exécuter, étant formée, chaque
groupe doit passer au moins une fois sous la treille du même pas
toujours sautillant et cadencé.
Quand l'évolution de tous les groupes est complète et que
les guides de tète et de queue sont revenus au point de contact,
ils font une pirouette en avant et laissent passer sous leur treille
le groupe qu'ils rencontrent. Chaque file, une fois passée, fait
les mêmes pirouettes et mouvement.
Supposons, comme normalement cela devrait être, que
celte rencontre au point de contact ait été faite par les guides de
tête et de queue, après un tour complet de chacun dans le cercle
de huit, en arrivant devant le guide de queue, celui de tête se
détache du bras de sa d nseuse sans lâcher la treille, s' écarte suffi-
samment pour laisser passer le groupe guide de queue, en élevant
suffisamment la treille pour faciliter ce passage, fait une nou-
LA DANSE DES TREILLES
113
velle pirouette en avant, et, quand il l'a terminée et que le
couple qu'il avait rencontré est passé sous la treille, chaque couple
guide se reprend par le bras et continue de parcourir le plan en
forme de huit, suivi de tous les couples jusqu'à ce que tous y
soient passés.
Les deux guides arrivent ainsi à se rencontrer encore au
point de contact, et la figure est terminée.
Les Dais
Pour l'exécution de cette figure, les deux groupes guide de
tête et guide de queue se trouvant à côté changent le plan et
marchent côte à côte devant eux, suivis de toutes les files
comme dans la figure suivante :
REPRISE DE LA COLONNE APRES DEFORMATION DU HUIT
Dès que les groupes bien alignés et accouplés par deux ont
défilé jusqu'au moment où les chefs de tête et de queue arri-
vent à une même hauteur de ligne, ils se rompent pour se placer
en forme de dais, à l'aide des treilles, comme la figure de dessous
l'indique, de quatre en quatre.
FORMATION DU DAIS
PI. IX
Pour opérer ce mouvement au signal que donne le chef, à la
fin de la reprise du hautbois, les deux guides se mettent ensemble
par couples; soit :
S
114 LA DANSE DES TREILLES
le couple n° 1 avec le couple n° 30
— 15 — 16
— 8 — 23
— 2 — 3
_ 4 — 6
— 6 — 7
— 9 — 10
— 11 — 12
— 13 — 14
— 17 — 18
— 19 — 20
— 21 — 22
— 24 — 25
— 26 — 27
le couple n° 28 avec le couple n° 29
En supposant que les danseurs sont au nombre de trente,
et ainsi de suite, s'ils sont plus nombreux.
Figure du Serpent
Puis les danseurs se remettent en colonne double, en deux
groupes, comme à l'avant-dernière figure ci-dessus ; seulement
ici, le groupe de queue, ou de gauche, doit avoir à sa tête le guide
de queue et en queue le guide du centre; le groupe de tête, ou de
droite, doit avoir à sa tête le guide d i centre, et en queue te guide
de tête.
FORMATION DU SERPENT
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& ^l 4 ^^
pi. x
LA DANSE DES TREILLES
115
Les danseurs ainsi placés, le chef de guide ou de file, de
chaque groupe, fait une conversion par file à gauche, suivi des
autres groupes, comme dans la figure suivante qui indique la
position chorégraphique au moment où les groupes se rencon-
trent, pour se rejoindre en une première ondulation.
Le guide de queue, ayant continué de se mouvoir toujours droit
devant lui, suivi de toutes les files de danseurs, il arrive un moment
où la colonne se trouve placée en lige droite compté e, composée
comme dans la figure ci-dessous:
REFORMATION DE LA COLONNE
a, %
% % % %
PL XI
A ce moment, le chef directeur donne un signal: chaque
ieune fille change la treille de mains et vient se placer derrière
le danseur qui la précède, très rapprochée de celui-ci, de façon à
ce que les couples continuant la cadence en dehors des treilles ne
forment plus quune seule treille ou ligne d'ensemble, comme
dans la figure suivante :
FORMATION DE LA TREILLE EN LIGNE
PI. XII
La danseuse, guide de queue, commence alors le mouvement
d'ondulation du serpent, en passant sous sa propre titille, suivie
116
LA DANSE DES TREILLES
*»
de son cavalier ; elle pénètre successivement sous chaque treille,
et tous les couples à la suite exécutent le même mouvement qui
offre un coup d'oeil des plus attrayants, soit :
ONDULATIONS DU SERPENT
-v&H<
PL XIII
Aussitôt que la jeune fille qui a commencé les ondulations
arrive après le guide de tête, elle se place à la suite, pour laisser
passer tous les autres couples, jusqu'à ce qu'après le passage
complet, elle soit redevenue avec son cavalier, tête de colonne.
Quand tous les danseurs sont passés en sautillant sous la
treille du guide devenu tête de colonne, le cavalier donne le bras
à sa danseuse et revient sous la treille. Puis, le couple va droit
devant lui, jusque ce que la colonne soit reformée en ligne. Sur
un signal du chef, ce mouvement se répète en sens inverse,
et c'est le guide de tête qui reprend la tête, par un mouvement
opéré par la droite.
Salut final
Quand la figure du serpent est terminée, la colonne se trouve
reformée en ligne droite absolue dirigée par le guide de tête.
Celui-ci se porte alors en avant, de façon à passer à un point que
lui indique le chef, soit une estrade, ou un point quelconque
au milieu de la foule, d'où sont partis les applaudissements par
exemple. Tous les danseio*s le suivent, et pour former autant que
possible le fer à cheval, il va rejoindre, à une distance évaluée
selon le nombre d'exécutants, le guide de queue.
Quand ces deux guides sont arrivés à se trouver sur une
même hauteur de ligne, le plan chorégraphique présente à peu
près la forme d'un hémicycle.
LA DANSE DES TREILLES
117
Le hautbois joue ses dernières mesures... Chaque danseur
fait sur lui-même trois pirouettes, en les espaçant selon la
cadence de la musique, et sans jamais cesser de sautiller, et
termine l'exécution de ce charmant et délicieux divertisse-
ment, en se penchant, les treilles levées, comme pour un salut,
vers le point à honorer, en se tenant sur un pied, l'autre levé et
allongé !
Ce salut termine la Danse des Treilles. Les danseurs se repla-
cent en bon ordre de marche en un groupe resserré, pour aller
recommencer un peu plus loin leurs évolutions, et la danse
du chevalet commence.
Fernand Troubat.
MUSIQUE DE LA DANSE DES TREILLES
Notée par M Coquelin, ex-chef de musique au 122e régiment de ligne
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1 Cet air de danse n'a pas d" nom connu d'auteur. Il nous a été
communique par l'aimable bibliothécaire M. Gaudin.
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
(Suite)
185
EN PEIROLS
(= B. Gr. 366,2)
I. (p. 177) Atressi col cirues '
[fai
Can vol morir chant
Car sai. qe plus gent mor-
[rai
E ab meignz dafan
5 Pro magra mortz tengut
[ellatz
E maingz trebails nai suf-
[fertatz
E pel dan caoras men ve
Conosc cane mais nô for-
[fei re.
II. Doncs 2 cal cosseil penrai
Saissi muer amanz
Ni ioi non atent de lai
On mei sospir van
5 Jes non sen part ma volun-
[tatz
Sitôt men siu 3 desesperatz
Pensius e cossiros me ten
La bella de cui me soue.
III. Tant bella domna nô sai
Deus per qe val tant
Cant ieu ia nô lhauzarai
Dire mon talan
5 Gent macueil & ha bel so-
[latz
E del plus sui mal cosseilatz
Qe sieu la pregaria 4 de re
Adonc crei qesgardes de
[me.
IV. Pregar lai on no seschai
Tornaz enoig gran
Ses parlar la preiarai
Con al bel semblant
5 & cel mentenda sil platz
Caissi doblaral dos el gratz
Qant vs cors ab autre saue
E cant om ses qerre fai be.
V. Franchez e humiltatz trai
Amors enant
Caltz paratges la dechai
Quel rie son truan
5 Qel miels de totz vei sor-
[deiatz
Per qel segles es sordeiatz
E dona que bon pretz man-
[ten
Nom am per ricor sais noi
[ve.
VI. Chanzos a la bella vai
E non qweu lheniant 5
Beil podetz lo meu esmai
Contar ses mon dan
5 Digatz lim qa leis ses do-
[natz
Mos coratges e autreiatz
Sieus soi e sieus serai iasse
Morir mai per ma bona fe.
1 /. : cignes — 5 /. : D. e — 3 /. : sui — 4 pregaua — ! /. : q. 1 re mant.
LE CHANSONNIER DE BEHNAUT AMOHOS 121
Vil. Domna del mon qo mais me
[platz
Joi si ab vos on qe siatz
Qeu non vos auz preiar de re
Mas seuals pensar o puesc
[be.
186
EN PEIROLS
(=B. Gr. 306,11)
I. Deusa la razon qeu sueil
Mer a chantar per usatge
Qe no mora ni macueil
Ma don el sien senjoratge
5 Bem trairon sei bel oill
Com a fais messatge
Can me meiron en coratge
Samor don mi dueil.
II. Sim fai tort nim mostror-
[goeil
A mi es grieus e saluatge
Per ' si là e la veil
Qieu non sai penre autre
[gatge
5 Qan viest e qan mi despueil
Consir mon dâpnatge
E conosc qe gran follatge
Faz car no men toil.
III. Tolre nom puesc eu ges me
Per mal qelam fassa traire
Anz mi platz sabetz per qe
Conoissera seu lam gaire
5 Qiestiers non er hom ia
[ben
Vertadiers amaire
Tro qe non sen pot estraire
Per neguna ren.
IV. [p. 17$) Tant mi plaz per
[bona fe
Cant aug de mi donz rc-
[ traire
Lonor el pretz qil mante
Cab leis son so mes vejaire
5 E cant eossir mesdeue
De nul autrafaire
Samors mo ven tôt desfaire
Neus 2 lo pro qem ten.
V. Tant nai estât consiros
E sufert tan grieu martire
E grieu trebail angoissos
Qe del esperanzam vire
5 E ia sauals sieu en fos
[ •]'
Sai ben ca prop lo dezire
Forai iois plus bos.
187*
EN PEIROLS
(=B. Gr. 366, 5)
1 . Ben * no val hom ioues qe
[nos periura
Per saluar plus cant er tuel:i
[sagramen
E sieu per mal ni per paor
[deuein
Couenc a dieu qeu non chan-
ges aora
5 Pos nostre temps si meil-
[lura
Trobarai qefo teicmespres
[E perdon me deu fai7 mes-
pres].
1 /. : P. o — 2 l.'i Veus — 3 /. : Al dereir jauzire.
* Voyez l'édition donnée par M. Chabaneau dans laRev. d.l. r. IV. s. t.
IJ,p. 570 s.,— *CA.:Ren?— s Gh. I .:eJ tucl( — toi)? — « Ch. I. .-es?
- t Ch. .-s"ai
122 LE CHANSONNIER DE
II. En respcig son dauer bona
; Ventura
Car ades ai maltrag e mon
[iouen
Mais anc nom plac soiornz
[entrauol gen
Per cai maint iorn e mainta
[noit escura
5 Suffert e chautz e freidura
Që loingnes de vilas paies
E per segre com pros e cor-
[tes.
III. Jamais nuls hom non faria
| rancura
De mercadiers so sai cer-
[tanamen
Se vezion con gazaignon
[largen
Ni cos meton e ' mar ad
[auentura
5 De tôt me sui donatz cura
Can an lor temps e non lan
[ges
Tôt mo tieng a soiorn de
[près.
IV Anc la bella ben faita per
[centura
Non desirei mais cara per
[un cent
Non dezir mais e garbir 2 e
[ponent
E 7 autres venz. con i si fan
[per mesura
5 E net port a gran largura
Com conosca can son 3
[temps es
En blachas non sab 6 ies
[qe ses.
BERNART AMOROS
V Sanc baordei ni anei dam-
[bladura
Per caual pren nostra7 nau
[can cor gent
E per escut 8 la grant vêla
[al vent
E per lanza lantenna fort e
[dura
5 Per esperon larsiura9
Els timos prenc per fres
E per sella e per arnes.
188
EN PEIROLS
(= B. Gr. 366, 8)
I. Quora camors veilla
Eu chau
Cautra flor ni fueilla
Nô irai gardan
5 Ben es dreitz qen doilla
Amant
Sol qen grat mo cueilla10
Sil cui ieu mi coman
Perdut ai
10 E cobrarai
Jes nô recres " per tan
Caissis val segles camian.
II. (p. 179) Dieusmaiut em val-
[lia
Qantan
Ai damor ses failla
Mas non ai ogan
5 Qeran mou batailla
Tan gran
Al cor e tradailla 12
Dormen e veillan
i Ch. :en - 2 C/i..-garbin — * Ch.
Et — ' Ch. : can
s Ch.I. .-bon?
— 5 Ch. : sap — 7 c. en : uostra — 8 Ch : estut, l. : escut — n Ch
l. : amura?. — 10|c en : tueilla — " /. : recrei — n L : trabailla
LE CHANSONNIER DE BERNANT AMOROS
123
Per co fai
10 Qal miels qeu sai
La serf & blan
Per zo vei qe mi ai dan.
III. Mos cors sail e trembla
Soen
Mamia lo membla
Si qeu nô o sen
Quil marna son sembla
Comen
Qel siens digz resembla
Mon pensamen
Donc dirai
10 Qe molt mi plai
Suffrir aquel turmen
Don eu tan rie ioi aten.
IV. Nuls hom ben nom ama
Ni g-^n
Qi damor se clama
Si tôt mal li en pren
5 On plus menliama
Greumen
E mart e maflama
Nai meillor talen
Aisim trai
10 Mos volers lai
El fol contenemë
On mes maintas ves par-
V. Ben bas fora meza [uen.
Valors
Deportz e gaieza
Si non fos amors
5 Qe mante proeza
Totz iorns
E fai qe corteza
Car prê los meillors
Non seschai
10 Dôme sauai
Jall venga tant donors
Qe damor senta dolors.
VI. Eraus qier amia
Socors
Qenanz i morria
Qen qezes aillors
5 Asatz trobaria
Dautors
Vos es senz fadia
Una de las genzors
Mos cors gai
10 En gran esmai
Entre sospirs e plors
Ma tôt mes ioi e douzors.
VII. Peirols fai
Fin e verai
Lo sonet per amors
On sos cors estai totz iornz.
189
EN PEIROLS
( = B. Gr. 366,1)
I. Ab gran ioi mou maintas
[vetz e comenza
Zo don hom pois a dolor e
[cossire
Per mi o die cai folla conoi-
[senza
Dun feing semblan. Abqem
[trainet gen
5 Cil on anc plus mentendei
[finamen
Cadonc fui ries qesser cuiei
[amatz
Era ses fort totz mos afars
[cambiatz.
II. Amors ab pauc de vera man-
[tenenza
Non o pois mais celar ni
[escondire
Li fais aman qis fan ' en
[ paruenza
i /. : f. fin
124 LE CHANSONNIER DE
La dechazon per lor galia-
[men
5 E las donas si nan colp eis-
[samen
Capeoas er neguns drutz so
[sapiatz
Qe non engan o no si enga-
[natz.
III. {p. 180) Ma doHam fai morir
[per tal faillenza
Qeil sta ' mal seu lo auzaua
(dire
Cil al pechat et eu la pene-
[denza
E ges noil trop ochaizon de
[nien
5 Pezam car ai tam bon razo-
[namen
Trop es mos dreitz conogutz
[e prouatz
Mais 2 fos mensonja la ver-
[tatz.
IV. Ai tan grieu mer saissi pert
[mentendenza
Del bon esper on sueil mon
[cor assire
Pero trop nai orgoilloza
[temenza
Cab mal talen. lencolp e la
[repren
5 E si sai damor. ieu3 lo meil-
[Ior sen
Com ia de ren no sen fezetz
[iratz
Mais qi saubes so mal suf-
[frir em patz.
V. Contra mi donz non puesc
[auer temensa
Qant eu lesgart e vas mi la
[vei rire
BERNART AMOROS
Tota mosta lire, la maluo-
[lenza
La so amors qim destrein.
[douzamen
5 E sanc mi fez mal. ni aira-
[men
Qan pais mos oils glotos sa
[granz beutatz
Cuiatz la donc li voilla mal
[no fatz.
VI. Solatges ; es qi son afar bis-
[tenza
Nom tenrai mais daizo qieu
[plus dezire
Mais voil qa tort ma douz
[amigam venza
Qe per mon dreg plor ni
[plagna souen
5 Merceil qerrai des lo sieu
[faillimen
Tôt enaissi con er sa volun-
[tatz
Cab lieis nom pot nulsplaitz
[essermaluatz.
190
EN PEIROLS
( = B. Gr. 366/2'.»)
I . Cant amors trobet partit
Mon cor de son pensamen
Duna renson5 massalit
E podez auzir comen
5 Amies peirol malamen
Vos anas de mi lanian
E pos e ml ni en chan
Non er vostre entencios
Digatz pois qe valres voz.
II. Amors tan uos ai seniit
■ /. : estai — J l. : M. volgra — 3 /.: s. ieu damor — * l. : Folatges.
B /. : tenson
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
\>:
E nulspechat1 nous en prê
E vos sabes cani 2 petit
Nai aut de iauzimen
5 Nous oohaizon de uien
Sol qem fassatz derenau
Bona patz als nous demanz
Qe nuls autres guizardos
Nom poiri esser tam bos.
III. Peirols mètres en oblit
La bona dona valen
Qe tan gen vos acuillit
E tan amorozamen
5 Tôt \>er mon comâdamr
Truep auez leuger talan
E non era gez semblam
Tan gais e tan amoros
Eratz en vostras chanzos.
IV. (p. /<S7) Amors anc mais no
[faillit
Mas ar fail forsadamen
E prec dieu qen r> guit
E qem trameta breumen
5 Entrels reis acordamen
Qel secors irai4 trop tarzan
& auria mestier gran
Qel marqes valenz e bos
Nagues mais de compai-
[gnos.
V. Peirols turc ni arabit
Ja per vostres vazimen5
Non laissaram tor dauit
Bon conseil vos don e gen
5 Amas e chantas souen
Ires vos eil6 rei noi van
Veias las guerras qen fan
Et esgardatz dels baros
Cossi trobon ochaizos.
VI. Amors si li rei noi van
Del dalfin vos die aitan
Qe per guerra ni per vos
NO remanra tant es pros.
\ 11. Peirol maint amie partran
De lue amigas ploran
Qe si saladis no foz
Sai remazeron ioios.
191
EN PEIROLS
( = B. Gr. 404,4 )
I . Lo clar temps vei brunezir
Els auzeletz esperdutz
Qel fregz ten destregz e mutz
E non an soign desiauzir
5 Et eu qi de cor suspir
Per la genzer res7 qanc fos
Tan ioios
Sui qades mes vis
Qe foill e flors reuerdis.
II, En amor son mei dezir
Qa lei seruir sui rendutz
E pois tan rie ioi madulz
A mi donz o dei grazir
5 Qel miels del mon sai chau-
[zir
Si feira chascun de vos
Volontos
Si vos acuillis
La bella cui sui amis.
III. Amis 8 sui e serai
Aitan qan la vida dur
E nous cudes qeu peiur
Fmantz me meillurarai
5 Qel pais on ella estai
Mir e soplei e acli
Ab cor fi
E vir lai souen
1 /. : pietat — 2 /. : cum — 3 /. : qem sia — ' l. : vai — $ l. : vostr cnua-
zimen— 8 1. : sil. — M : genzor re — * l. : Sos amis
126 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
Los oills qe als non enten.
IV. Haidieusqal dostra cham1
[fai
A leis vezer ters 2 e mur
Mas en aizo masegur
En un messatgier qeu nai
5 Mo cor qi souen lai vai
E conorta menaissi
Qendreit mi
Nol voill ni enten
Amis ni precs no cossen.
V. E seus en die mon conort
No mo tengas a orgoill
Qar aitan lam e la voill
Qe sera confes de mort
5 Nô qerria dieu tan fort
Qe laissus em paradis
Macuillis
0 qem dez léger
Duna noig ab leis iazer.
VI. (p. 182) Tant lai assis mon
[confort
Qe pe?- nuill autra nô dueil
Ni autramor nom acoill
Dont ial fassa dreg ni tort
5 Qar la bona fez qeil port
A si mon coratge pris
A deuis
Qe qant siu iazer
La cuig e mos bratz tener.
VII. Si con ieu die ver
Mi don dieus de leis poder.
[192 (ca 132)]
PEIROL DALUERNIA
(c f. 86 r°)
(= B. Gr. 366, 3)
I. Ben dei chantar pois amor
mo esegna
Em donaengein qeu J sapcba
[bos motz faire
Qar sil nô fos ia nô fora
[chantaire
Ni conogutper tantasbonas
[gen
5 Mas era crei & sai certa-
[namen '
Qar tôt lo ben qe ma fait5
[me uol uendre.
II. Seunô soi druzhom no me 6
[pot défendre
Qa tôt lo mens no sia fis
[amaire
Francs & suffrenz humils e
[merceiaire
Ses trop parlar e de bon
[celamen
5 En aital guisa & per aital
[conuen
Mautrei a leis qi 6 retener
[nom degua.
III. A fors damor alen qe iois
[me uegna8
E pot esser mas me nô es
[ueiaire
Tant es bella & pros e de 9
[rie afaire
1 1. : destrecham — il. : tors.
L.S.: L'ordre des strophes dans L. S. est: I: 1, II: 5, 111:6, IV : 2,
V : 3, VI : 4 — 3 d. gien con — * sai e conosc ueramen — 6 qanc mi fes —
« d. res no mo — ' M. celei qe — 8 Esfors de me non a ren qun reuei-
gna — » Qel es tan bels e de tan
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOHOS
127
Coinda o plasenç en fait >X.'
[en ' paruen
5 Per qeu sai ben samor 2
[raison enten
Qil non degues tan bas uas
[me descendre.
IV. Qe farai donc recreirai me
[datendre
Non eu mais am tôt U'ps
[perde ; mal traire
Qeu non uoil reis esser Di
[emperaire
Per qe de leis ostes 5 mou
pensamen
5 Don soi ben ries sol qeu
[lam6 finamen
Grans honor mes qe samor
[me destregna.
V. Relia dôna qalqe fais entre-
[segna
Mi fesez 7 don mallegre e
[mesclaire
Pois conoisez qeu 8 no men
[puesc estraire
Ab bel semblan paisetz 9 lo
[mal qeu sen
5 Qaissim podez!0trainar lonia-
[men
E de mô cor qauez tôt" un
[pauc rendre.
VI. Bona domna ben lo1* deuez
[entendre
Qeu uos am tant nous aus
[preiar de gaire
Mas uos es tan franca e de
[bon aire
(Jades13 naurez merce mon
[escien
5 Lo meu fin cor gardaz14 el
[meu talen
Ja de uostra richesa nous
[souegna.
[193 (ca 133.]
PE1ROL DALUERNIA
(c f. 86 v°)
(= B. Gr. 366, 19)
I . Manta genz me15 mal rasona
Qar eu nô chant plus souen
E qi daiso mochaisona
Nô sab jes qan loniamen
5 Ma tengut en greu pensamen
Cil 1C qe mon cor empresona.
Per qeu perd esbaldimen 17
Tal desconort me18 dona.
II. Pero sim19fo dolça & bona
Ma domna al comensamen
Mas er nom acoil nim sona
Mas aisi eu.20 lautre gen
5 Qar conois qeu lam21 fina-
[men
A 22 cum mal me ghider-
[dona 23
Amors fara fallimen
Saqest tort li perdona.
III. De trastotioimi24 deslogna
Ma domna e nô les honors
Qab qalqe plaçen menço-
[gna
Me pogra far rie 25 socors
1 Pros e corteza e fai tan gen — *s8ma — a giqirai mi — " t. em per-
don — s parta — 6 No son pro ries sieu ben am — 7 Mi l'ait/, si uals —
8 qe — 9 paissetz — '«• poiretz — n tout — l2 o — 12Perqe — i* gardatz.
L. S.: ie mi — i6Cel — i' Non a point de chauzimen — i8 Grant d.
mi — 1;' Moût mi — 2o Assi con — 21 Qieu c. be — "Ai — 2;) guizardona
— 24 tola ioiam — Jit;en
128
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
7) Er sai qe non es mas folors
A qesta atendensa longa1
Don ai fait tantas clamors
Qanta mes2 e uergogna.
IV. E partirai men eu 3 nô ia
Qe sos preç & sa ualors
Mo deueda emo calogna
E quant en * cuid amar
[allors
5 Per tôt lo cormintra lamors
Si cum fai laigua en les-
[pogna
Toz têps me plairai dolors
Cum qem destregna em po-
[gna.
V. Ades uoil qamors massailla
Noit & iorn5 maitin e ser
E ses la sua6 battailla
Non uoil mais7 repausauer
5 E 8 seu nô ai tôt mon uoler
Tais es cil qaisim trabailla
Qel mon non a mais 9 pla-
cer
Que lo meu mal traitz
[uailla.
VI. Lansengani diuinailla10
Denoios nom cal temer
Sol pensars de leis nom
[failla
Res no me pot dan tener
5 El consirs ont eu maleser "
Pais me miels dautra1' ui-
[tailla
Per mal qem fassa doler13
Mos cors no sanuaiila11.
[194 (ca 135)]
PEIROL DALUERNIA
(= B. Gr. 366, 13)
I. Dun bon uers uau pensan
[com lo18 feçes
Qamors madui16 lochaison
[el talan17
Em fai estar del tôt al seu
[coman
Si que mon cor na retengut
[en gage 18
5 Trop19 demôstra uas me20
[son poderage *'
Qera mauci lo trebail on
[ma mes
Per tal dôna qen dreit meno
[satagn. 2t
II. Aqestam plaiz mais de ne-
[guna res
Alei mautrei liges desere-
[nan
E sil nom uol mi qen qal
[quatertan
Serai aclis uas lo seu segno-
[rage
5 Cum seu lagues fait certan
[homenage
E serja23 granç torç qi men
[tolgues
Lo désirer pos tôt lais men
[sofragn. 24
III. Ben25 uoil samor mais qere
[non laus 26
• entendensa lonja - 2 nai- 3 Partir men ai - * ieu - 5 Em guerrei
—e Contra la soa- ' qier ia- » Car - s n. es nuls - i» Lausenja m deui-
nailla — " c. maigre paisme — i2 de null autra — » Per ren qeu nai
em poder — u non senuallia.
L. S.:**dei pensar cossil — « madus — " talen — « gatge — 19 Troep
_ îo e mi — *' poderatge — 22 satain — " faria — 24 sofrain — 2t Truep
— ib qerre n. 1. ges
LE CIIAXSuXXIEK DE BERNANT AMOROS
129
Esters qab diz ' cuber/ li 2
[uau parlan
Mas sil uolgues esgardar
[mon semblan
Xô calria 3 plus uertader
[mesagc
5 Qa4 sol lesgart pot homben
[per usage
Lo pensamen conoiser tal
[uez
E membres li qassaz qer
[qis côplagn. 8
IV. Ben sai qeu lam sil amarme
[uolgues11
Mas leis nô cal Li non i a
[gran dan 7
Cuidaz 8 uosdonc qe sis uai
[/jerpensâ9
De sa ualor ni de son rie
[lignage
5 Qe nol deia esser fer e10 sal-
[uadge
Pero ualer sol en amor
[merçes
Vens" lesperança on ma
idolor refragn.12
V13. Aqest conorz nô es mais
[nescies
Qar enlv amor pos trop uai
[trainan15
Xon deu hom pois auer
[fiansa gran
Qe farai donc partrni me1G
(c f. 88 r°) de follage
5 Xon eu perqe far i n uoil
[mon dânago
Aissi com cel qal iogai
[emprea
Qe perd & perd per respeit
[de gadagn. '*
VI. Tendra me donc ia pro19 ma
[bon a fes
Qeu non am ges per esqern
[cum sil 20 fan
Qi son fegnet 21 galiador
[truan
Fais mensonger & ab 22 uo-
[ler uoladge
5 Anz ai en lei si assis23 mon
[coradge
Qora
2'i
îorn noit an set-
[mana e mes
En un désir25 son ades &
[remagn.26
Vil. •" Souen a hom per trop28
[sen gran dfipnadge
E de29 foldaz uen mantas
[ueiz grans bes
Domna en aqest auentura
[remagn. 30
VIII. Domna el uers entendez31
[mon coradge
El uostre cors francs 32 na-
turals cortes
1 Pero ab motz — * lien — 3 Ja noil calgra — 4 Qab — 6 côplain —
* Pregarala si ualer mi pogues — ' c. de mi ni apertain — 8 Cuias
— 9 can sen uai apessan — 10 sia ben f. e bon — H Xeus — 12 refrain
— '3 Les str. V et VI sont interverties — 4,Quen rie — 1S tainan — *6 par-
tir mai — " Jeu non perqe car far — 18 respeig de gazain — 19 E doncs
ualra mi ia — "> nom chamgi p. ren aissi com — 21 Fol lauzengier —
il hgnjedor c de — 23 1. assis tôt — 24 Ora — 2S Qcnun talen — 26 remain
— 27 Les deux envois sont aussi intervertis — 28 h. de son — 29 Per
— 30 remain — 31 entendatz — 3* gai — 33 Sabra ebauzir so qendreit
me satain.
9
130 LE CHANSONNIER DE
Sapchan triar ço qa uos sen
[atagn.
[195 (ca 137)]
PEIROL DALUERNIA
(= B. Gr. 366, 26)
I . Per dan qe damors mauegna
Non laissera
Qe ioi & près (afchan) non
[manteigna
Tant qan uiurai '
5 E sim sui en tal esmai
Non sai qen 2 deuegna
Qe sil ou mon cor estai 3
Y ci camarnom degna.
II. Neguna bona entresegna
De lei non ai
Qe iam conor t ni proni '* tegna
Del mal qeu trai
5 Pero si lam5 preierai
Qe de me il souegna
E samors no la matrai
Merçe ian6 destregna 7 .
IIP. Bona8 domnaseus9 plaçia
Fort mamistaz
Qal merauilha 10 séria
Se mamauaz
5 Mas era qar11 no uos plaz
Se iois men uenia
Conosc bë qe maier graz
Si atagnaria12.
IV. La nueg me trabailla43 el
Nom lais en paz [dia
BERNART AMOROS
Sim destrein M cortesia
E sa gran beutaz
5 Doncs sofrirai pos leis plaz's
Qel,(i désir mauçia
0 qa lei prenda pietaz
Qe plus francam sia.
V. Tantaienleiferm coradge'7
Qe dais non pês 18
Et ane mais19 ses cor uo-
Non amet res [ladge
5 Daisom degra uenir bes
Qe an boni 20 dàpnadge
Gardaz sen amor a ies
De peior usadge.
VI. Chanson uai tendreituiadge
Lai ou 21 il es
Qel mon non a mais mes-
Qe il 2'2 trameses [sadge
5 E pois del tôt me soi mes
El seu segnoradge
Pregali qe non agues
Ver mi cor saluadge. 23
VII. Qadousar pot petit bes
Lo mieu gran dânage.
[196 (ca 138)]
PEIROL DALUERNIA (c/\89r°)
(= B. Gr. 366, 15)
1 . Ab ioi qem dimora 24
Voill un sonet faire
Qe 25 ben uai aora
De tôt mon afaire
L. S. : i poirai — 2 qem — 3 Se leis on mon cor ai — 4 proni —
s la — 6 lam — ' Les strophes III et IV sont interverties — 8 Bêla —
s sius _ io meraueilha -"pos-12 Sentaigneria - '3 trabail - i* Tan
mangoissaU- » Las qeu farai zo qar faz - '• Trol - i' T. uos am de
bon coratge - 18 penz— >9 Cane mai miels - 2° E ail - ^ ont - 22 »
L. S.:2*demora- -' Car
LE CHANSONNIER
5 Fin amor menora '
Si qal meu ueiaire
Ges tan ries non fora
Seu fos emperaire
Qel coradge ou nai
11) Jauçion & gai
Pero non a gaire
Qera mortz desmai.
II. Plus es amor bona
Qeu non sai retraire
Qi mal la raçona
Non es fis amaire
5 Qe gen guierdona
Si tôt fai maltraire
Qi si - abandona
Nil es merceiaire
On ijeu mestei çai •'
10 Mon pensamët ai '
Vas la dolçe s repaire
On mi dons 6 estai.
III. De lei son qem ; mena
Et es cortesia 8
Qab soa ,J catena
Mestreing fort em lia
7) Mos mal nô refréna
Mus garitz séria
Sab tan dolça pena
Per mi dons moria
Ja no men per tirai 10
10 Mais tan com uiurai "
Si totz têps uiuia
Totz têps lamarai.
IV. Francha res cortesa
Bella douça mia
Amor ma uos l2 mesa
DE BEKXAHT AMOIIOS
131
El cor on qeu sia "
5 Gran ioia mes presa lv
Daital segnoria l!;
Qeu sui si nous pesa
Vostr hom tuta nia ""'
•Ja ren nous qerai l7
10 Mais uos seruirai
Pero sius plairia 18
Reu plus nO diria. lfl
V. Seu '-" per allegrança
Sai chantar (al' : Voil iugar)
[ni rire
Dun ioi qe menança
Don eu soi iausire
5 Domna ia21 doptança
Non aiaz del rire
Qeu nô faiz 22 semblança
Qe endreit'3 uos consire
Ben e gen me sai
10 Cobrir qan sui lai 2i
Seu mos oilz uos uire
Tost los en retrai.
VI. Som re mi demanda
De mon dolçe 2J deçire
Amors mi comâda
Lo uer 2C contradire
5 Ben es dreit qeu blanda
Lei cui sui seruirc
Et er foldaz granda
Sil 27 fatz don 28 maçire
Segnors cosim 29 uai
10 E cossi mestai 30
Zo qim 3I sol aucire
Maduz ioi uerai.
1 amors monora — 2 Eisi — 3 Mas con qeu mestes — • M. coratge ai
lai — B Ades el — 6 la bell — ' Sieus sui qilmi — 8 corteza — 8 suau —
»° partrai — " A ma uida mai — ,2 Al cor uos ma — 13 Amors tota uia
— " preza — »5 compaignia — 1G Vostre on qe sia — 17 qerrai — i8 E
si nous plazia— i» dirai — 20 Sieu|— 21 Don ai ia — 2Î Q. fassa — *3 de
— -" q.seschai — 25 douz — 26 Uertat — " Seu — 28 qil 2a Gardatz com
mi ;i" E comen estai — il So qem.
132 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
197
PEIRE RA1MON DE THOLOZA
(=B. Gr. 355, in)
I. Pensament ai e consir
Duna chanso faire
Qar lois degues abeillir
Cui soi fis amaire
5 E si pogues auenir
En bos ditz retraire
Far pogra parer
Qeu plus rie ioi esper
Com cane fos de maire.
II. Lo cor el sen el albir
Ai mes el veiare
En honrar leis e seruir
Car es la belaire
5 Com pogues el mont chau-
vir
Don nom puesc estraire
Ni mon cor mouer
Camors mi fai tan temer
Lei.s qals non am gaire.
III. La fina vera valors
Plus dautra valenza
El pretz el fresca colors
Mi platz e magenza
5 Pero sim valgues amors
Tan qe mentendenza
Mi donz abeillis
Plus rie ioi de paradis
Agra ma paruenza.
IV. Nul autra nom pot socors
Far ni dar guirenza
E ont mais en sert1 dolors
Plus nai souenenza
5 Mas* dire mas clamors
Non aus per ternenza
Tant li sui aclis
Con plus vas mi safortis
Mais lam sensas faillenza.
V. E fora li ben estan
Sim des alegranza
Tan qaleuges mon afan
Ab douz cointanza 3
5 Qeu li sui sers sens enian
E non ai membranza
Dais mais qe fezes
Tôt qant a mi donz plagues
Pero pauc menanza.
VI. (p. 1S3) Cades mi vauc
[conortan
On plus ma4 pesenza
Vas leis e sufris mon dan
Ab bon esperanza
5 E doblera me talan
Sa bella semblanza
E gentils cors cor tes
En prezes de mi merces
0 qalsqe pitanza.
198
PEIRE RAIMONZ
DE THOLOZA
(= B. Gr. 355, 16)
I, Si com celui qa seruit son
[segnior
Lonc temps el pert per un
[pauc fallimeu
Maue per zo qar eu ai lon-
[iamen
Fait son coman de ma donna
[e damor
5 E ia dest tort non degro-
[chaizonar
Ni mal voler ma domna seil
[plagues
Pero ben sai cant om plus
[sauis es
i l. : sent-» l. : M.
ges — 3 l.
acoindanza — * L: nai.
LE CHANSONNIER DE
Adoncs se deu miels do
[faillir gardar.
II. Tant tem son pretz e sa fina
[valor
E tant ai cor de far tôt son
talen
Mas tant me fan lauzeng<-r
[espauen
Per qeu nom ans de leis
[faire clamor
5 Ni mo ferm cor descubrir
[ni mostrar
Mas mil sospirs li rent qec
[iorn per ces
E veus lo toit de qeu li
[soi mespres
Car ieu lauzei tan finamêt
[amar.
1 11 E sil plagues qem fezes tant
[donor
Q i -enoillossopleianhumil-
[men
Son gent cors car gent for-
[matz auinen
El douz esgar e la fresca
[color
5 Mi laisassetzsospiran remi-
rar
Qe mai ben crei noill faillira
[nuls bes
Car tant fort ma sa mors
[laissât e près
Qe dais non pens nin puesc
[mon cor virar.
IV. De paratge ni soi ni de ricor
Qe iam faisses ' qem fes
[damar paruen
Mas cant ries hom sils me-
[nors acueil gen
Dobla son pretz e creis mais
[de lauzor
BERNART AMOROS 133
5 I'er qeil fora - ma dona ben
[estar
Si calqe bel semblant far
volguea
()nru tel lo mont non a
mais Quilla res
Qi ia senz leis mi pogue-
donar.
V. Ben sai a escient qeu az 3
[folor
Car ai en lai mes mon en-
[tendamen
Mas non pusc als con plus
[li vauc fugen
Nais lo dezirs e dobla ma
[dolor
5 So com vol fort non pot hom
[oblidar
E sa près cent mais tragz
un ben nagues
Ben fora ries e sol ca leis
[nom pez
Arai *li tost denan merces
[clamar.
VI. (p. 1S5) Sa gran beutat son
[gent cors nou e car
Son pretz sonor. sain dieus
[el ditz cortes
Qe res de be noil fail. mais
[cant merces
Qe sol ab tant ia non tro-
[bera par.
VII. Chanzos vai me tost re traire
[contar
Ad aura mala e dim al pro
[marqes
Messer conrat qen lui a tant
[de bes
Per com lo deu sobre totz
[apellar.
i c. en : taisses — '■ L : l'eira — 3 /. : faz - ' /. : Irai.
134
LE CHANSONNIER DE
199
Peire RAINCONZ de THOLOZA
(= B. Gr. 132,8)
1. Pos comgnhat ai de far
[chanzo
De mi donz cui am e dezir
A leis o demi om grazir
Seu i faz bonz motz ni gai
[so
5 Oc e seu re mais ben fazia
Grazit fos ' ma douz amia
Qe de leis tein vn pauc de
[ioi qeu ai
Pero sil plaz anqeras naurai
[mai.
II. Ane mais hom tan cocha tz
[no fo
Damors e no men puesc
[partir
Qen pert lo solatz el dur-
[mir
El ris ni als no mi sab bo
5 Mais pois tornatz soi en la
[via
De chantar de cui me par-
[ria 2
Suna vetz chant con3 mil
[vetz plorat ai
Be se coue pos a ma dona
[plai.
111. Bella domna pos vostrom so
Cautra no mi pot guarentir
Laissaretz mi del tôt moiïr
Don vos mi podes leu far do
5 E so faitz faretz vilania
E pueis er uns ramz de feu-
[nia
BERNART AMOROS
Qi son franc home liai mu-
[rir fai
De dezirer el pot gitar des-
[mai.
IV. Amiga ia dieus nom perdo
Seu nous am mais qeu non
[sai dir
E si per so me fais lan-
[guir
Mais am en vostra sospeizo
5 Estar. qe si dautra iauzia
Jauzir nom cami non plai-
[ria
Qe mi non pot faire iauzent
[ni gai
Totz lautre monz dona de
[vos en lai.
V. Non sai far mon dan ni mon
[pron
En nulla ren tan noi mal-
[bir
Ni noi poiria deuenir
Seu nous bais (p. 186) la
[bochel mento
5 De vos cui hom sui senz
[bauzia
E serai e no men partria
Malgrat vostre vos am eus
[amarai
E malgrat meu pos amors lo
[matrai.
VI. Chanzos vai ten e ten ta
[via
A la bellam di senz bauzia
Cautra dôna no voil ni qeir
[ni ai
Ni vos domna non sai. si vos
[aurai.
1 l. : fos a — 2 /. : partia.— 3c. en : don.
LE CHANSONNIER DE BEHNART AMOROS
135
[200 (' 116)]
PEIRE RAIMON DE TOL<m\
o
(= B. Gr. .T>:>, 5)
1 . Autresi com la candela
Qe se meteicha ' destrui
Per far clarlat ad autrui
Chant on plus trag greu m;ir-
[tire
5 Ter conort 2 dautra gent
!■'. car adreit esient :!
Fa s tan gran follage
Qe aç autrui don agradage
E a mi B pena & turmen
10 Nulla re se mal nien pren
Non 6 deu plagner del dâ-
[nage.
II. Qar ben conosc per usage
Qe lai on amor saten
Vai foldaz en log de son
Doncs pos tant 7 am & de-
5 La genser qel mon se mir
Per mal qem deg s auenir
NO 9 taing qem recreia
Qar 10 on plus mausi den-
ueia M
Plus li dei 12 ma mort gra-
[sir
lu Sil dreiz damor uulh 13 se-
[guir
Qestiers sa cortz non plai-
[deia.
III. Doncs pos am so u qem
[guerreia
Cniosc qe mer a blandir
Ab selar & al) sofrir
l.i serai nom & sernire
5 Et sai sim uol retenir ' '
Veg "i.- toi al Beu plai
! - fr mes ses tota bauç i
E si al) aital tiicharia
Puesc a '■'■ sa merçe uenir1'
10 El mon non '-s nuls Baber
Per qeu camies ma folia.
IV. Lo ioru (je sa cortesia
Mi mostret nim fez aparer
lu pauc damor ab'8 placer
Pareg ben qem uolc ausire
5 Qins el cor manet sa
E el cor mes mel 1B deçir
Qe mausi denueia
lu eu com fols qe folleia
Fui leus a gen foletir -°
10 Qan cugei soper21 albir
Qenqer non pes'-2 qesser
[dei a.
V. (cf. 77 r°) Si per nulh autra
[qe sia
Me pogues mais enriqir
Ben agra en cor a partir
Mis cum plus i fort mo
[consire 23
5 lui-'* tant qant lo mon25
[per pren
Nô sai una tant ualen
De negun parage
Per qeu e 26 seu senhoradge
Rernang tut uencudamen '"
10 Qar28 non trop melhuramen
Per fortz o per agradage.
[L. S.:] ' mezeissa — 2 plazer — :i escien — ; alegratge — b me-
f xom_ "D.mas eu — 8deia — 9Nos — "> Anz — " em guerreia — ia Li
dei miels — 13 uoil — u E doncs pos so — '5 retener — 1G en — 17 caber
— i« damoros — " Lo ci s lo — 20 ad efoletir — 2i Qar zo crezei
— 22 Qeu eis n. penz — -'■ M. <ui p. eu mo albir — -' Ai — 25 monz
— *<> P. qe el — 2" tôt forzadamen— :e Pos
U6
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
VI. Chanson a1 portdalegrage2
On preç & ualor saten
Al rei qe sap & entcn
Miras en araguon dire
5 Qe anc mais tant guauçens
[no fui
Per finamor cura er sui
Quab rens3 & ab uela
Poia4. ades so qe non5sela
Pero nocan6 fas gran brui
10 Ni nô uulh sapcha hom de
[cui
Mo " dig plus qe dune 8
[stella.
VII. Mais nos am ges una mêla
Nô preç qar ab uos no sui
Pero aç obs uos estai
Qem siaz guouerns e uela.
[201 (ca 119)]
PEIRE RAIMON DE TOLOÇA
(= B. Gr. 355, 14)
1. Pois ueçem bosc & broils
[floriz
El praz sunt groc uert e
[uermeilh
El chant el refrim el tro-
peilh9
Auçem del auçellet10 petitz
5 Bens taing qun nouel chat
[fabrec
En aqest douç M temps dra-
[biil
E si ben sol12 mot maestril
Leu seran dentendre adrec'3.
II. E car non ueini trop ie un14
[desplec
Mou ferm natural sen sutil
Per tant non clam mon
[saber uilh
Si tôt ancar grans non
[prec15
5 Qaisi corn fi trobau escritz
Bons motz tan genç los
[apareill
[ ]
Qen chantan16 formes meil-
[lorditz.
III. Mas un gen cors franc &
[graçitz
Qanc tan bel nô I7 uic en
[espeill
Per cui pens & fremisc &
[ueilh
Mes en18 cor tant abeliz
5 Qe dal ren seruir no men-
[brec
Mas ma domna ab franc cor
[humil
Per qe senz tôt enian ma-
[pilh
Enamor qen recob en 19 lec.
IV. Anc hom en ben amar non
[crée
Tant cum en mi dons don
[ma fil
En lei seruir qab un pauc fil
Ma près e eug qe pauc me
[sec
5 Pero nô tem parlers me-
[riz 20
Tantesperson leial conseilh
i Cliansos al — 2 dagradatge — 3 Cab rems — * pueg — 5 a. com no
sen — 6 E pero no — 7 Nin — 8 com del.
L. S. : 9 trepeilh.— 10dels auçelletz— '* a. beldouz— 12 son — I3adtcc
— 14 n. truep cab on — •> parec 16 chantant — 17 nos — 18 en mon —
i'' qem te cob «S; — 2° ni criz
LE CHANSONNIER DE B EUX A HT AMOHOS
137
E s'il plaitz qela maconseilh
Gent serai de fin ioi guer-
[nitz.
V. Ades es lai mos esperitz
Ond ' il es don nô merauilh
Qaitan qan ferrai 2dc soleill
Nô régna tau bon 3 aibs
[cOplitz
5 Nul autra nô par qab lei sec
De beutat seran dautras
[mill
Don prec mi don qe non v
[auilh
Si mos cor uol qautra nô
[dec.
VI. Tan magreist pér8 madom-
[na sec
Chanson0 gen format cors
[gentil
Nô uei qeu fora mort de
gilh
Tro qun pauc mon cor ses-
prec.
[202 [F* 156)]
JORDAN BONEL
(= B. Gr. 273, \)
Sira damor tengues amie
[iauzen
Non fora cel cui meillz
[ânes de me
Qar pen e dol e dan e ma-
[rimen
Hai soflertat pos amei e
[conue
5 Qeu aial mal e ma dOpna
lo 1)0
E sellas uol aissi ab me
[deuire
Qar sap e ue ' qeu nol ausi
re dire
Anz uuoill mon dan sella2
[uol ez amors
Gardatz sieu [sui] dels fis
[genz3 amadors
II. Aradiran tut li '' desconois-
[sen
Qe cel es fols qam autrui
[mais qe se
Doncs nô sabon 5 qom nô ha
[ges de sen
Qant en amorses empeintz,!
[senes fre
5 Qe chastiars ni blasmars7
[noi ual re
Ni fis amanz 8 non ha poder
qes uire
Qab ambas mans contra
laffan nos tire 9
Si corn eu faz e 10 qar mi
[fora n honors
Cugei passai' totz los bos
[suffridors.
III. Si corn laiga suffre la nau
[conçu
Qant 12 es tan grantz qe
[nul[s] homes soste
E dun clauel pert son affor-
[timen
SofFrira ,3 eu mal meillz de
[null autra re
5 Mas qant de lei n qem de-
[faill ,s ab merce
i ont — 2 ferrais — 3 bos — 4 nom — s magrist — 6 Canson.
L. S. : '• crei — 8 si lai — » fegnens — io Arain d. qeu sui — n sabetz
— 6 espres - » maltrair— B Ni da lamor — '■> uol rire — «o mas— ■ '
_ 12 Pos — 13 Sufert — " E plus qe lois — 18 desl'aill
138 LE CHANSONNIER DE BERNARÏ AMOROS
Qez on mais lam meillz a
[cor qem azire
Ez on jiiez trac plus doblon
[mei martire
El dolz esgartz mes co?» la
[blanca flors
Qe pois de fruich amarçis '
[la sabors. 2
I\ . E fai mal dôna mon escien
Pois fai semblan don pre-
gar sesdeuen
A caualier nildonentendimen
Qan non ha cor si con una
[fes me
5 Qim parla piegz qan nom
[au ni nom ue
E sieu fos fais engananz ni
[traire
E contra leis. aisin fora iau-
[zire
Mas uas amors non ual
[forsa ni tors
Ni tem mais cors de uerais
[amadors.
V. A chaletz uai chanzos a mi
[dor.z dire
A na guibors cui bos pretz
saup eslire
On es iouenz e beutatz e
[ualors
Ca leis mi clam del siens
[mais noiridors.
VI. E potz aitan sus en sa cart
[escriure
Qe ia bel ditz ni semblantz
[de douz rire
Non creirai mais ni oils ga-
[liadors
Qe gardon zai e plus sou-
[ent ailhors.]
203
RAMBAUTZ DAURENGA
(= B. Gr. 389, 36)
I . Pos tais sabers mi ven en 3
[creis
Qe trobar sai et eu '* die
Mal estara si non pareis
E si mes mal car no meu
5 Qe qant om diz ab la len-
[gua
So com ben em pos 5 non
[tengua
Nom pot auer sordeior dec
Qe dir so qe nos couengua.
II. E qi anc iorn | damar] si
[feia
Ara nos taing qen derasic
Pel nouel temps qes despe-
[reis
Deu auer qecs son cor plus
[rie
5 E qi no sap ab la lenga
Dir. so qe se taing apiëga
Coissi al nouel temps saplic
Caissi vol pretz. qes cap-
[tenga.
III. Ar ai gaug can sabrandal
fregs
E remanon sol li abric
E dels auseletz e lor leis
Oi mais de chantar non se
[trie
5 Qe qeigz salegre sa lenga
0 pel 6 nouel temps qil so-
[uenga
E dels arbres qeran tue
■
-traitz e marcis — ; L. S. ha di più queste 3 stanze (IV.-VI).
3 /. : cm — 4 /. : eu o — 5 /. : en pes — G l. : Pel
LE CHANSONNIER DE BERNART AMUROS 139
La flor per bracei1 se renga.
IV. Estât ai lins amies adreitz
Duna qe menganet ab trie
E car une samors me des-
treia
Totz temps maurai mon cor
[enic
5 Car eu non veu 2 ab la
[lenga
Auer lo dig që destrëga
Ver qe autraui ab lieis sem-
| brec
E qieu qalz so qcl en
[prenga.
V. Ab lei remangal inalavegz
El enianz ^ ab son amie
Cuns tais iois nia près en
merces
Don ia non creirai fais pre-
dic
5 Anz voil coin me tail la
[lenga
Seu ia de lieis cre lausenia
Ni de samor mi desadec
Sen sabia perdre autenga. 3
VI. Domna non sai far lonc
[plaides
Mas de me podes far men-
[dic
0 plus rie que anc no fo res
Del tôt soi al vostre castic
5 Sol që digatz ab la lenga
Coissi voletz qem captenga
Qeu ai cor qenaisi estic
Ni qe ia dautra non fenga.
VII. {p. 1S 7) Ben taingqesia fins
vas lieis
Car anc mais tant enals non
[e rie ■
Car uostre seignier el
zeia
Ab pane afar no Besbaic
5 Ca penas sai ab la Lenga
Dir aital aital ■ qe deui
La gran beutat qen lei parie
Non taing qautre si esj"
VIII. Domna als non qer la lenga
Mas qen baisan vos estre-
[gna
En tal luec qeu ab vos ma-
[sec
E qe de mos bratz vos ten-
[gua.
204
REAMBAUTZ DAURENGA
(= B. Gr. 389, 7)
I . A moners darai fi chanson
Ab leus motz et en leu son
Et en rima vil e plana
Pos aissi son encolpatz
5 Qan fas auols motz als fatz
E dirai so qem cossir
Qi qem nan 7 mais om nazir.
II. Damar tornom 8 en tenso
Cil on anc a mors no fo
Plus qe me obra vilana
E diz qeigz en teing los
data
5 En sai maitz qe nuls nom
[natz
Per qem platz e deuedir
Daqo qeu als moltz naug
III. E si torn en ocaizo
Cel dig qom fai plus felo
' /. : branqil — - c. en. : veil — 3 I.
a. voil. — 6 /. : mo uers dirai — ' /. : nain — * L
- ' /. : n. cric — s 1
l<'mon
HO LE CHANSONNIER DE BERNARï AMOROS
No mo tengatz ad ufana
Qar per trop es autreiatz
5 Qal niais aug dir e non platz
Qe dona si vol aucir
Qe rie orne deignia auzir.
IV. Qeigz a dreig qe sarazo
Mas vers venz qi bel des-
[pon
E ieu die paraula sana
Qe meils deu esser amatz
5 Ries hom francs1 ensegniatz
Qil pot pro e bel chaucir.
Per dôna cauz prez soffrir.
V. Mas donna cama lairo
A semblan de tracion
Non deu ges esser aurana2
Mas em baz luec sasolatz
5 Siqe sia coïdatz
E qei posca esdeuenir
La nueg el iorn ses dezir.
VI. Ane donna qi qen salmo
Per null rie ome no fo
Ni tornet de pretz sotrana
Et eu sai et es vertatz
5 De pron caualier priuatz
Vistas tais dôna delir
Com sen degra sebeillir.
VII. E dirai en mais eu no
"Ara en aqesta sazo
Mas se neguns hom se vana
Cap me sencontrast iratz
5 Adonc mauziretz viuatz
Celetz 3 motz per me ses
[mentir
Com non poiria cobiïr.
VIII. [p. 188) Dieus retenc lo cel
[el tro I
A sos ops ses compaignio
Et es paraula certana
Qa mi donz laisset em patz.
5 Ca seignoriu vas totz latz
Qe totz monz li deu seruir
E sos volers obedir.
IX. Ja de mort ne de preizo
Nom gar dieus ni gaug nom
[don
Se mi donz qem re ' sescana
Noval pro mais cautrasatz
5 Segon qieu cre e sapiatz
Qe totz hom qe leis remir
Senten ab mi al partir.
X. Domna eu vos deg grazir
So qe sai be far e dir.
XI E som datz ab loue dezir
Lo ben qen degnias soffrir.
205*
REAMBAUTZ DAURENGA
(= B. Gr. 389, 30;
I. Joglar fe qe deu dei
A dieu ni a ma donna ni a
[mei
Qazutz son en esfrei
Qarmatz ab cor non vei
5 Lieis a cui totz mautrei
Per ar e per totz temps.
II. E serein mais ensems
Eu sai qo tal 5 ma domna
[qar trop tems
Lun 6 oil men fus remdemps 7
Qeu nom temsessa. tremps
5 Sol vos senera semps
Meins no men presasetz.
II. Cancfams ni sons ni setz
Nom destreis tan vns ni
[tuig millia vet
' L: f. et — 2L: aulana — 3 /.:Talz — * <:.e?i: te.
' Voyez l'édition' de M. Appel, dans la Iiev. d. I. r., IV s., I. X,p. 112 ss.
- 5 Appel : toi — 6 A.. : S'un — 1 A. : redemps
LE CHANSONNIER DE BEHNAHT AMoRO*
1 l 1
Cô fai mos telans freigtz
Qoin breu deuenter abretz
5 Car vos non vei cui letz
De sofrir nom1 perill.
IV. A donnap 2 cor volpill
Gran paor ai qeil bocha me
[rouill
Qar del col tro al cuill
Nous bais qi qen grondill
5 Qeu niria en eissil
Enanz cautram baizes.
V. E co morrai ades
Sim cochai bes qeu naic.qel
[luec torncs
A domnal plus confes
i Mue qez auc âmes
5 A cortes si qe près
De vos sia mos cors.
VI. Ai talens car no mors
E seignier dieus gitasses lo
[tost fors
0 qil semblés ma sors
A cels qe sabol destors
5 Si qe nostre demors
Fos per totz acuillitz.
Vil. Dôna nom faz marri tz
Per qem degnia de vos per
[eschernitz
Mas qat 3 lur falz critz
Dels enoios traitz
5 Terne tant son eissitz
Del bon sen cauer soill.
VIII. (p. 189) Per lespauent mi
rdoill
E pel grau be qaut ' nai
fait orgueill
Si qieu non deing mon oill
Girar ves autre foill
5 Qar mos cors no macoill
Qieu ves vos mi renei.
IX. Dôna si lai on soill
N mis vei breu cm renei.
X. Far men podes orgoill
Qaut morrai qem renei.
206
REAMBAUTZ DAURENGA
(=B. Gr. 389, 20)
I. Ben seschai qem bona cort
Chaut iji chantai' sap
Et eu atendrai o B mon gap
Dont me tenrai plus per lort
5 Qe sabrun. li cet 6 eil sort
Qieu naurai pretz qi qe sen 7
[jap
Del.-; vint qe serem el trap.
II. Donc lendeman del beort
Leuarai el cap
La gran corona del drap
An mita ab louas cort
5 Et qi lapella reg bort
Lau qe la lenga liarrap
Qemais fols motz noil escap.
III. Aissi ai bastit en gaug
Mon cor nou e fresc
Qades sort e sail e tresc
Si qapenas vegl ni aug
5 E sapchal donz de thalaug
Qeu no son cel qe paresc
Qe en autre sen mantrebresc.
IV. E qis vol corn crit a flaug
Damor pos eu enqes 8
Sobre totz qals qen fol pesc
Qeu am des lue tro az an g
5 La iensor e men pelaug
Tôt hom qautra per fadesc
Qan leua ab leis en paresc.
1 .1. : mom — - A. : domn' ap — 3 c. en : qar — * A. : qu'aiit
5 /. atendrai — 6 c. en : cec — 7 l. : qi qen — 8 l. : cresc
1 IL'
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
Y. Per mi donz ai cor estolt
Et humil e baut
Car sa lieis no foz dazaut
Eu moestor ' en loec dun
[vult
5 Qe dais no pessera molt
Mas mangera e tengram
[caut
E agra nô raubalt. 2
VI. E qi vol apenre escolt
Damar ben cum sait
E sail plus qe nuls nom
[aut
El ianglos feul 3 per so
[molt
5 Sol qel sapil e sacolt
Cuia ab lauzeniar. despaut
Dir so don ma dôna raut.
VII. (p. 190) Macansosno vueil
[qe sait
Per cels mais de cui mazaut
Per enseniament mazaut
De moltz qem fan de lur
[chaut.
VIII. Joglars per qem desazaut
Ma dôna e vos mi faitz
[baut.
207
REAMBAUTZ DAURENGA
(=B.Gr. 389, 1)
I . Ab nou cor et ab nou talen
Ab nou saber et ab nou sen
Et ab nou bel captenemen
Vueil un nou verset comen-
[sar
5 E qi mos nous bos motz
[entent
Ben er plus nou a son
[uiuent4
Com veilz 5 sen deu renoue-
[lar.
II. Qieu renouel mon ardimen
Cai nouel al) veil [pessamen
Franc de noueil abrieilpar-
[uen
E] cant em al nouel tëps
[clar
5 Qel nouols foils nais dont
[deisen
Lo nouels critz don iois
[sempren
Dels ausels qintronenamar.
III. Don amars mi fai alegrar
Qeu am si com non pot com-
[dar
Tam ben con eu amni pen-
Tsar
Qieu am la gensor ses cotent
5 Si dieus mam e noi mère
[cuiar
Qal miels damar lam saup
[triar
Amors qe nos aiustet gent.
IV. Damor me deg eu ben lau-
[zar
Mais qas amor guizardonar
Num pose qamors ma sim
[ten car
Dat amors pe»' son chauzi-
[men
5 Mais qamor nô pot estimai7
A sos obs amors ni douar
Ad autrui con ai cor rizen.
V. Rire dei eu sim faz souen
Qel cors me ri neus en dur-
[men
E mi donz ri tan douzamen
i l. : mester — 2 /. : raembalt — 3 /. : sail.
*Z. : iuuent — *c.e?i: veslz — |;/.: met—7 c. en: estuiar
LE CHANSONNIER DE
Q> lis de so ui mes
[soin par
5 Don me fa sos ris plus iau-
[zen
Qe sem rizion qatre cent
Angel qem deurion gaug
Far.
VI. Gaug ai eu tanqe mil dolen
Seriô del meu gaug manen
Car de! meu gaug tuig meu
[pareil
Viurion ab gaug [
5 . . . . ] ' & eisainent
Lami don/, qel mi pot tôt
[dar.
\ II. Domna dais non ai aparlar
Mas de vos dona qe baisar
N >s cuig domna <jant aug
[nônar
\ "s dona qe sos 2 vestimen
5 E mon cors dôna vos esgar
Qadee miusvegni :i donastar
Vostre bel nou cors couiuen.
VIII. (p. 191) De mon nou vers
[vueil totz pregar
Qeil manon de nouel chan-
[tar
A lieis qam senes talen var
Deus mabais & amors seim
1 1 1 oit *
5 Qautre ris me semblon plo-
[rar
Sim të ferm en gaug sens
[laissai1
Mi donz cautre drut nô
[cossêt.
IX. Ja dieus mais dôna nom
[prezent
Sol gart ma dr>na e mô ri-
glar.8
BERNART AMOROS 1 i :;
X- Deus gart ma dOna e mon
[viglar*
E ia niais dôna nom prezent.
208
REAMBAUTZ DAURENGA
(=B. Gr. 389, 19)
1 . Ben sai qa cols séria fer
Qem blasmonqar tant souent
[chant
Selur costauon mei chantar
Miels mestai
•r) l'os lieis plai
Qem ton gai
Qieunon chant miglia. sen
per aur 5
Qe nentend en autrui plazer.
II. B per als men cog plus
[anqer
Car tan souen. con en chan-
[tan
Non la puesc auzent tôt
(nomnar
E pois ai
5 Tan gran gai
Qenqers brai
So qieun die qadonc eug
[tener
Dieu o lieis dont me nos
[temers G.
III. Bon sapqide mi donz men-
[qier
Qieu noi faz ges feignit"
[semblan
E creis men gaugz cant
[naug parlai-
Ne us de lai
5 On nosfai
1 /• : g. ses manjar Que ieu ai gaug — 2Z. : ses — 3 /. : inz — 4 l. ; sieu
men — :■<?. en : iuglar — e /. : ni ia per auer — ' l. : uol teincr
I u
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
Nos métrai
Qant diretz de lieis tal plazer
Cossius nera datz grans
[auers.
IV. Gran eiïors fai dieus qem
[suffer
Cab se nolan puega baizan
Mas no vol tolre mi tort
[far
Ni seschai
5 Qe nesmai
For eu fai '
Pos lieis non pren nol cal
[temer
Qe ia tant plasa teners.
V. Si de ben amar lieis mes-
[mer
Qeu sai qe si pel non2 ses-
[pan
Qautras men faran fachurar
Don mesglai
5 Qen fai ai
Cobrirai
Anz donc mon gran ben
[gauzen ven 3
Hoc si mera mieus lo po-
[ders.
VI. [p. 192) Mas totz temps fo
[e totz temps er
Qe granz amors nô ten
[garan
Grans merauillias son da-
[mar
Qen dirai
5 Samors gai
Qar va un bai
Ailas ia nomo lais vezer
Cel dieus qem na datz jauzer
[sers.
VII. Qaisi tiron ves man es-
[qer
Cil rie qe plus cortes sen fan
Qades poignion en lauzen-
[gier
Eil verai
5 Son emplai
Qar i atrai
Gels qe semblon sens ferm
[poder
Par cortes si noncaz e vers.
VIII. Domna vostre domini ser
Crezes me qieus am ses
[engan
E membreus plus qe len-
[cuzar
Li doutz bai
5 Ar morai
Sin die mai
Ai cun fail qan pens del
[douz ser
Lo sens e lauzirs el ve-
[zers.
IX. Qan la chandelam fes vezer
Vos bazan rizen a cars
[sers .
X. Joglar ades lo iorn el ser
Me tirai cors vostre vezers.
209
REAMBAUTZ DAURENGA
(= B.Gr. 389,5)
I. Als durs crus cozens lau-
[sengiers
Enoios vilans malparliers
Darai un vers qe mai pensât
Qe ia dais noi aura parlât
5 Qa pauc lo cors no mes-
[clara ;
Per so qeu ai vist e aï5
i /.: sai. — M.: mon — a c. en: ver.— * /. : mesclata — 5 /.: e proat
LE CHANSONNIER DE BERXART AMOROS
145
De ioi mal serua1 barata.
II. El dirai vos de lor mestiers
Aisi con cel qc nos 2 cosou-
[siniers3
Dausir e de sufoir'» lur glat
Sim pesa mas non ai laisat
5 Qeu de mal dir vos com-
[bata
& ia del plus nom sapchon
-rat
Car mos cors totz non los
[mata.
III. Lauzeniador fai on5encom-
[briers
Als cortes & als drechu-
[riers
& a celas qau 6 cor a saur 7
E qecs per aqel eu 8 mer-
[chat
5 A lautre cobri & aplata
Son vergonios auol batot9
Aisi sô deser ,0 eschata.
IV. Perqei fal totz pros caua-
jliers
Qels cre qus voulios " pla-
[zentiers
Mas per qen traia miels
["sonat
Qil penson ist mal amat 12
5 Pos dais non vais vna rata
De qal saras13 sa voluntat
<>il dizlauzenias ol grara '*.
V. (p. 193) Dautres ni a qei van
[estiers
Qes far 15 qers 16 cortes uffa-
[niers
Qe per oltra euzamen 17 fat
0 cuia auer meil gazainiat
5 Cel qe plus la lenga lata
En dir de partir lamistat
De cels en cui iois Baflata.
VI. Qcl plus pros el plus galau-
[biers
Veg de luuzeniar presentiers
B pens me domen qaia amat
Com pot far amador irat
5 Mas ges qi qen crit on glata
Non amon tug cil qan baisât
So sap si donz na lobata.
VII. Tais cui esser cortes entiers
Qes vilas daus qatre ladrers
E al cor dins mal enseigniat
Plus qe feutres [....J18
5 Ni tros de beou escarlada l9
Non sabon mais qei van tur-
[bat
E qeis cos pot galafata.
VIII. Pos non aus mos durs de-
[zirs 20
Dir ta tem qei danz fos do-
[bliers
Mas dirai ios 21 en luec dau-
[rat
& dieus qan fara charitat
5 Los maldiga els trabata
Sai e pois lai e nei romprai22
On recebran de nauata.
IX . Pailhairet non ies granz pail-
[liers
Daqest vers umplis tos pa-
[ners
En porta tôt ton col cargat
1 l. : lor maluasa — * c. en: nés — 3 /. : costumiers — *Z. : sufrir — 3 /. :
*an — ,; /. : qan — ' c. en: asaut, l. : ausat — ** /. : eis — ;' c. en: batat
/. : barat — '*' /.: de fera — " c. en: non lies — 12 l. : aurat — 13 c. en :
qeil taras — " c. un : jrrata — ' •• /. : fan — IG c. en : ries — 1' c. en: Qerir o.
euzamen — '" /.; f. semlila sendat — 19 c. en : escarlata — -0/. : deziriers
— il t. : uos — ** /. : on es comprat
10
140
LE CHANSONNIER DE
An girart de cui ai peccat
5 A perpinian part leuochata
E dir pe>" qe maia coinprat
Qen chant qi qe sen debata.
X. Ben chant qi qe sen debata
Dels lauzengiers qan ioi bais-
[sat
Del suc 4 tro en la sabata.
XI. Joglar seu ia cautz sabata
Qi nous ve pauc a caualgat
Ni sap per qe se debata.
210
REAMBAUTZ DAURENGE
(= B. Gr. 389, 32)
I. Non chant per auzel ni per
[flor
Ni per neu ni per gelada
Ni neis per freg ni per cha-
[lor
Ni per reuerdir de prada
5 Ni per nuil autr esbaudimen
Non chan ni no soi chan-
[ taire
Mas per mi donz en cui
[menten
Car el 2 del mon la belaire.
II. Ar soi partitz de la peior
Cane fos vista ni trobada
Et am del mon la belazor
Donna e la plus prezada
5 E tarai o al meu viuen
Qe dal res no soi amaire
Car eu cre qil a bon talen
Ves mi segon mo veiaire.
III. (j). 194) Ben airai 3 donna
[grant honor
BERXART AMOROS
Si ia de vos mes iutiada
Onranza qe ses cobertor
Vos ténia nud embrassada
5 Car uos uales las meilliors
[cent
Qeu non soi sobre gabaire
Sol de! pez '* ai mon cor iau-
[zen
Plus qe sera emperaire.
IV. De mi donz fas donne segnior
Cals ce sial destinada
Car eu begui del amor
Qe iaus deg amar celada
5 Ab tris tan can lail det izeus
[gen
E bêla no sap als faire
Et eu am per aital couen
Mi donz dont nom puesc
[estraire.
V. Sobre totz aurai gran valor
Saitals camiza mes dada
Con yseus det a lamador
Cane mais non era portada
5 Tristan molt prezes gent
rprezent
Daital soi eu enqistaire
Sil me dona cil qeu menten
Nous teing enueia bel fraire.
VI. Veiatz donna con dieus acort
Donna qe damas 5 sagrada
Qizeus istet en gran paor
Pois fo breumens conseil-
Tliada
L
5 Qil fes a son marit crezen
Canchomqenasqes de maire
Non toqes en lieis mantenen
Atrestal podes vos faire.
VII. Caris tia e fauzimen G
Aportes adaizel repaire
i /. : lue - l. : es — 3 / : aurai — 4 /. : prez — 5 /. : damar — 6 L: C.
esiauzimen
LE CHANSONNIER DE BEllNART AMOROS J47
Ont es mi donz qem ten gau-
[zent
Plus qeu .-is non sau ' re-
[traire.
211
(= B. Gr. 29, 18)
RAEMBAUTZ DAURENGA
I . Sols soi qi sai lo sobrafar 2
[qim sortz
Al cor damor sufren. per so-
[bramar
Qarmos volers es ta m ferais
[et entiers
Cane non sesduis de seleis
[ni sestors
5 Cui en cubicel prim vezer. e
[pois
Cades sens leis die a lei
[cent bos motz
Pois can la vei . no sai tan
[lam qe dire.
II. Dautras vezer soi secs e
[dauzir sortz
Qan sola lieis veg e aug e
[esgar
E ies daiso noil soi fais pla-
[zentiers
Qe mais la vol non ditz la
[bocal cors
5 Qeu nô uau tan câpres 3
[valz ni planz ni pojs
Qeu v vn sol cors trop aissi
[bos aibs totz
Qen lieis s vole deus triar &
[eslire.
III. Ben ai estât ad autras bonus
[cortz
Mas sai ab lieis trop • mais
[qe lauzar
Mesure sens & autrez bos
[mestiers
Beutat iouë bos faitz e bêla
[damor
5 Gent cortesia laduis 7
Tant ai de si totz faitz «le
plazentz ros
De lieis non crei aies 8 de
[be sia dire
IV. (p. 195) Nuls iauziinenz nom
(sia breutz ni cortz
De lieis cui prec co uoilha
[deuinar
0 ia per mi non o sabria es-
[ tiers
Sil cors qes dins nos pre-
| senta defors
5 Qe ges lo reis per aiga qi
[lengros
Non a tal brui qui cor plus
[larga dolz
Non faz estanc amors tan la
[désire.
V. Jois e solatz daltram par fais
[e bortz
Cuna de pretz a lieis nos pot
[egar
Qel seus sols es dels autres
[pretz sobrers
Aisi non lai las tan mal ma
[qeu mor
5 Pos lasauz9 mes deportz ris
[e iois
Car en pensan soi de lieis
[letz e glotz
A dieus sija serai de lieis
[iauzire.
1 /. : sai. — 2/ .- sobrafan —*/..• camps — ic. en : Qen — B /. : l.loa —
6 /. ; trop pro — H. ; G. lenseignet c. e lados — s l. : res. — 9 / : Pero lafanz
148
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
VI. Ane pois sous pliu nom plac
[tan treps ni bortz
Ni re al cor tant ' ioi nom
[pot dar
Cou fes aqel donc anc feing
[lauzengiers
No ses brugic cami sols son
[trésors
5 Trop 2 eu uo sol liei non sia
[enois
Bella per dieu lo parlar e la
[voz
Vol perdre mais qe dire ren
[qieus tire.
VII. Ma chanso prec qe nous sia
[enois
Qar si volez grazir. lo se 3
[els motz
Pauc pretz arnaut cui qe
[plassa o qe tire.
212
RAEMBAUTZ DAURENGA
{— B. Gr. 389, 16)
I. Er sespan la flors enuersa
Pels trenchans rancs e pels
[tertres
Cals fregz nieus giels e con
[glapis
Qe cos e destreing e trenca
5 Don vei mortz qels critz
[braitzchiscles
E foilleran et engiscles
Mais mi ten vert e iauzent
[iois
Er can vei secs los dolens
[crois.
II. Car enaissi o enuersa
Qeil bel plan me semblon
[tertre
E teing per flors lo con-
[glap>
El cautz mi par qel freitz
[trenqe
5 E trop mi son chant e chis-
[cle
E parom foilljat. li giscle
Sim soi lassatz e ferms ad
[ioi
Qe re non vei qem sia croi.
III. Mas una gent fada enuersa
Qem semblo nirit en ter-
[tres
Me fan trop peigz qel con-
[glapis
Cusqecs ab sa lenga trêca
5 E parlon bas & ab chiscles
E noi val bastos ni lisches
Ni menassas anz lor es iois
Can fan so per com los te
[crois.
IV. (p. 196) Qar en baisan nous
[euersa
No mo tolon val ni tertre
Dôna ni gel ni conglapi
Mas nompoders trop en-
[tronqe*
5 Dona per cui chant e giscle
Vostre bel oill mi son giscle
Qem chastion sil cor ab ioi
Qeu non aus auer talant
[croi.
V. Anait ai com causa enuersa
Totz temps cercan vais e
[tertres
Mariïtz con hom cui con-
[glapi
Destreing e mal entrenca
1 /. : tant de — 2 l. : Die t. — 3 /. : son. — * l. : entrenqe.
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
149
5 Cane nom conqes chanz ni
[chiscles
Plus qel fel clers conqcv
[giscles
Mas er lausdeu malberga
fiois
Malgrat dels fais lauzen-
[giers crois.
VI. An mos chanz caissi en-
[uersa
E nol teignion val ni tertre
Lai on om no sent conglapi
Ni a poder freigz qe tren-
[che
5 Amidonz lo chant el chiscle
Clar qins el cor lhentrol gis-
[che
Cels qil sab gent chantar.
[ab ioi
Qe nos fai a chantador croi.
VII. Dousa donna amors e iois
Non ten ensems malgrat
[dels crois.
VIII. Joglar ganre nai meins de
[ioi
Car nous vei en fas semblan
[croi.
213
REAMBAUTZ DAURENGE
(= B. Gr. 389, 40)
I . Una chansonetta feira
Volontiers leuet a dir
Don tem qe mer a morir
Qe far lai tal qi sen cela
5 Bë la poira leu en ten 'Ire
Sitôt ses en aital rima
Li mot seran descubert
Alqes de razô" deuiza.
II. Hom sap car1 mapodera
Mos cors qe non pot suffrir
De mou talan deBeubrir
Cades poi a plena vêla
5 Cui qe veia is 2 disendre
Per qe noi pos nul escrima
Trobar tant ai trop suffert
De far parer ma conqiza.
III. Pos ma dona mes tan vera
Trop miels qeu noil sai
[grazir
Sien qier als totz temps
[mazir
A dieu ni ian mer 3 chan-
cela
5 Om fassa qe be man pen-
[dre
Et per sa l gola ad una
[cima
Per 5 ma dat si lieis nom
[pert
Dieus e pagar 6 a ma guiza.
IV. Ben saup lo mel de la cera
Triar elo 7 meilz dcuezir
Lo iorn që lieis pois cauzir
Plus cazen 8 clardat destela
5 A par nos fai a contendre
Beutatz dautra si belisma 9
Qe ia nin cort de la sert
Qes cuida aribar ves piza.
V. (p. 197) Domna cant mi
fcolg al sera
La noit e tôt iorn cossir
Cous pogues en grat seruir
Cant em penz qim sier ,0
[nim pela
5 Nom pot far en als entendre
' /. : Boni car tan — 2 l. : ios — 3 l. : met — i l. : Per la — W. : pr0
6/. : pagat — 7 /. : el— R c. en cozen — * /. : bes lima — 10 c. en : fier
lôO
LE CHANSONNIER DE
De gaug mos cors salegri-
[ma
Tant ai en vos mon cor sert
E ma voluntat azisa.
VI. Domna si no salezera
Mos cors lai ont eu dezir
Res plustost non pot aucir
Sim tarza pensât de cela '
5 Al cors 2 nos pot défendre
Qeil uida mes aitan prima
Souenen gaug em nespert
Em pens mala lei enqisa.
VII. Non ai fag tan longa espéra
Caissi men degues marrir
Mas us iorns mes vis qem
[tir
Un an lo près duna mêla
5 Min 3 tem simo pot car ren-
dre
Dreig qe 4 mos cors men
[ferma 5
Cades mis tan hoill ubert
Ves cela part on lai viza.
VIII. Deu prec tan de mort mes-
[crima
Donna e maia suffert
Tro qieus embraz ses cha-
[miza.
IX. Qi trob amors ses escrima
Ja nom deu plagnier. sim
Falsa ni vaira ni biza. [pert
214
REAMBAUTZ DAURENGA
(= B. Gr. 389, 41)
I . Un vers farai de tal mena
Ont vueil qe mos cors pa-
[resca
BERNART AMOROS
Mas tant ai rich entendensa
Per qe nestauc en bestensa
5 Qe non pusca complir mon
[ë™g
Canz tem cun sol iorn nom
[uiua
Tant es mos dezirs faitz
[lentz.
II. Ins e mon cor si semena
Uns volers e eug qen cresca
Dun ioi qen mettal crezenza
Qe dais non ai souinensa
5 Ni res qe sagues nom fa
[gaug
Anz lais e mos cors esquiua
Autre ioi qe de me non asai.6
III. Per7 no sai que tan grant
[pena
Qinz el cor mi vais 8 em
[tresca
Non trais om senes9 pene-
[densa
Con eu qe bella paruensa
5 Noi ai fort naduncs 10 perqe
[nai gaug
Car uns volers men abriua
Qem diz qez in altra non
[poin.
IV. [p. 198) Be ma nafrat en tal
[vena
Esta mortz caram ven fresca
Don nuls metges de proensa
Nadius nom pot far valenza
5 Ni mezina qen faza gaug
Ni ia non cre qe sescriua
Lo mal qe inz al cors mes-
[con.
V. Camors ma mes tal cadena
Plus dois mes qe mels de
[bresca
1 l.: tela — 2 /. : cor qom — 3 c. en : Nian — W. : perqe — H. : cima.
6 /. : sens — U. : Ren — « /. : nais — »/. : ses — 10/. : tort donc
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
loi
Can mos pensars mon co-
[mensa
Pois pens qe désirs non
[vensa
5 Loncs perqe torn em plor
[mon gaug
I" vauc cosares1 pensiua
Car non ans mostrar mon
[bezoin.
VI. Bon ai ma voluntat plena
Da ta] sen qe sentrebesca
E cug qe maia temensa
Car nuls honi mais per
[pleuensa
5 Nomen poiria faire gang
Dona sun 2 fossetz aiziua
Tost saubra sen fol men
[peroin.
VII. Mas il nô sap cal estrena
Ma dada nim com adesca
Car tan sos pretzsobregensa
Qil non cre qeu per temensa
5 Auzes ges de lieis auer gaug
Car es tan nomenatiua
Tem si lio die qe mon ver-
[goin.
VIII. Dus bes 3 granz talanz
[afrena
Mon cor car sens aiga pesca
Pois noil los puesca pre-
[senza
Dir deus lien don conoi-
[sensa
5 Alieis tal came torn en j.r
Qest vers farai qem caliua
Dir lai on ab lieis pretz
[sajoin.
IX. Ries soi si lenten en a gaug
Mas eu non stai perqem
[viua
Sil coneis ; e pos non na
[soin.
X . Non deg entendre mal mon
[gaug
Qel bos espers vol qe viua
El mais mentra don non ai
[soin.
i /. : co fa res — - L: sim — 3 /. : Cus bos —•»/.: conois .
I DODICI CANTI
ÉPOPÉE ROMANESQUE DU XVIe SIÈCLE
(Suite)
CANTO DUODECIMO
F°133v°]l. Signor, fur molti nella antica etade
A quai Fortuna prospéra promise
Eterno honor, perpétua majestade,
Ne lor dalle vettorie ample divise
Finchè mostrarno lor chiara bontade ;
Ma, quando inertia nel lor cor si mise,
Persero a un punto sol quel ch'in molti anai
Acquistato havean già con gravi affanni.
2, Di questi un fu quel gran Cartaginese
Ch' a Canne tante gran vettorie perse
Per non seguire l'honorate imprese :
Vivendo in otio il suo danno sufferse ;
Et quel moderno rigido Francese
Ch' altresi in Puglia ai suo' la morte offerse
Col troppo soggiornar, col star a bada,
Tenendo al fianco l'ociosa spada.
3. Et quel Thosco gentil, di cu'i figliuoli
Aile paterne spese hanno imparato
Soleciti esser per fuggir li duoli
Ch' acquistô il padre nel castel di Prato,
Et render libertade ai patrii suoli,
Cerca tutt' hor in questo et in quel lato :
Cosi in Durazzo hora Milone il duca
L'otio percuote, distrugge et manduca.
CANTO DUODFXIMd 153
4. Licentiô li suo' militi el sire
Preso ch' hobbe Durazzo, et con la moglie
Già consumati tutti i suo' desiiï
Et adimpite le bramose voglie,
Non conoscendo i suo' futur martiri
Ne le maligne sue venture doglie
Pensando chc nisc[i]un mai più il moleste
Ne l'alegrozze sue faccia funeste.
5. Vivendo, com' io dissi, alla Francesca
Con giostre e torniamenti, et lieta fronte
Facendo in corte a ognun, gente Turchesca
Accetta seco e al fin n'hebbe pur onte,
Perô ch'essendo ancor la piaga fresca
Se ne duolse Mongrana et Chiaramonte,
Onde ne trasse il duca la famosa
Origine per sempre glorïosa.
[F°134r0j6. Naparro sotto il nome di Torrindo
Venne a Durazzo coi compagni in fretta,
11 nome dando che dal paese Indo
Era venuto, aciô che men suspetta
Renda la gente, et Ottomanno il lindo
Armato entrô con tutta quella setta
Et da Lamphibo fu accettato,
Ch'è Turco altresi mal battizzato.
7. Da Finadusto fu con molto honore
Ricevuto Naparro, et alla corte
Non si vuol présentai- di cpuel signore
Cui cerca dare con gran stratio morte.
Vi va quel altro, ma non scuopr'il core,
Et mena seco le sue fide scorte
Dei cavallier, con dir ch' ivi andato era
Per honorar sol quella giostra altiera.
8. Enteso ho dir che si gettan tre acque :
La prima è quella che dentro al mar piove ;
La seconda (di udir non mi dispiacque)
É che al somier il capo lava, dove
L'eterna ingratitù per sempre nacque ;
Et délia terza più gettata altrove
Non si vidde di quella, ch' el Guidée
Battezza o il Turco o l'infido Caldeo.
154 I DODICI CANTI
0. Si suol dir un proverbio assai vulgare
Ch' un mal Giudeo non è mai buon christiano.
Chi facilmente questo vuol pruovare,
Hor ne puô haver l'esperientia in mano.
Finadusto et Lamphybo i' vi vuo' dare
Per testimoDi che '1 battesmo in vano
Presero per tradir più cautamente
Milone il duca et lor patria dolente.
10. Furon costor cagion che la citade,
Loi" patria, rovinasse a ferro e sangue,
Et vi périsse con gran crudeltade
Molti christiani, e il re Gniciardo esangue
Per il fratel restasse ; che pietade
Non truova hora Durazzo ; et perô langue
Per il figliuolo la misera madré
Et la figliuola per pietà del padre.
lF°134 v°j 11. Quando la giostra in piazza ordinata era,
Fassi nella cita tumnlto altronde.
Finadusto et Lamphybo con l'altéra
Persona di Napar che non se asconde
A loro, ma con la spietata et fera
Malignità cui par sempre seconde,
Truovan christiani et donne et fanciullini
Occidendo dai grandi ai picciolini.
12. Va il rumor al palazzo ov' è Seferra,
Quai piglia il fanciullino e in l'antro scende.
Invalidisse in la cita la guerra,
Col duca il buon Manfredo l'armi prende.
Dal basso centro fin sopra la terra,
La gentil maga le figure orrende,
Con le sue arti, trahe nella spelonca,
Col galetto délia Stigia conca.
13. Manda in Constantinopoli quell' armi
Che Volcan fece al sacro imperatore,
Per un di quei che coi magici carmi
Haveva de l'inferno tratto fuore,
Quai disse : « Fa che nullo unqua se n'armi,
Se non chi con giostrarle havranne honore,
Che, se altrimente mai tu ne facesti,
Il nome di esser giusto perderesti. »
CANTO nUODEClMO lï>5
14. Fu a un principe si grande grande il duono,
Ma il dcmon ch'el porté» che in forma humana
Se le mostrô, come un balen dal tuono
Via si parti tornando alla gran tana
Onde uscito era, et l'imperator buono
Lo fa cercar per la cita sovrana,
Volendol meritar, ne si ritruova,
Onde s'ammira di tal cosa nuova.
15. Et viste l'armi, che d'una bellezza
l'Iran non vista mai, l'hebbe assai care.
Furno stimate ancor di gran richezza
Che vi eran gemme pretiose e rare.
Havea l'imperador di gentilezza
Un figliuol pieno et di virtù preclare,
Sol d'anni cinque, et fe dissegno darle
A quello, onde per quel fe conservarle.
16. Milon fu fatto eon sua cara moglie
Prigione e in prigion posto ; ivi conviene
Tanto vi stia con stenti et amare doglie
Ch'el figliuol creschi et poi a trarli di pêne
Katto ne venghi, et le sfrenate voglie
Del zio maligno il giovanetto affrene,
Che con Seferra va in un piccio[ 1] legno
Pel mar fuggendo di Naparro il sdegno.
[F0 135 r°] 17 Ma la Fortuna, che è dei buon nemica
Et spesso in fine al cielo i tristi estolle,
Ne l'onde false quel legnetto intrica
Con contrar venti, et dal camino el toile
U' condurlo Sefferra s'affatica,
Per far le voglie sue nette satolle,
Che non le basta i genitor turbare
Ch'ancor persiegue il figlio in mezzo il mare ;
18. Perché fu preso il nobile bambino
Da certi predator nel mobil regno
Di quel che già si converti in d^lfino
Sol per Melantho, et del fanciullin degno
La fida scorta in mar col capo chino
Sendo gettata, il ciel sempre benegno
La rimutô in l'augel ch'al marin lito
In bianchc penne è passeggiando unito.
156 I DODICI CANT1
19. Doppo' fu comperato il fanciulletto
Dove, il bol monton d'or trasportando Helle,
Da lei caduta Hellesponte vien detto,
Et quel fu trasmutato in chiare stelle.
A Biza[n]tio portato il pargoletto
Fuggi le sorti sue crudeli et felle,
Che fu nudrito e imparô in le scuole
Ciô che liber fanciullo imparar suole.
20. Lungo saria il volervi, s'io volesse
11 tutto corne et quando racontarvi,
Ma bastami servar le mie promesse
Et sol Thystoria qui manifestarvi
Del pro Guerino, et poi quel che successe
Di lui più a pieno spero dichiararvi.
Basta ch' io dichi como acquistô Farmi,
Perche dirlovi haver promesso parmi.
21. Epydonio fu quel ch' el fanciulletto
Comprù dalli corsari et porto seco,
Trovando una nudrice che col petto
Li desse il latte, che di figli cieco
Era egii in prima, ma il motor perfetto,
Che niscium lascia over Latino o Greco
De l'opre pie senza buon guidardone,
La moglie fecondô d'un bel garzone.
22. Cosî fur nudricati in modo taie
Che l'un da l'altro non si conosceva,
Ciô è quil schiavo da quel naturale
Figliuol ; perô Guerino esser credeva
Figlio a Epydonio et a quel altro uguale
Certo fratel germano si teneva.
Era loro un vestir, un viver solo,
Corne se stato anch' ei fusse figliuolo.
; F° 135 v°] 23. Perché meschinamente fu truovato
In man di ladri il degno fanciullino,
Non sapendo che fusse battezzato
Ribatezando il fe chiamar Meschino.
Enidonio il figliuol poi fu nomato,
Ma fu di aspetto tanto pellegrino
Quel prima detto comprato fanciullo
Ch'a ogni animo gentile era trastullo.
CANTO DUODECIMO Ï5'
24. Et pervenuto al quintodeeimo anno
Cou Enidonio esscndo andato iu corte
Del sacro imperador u' sen/. i affanno
Si vivea lieto, le toccô per sorte
Giocar a lotta, et, non senza onta et danno
Dei lottatori, tanto destro et forte
Si demostro che venti o più ne vinse
Nanzi ch' ei si straccasse e in terra spinse.
25. Onde Alexandro, al degno imperatore
Vero figliuol di sangue et di costumi,
Al Meschin puose tanto grande amore
Che sempre in lui tenea firmati i lumi,
Considerandol tutto, et dentro al core
Si mise per lui spender molti numi
Comprandolo, onde ad Enidonio chiese
Ch' in venderglelo fusse al men cortese.
26. Quai le rispose non posser disporre
Del Meschin senza la paterna voglia,
Ond' Alexandro ad Epydonio esporre
Fe il suo désir et lui pregar che voglia
Concederli el Meschin et tanto tuorre
D'argento o d'or al désir le accoglia,
Pur che le dia il Meschin, che sol le piace
Sempre haver seco per sua eterna pace.
27. Enidonio gentil discreto et buono,
Al suo signor in tutto sempre grato,
Le ne fece cortese et largo duono,
Narrando corne l'haveva comprato
Da certi ladri che di voce in suono
Le disser corne l'havevan predato
De Sefferra che n'era curatrice
Et con molto oro et gemme e una nutrice;
28. Et corne haveano l'una et l'altra donna,
Ma pria la vechia, dentro al mar gettata,
L'altra che di bellezza era colonna
Da tutti i marinar sendo stuprata,
Ma perù a forza, in fine che la gonna
Con tutto el corpo bel fu lacerata,
Et al ciel rasa l'animetta pura,
Al corpo derno il mar per sepoltura.
158 I DODICI CANTI
[F°i36r°]29. Il tutto ode Guerin che era présente
Ciô che Epydonio ad Alessandro dice ;
Dagli ochi il pianto et un suspir rovente
Da 1* imo petto esala et se infelice
Chiamando pria ; et poi di quella gente
Quai sia diuianda che fn prédatrice
Di lui, quali esser Turchi entese, onde ello
Giurô di famé un di crudel macello.
30. Et lo successe poi, corne odirete,
Che fu de' Turchi capital neraico,
Et felli capitar entro una rete
Che fu a lor duro laccio et grande intrico
Più ch' a 1' imperio il sdegnato Narsete
Vedendo il cor d'Augusta esserli oblico ;
Ma, lasciando ogni cosa, i' vi vuo' dire
Come l'armi acquistossi il gentil sire.
31. Era Alessandro di bella statura
Proportionato et di cor generoso,
Cui donô il padre la bella armatura,
La roazza, il scudo e il brando luminoso,
Che le piacevan fuor d'ogni misura
Per la bellezza lor, ma gli era ascoso
Ciô che in quelle era, quai il sir si pruova
Ne ben le stanno o pur se armar ripruova.
32. Quando ha più volte et più pruovato il sire,
La prima volta le truovô assai strette,
L'altra si larghe che non son ben dire,
Et l'altra corte ; et quando poi si mette
In pruova di volersene vestire,
Più al corpo suo le ritruovava inette,
A tal che se ne lagna asai et le spiace
Non potersi vestir quel che le piace.
33. Et cosi quando è largo et quando stretto
O quando è troppo cupo o troppo piano
Il vago, bello et pretioso elmetto,
Il che par caso ad Alessandro estrano.
Altresi ancor le avvien di quel perfetto
Brando non fatto per oprar humano,
Che quando è corto, quando lungo et quando
Leggiero et quando è grave il degno brando.
i.ANTO DUODECIMO 159
34. Similemen te délia mazza et seudo
Avvien, chequando leggi etquando gravi
Sono al campion d'ogai baldanza igaudo,
Onde par che grao doglia il sir aggravi
Che servir non si puà di quelle, et crudo
Par a ciascun il caso, et alli ignavi
Fabri de 1' armi par cosa impossibile
E agli huaiaui intelletti anco incredibile.
[F"136 v°]35. Prendoao la misura al sir gentil''
Più fabri eh' ban de V armi il nome chiaro,
Ne alcun sa ritruovar modo ne stile
Di guastar quelle o a quelle farne uu paro.
Era illavor si bello et si sottile
Che di ponervi man tutti dubbiaro,
Ma pur pruovando ruppero i scolpelli,
lucudini, tenaglie et più martelli.
36. Non si ponno guastar per quella tempra
Ch1 hebbero prima dal suo dotto fabro,
Che ogni altro ferro o vi si frange o stempra;
Perô par forte il caso, duro et scabro
Et di esserne pur donno più s'insempra
11 gran disio nel sire, et torce il labro
Pel sdegno grande che nel cor s'imprime,
Onde a guastarle fa pruovar più lime.
37. Una si spezza, l'altra perde il taglio.
Straccanosi li fabri intorno a quelle,
Mirano tutti al pretioso intaglio,
Le frondi et ghiande con misure belle.
Di piu armature a quelle fanno aguaglio
Ne di beltà si truovano corne elle
Ne di fortezza ancor, perché i diamanti
Che quelle assai più foran franti.
38. Onde Alessandro si perturba et dice :
« Chi sia questo Guerin che quivi è scritto ?
Mai non se intese ancor, ma ben felice
E più di me se a suo comodo dritto
Posseduto ha queste armi ; et io felice
Tanto son più di lui quanto più afflitto
Sono per non gioir di si bel duono
Che m'ha donato il genitor mio huono ».
160 I DODICI CANTI
39. Le fa riporre al pristino suo Iuoco
Con pensier di truovar chi a lor simili
Ne faccia ancor, tornando a festa et giuoco
Coi suo baron magnanimi et gentili.
Ha il Meschin sempre seco,et sempre in fuoco
Di sdegno accesi l'aima e il cor virile
Il giovanetto ha sol per non sapere
Délia sua stirpe le certanze vere.
40. Frâ gli al tri un di Alessandro et più baroni
Giocando a lotte, a pale, a tirar pâli,
Ch' ivi eran de diverse regioni,
Si truovan tutte quelle armi fatali
Ne fuvi alcun in tutti quei campioni
Cui stesser ben, perben che molti uguali
Erano di persona al bon Guerino,
Ma sol s'assettan ben sovra el Meschino,
[P° I37r°"41. Vuolse Alessandro alhora un duono farne
Al suo Meschin, ma in piè nacque un tumulto,
Che ciô non si dee far per contentarne
Un sol, che fora agli altri troppo insulto
Et tanti gentil homin scontentarne,
Onde uno ad Alessandro dà consulto
Che non vuoglia dispor senza del padre
In ridonar altrui l'armi leggiadre.
42. 0 invidia che in le corti sempre pasci
La tua ingordigia et dishonesta famé,
Che, se hoggi muoiï, diman rinasci
Quai vivo semé sparso inbuon letame,
Tal che mai discader tu non ti Iasci
Ne a te rompeno mai le Parche il stame,
Ma tu pulluli più che gramigna
Perché aile corti sei fîda matrigna.
43. Onde Alessandro al sacro impei adore
De l'armi raguagliô la cosa intera.
Per6 de l'armi vuol che sia signore
Chi quelle vince con battaglia fera,
Ricordatosi corne il donatore
Le disse già che a chi per giostra altiera
L'acquistarà, si dessero et no ad altri,
Ancor che fussin valorosi et scaltiï.
CANTO DUODECIMO ICI
44. Cosl uno editto fe che ogmm potesse,
Pur che fusse signor o cavalliero,
Giostrar qell' arnai, et quel che le vincesse
Ne andasse di elle et di gran fama altiero;
Ma, se per sorte alcun se prosumesse
Ivi giostrar che non fusse guerriero
Famoso o sir di qualche deguo stato,
Subito preso sia decapitato.
45. Quando entese il Meschin la conditione
Con quai covien che tal armi si giostri,
Ne l'animo ne prende gran passione
Che sol chi è franco cavallier dimostri
Quanto egli vaglia fra l'altre pcrsone ;
Voltando gli ochi alli superni chiostri
Si lagna di sua cruda e amara sorte
Che schiavo l'habia fatto et tolto a morte.
46. Non ride più, non giuoca et non fa festa,
Non si ralegra più corne egli suole,
Non alza più la delettevol testa,
Più non motteggia con grate parole,
Ma sempre più la fantasia il molesta.
Piange da se, suspira, assai si duole,
Perde il color suo solito, et la mente
Sempra più gramaet più turbata sente.
[F°137v°]47. Vede Alessandro questo et sta turbato,
Perche si pensa ch 'el Mcschin sia infermo.
Délia cagion l'ha subbito spiato,
Ma quel non scuopre il suo proposto fermo,
Anzi si escusa, et di essersi mutato
Non creder dice, et non ne puo far schermo.
Pur lo costringe sotto giuramento
Che '1 ver le dichi senza haver spavento.
48. Tanto è l'amor ch' Alessandro le porta,
Che giura anche egli non negarli mai
Cosa ch' ei chicgga, onde si riconforta
Alquanto il buon Meschino et dei suo' lai
Al suo Alessandro âpre la chiusa porta,
Et dice : « Signor mio, non vorei mai
Essere in questo miser mondo nato
Poichè '1 giostrar de l'armi mi è vietato.
11
162 I DODICI CANTI
49. Non che la cupidigia mi ci tiri,
Ma sol disio d'honor d'acquistar fama
Mi dà dentro del cor crudel martiri,
Ch' io veggio da lontan che sol mi chiama
Vittoria a questa impresa, et con suspiri
Convien ch' io mi rimanghi, onde ogaor hrama
Mia istessa morte il mio spirito afflitto
Dal ciel et da Fortuna derelitto.
50. Viver non vuo' più in questa mortal vita,
Se vita si puô dir questa mia sorte,
Quai giorno e notte a desiar m'invita
Sol per uscir di servitù la morte
Che certamente per sententia trita
E men di servitù crudele et forte,
Che mille volte il di vivendo i' moro
Fin ch' io son schiavo con crudel martoro.
51 . Vedendo il pio Alessandro cl.o '1 Meschino
Délia sua sorte si lamenta et piange,
Tenendo per pietade il capo chino
Verso la terra, dentro del cor s'ange,
Et giurando promette al poverino
Che, se ei vuol, giostrarà. Cosi le tange
La mano con gran fede et con amore
Benchè non vogli ancor lo imperadore.
52. Et, se ei si porta nella giostra, ancora
Soggiunge il sir, corne ei bramando spera,
Libero farlo senza altra dimora,
Et honorar la sua persona, e altiera
Farla fra cavallier in poco di hora.
Tanto nel dir mostrô grata maniera
Che ritornô al Meschin quel color vivo,
Di che stato era per più giorni privo.
[F°i38r°]53. Di Grecia in ogni luogo si divolga
La giostra impérial dever si fare
Il primo di di Maggio, et ch' ognun tolga
Il tempo a proveder corne li pare,
Ne vuol lo imperador che si rivolga
Lo editto suo che nisciun puô giostrare,
Se non è gentil huomo e cavalliero
Overo che habia giusto et meroimpero.
CANTO DUODECIMO 163
54. Cosî il tempo ne viene atto alla giostra.
Si adunano i guerrier Greei et Latini
Con pompa grande, et ciaschedun si moslra
Con belli arnesi et corsier pellegrini.
Intendesi fra' Turchi che si giostra,
Ch' al Greco imperador presso ai confini
Sono, onde li figliuoi d'Astiladoro
Vivean con grande pompa et con molto oro.
55. Huvevan triegua alhor Turchi et christiani
Greci per ducento anni insieme tutti,
Ne coi sol Turchi ma ancor con gli Alaui,
Con Mori et Saracin malvagi et brutti,
Onde dalli paesi ancor lontani
Vennevi gente assai per corre i frutti
Délia virtù, che son fama et honore,
Loda, gloria perpétua, immenso amore.
56. Astillador duo figli, de' quali uno
Torindo detto et Pynamonte
L'altro nomato, et si superbo è ognuno
Dei duo fratei che non estiman fronte
D'altrui et nel pensier han che nisciuno
Lor tolga il pregio, onde per valle et monte
Cavalcan con gran pompa et da Gismondo
Furno acettati con il cor giocondo.
57. Di Macedonia il principe vi venne
Polydamante, et délia Assiria il re
Amphymonte gentil, et quel che tenne
Di Lychaonia il scetro, lo quai fe
In giostra il suo dover rompendo antenne,
Non che le lance, e altrui fastidio diè,
Brunante detto ; et d'Alessandria il vero
Signor, che fu nomato Narpalero.
58. Amphylo ancor figliuoi del re dei Persi
E i duo Albanesi zii del pro Meschino,
Che i genitori suo' tenean sumersi
In oscura prigion, ma più meschino
Vi fu Madarro, che coi passi persi
Perso la vita per man di Guerrino,
Come udirete suecessivamente,
S'havrete al cantar mio l'orechie atente,
164 I DODICI CANTI
[F0 138 v°] 59. Pria che giostrasse il Meschin, manumesso
Fu da Alessandro quai fedel chiïstiano,
Benchè farlo doppo gli havea promesso
Libero, ma Epidonio tutto humano,
Che quel ch' amava hebbe al suo sir concesso,
Le supplice ch' in affrancar lo estrano
Non le fusse Alessandro quai havaro
Non li essendo ; rogarne fe il notaro.
60. Tre cavai sol potea ciasehedun seco
Menar chi a questa giostra esser volea,
Cavallier Turco, Mor, Perso, lndo o Greco
0 venuto di Persia o di Galdea,
Signor, conte, marchese, e duca, bieco
Non havendo egli il cor, entrar potea
In la cita ove riceveva honore
Dal magnanimo et sacro imperadore.
61 . Tutti i signor, che già di sopra ho detto,
Nella regia era[n] con araor tenuti
Per fin che giunge il di fra gli altri elletto,
Che fu il primo di Maggio, et dagli arguti
Cavallier si prevenne al degno effetto
Délia giostra ove fur abbatuti.
Vedendo ciô il Meschin per sdegno et rabbia
Quasi piangendo si mordea le labia.
62. Con Elisena sopra un palcho ito era,
Sorella d'Alessandro cui serviva,
Il buon Meschin, che quasi se dispera.
Scendendo a basso, ov' è Alessandro, ariva
Et dicele : « Signor, già Paîtra sera
Mi promettesti pur a voce viva
Ch' io giostrarei, et hor si giostra et io
Stonimi a veder con pena et dolor rio ».
63. Un poco se arossô Alessandro in volto,
Poi seco lo mena dentro al pallagio
E armollo di sua man d'armi, che molto
Erano sodé, et ragionando ad agio
Seco, le disse : « Honor portando et sciolto
Dagli altri torna quivi, che malvagio
E tanto il padre mio che certo i' dubbito
Che ti faria morir sapendol subbito. »
CANTO DUODECIMO 165
64. Sopra l'armi un a vesta da villano
Le puose il sir et délie un caval forte,
Ponendoli sul capo di sua mano
Di quercia una corona, che per sorte
Ivi un ramo truovo poco lontano ;
Poi sul caval il pose e uscir di corte
Lo fece dal postico in giostra intrare,
E, a ciascun che lo vede, un villan pare.
[F0 139 r°] 05. Porta di faggio una ben grossa lancia,
Sopra postovi un fer truovato a caso.
Se li oppone un de' zii che senza ciancia
Puonerlo in terra s' havea persoaso.
Madarro è questo, a cui mezzo alla pancia
La ruzza hasta passé rompendo il vaso
Délie intestine et più d"un palme et mezzo
Dietro passando lo lascio al dassezzo.
66. Ritira l'hasta a se cou gran valore.
Lievasi il corpo ch'in sul terren jace.
Chiede di gratia al magno imperadore
Nappar giostrar con quel villano audace,
Ne gli el niega ello, et con molto furore
Ne va contra al Meschin come rapace
Ancipitre al fagian ; pieno di sdegno
Vendetta spera contra il guerrier degno.
67. Al primo iscontro, il nobile Meschino
Diede in l'helmetto al suo secondo zio,
Et le giovù che di tempra era flno,
Che come l'altro con tormento rio
L'harebbe posto a l'estremo dirnino
Di morte orrenda, ma pur pagô il fio
Délia superbia sua ch'ello e il cavallo
Caddero al colpo senza altro intervalle
68. Et la eaduta fu si cruda et fella
Che se le roppe la sinistra spalla,
Maledicendo la sua fera Stella.
Ne si torce il Meschin punto, o traballa,
Anzi murato par sopra la sella
Del destrier, che ne fa dritto et non falla.
Se représenta con la lancia in mano
Cui il popol [grida] : « Viva hora il villano! »
166 I D0D1CI CANTI
69. Amphylo Perso in su l'armata coscia,
Di sdegno pien, con l'hasta s'apresenta,
Pensando a quel Mesehin donare angoscia,
A quel Mesehin che di nisciun paventa.
Arestano le lance ambi duo' et poscia
Menando i spron tengon la briglia lenta.
Si ferono amendua, ma il colpo adverso
Fa col cavallo andare in terra il Perso.
70. Già l'hora tarda per quel di fin puone
Alla giostra. Alexandro se ne torna
Verso el palazzo et aspetta il campione
Che con vettoriosa palma s'orna
Le chiare tempie più che di corone
D'oro li régi ; et mentre che soggiorna
Alessandro, il Mesehin ritorna dove
Quello lieto l'aspetta et non altrove.
[F0 139 v°] 71. Et da lui fu di peso scavalcato
Con tanto amor, con tanta ligiadria,
Poi di sua propria mano disarmato.
Non par che schiavo mai stato le sia,
Anzi maggior fratel sempre honorato,
Che non si satia mai di cortesia
Pieno et da se et da lui sempre honorarlo
Abracciandolo, e in faccia di basciarlo.
72, Si pongono alla mensa i giostratori
Et del vettorioso si dimanda.
Serve il Meschino a tutti quei signori
Portando a questo e quel l'ampia vivanda.
Al fine del cenar fansi rumori
Di quel villan che '1 suo nome non spanda.
Si meraviglia ognun poichè vettoria
Havendo non vuol dar di se memoria.
73. L'imperador ad Alessandro chiede
Se sa chi sia quel cavallier valente.
Nol niega et di saperlo non fa fede.
11 Mesehin' od' il tutto ch' è présente,
Cui Alessandro il giudicar concède
Chi lîionor habia havuto apertamente.
Quel villan disse : « L'honor ha, perch' io
Non giostro corne glialtri, o signor mio. »
CANTO DUOnrcCIMO 107
74. Disse Alessandro : « Donrjue ti dà il core,
Se tu giostrasti cou 'sti cayallieri,
Portarue gloria et sempiterno honore. »
Cui « Si » rispose. Alhora quei guerrieri
Risero tutti e il sacro imperadore
Rise altrosl ; et Alessandro i veii
Successi havendo visti, fa partira
lndi el Meschin, doppoi cominciô a dire :
75. « 0 sacro imperadm-, s'io la podésta
Havessi, i' vorrei far costui giostrarc
Per far più bella giostra et lieta festa
Et per voler l'animo suo pruovare. »
El magno imperador con la modesta
Voce rispose non voler ciù fare,
Che in le giostre u[n[ tal non dee mostrarsi
Chi sir o cavallier non puô pruovarsi.
76. Non replica Alessandro al degno padre,
Ma, levata la mensa a canti et suoni,
S'invitan cavallier donne legiadre
A veder recitar farse et bufFoni.
Stanvi Elisena et l'inclita sua madré,
Signor, conti, marchesi e altri baroni.
Lascianli solazzar finchè vediamo
Il bel giuoco d'Astolfo et de Aleramo,
[F°140r°] 77. Vi dissi già, signor mio caro, corne
Cavati dal giardin fur da Sylvana
Et condotti al palazzo del gran nome
Che fatto fu senza alcuna opra humana.
Il giuoco è ch'un anello entro aile chiome
Con mille nodi avolto in foggia estrana
Tiene una Fata, et senza nodo sciorre
Se lo guadagni sol chi lo puô torre.
78. Ha in se tanta virtù l'anel richiusa,
Che chi lo porta in deto a ognun fa grato,
Et chi in bocca tenerlo in viaggio usa
Non è da famé o sete unqua assaltato,
Et ogni tradimento scuopre a accusa
Se al destro braccio si porta legato,
Et chi in laccio di seta el tiene al collo
Mai non riccve dai nimici crollo.
168 I DODICI CANTI
79. Si pruova et si ripruova il duca Englese
Di trar l'anello fuor di tanti nodi,
Ne possendo ei dar luogo fu cortese
Ad Aleramo che con più et più modi
Pruova et ripruova, et stan tutte suspese
L'altre Fate a mirar che si disnodi
Dai capei d'oro et pur l'anel sta sodo,
Ne di cavarlo alcun ritruova il modo.
80. Astolfo ripruovarsi vuol da capo
Ch' ha de l'anello entesa la virtute,
Onde si acosta al bel dorato capo
Riponendo allô anel le deta acute,
Ma non ritruova via, modo ne capo
Ch'al desïo infermo suo presti salute.
La Fata vuol s'ei puô quei nodi sciorre
Non rompendo capel, sel possa tuorre.
81 . Discioglie un nodo Astolfo, et si ranoda
Lo biondo crine in più nodi et più stretto,
Il che fa che [1'] Englese più si roda
Dentro del cor et prendesi dispetlo.
Tanto è la treccia délia Fata soda
Che non si prende Astolfo ommai diletto
Più dello anel trar fuor, onde si tira
In dietro e a quella col bieco ochio mira.
82. Invitasi Aleramo al gran partito.
Doppo che puô con mano i nodi sciorre,
Tien volentier il degno et largo invito,
Et poi se ingegna con industria tuorre
El pretioso anel dal crin polito,
Et al suo desiderio il ciel concorre
Che gli presta favor et gran prestezza
A sciorre il crin con molta gentilezza.
[F°i40v°]83. Si sdegnô Astolfo e non diraostra fuore
La rabbia ch' el pensier dentro l'ofïende.
Conosce ciô Sylvana et con amore
Délia spietata invidia lo riprende
Con dir che duo' compagni d'un sol core,
D'un solo animo in tutte lo facende
Deveno sempre mai vivendo insieme
Servarsi fode et in l'un l'altro haver speme.
CANTO DUODEC1MO 169
84. Poi ambi prende per la man la Fata
Ht qninci et quindi pel palazzo mena,
Mostrali dentro et fuor la stanza grata,
La stanza tutta di vaghezza piena,
Ne la più bella vidder ne più ornata
Allronde i cavallier ne tanto amena.
Vi veggono figure agli ochi vive
Che paion solo dello alitar prive.
85. La sala, in che vi dissi che Sylvana
Truovor mutata in serpentil figura,
D'una imensa grandezza et si sovrana
Viddero et ornata di vaga pittura
Che l'opéra gentile più che humana
Giudicarno i guerrier, che la natura
Escedea dei pittori, et a mirarla
Puosersi e intentamente a contemplarla.
86. Vedevano ivi quoi alber di Giove
Che tenean dei pastori incoronati
D'oro et di gemme, corne i' dissi altrove,
Al ciel acetti, agli humani ochi grati,
Di quai vedevansi anche le gran pruove,
E i gesti loro aperti et denudati,
Uno hedifficar ponti et sacri tempi,
L'altro procéder coi mutati tempi.
87. Havea quel primo sotto il scalz - piede
Dilibri et di scritture un poggio fatto,
Ma a quel secondo chiaro vi si vede
D'armi un gran monte et un tempio disfatto
Più bel rissorgere ove si concède
Per quello indulto, et farsi indi ritratto
Di speme che ritorni il secol d'auro
Che tutto opresso havea li Hispano thauro.
88. Vedevasi un leon schiantare un ramo
Délia honorata quercia et crollar quella
Per dar le ghiande a un porco magro et bramo,
Et alegrarsen quella donna bella
Ch' el sposo suo poi vidde mesto et gramo,
E adolorata ogni sua damigella,
E, che libéra fu, soggetta farsi
La cupidigia astrinse, et aise et arse.
170 I DOD1CI CANTI
[F0 141 r°]89. Dalla crollata quercia pullularsi
Vedean le ghiande più vaghe et più belle
Et quella più ne l'aer dilattarsi,
Multiplicar le foglie corne stelle;
Et nella terra sue radici farsi
Più grosse et ferme ; et nascer sopra quelle
Uu tropheo di vettoria a gigli ornato,
Già da principi molti desiato.
90. Ivi un altro pastore incoronato,
Simile ai primi, in s'un carro di fuoco
Da terra in fine al ciel tutto elevato,
Quale spandendo il manto a poco a poco
Copria de Italia il più famoso lato
E a duo gentili giovani, in quel luoco,
Porger duo' lembi del bel manto d'oro,
Poi il car firmarsi nel céleste choro.
91 . Paulo Terzo havea scritto nel diadema
Quel coronato, et un dei giovanetti
Col destro pie par ch' una scritta priema
Cui inscritto era : « Allessandro delli eletti
Cardini sacri in chi virtù non scema
Alcun di modi soi sacri et perfetti. »
11 secondo « Ranuccio » haveva scritto
Un epytaffio infra il piè manco e il dritto.
92. Al piè del gran pastor un altro vi era,
Pur giovanetto, che del sacro manto
Si godeva anco a l'ombra, et alla spera
Del bel fuoco del carro sacrosanto,
Et dimostra il pastor grata maniera
A quelli e a questo che portano il vanto
Di eterno honor, et il nomme ivi si legge
Dol terzo : « Guid' Ascanio adempi il gregge. »
93. Stavan costoro a contemplar suspesi
Cosi l'hystorie corne le figure,
Quale vive parean coi volti accesi ;
Di color vaghe, con arte et misure
Ben liniate, i riguardanti intesi
Rendevan si che et ei parean sculture.
Pur ridrizando un oltra più gli ochi
Vidder cose da saggi et non da sciocchi.
CANTO DUODFXIMO 17 1
04. Un pastorel con una pietra viva
Rompea la fronte ad un gigante elato
La Buperbia di cui ciaschedun schiva,
Vedendolo esser forte et bene armato ;
Ma pur el pastorel di vita il priva
Et, col grave coltel che tenea a lato
Tagliatali l'altiera e orribil testa,
Riportarla fra i suoi con gioia et festa.
[F0 141 v°] 05. Cosi un griffon superbo e altiero tanto
Quanto altro mai quel degno paslor doma,
Et riduce a piotoso et mesto pianto
Una altaet gran collonna apresso Ruina;
Poi l'una etl'altra m an premendo, quanto
Huoppo le par, su l'una et l'altra chioma,
Non le lassa ricor pur i cappelli
Ch' [h]anno su gli ochi lagrimosi et felli.
06. Ad un dei descendent! di Guerino
Crollar la quercia da l'orato gbiande.
Lo istesso coronato Camerino
Tollendoli si vede, et farsi grande
Di quello Ottavio in prima fanciullino,
Genero alla grande aquila, che spande
I vanni altier da l'uno a l'altro polo,
Cercando inverso il cielo alzarsi a volo.
07. Ma quel seguendo le vestigie e i modi
Del suo progenitor céder si vede,
Per non schiantar ma conservar quei nodi
De l'alber suo pieno d'amore et fede,
A ciô que meglio in terra il pie si assodi ;
A chi il pastor poi mansueto riede
Di modo che li dà di sua famiglia
Una faneiulla saggia a meraviglia.
Poi di ducal galero *.
08. Che a guisa délia bella unica Psyché
Era servata per divin mistero,
N • a lei simil infra moderne o antiche
1 Ces mot? sont le reste d'une stance ainsi indiquée en marge, mais
donl il n'a été écrit que ce premier hémistiche.
172 I DODICI CANTI
Altra mai fu d'ingegno acuto e altiero.
Le Gratie con le Muse a quella aruiche
Seco seder parean nel magistero
Del gran pittor che quella sala pinse
Et non nati anco naturali efflnse.
99. Mentre stan fisi i duo guerrier fregiati
L'hystorie a contemplai" a loro ignote,
Altronde da Sylvana ritirati
Si rivoltaro ad ascoltar le note
Che sentivan di canti honesti et grati
Délie voci sonore hor piene, hor vote,
Con dolci acenti et soave harmonia,
Da suscitar chi è di morir in via.
100. Questo lo fece industriosamente
La gentil Fata per non rivellare
La cosa a lor futura a lei présente
Di quel che lor non tocca, et perô trare
D'indi li cerca assai fervidamente,
Et ov' è l'harmonia quelli menare
S'ingegna ch'una caméra vicina
Chiudeva in se la musica divina.
[F0 142 r°]101. Et sopra un letto riccamente adorno
Li fa posar la Fata et ella parte.
Non era giunto ancora al mezzo giorno
Di Phebe il carro, quando in quella parte
Lasciolli, et io li lascio etfo ritorno
Dov' Orlando lasciai dal fero Marte
Tutto infiammato contra Rio-Castello,
Vincer volendo il suo tyranno fello
102. Se vi ricorda ben, dissivi sopra
Ne l'altro canto corne giunse Orlando
A Rio-Castel, per adempir quella opra
Lodevol tanto con il forte brando
Contra el tyranno, in cui favor se adopra
Tutto il suo stuol sentendo il corno, quando
Hebbero incarcerato Sacripante,
Compagno alhora del signor d'Anglante.
103. Doppo il lungo sonar del degno corno,
S'armano tutti i cento cavallieiï
CANTO DUODECIMO 173
Et verso il conte sol cinquanta andorno
Ch'eran fra gli altri più gagliardi et feri,
Et gli altri in guardia del castel restorno,
Ma Sarpedoute fra quegli primieri,
Ch'usci con lor, rimaste morto in terra,
Ne perô terminossi alor la guerra.
104. Perché i cinquanta alhora vendicare
Volendo il suo signor, posti in battaglia,
Contra del conte mossi a contrastare,
Tutti Orlaudo gli affetta, ancide et taglia,
Tal ch'un non si puù vivo conservare
Per buona piastra o pur per fina maglia
Che egli habia in dosso, et cosi in quel contrasto
Fe il glorioso conte il terzo guasto.
105. Quel giovanetto ch'el consiglio diede
Contra al bon vechio, che delli cinquanta
Rimasti in guardia, perché in lui havea fede
Quel tyranno, era capo, non si vanta
l'iù corne prima, perché aperto vede
11 gran valor del conte etforza tanta
Esser flaggel di Dio, et se li rende ;
Quai gratamente per la mano il prende.
106. Il benigno lo accetta pur con patto
Che se abandoniet arda lo empio luoco,
Et sia in quel proprio giorno quel disfatto
Per viva forza d'avarapato fuoco,
Né fra loro altrimente vuol sia fatto
Alcuno acordo o per molto o per poco,
Ma pria si renda Angelica e a Roberto
Sylvia et sia dov' è il Re il carcere aperto.
[F0 142 V] 107. Non puô Gelarco, che cosi detto era
Colui che tanto araava Sarpedonte,
Contravenire alla proposta altiera
Di quel vettorioso et degno conte,
Ma pur, perché il thesoro ottener spera
Di quel morto tyrano, lieta fronte
Facendo, le due donne et Sacripante
Liberamente diede al sir d'Anglante.
108. Più di sei cento donne in Rio-Castello
Ferdinand Castf.ts.
VARIETES
Les noces, d'argent de Mistral et l'Allemagne
La Bibliothèque de la Société des Langues Romanes a reçu
de M. Auguste Bertuch uu intéressant document: un exem-
plaire de l'adresse que les visiteurs et hôtes allemands de
Mistral, philologues et romanistes, professionnels ou ama-
teurs, ont fait imprimer et lui ont offerte à l'occasion de ses
noces d'argent.
En 1900, au banquet de la Santo Estelo, à Maguelone, on
avait projeté de célébrer cet anniversaire par une grande fête
félibréenne ; mais l'idée n'eut pas de suites; et les amis alle-
mands du maître de Maillane sont les seuls à s'être souvenus
officiellement du 27 septembre 1876.
Voici le texte de cette adresse qui atteste la popularité de
Mistral en Allemagne :
Au mèstre venera Frederi Mistral, pèr la fèsto de si noço argentalo
emé Na Mario, nascudo Rivière, lou 27 de setèmbre 1901.
MÈSTRE VENERA,
Festejasau-jour-d'uei, perla gràci de Dieu, lou vint-e-sieisen retour
doû jour ouate vous sias amouiera.
Aquelo fèsto se deù dire uno fèsto de famiho, ounte es la coustumo
que lou roudelet entime di parent e dis ami s'acampon à l'entour d'a-
quéli que festejon, pèr ié pourgi tourna mai lou testimôni courau de
la part que de-longo prenon emai an presso i gau e peno d'aquéli que
soun tant estrechamen uni per li nous doû maridage.
Permetès que naùtri peréu venguen nous apoundre à-n-aquéu rou-
delet famihau e jougne nôsti vot de bonur i vot d'aquéli qu'eston lou
mai proche de voste cor 1 Naùtri peréu avèn passa lou lindau de voste
oustau amistous à l'oste d'aquel oustau, toco doû roumavage pèr
toûti lis ami de la pouësio prouvençalo revieûdado pèr vosto obro, e
que soun charme misterious nous a tambèn touca ; e dins lis ouro que
nous fugue douna d'esta au vostre, avèn près uno visto em 'uno cou-
neigudg inoûblidablo di fôrti fondamento ounte repauso lou bonur de
VARIATES 17 o
voste oustau, mounte une superbo tradicioun de i'amiho, uno coumu-
niou entimo e afeciounado dis espous dins li pensié e li pantai dam-
Ledous e la pïouso ousservanço dis usage tcrrenau an créa un si;ni e
segur recatadou di Muso, fach à meraviho pèr enaura vosto obro
pouëtico counsacrado a la pichoto patrlo e pourgi pèr aquelo obro uno
perdurablo jouïssenço a toûtijlis ami de la blouso e veraio pouësio.
Posque este jour, ounte vous e vosto venerado mouié vesès en-
rèire, dins la fierta de vosto joio entimo uno vido famihalo longo e
benesido, posque este jour s'escoula pèr vous en touto gau, e posque
lou bonur que fin qu'aro vous es esta larga tant aboundous demeura
vostre, franc de touto àuci e de tout trebau, dius uno longo tiero de
bèllis annado.
Lou 27 de setèmbre 1901.
Vostis oste e amiraire di pais de la Lengo d'Alemagno
Heinrich Ahnkn, Echternach.
Cari Appel, Breslau.
August Bertuch, Frankfurt a. M.
Marie Bertuch, —
Eduard Boehmer, Lichtenthal.
Ludwig Brautigam, Bremen.
Suzanne Brautigam-Romane, Bremen.
Johannes Fastenrath, Koln a. Rh.
Cordelia Haltexhoff, Genf.
Oskar Hexmcke, Bremem.
Eduard Koschwitz, Marburg.
Wilhem Kreiten, Kirchrath.
Emil Levy, Freiburg i. B.
Henricb Morf, Zurich.
Karl Sachs, Brandenburg.
Siegfried Samosch, Berlin.
Hermann Suchier, Halle a. Saale.
Heinrich Vierordt, Karlsruhe.
Nicolaus Welter, Diekirch.
Julius Wolf, Charlottenburg.
Marie Wolf, —
Cette adresse a été composée avec le plus grand soin et un
goût parfait, par MM. Breikopf et Hartel. — Elle forme une
plaquette in-quarto de huit pages, tirée en deux couleurs et
imprimée en caractères archaïques, et constitue en elle-même
une véritable œuvre d'art.
BIBLIOGRAPHIE
Romania. — XXX. 1 (janvier 1901). — P. 1. Ferdinand Lot.
Nouvelles études sur la provenance du cycle arthurien. — XI. Arthur
en Cornwall. — XII. Sources cornouaillaises de Gaufrei de Mon-
viouth ; Cador dux Cornubia? et Gorlois dux Cornubire. — XIII. Kel-
liwlc, résidence d'Arthur. — XIV. Le blanc porc dans Guingamor. —
XV. La bataille de Camlan. — XVI. Deux localités arthuriennes, Cara-
digau et Dinatiron. — XVII. La forêt de Calisse. — XVIII. Enide. —
P. 22. Arthur Piaget. La Belle dame sans merci et ses imitations. I.
[Voici les conclusions de cet intéressant article: « Alain Chartier
est né vers 1385; il est l'aîné des frères Chartier ; il est bien l'auteur
de la rédaction latine du Cariai. »]. — P. 49. Alfred Morel-Fatio. Le
débat entre Anton de Moros et Gonzalo Davila. Série de neuf pièces
satiriques, d'un ton assez grossier, dont cinq d'un irobador inconnu,
Anton de Moros, et quatre réponses de Gonzalo Davila, dont on con-
naissait une petite pièce galante insérée dans un chansonnier du Musée
Britannique. — P. 65. Salverda de Grave. Les mots dialectaux du fran-
çais en moyen-néerlandais. [ Mémoire plein de faits et d'idées, qui forme
le pendant du précédent ouvrage de l'auteur intitulé : Essai sur quel-
ques groupes de mots empruntés par le néerlandais au latin écrit (Am-
sterdam 1900), et qui amène l'auteur à cette conclusion : que la plupart
des mots français empruntés par le néerlandais au moyen âge lui sont
venus du Hainaut, province dont les comtes ont longtemps régné sur
toute la Hollande et dont les villes avaient, à cette époque, une grande
importance.
Mélanges. — P. 113. Ov. Densusianu. Primus et *antaneus en rou-
main. — P. 115. A. Dauzat. Amaiza. [Ce mot, qui signifie « fourmi »
dans le centre de la France, viendrait d'un primitif germanique
(imait -, par l'intermédiaire d'un diminutif hypothétique amaizïdï].
— P. 119. A. Dauzat. Urgere. [M. D. a noté dans la bouche d'une
vieille femme, à Vinzelles ( Puy-de-Dôme), le mot dourze, « pousser,
ramener (le bétail) vers l'étable », qu'il tire avec raison de urgere
avec un d prosthétique. Il aurait pu comparer moulze = mulgere
(passim) ]. — P. 120. R.-J. Cuervo. Canoa — Sabana. — P. 127.
F. Lot. Le cri de la bête dans le Daniel du Stricker. [Démonstration
de l'origine celtique de cet épisode. ]
BIBLIOGRAPHIE 177
Comptks rendus. — P. 13'). G. Schlessinger, Die altfranzœsischen
Wcerter in Machsor Vitry nach der Ausgabe des Vereins Mekize Nir-
damim (L. Brandin : utile contribution à l'étude des glosses nébi
romanes, mais l'auteur n'a que des Dotions insuffisantes d'ancien
français). — P. 132. G. Paris, Orson de Beauvaia (H.Suchier: grands
éloges; quelques petites corrections, dont M. G. P. conteste une
partie et accepte les autres avec sa bonne grâce habituelle, ajou-
tant deux rectifications suggérées par M. A. I.ongnon. ). — P. 138.
II. Berger, Canchons h ml Partures des altfranzœsischen Trouvère Adan
de le Haie le Bochu d'Aras A. Jeanroy et G. Paris : les deux rappor-
teurs sont d'accord pour blâmer le style amphigourique et la subtilité
ainsi que la prolixité du commentaire, souvent erroné, tout en rendant
justice à la grande érudition de l'auteur et à la somme de travail
dépensée.). — P. 149. Potanine, Vostotchnye motivy v sredneviekovi \rn
evropeislcom epoesie. (Les motifs orientaux dans l'épopée du moyen âge).
(E. Anitchkof : matériaux précieux, mais thèse inacceptable tant par
les philologues que par les folkloristes).
Périodiques. — P. 151. Ze'dschrift fur romanische Philologie,
XXIV, 4. (A. Thomas et G. Paris). — P. 154. Siebenter lahresbericht
des Instituts fier rumœnische Sprache zu Leipzig (M. Roques). — P. 1 55 .
Chronique. — P. 158. Livres annoncés sommairement.
XXX, 2-3 (avril-juillet, 1901). — P. 161. M. Roques et G. Paris.
L'élément historique dans Fierabras et dans la branche II du Corone-
nieut Looïs. [I. Fierabras. — M. R. croit aune contamination des évé-
nements de 846 (arrivée des Sarrasins à Rome par le Tibre, pillage des
trésors de Saint-Pierre et défaite des Sarrasins par le marquis Gui,
sans doute le duc de Spolète) et la délivrance, par le Normand Robert
Guiscard, du pape Grégoire VII, assiégé dans le Château-Croissant
(Mole d'Hadrien) par l'empereur Henri IV après la prise de Rome, et
du portique de Saint-Pierre. Robert Guiscard serait le prototype du
Richard de Normandie de la chanson. — II. Couronnement de Louis, L'in-
vasion sarrasine racontée dans la branche II de cette chanson de
geste a pour base, comme la première partie de Fierabras, l'attaque
de 846 contre Rome et non le siège de Capoue (Chape), qui n'est qu'un
épisode antérieur auquel il est fait allusion au début. Le nom de
Guafier, fait prisonnier à Chape et devenu roi de Salerne, le souvenir
des luttes soutenues par les villes campaniennes, sont venus s'ajouter
au récit du siège de 846, mais ne forment pas l'élément historique
essentiel du poème. M. G. Paris déclare être arrivé à des conclusions
très voisines, quoique un peu moins précises, dans une leçon faite au
Collège de France, en décembre 1396.] — P. 184. R. Weeks. Études
sur Aliscans(à suivre). Des nombreuses inconséquences intérieures du
12
1T8 BIBLIOGRAPHIE
poème et de ses contradictions avec les poèmes apparentés du Cove-
nant Vivien et de Faucon de Candie, M. \V. conclut que « là où A liscans
et les autres poèmes sont en désaccord, ce n'est pas à Aliscans,
comme l'ont dit la plupart des critiques, qu'il faut demander la
légende la plus ancienne, mais plutôt à ces poèmes. » Lorsqu'il y a
désaccord entre ces derniers, c'est dans Foucon de Candie que se trouve
la légende authentique, au moins pour tout ce qui touche à la bataille
d'Aliscans]. — P. 198. A. Longnon. La procession du bon abbé Ponce.
M. L. établit le caractère historique de cette chanson en bourgui-
gnon du XIIIe siècle et en identifie le héros avec Ponce, abbé de
Saint-Seine, dont on a des chartes de 1241, 1242 et 1243. — Au v. 49,
chamois, dont M. L. dit qu'il peut désigner une bête de somme, est
tout simplement le pluriel de chameil, chameau) ; cf. Orson de Beau-
vais, 1501, etc. L'emploi, peut-être abusif, de ce mot s'expliquerait
par le caractère burlesque de la pièce]. — P. 213. R. Philipon. Mor-
phologie du dialecte lyonnais aux XIIIe et XIV0 siècles. [Savante
étude, [tour faire suite à la Phonétique lyonnaise au XIV" siècle, du
même auteur, publiée dans la Romania, t. XIII, pp. 542-590, mais
basée sur un plus grand nombre de textes]. — P. 225. Paul Meyer.
Notice du ms. 10295-304 de la Bibliothèque royale de Belgique (Légen-
des en prose et en vers). [Manuscrit sur papier de la première moitié
du XVe siècle, contenant (outre YYsopet de Marie de France, Ylmage
du monde et la traduction, par Renaud de Louhans, de la Consola-
lion de Boece), un poème didactique et moral inconnu, la Bible des
laies gens et 41 Vies de saints, dont plusieurs ne se trouvent pas
ailleurs. A signaler surtout une Vie de sainte Madeleine, qui s'écarte
des vies latines sur plusieurs points, en particulier en ceci que,
« dans le miracle connu sous le nom de « Miracle du seigneur de
Marseille », la ville où habitait ce seigneur est non pas Marseille,
comme dans la plupart des textes latins ou français, non pas Ballatn,
Barlate, Balete, comme dans YAbbreviatio in vitis sanctorum et textes
dérivés, non pas Aquilée, comme dans une des versions françaises,
mais Arles, ville qui est ici appelée Arles le blanc. » Est-ce que ce
choix d'Arles ne viendrait pas d'une erreur de lecture de Barlate =
Arlate dans un texte latin ?] — P. A. Piaget. La Belle dame sans
merci et ses imitations (suite). — IL Le Parlement d'amour de Bau-
det H er eue (deux fois imprimé). — III. La dame loyale en amour.
[Ce fascicule contient les 111 premiers huitains de ce poème ano-
nyme, qui est une réponse au Parlement d'amour. La fin sera publiée
prochainement]. — P. 352. G. Paris et M. Schwob. Villoniana.
.M. G. Paris, à l'occasion delà récente publication qu'il a faite d'un
livre sur Villon dans la collection des Grands écrivain* français de
la librairie Hachette, donne une revision minutieuse et, naturellement,
BIBLIOGRAPHIE 17'.'
des plus intéressantes, de l'édition de M. Longnon (1892). 11 y joint
quelques notes de M. Marcel Schwob sur le Testament (c'esl ainsi
qu'il convient d'appeler le Grand Testament, eu laissant au Petit Tes-
tament le nom de Lais, que lui a donné le poète) ].
Mélanges. — P. 303. P. Meyer. C et (1 suivis cFA eu provençal.
M. P. M. complète sur quelques points (Alpes-Maritimes et Basses-
Alpes) les recherches qu'il a publiées en 1895 sur ce sujet [Momania,
XXIV, 520 sqq.), et fait cette constatation curieuse, que la pronon-
ciation ca, ga gagne du terrain sur cha, ja, comme paraissant plus
élégante. M. A. Thomas avait déjà t'ait une observation semblable
pour la Haute-Auvergne]. — P. 308. A. Thomas. Ls suffixe -esimus
en français. [M. T. constate que, dans la région orientale, où Ve long
entravé se diphtongue, on trouve assez souvent pour les noms de
nombre ordinaire des formes eu oime, aime. Ce suffixe n'a pas eu
d'influence directe sur le suffixe actuel en ième]. — P. 400. P. Meyer.
Provençal nadui. [Naclui dans Flamenca, 3680, doit être lu nadiu =
nativus, et signifie « drap du pays »] — P. 401, A. Delboulle. Davoisne.
[Le v. 8530 du Roman de la Rose (éd. Marteau), Beloces d'Aves-
nes, jorroises, doit être lu : Beloces, davesnes, jorroises. Davesnes
= c?^^âT//r/vov, gr. mod. pour <?aftaffj£»ivov (prune de Damas). La da-
voine est une espèce médiocre île prunes très commune en Normandie].
— P. 103. A. Delboulle. Un proverbe altéré. A beau (bon) deman-
deur, beau (bon) refuseur, est pour : A baut demandeur, haut refit.
seur. — P. 404. Eug. Ritter. Romancium et Gallicum. [Dans un
document genevois de 1460, romancium désigne le parler local, galli-
cum le français de France]. — P. 404. G. Paris. Mayence et Nimtgue,
dans le Chevalier au Cygne. [Bien qu'où ait le plus souvent, dans les
manuscrits, substitué Nimègue à Mayence, la version proprement
française de la légende plaçait à Mayence le débarquement du Che-
valier au Cygne et son combat judiciaire, inséré plus tard dans le
récit.] — P. 400. E. Muret. Un fragment de Marco Polo [C'est un
feuillet d mble, servant de reliure à un cahier de comptes, de la fin
du XVIe siècle, à la bibliothèque de Vevey (Suisse). La première
moitié correspond à la fin du ch. 121 et au ch. 122 presque en-
tier de l'éd. Pauthier, la seconde, à la fin du ch. 134 et aux ch.
135, 136, 137 et aux premières lignes du ch. 138.
Comptes rendus. — P. 415. O. Densusianu, Histoire de la langue
roumaine, fasc. I (G. Paris : Grands éloges). — P. 418. W. Meyer-
Lùbke. Die Betonung im Gallischen A. Thomas : Eloges avec quel-
ques réserves et rectifications de détail). — P. 423. F. Noack. Der
Strophenausgang in seinem Verhœltnis zum Refrain und Strophengrund-
stoch in der refrai nhaltigen altfranzœsischen Lyrïk (A. Jeauroy ; utile
ISO BIBLIOGRAPHIE
pour le grand nombre de faits réunis et classés, non sans quelques
erreurs; nombreuses corrections aux 66 chansons à refrain publiées
en appendice pai M. E. Stengel). — P. 430. H. E. Todd. La Vie de
sainte Catherine d'Alexandrie (G. Paris : utile, nombreuses correc-
tions au texte). — P. 432. Kr. Nyrop. Observations sur quelques vers
de la farce de Maître Pierre Pathelin (G. Paris : éloges, quelques
additions et corrections). — P. 334. Jean Ducamin, Libro de Buen
Amor, de Juan Ruiz, archiprètre de Hita (II. Menéndez Pidal : tra-
vail définitif). — P. 440. Leite de Vasconcellos. Estudios de philologia
mirandesa (A. Dauzat : grands éloges).
Périodiques.— P. 444. Zeitsehrift fur romanische Philologie, XXV ,
1-3 (G. Paris). — P. 448. Archivio glottologico italiano, t. XII (1890-2)
et t. XIII (M. Roques). — P. 454. Literaturblatt fur germaniscJie und
romanische Philologie, XXI (1900) (E. Muret). — P. 457. Revue de
Philologie française et de Littérature, p. p. Clédat, t. XIII (1899) et
t. XIV (1900) '(P. Meyer). —P. 459. Bulletin de la Société des
anciens textes français, 1900. — Bulletin historique et philologique
(Comité des travaux historiques), 1899. — Bulletin archéologique du
Comité des travaux historiques et scientifiques, 1897-1900 (P. Meyer).—
P. 462. Chronique. — P. 4G9. Livres annoncés sommairement.
XXX, 4 (octobre 1901). — P. 481. F. Lot. Date de la chute des in-
tervocales en français. [Le dépouillement des Chartes de Cluny, actuel-
lement en cours de publication, et des chartes du pays de Langres ont
permis à l'auteur de ce mémoire de conclure que la chute du d inter-
vocal était un fait accompli dès le début du Xe siècle (et non à la fin
du XIe seulement, comme on le croyait), au moins dans la région
de Langres à Mâcon ; il en est de même pour le t intervocal.] —
P. 489. Paul Meyer. Fragment d'un vis. d'Aie d'Avignon. [Il s'agit
de 320 vers trouvés dans une reliure des Archives de Vuillafans
(Doubs), par M. Jules Gauthier, et qui correspondent aux vers 1765-
2087 de l'éiition P. Meyer et Guessard. Le ras. du fragment, supérieur
comme langue au manuscrit de Paris (qui est unique, à part les courts
extraits de Fauchet et les fragments de Bruxelles et de Venise issus
d'un même manuscrit), et plus ancien d'environ un demi-siècle, lui
est cependant souvent inférieur pour les leçons et en est indépendant.]
— P. 504. Otto 'Âlob. A Vida da sancto Amaro, texte portugais du
XIVe siècle. — P. 519. Hermann Suchier. La fille sans mains. [M. H.
S. commence par une version catalane, tirée du ms. delà Bibliothèque
nationale, fs espagnol 632, l'impression des matériaux réunis par lui
sur ce conte populaire, dont il a traité dans son introduction aux
Œuvres poétiques de Beaumanoir (et de quelques autres textes décou-
verts depuis;, et promet de revenir .sur les questions générales qu'il
BIBLIOGRAPHIE 181
so ni ève. Celte version peut être intitulée, d'après la rubrique : La Tsto-
ria de la filla de l'emperador Contasti (Constantin)]. — P. 539. Lazare
Sai néan. Les éléments orientaux en roumain (Pr article).
Comptes rendi 3. — I'. 567. Miscéllanea linguisticainonoredi Gra-
ziadio Ascoli. [M. G. Paris rend compte des 23 articles (sur 35 que
contient ce beau recueil] qui intéressent les études romanes. A l'indi-
cation de son propre article (ficatum en roman), il joint quelques
observations que lui ont adressées à ce sujet divers savants.] — P. 578.
F. Geo. Mohl. Les origines romanes. La première per*<>unr du pluriel
en gallo-roman. [G. Paris: critique aussi juste que Bévère de ce livre
systématique, écrit pour illustrer par un exemple, certain aux veux
de 1 auteur, la règle qu'il avait « érigée en principe » dans un premier
ouvrage (voy. ci-dessous) : « Toute désinenct latine semblable à la
désinence celtique correspondante est régulièrement contaminée par celle-ci
dans les pays gaulois. » M. G. P. émet le vœu « que M. Mohl se décide
à mettre au service de la méthode vraiment philologique les vaste-
îaissances, la belle imagination et la puissance de combinaison
dont ses écrits nous donnent tant de témoignages. » — P. 588. E.
Stengel, Dos alffranzoesische Rolandslied édition critique), I (Texte)
[L. Bran lin: vifs éloges de cette œuvre patiemment élaborée avec
une compétence exceptionnelle]. — P. 590. Raccolta cli studii critici
dedicata ad Alessan<lr<> éTAncona, festeggiandosi il XL anniversario
del suo ensegnamento. [G. Paris rend compte avec éloge de 22 des
52 mémoires contenus dans ce recueil]. — P. 597. Carmina de Mensibus
di Bonvesin de la Riva, a cura di Leandro Biandene. [G. Paris :
l'éditeur attribue à tort à Bonvesin bien des fautes de versification qui
sont le fait du scribe, et d'autres qui étaient admises par la prosodie
du moyen âge et qui ne sont nullement dues, comme il le croit, à
l'influence de la versification rythmique.]
Périodiques. — P. 603. Zeitschriftfùr romanisch Philologie, XXV,
1 G. Paris]. — P. 608. Archivio gloitologico italiano, t. XIV et XV,
1 et 2 [Mario Roquesj. — P. 617. Supplementi periodici ail' Archivio
glottologicn italiano... ordinati da G. J. Ascoli, I-VI [M. Roques]. —
P. 620. Chronique. — P. 024. Livres annoncés sommairement.
Léopold Coxstans.
I.Durrieuz (A.). — Dictionnaire étymologique de la langue gasconne,
Audi, G. Foix, 1" vol. 1899 [372 p.], 2' vol. 1901 [544 p.].
Il i a un personnage d'Alphonse Daudet qui a appris à faire tutu-
panpanen écoutant chanter le rossignoou, M. Alcée Durrieux, avocat
à la cour d'appel de Paris, en fréquentant des « Gersois Parisiens »
182 BIBLIOGRAPHIE
a découvert que le gascon n'est autre chose que du grec ou plutôt
du eelto-grec. Le latin aussi sort du grec, ô Philaminthe, & un peu
du gascon. Pour le français, ce n'est qu'un maleureux enfant trouvé,
bâtard du Gaulois & du Gascon, abandonné justement par ses pères,
mais qu'une insolente fortune a élevé du rang de vil patois à celui
de langue littéraire & presque national'. Cette importante trouvaille
a valu à M. Durrieux dix ans et plus de travail et de patientes recher-
ches, qui viennent d'aboutir à deux volumes d'aspect matériel assez
avenant. Le contenu ne manque pas non plus de gaîté. Ainsi dans le
premier tome on nous démontre, en citant l'autorité d'Ammien Mar-
cellin, que les filologues & les linguistes sont des ânes bâtés. Le
second volume, dans lequel l'auteur dresse sou édifice sur les démo-
litions & les ruines accumulées dans le premier, n'est pas moins
réjouissant. Le grec qu'on i lit n'est pas de Démosthène, mais d'un
avocat plus moderne : il faut bien suivre le progrès. Le « Celte »,
ah! mes amis, si vous voulez vous en faire une pinte.., voyez ce
« Celte ». Le sanskrit, M. Durrieux nous prévient qu'il n'est pas de
lui ; il n'a pourtant jamais retenti sur les rives du Gange ou de
l'Indus; c'est une plante qui ne pouvait pousser qu'aux bords de la
Garonne. Quant aux étimologies, elles ne sont pas aussi nombreuses
qu'on aurait pu le craindre, mais pour la plupart bien gasconnes &
portant avec elles un parfum de cassoulet & de blanquette1.
II. Laurent D) et Hartmann (G.). — Vocabulaire étymologique de la
langue grecque & de la langue latine, Pco'is, Delagrave, 1900 [xxvm,
498 p.].
L'ouvrage de M. Durrieux, fait par un amateur sur un patois qui
n'intéresse que des amateurs & quelques spécialistes, publié chez un
éditeur de la région, ne sortira évidemment jamais du cercle des
amateurs. Loin qu'il puisse nuire à quelqu'un, ce livre est une aubaine
pour les receveurs d'enregistrement, les avocats sans causes, les
abbés, les capitaines retraités, et toute cette armée de désœuvrés à
qui l'insuffisance oula monotonie de leurs occupations laisse en même
temps que de nombreux loisirs un besoin d'activité qu'il faut à tout
prix satisfaire. Ils vont trouver là une mine inépuisable, & à force
de la creuser & d'i consacrer cette énergie qui ne trouvait pas à
1 Cet article était achevé quand « La terro d'oc » est venue nous
annoncer la mort d'Alcée Durrieux; nous nous associons au deuil de ses
amis en ce qui concerne l'homme; mai-; nous devons leur faire observer
que c'est mal servir le « savant » que d'apporter à l'appui de sa tes.
une pièce de Charlemagne qui es! du XIII siècle.
BIHLI0GRAPH1E 183
s'employer ailleurs, ils feront d'importantes découvertes dont débor-
deront les colonnes des feuilles & des revues locales. En définitive
tout cela est bien inoffensif &, comme me le disait l'autre jour un de
mes amis qui aie travers d'être antialcooliste : « Après tout, il vaut
mieux que ce -là fassent ça que d'aller au café ».
Le livre de MM. Laurent £ Hartmann n'est pas dans les mêmes
conditions; il porte Bur deux langues classiques, le grec & le latin, il
répond à un besoin, puisqu'il n'i a en France ni dictionnaire étymo-
logique grec ni dictionnaire étimologique latin, il parait chez un
éditeur classique, dans un format classique, avec une reliure clas-
sique. Or ce livre n'est qu'un ramassis de tous les rapprochements
1rs plus ineptes qui aient jamais été proposés par les étimologistes
les plus ignorants, les plus imbéciles ou les plus fumistes. On lit
à la p. vin que le sanskrit, le grec et le latin « sont trois langues
irs » & par conséquent ne sortent pas l'un de l'autre, ce qui esl
i 3 juste ; maison voit aux p. xxi & xxn que la voyelle a (la voyelle
du sanskrit) se « dégrade •» en e, o, a, û, i en grec & en latin; que
dans les mômes langues les gutturales se « dégradent » en labiales,
les labiales eu dentales, les dentales en liquides & en sifflantes,
& c'est toujours le sanskrit qui est le point de départ. Voulez-vous
des étimologies? p. xx Xeîfra en face de sk. lip\ (Sk. lip-, qui est
eu védique rip-, signifie « oindre » et est apparenté à gr. Hnoç
« graisse » ; lt!.n<o « je laisse » correspond à sk. rie-, rinàkli u lais-
ser»); p. xxi sk. dahatam en face de lat. centum, & p. xxm le
même dacatam (mais avec un c) en face de viginti ! (Lat. centum cor-
respond à sk. çatâm & viginti à sk. vimçati-; dakatam ou dacatam
n'existe pas en sanskrit). Tenez-vous à sortir de la préface & de
l'introduction pour pénétrer dans le dictionnaire proprement dit?
Reprenons les mêmes mots ; '/;7ro; « graisse » nous renvoie à une
racine ghar a mouiller », Xsuru « je laisse » nous renvoie non plus à
lip mais à une racine ragh « séparer »! En face de la racine ghar
v tus trouvez, p. 290, yâpoçu sauce », xXû£a>« je lave », yXvxûç « doux »,
y/'.vo; « érable », lat. cloaca « égout », dtdcis « doux », arundo
« roseau «,oliva « olive », etc. En face de la racine ragh vous trouvez,
p. 336, Xfy<îoç« mortier», Xqx'jOoç « burette »,Xsxt0oç« purée »,Xa^at'vw
" creuser », \éyiw « frange ». A17Ç «de travers», lat. ricinus « tique»,
ruga « ride », pollex « pouce », lama • bourbier », lanx « plat », Iocub
« lieu », lacerna « ventre », luxu-t « excès », limen « seuil », liceor
« acheter », etc. Nos lecteurs nous en voudraient de poursuivre. Ils
en ont assez pour se demander avec effroi ce que c'est que ces raci-
nes, ce que c'est que ce sanskrit, ce que c'est que ce cauchemar. Et
dire (pie cet ouvrage, lancé par un éditeur classique, va pénétrer dans
les classes supérieures de nos licées pour achever de dérouter &
iS4 BIBLIOGRAPHIE
d'aùrir nos maleureux enfants ! Dire qu'aux concours d'agrégation
les examinateurs chargés des questions de grammaire, filologie &
istoire des langues, & que l'on choisit trop souvent parmi les profes-
seurs qui ont fait preuve de la plus aute incompétence en ces
madères, vont trouver dans ce ramas une source intarissable de
« colles » ingénieuses à poser aux candidats !
La publication d'un pareil livre en France & en 1900 est un scan-
dale et une action coupable ; l'éditeur, qui n'en est du reste pas à
son coup d'essai puisque c'est déjà chez Delagrave qu'avaient paru
les élucubrations ethnologiques de l'abbé Espagnolle, mérite d'être
flagellé sans réserve. Quant aux auteurs, ils n'ont qu'une excuse, une
seule, c'est que s'ils avaient fait un bon livre au lieu d'un monstre,
ils n'auraient pas trouvé pour lui d'éditeur.
Maurice Grammont.
A. Macé. — Essai sur Suétone. Paris, Fonlemoing, 1900.
Nous avons cherché en vain par où rattacher l'examen de ce livre
à l'étude des langues romanes. Si du moins il contenait un chapitre
sur la langue de Suétone ! Mais même sous ce titre : La prose métri-
que et le style de Suétone, il n'y a guère que des observations,
curieuses d'ailleurs, sur sa prose métrique, et des renvois à quelques
remarques éparses sur son style. Disons donc simplement, puisqu'on
nous demande un compte rendu, en quoi l'ouvrage consiste. D'une
part, M. Macé épluche, avec une grande prodigalité d'hypothèses et
une prolixité effrayante, les maigres données biographiques que nous
possédons sur Suétone. De cette discussion le résultat le plus nou-
veau est que l'historien serait né neuf ans plus tôt qu'on ne l'admettait
jusqu'ici. D'autre part, et ceci est une matière autrementriche, M. Macé
passe en revue les nombreux écrits de Suétone et essaie d'en déter-
miner la chronologie, l'objet, la valeur historique, scientifique et litté-
raire. Cette seconde partie, relativement plus brève, sinon plus
concise, et qui témoigne de même que l'autre d'une grande somme
de travail, n'épuise pourtant pas le sujet, il s'en faut. Mais elle est
plus utile, peut-être.
T.
Lewis F. Mon. — The Provençal Lyrik. New-York, William R.
Jenkins, 1901, in-8°. 57 p.
Les Américains ont peu contribué jusqu'ici à l'étude de l'ancienne
littérature provençale. Le présent travail, écrit par un professeur
d'anglais de l'Université de New-York, a été lu devant la Société de
littérature comparée de cette ville : il n'apprendra rien de nouveau
1JII5L10GHAPHIE 185
aux provouçalistes : c'est un agréable résumé des caractères de la
lyrique provençale. Quelques traductions viennent B'iutercaler dans
le texte. Nous souhaitons qu'elles inspirent aux compatriotes de
l'auteur — qui ont montré tant de goût pour le provençal — le désir
de connaître de pics l'aucienue littérature provençale .
J. Angla.de.
LIVRES ANNONCES SOMMAIREMENT
Levi (Ugo;. — I monumentipiù anticlii del dialetto di Chioggia,
Venezia, 1901 [84 p].
Les monuments les plus anciens du dialecte de Chioggia sont les
trois « Mariegole » di S. Nicolado dei Galafadi, di Sl° Croce, di San
Marco dei Calegheri. M. Levi les publie ; les deux dernières étaient
inédites. 11 fait suivre ces textes de leur « illustrazione glottologie;i »,
c'est-à-dire de tableaux où il réunit les principales particularités
fonétiques, morfolujriques et sintaxiques qu'il i a remarquées. Il ter-
mine par un glossaire.
Cette brochure n'est que la première d'une série d'études que
l'auteur se propose de faire paraître sur les patois du golfe de Venise,
à savoir: celui de Chioggia, celui de Sottomarina, celui de Pelés trina,
celui de Lio Mazor et celui de Burano.
M. G.
Notice sur l'abbaye de Quarante (Montpellier, Imprimerie de la
Manufacture de la Charité, 1891', in-S°, 66 p.). — Sous ce titre,
M. l'abbé Vabre, curé de Quarante, a écrit une intéressante mono-
graphie sur une abbaye qui a eu quelque importance dans la région
narbonnaise. En s'appuyant sur des textes déjà connus ou sur de8
documents mis obligeamment à sa disposition par M. Camille
Laforgue, il a pu refaire l'histoire de cette abbaye depuis le Xe siè-
cle j usqu'à la Révolution. M. Vabre prépare d'ailleurs une histoire
de Quarante depuis les origines (le village date des premiers siècles
de notre ère) jusqu'à nos jours. La plupart des documents seront
empruntés à la riche bibiothèque de M. Laforgue.
Mélanges d'étymntugie française, par Antoine Thomas, professeur
de littérature du moyen ;rjr et philologie romane a la Faculté (tome XIV
de la Bibliothèque de la Faculté des lettres de l'Université de l'un
1 vol. gr. in- 8° : 7 francs (Félix Alcan, éditeur,!.
L'auteur a réuni dans cet ouvrage 259 notices étymologiques. S'il
lui a donné le titre de Mélanges, c'est qu'aucun dessein prémédité n'a
185 CHRONIQUE
présidé au choix des mots qu'il a étudiés. Les mots français n'y sont
pas en majorité, et c'est surtout à l'ancien français, à l'ancien pro-
vençal et au fonds si riche de nos parlera provinciaux qu'il a demandé
les mater. aux de son travail.
Le nombre des notices paraît peu considérable en comparaison de
ce que nous ignorons encore ; mais si l'on songe à la somme de recher-
ches qu'a nécessitées la moindre d'entre elles, aux précautions de
toutes sortes que doit prendre l'étymologiste pour éclairer sa marche,
on se rendra compte de l'importance de ce travail. M. Antoine
Thomas s'est principalement appuyé dans ses recherches sur la
phonétique et sur la sémantique, qui sont inséparables de tout travail
étymologique.
Une table index des auteurs, des index géographique, lexicogra-
phique et grammatical terminent l'ouvrage, et, à côté de l'intérêt
qu'ils offrent, donnent la mesure de la quantité de documents
étudiés pour arriver aux résultats présentés.
CHRONIQUE
M. Ed. Huguet, professeur de philologie à l'Université de Caen, a
pris l'initiative très louable de la fondation d'une Société consacrée
à l'étude des auteurs français modernes. 11 nous adresse le programme
suivant, que nous nous faisons un plaisir d'insérer et de recommander :
<( On sait quels services rend depuis vingt-cinq ans la Société des
anciens textes français. Une « Société des textes français modernes »
pourrait rendre des services analogues en réimprimant celles des
œuvres des quatre derniers siècles qui sont rares, coûteuses ou mal
éditées. Elle aurait surtout à publier des œuvres du XVIe siècle
et du XVIIe, mais elle ne s'interdirait pas la publication de textes
plus récents.
«Elle pourrait, par exemple, faciliter beaucoup l'étude de la période
romantique, si elle réimprimait des poésies devenues presque introu-
vables, et des articles qu'il est souvent difficile d'aller chercher dans
le journal, la revue où ils ont paru.
« Il est impossible de dresser, dès maintenant, une liste des œuvres
que cette Société pourrait se proposer de publier. C'est la collabo-
ration des sociétaires qui établirait cette liste avec le plus de sûreté,
chacun indiquant, pour la période qu'il étudie particulièrement, les
lacunes qu'il est urgent de combler. Le principe que l'on pourrait
adopter au début serait de ne pas s'occuper des auteurs dont on peut
se procurer facilement un texte au moins passable.
• Le premier soin de la Société devrait être de donner les textes eux
mêmes ; elle commencerait donc par publier des éditions presque sans
CHRONIQUE 1*7
notes, indiquant seulement, au bas de chaque page, les variantes
indispensables La qualité essentielle de ces éditions serait d'être
correctes et bien imprimées. Plus tard, il serait possible d'entre-
prendre une nouvelle série de publications, el de donner des éditions
accompagne. - d'études biographiques, dénotes et de glossaires.
« I.a cotisation annuelle pourrait être de 10 francs. Les membres
delà Société recevraient gratuitement tous les volumes publiés. »
M. Eugène Ri gai, professeur à la Faculté des lettres de l'Univer-
sité de Montpellier, veut bien se charger de recevoir et décentraliser
les adhésions pour notre ville et pour la région de Languedoc.
M. Angelo de Guberuatis, le savant professeur italien dont le nom
est bien connu de dos lecteurs, nous adresse un chaleureux appel
en faveur d'une Société dont il est le fondateur, et dont le but est
«de développer la civilisation latine, de la faire mieux connaître, et de
iriser le progrès de tous les intérêts moraux et idéaux des peuples
latins. »
La Société des Langues Womanes,dans un domaine plus circonscrit,
mais mieux délimite et plus scientifique, poursuit depuis trop long-
temps une oeuvre analogue, pour ne pas encourager cette tentative
nouvelle, encore qu'elle semble un peu flottante dans son programme,
et peut-être bien ambitieuse: mais ces vastes ambitions n'en sont pas
en somme moins dignes d'intérêt. Nous ne saurions donc mieux faire
cpie de reproduire le manifeste même de la nouvelle Société, la Socit ta
Latina. Nous ne le traduisons pas : la langue italienne est familière
à nos lecteurs ; ce serait trop risquer de trahir la pensée de l'auteur
(pie de vouloir la traduire, et d'ailleurs ce morceau de littérature cha-
leureuse et entraînante a sa valeur propre. Le voici donc dans son
texte original :
SOCIETÀ LATINA
RESIDE N TE IN KO M A
PKR PROMUOVKRE TUTTI GLI INTERESSI MORALI ED IDEALI
de'popoli LATIN I
Sta per fondarsi in Roma una nuova Società, che prenderà nome di
Latina, oggetto délia quale sarà promuovere ogni forma di attività,
ogni energia spirituale fia i popoli latini, farne conoscere gl' intenti,
le opère, gli studii, rendere piii diffuse e popolari tutte le scoperte e le
nuove indagini nel campo délie Ietterature neo-latine, dovute a studiosi
specialisti, l'opéra meritoria dei quali è troppo ignorata, rivclare in
tutti i suoi aspetti più nobili il moto présente del genio latino, riunire
le forze intellettua'i ad uno stesso scopo civile, al risorgimento con-
sapevole délia nostra gente.
La Società verra regolarmente constituita eiucomincierà,eoadiuvaîa
da unautorevole Consiglio, isuoi lavori, appena mi saranno pervenute,
dalle varie regioni italiane e dalle varie nazioni latine, corne dai cul-
188 CHRONIQUE
tori délie lingue neo-latine dî ogni paese, non meno di trecento ade-
sioni di soci che avranno nome di fondatori e promotori.
Ho buona fîducia che, dentro il gennaio, si possa dare principio ai
lavori délia Società, la quale non si propone già, in alcun modo, e mi
preme di avvertirlo subito, di osteggiare, suscitando contro di essa
sentimenti ostili, alcun' altra razza civile, ma solamente coordinare
tutte le forze latine ai più alti scopi ideali, renderne piu armonico il
lavoro, dare un accento più vivo ad ogni loro affermazione artistica,
letteraria e scientifica.
Se dalla Francia giungono già a noi desiderate, sollecite e frequenti
notizie (e, per mezzo délia Società Latina, si faranno anche più copiose
e vivaci) lo stesso non avviene per Topera intellettuale e civile che si
compie, lentamente e più oscuramente, in altri paesi latini, la Spagna
ed il Portogallo, il Belgio e la Svizzera romanza, i Grigioni e la Sviz-
zera italiana, le regioni italiane dell'Impero austriaco e la Romania,
lontana, ma pure congiunta all'ltalia e specialmente a Roma, l'aima
Muter, con strettissimi vincoli d'affetto, e finalmente, in tutta l'America
Latina, dove già tanta parte d'Italia si è versata, tanto nuovo popolo
latino sorge operoso e fecondo a nuova civiltà.
La Società attenderà specialmente all'opera sua, civile e pacifica,
per mezzo di un periodico quindicinale, che s'intitolerà Cronache délia
Civiltà Latina, e con l'aiuto di conferenze che si terranno, almeno una
vol ta al mese, in Roma dal primo gennaio alla fine di giugno d'ogni
anno, per diffondere meglio e più largamente la conoscenza délie cose
latine, promuovendo, inoltre, secondo i mezzi di cui la nuova Società
poti'à disporre, tutte le più gentili e più nobili manifestazioni dell'idea
latina.
Le Cronache si publicheranno in lingua italiana; ma vi s'accoglie-
ranno pure note in lingua latina, francese, provenzale e spagnuola,
quando alcuno de' collaboratori latini non possa servirai délia lingua
italiana; una parte délie Cronache riguarderà il mondo antico latino,
un'altra parte il mondo neo-latino, e la terza, in modo più largo e
necessariamente più vivo, il mondo latino moderno europeo ed ameri-
cano.
Tutti i Soci fondatori e promotori, avranno diritto di ricevere gra-
tuitamente le Cronache délia Civiltà Latina e di assistere pure gra-
tuitamente aile conferenze che saranno tenutein una sala da destinarsi
in Roma ; altre potrà promuoverne essa stessa in altre città italiane
o straniere, dove si fonderanno puie speciali sezioni corrispondenti
délia Società Latina résidente in Roma, quando ogni sezione pos.*a
con tare su venti soci.
Un Consiglio composto di uomini eminenti, scelti fra i più cospicui
uomini di scienza, tra gli uomini politici e diplomatie! residenti in
CHRONIQUE 189
Roma, che sentono più fortemente la latinità e il bisogno di stringeré
i vincoli délie varie società latine, si riunirà ogni mese in Roma, e
veglierà al buon andamento délia Società.
Ogni socio fondatore e promotore pagherà, d'anno in anno, senz'altri
obblighi ed impegui, dieci lire, al ricevimeuto del primo fascicolo di
ogni anuata délie Cronache.
Tali sono le basi fonda mentali sopra le quali la nuova Società
intende ordinarsi. Io non d ubito che quanti, anche non latini, amano
la gloria latina, quanti mirano ad espandere, non già l'impei'o mate-
riale latino, ma l'efficacia dell'opera géniale e civile del genio latino
nel mondo, godranno ci tro\arsi associât! in un' opéra, la quale ren-
derà meglio manifesta, e, in modo costante e simpatico, a ciascuno
di noi la virtù latina, e contribuendo pure ad allargarne in noi la
coscienza, ringagliardirà la nosti'a fibra, non ancora dégénère, ne
infiacchita, e la renderà forse più capace di opère gagliarde e di nuovi
lieti portenti.
Angelo De Gubernatis.
A ce noble manifeste est jointe une formule d'adhésion dont voie
la traduction : « Le soussigné, ayant pris connaissance du premier
manifeste par lequel est annoncée la constitution d'une Società Latina,
déclare qu'il désire collaborer à ses intentions, aux conditions ci-
dessus décrites, et demande à être inscrit au nombre des membres
fondateurs et promoteurs. »
Les noms des trois cents premiers membres fondateurs et promo-
teurs seront publiés dans le premier fascicule de Cronache.
La Société des Langues Romanes se chargera volontiers de trans-
mettre à M. de Gubernatis les noms, s'il s'en trouve, des adhérents
montpelliérains et languedociens de la Società Latina. On peut les
adresser directement à M. le professeur de Gubernatis, via san
Martino al Macao, 11, Rome.
Le Litteralurblatt fur germanische und romanische Philologie de
novembre 1901 contient un intéressant article du professeur K. Sachs,
sur quelques publications provençales nouvelles1. M. S. compare les
revendications félibréennes aux revendications des Flamands pour se
soustraire « au joug du Français » en Belgique. La comparaison est
plutôt défectueuse. La question flamingante a pris un caractère poli-
tique,— et par certains côtés international — que n'a jamais eu laques-
tion félibréenne. Il est aussi quelque peu exagéré de dire du livre de
M. Gaston Jourdanne (Histoire du Félibrige) qu'il est sehr oft h'ôchst
unzuverlâssig ; les félibres de Cannes qui l'ont assuré à M. K. Sachs
i Armnnn Prouvençau, Armana Marsihès, Reglamen de l'Escolo de
Lerin, etc.
100 CHRONIQUE
ont parlé en Méridionaux: et puis il y a peut-être par là-bas quelques
petites chapelles
A noter çà et là quelques inexactitudes: Antonin Perbos est mécon-
naissable (c. 382) sous la forme Anlonïus Ferbosc. Les separatis-
tiche Beslrcbungen signalées c. 382 n'existent que dans l'imagination
des étrangers. Félix Gras est mort et Y Aïoli a cessé de paraître.
Quelques Montpelliérains apprendront avec plaisir — d'après le
même article — que Y Aube Méridionale paraît à Montpellier, 10, rue
du Four-Saint-Eloi.
Nos lecteurs connaissent le beau Libre nouvial dans lequel M. La-
forgue a réuni les hommages adressés à sa fille, Mme la vicomtesse
d'Armagnac, lors de son mariage. Une publication analogue doit con-
sacrer le souvenir du mariage de la seconde fille de M. Laforgue
avec M. le baron de Rivières. Nos lecteurs nous saurons gré de leur
donner la primeur de quelques aimables vers en provençal du Xile
siècle adressés aux nouveaux époux par M. le professeur Léopold
Constans, de l'Université d'Aix-Marseille :
Pour les noces de M. le baron de RIVIÈRES
et de M"" Marie LAFORGUE
AS HKLS NOVIS
A mors vola en lonc, en lare,
Per l'aire suau qu'encan ta,
Pois s'en ven dreit a Quaranta.
Sobtan a bandât son arc :
La sageta d'aur isnela
Ieis e vola coma vent
E fier el cor la donzela
E lo donzel avinent.
Sotz un albespin en flor,
Lo rossinholet salvage
Canta dedinz lo boscatge
Lo triomphe de l'Amor :
Ieu al nôvi, a la novieta,
Pel dolz liam estreit liguatz,
Man mon vot a votz discreta :
« Bon aùr, joi e solatz ! »
AUX NOUVEAUX EPOUX
L'Amour vole de çà, de là, — dans l'air doux et enchanteur, — puis
s'en vient droit à Quarante. — Tout à coup, il a bandé son arc: — la
CHRONIQUE 1 '.' 1
flèche d'or agile — part el vole (rapide) comme le vent — et frappe au
cœur la jeune fille — el le jeune homme charmant.
Sou-; une aubépine en fleur, — le rossignol solitaire — chante dans
le ïk >ls — le triomphe de l'Amour : — el moi à l'époux, à la jeune épouse,
— par le doux lien étroitemenl liés, — j'envoie discrètement mes vœux :
— « Bonheur, joie et reconfort ! •>
Léopold Coxstans.
I.a ville d'Asti se prépare à célébrer le centenaire de la mort
du poète Alfieri, au mois d'octobre 1903. Dès à présent, elle a con-
stitua un Comité d'honneur dont la présidence a été offerte au plus
grand poète italien vivant, Giosué Carducci. Carducci l'a acceptée par
ce télégramme lapidaire: « Troppo grande onore ma insieme è dovere.
Asti commémorera degnamente chi colP Allighieri e il Macchiavelli
è il nume indigete d' Italia». Par une délicate attention de la patrie
d'Alfieri à l'égard de la ville de Montpellier, à qui sont parvenues tant
de reliques du poète, le maire de Montpellier a été nommé membre de
ce Comité d'honneur. Et l'on a fait à deux érudits français, M. Charles
Dejob et M. Léon-G. Pélissier, l'honneur de les inscrire aussi dans
ce comité, composé d'ailleurs exclusivement d'Italiens. Ils y rencon-
treront le ministre de l'Instruction publique italienne, le maire de
Florence, M. Villa, président de la Chambre des députés, les séna-
teurs Saracco, Visconti-Venosta, Borgnini, l'ancien ministre Boselli,
MM. Médici, Ottolenghi, Giovanelli, de Gubernatis, et l'éditeur de la
vie d'Alfieri, le professeur Emilio Teza. Ou sait que M. Dejob est
l'infatigable président de la Société des études italiennes, et (pie
M. Pélissier s'occupe depuis longtemps de l'étude des relations
d'Alfieri et de la comtesse d'Albany avec les artistes et les lettrés
de leur temps, et de la publication des manuscrits inédits du fonds
Alfieri à la Bibliothèque municipale de Montpellier.
Nous avons le plaisir d'annoncer à nos lecteurs et confrères que
l'Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Besançon vient
de décerner le prix Xavier-Marinier à notre éminent collaborateur et
excellent ami, M. Maurice Grammont, professeur à la Faculté des
Lettres de Montpellier, ancien président de la Société des Langues
Romanes, pour son livre sur le Patois de la Franche-Montagne et en
particulier de Damprichard (Franche- Comté).
le mois de « deloir » (décembre)
Dans un de nos précédents numéros nous avions reproduit, d'une
manière trop brève, la note présentée par M. A. Thomas à l'Académie
des Inscriptions et Belles-Lettres. Cette note se trouve reproduite
dans la Bibliothèque de l'Ecole des Charte* (juillet-août 1901).
pp. 349-355. Natalis de Wailly. à la suite de Barbazan et de Roque-
fort, voulait qnc l'on écrivit de l'oir{= de l'héritier, du Fils de Dion).
Bourquelot avait déjà fait remarquer qu'on trouve généralement la
\ § î CHRONIQUE
formule de cleloir. M. Thomas cite d'autres exemples, français et pro-
vençaux, où le mot deloir, delors, dater es précédé de de. Phonéti-
quement, le mot ne peut venir que de " delêrus pour delïrus. Pour
calmer les scrupules de la sémantique, M. Th. suppose ingénieuse-
ment qu'il y aurait là un souvenir du mois des Saturnales. (Notons
que la graphie delerus, deleirus existe en ancien latin, cf. Georges,
Lat. Wb. s. u.)
Dans le même numéro de la Bibliothèque de V École des Chartes,
M.Léopold Delisle publie une notice (accompagnée d'extraits) sur
un manuscrit récemment entré au Musée Condé (Chantilly) et conte-
nant le Livre Royal d a Jean de Chavenges. L'auteur parait être un
clerc champenois et le poème a été écrit dans la première moitié du
XIVe siècle.
La Revue Forézienne a publié dans son numéro de décembre
1901, une intéressante étude félibréenne, intitulée Les spectacles de
Vêlé : à Pompadour; Félibrige et Théâtre.
Le pseudonyme Aimeric des Millières cache un nom bien connu
des lecteurs de Lemouzi.
*
Analogie. Elle continue à s'exercer dans la langue française,
chacun le sait. Voici une de ses dernières créations: « Les impurs
s'empaièrent de l'Egypte entière, et Pharaon ne reconquérit son
royaume qu'après treize ans écoulés». (Journal des Débats, 1er jan-
vier 1902, feuilleton col. 3), signé : G. Maspero.
Le Congrès des Sociétés savantes en 1900. — Sous ce
titre, M. Gabriel Haon vient de publier (Alais, imprimerie J. Brabo),
un compte rendu des principales communications intéressant le Midi.
Le Gérant responsable: P. BÎameliN.
REFRAINS INÉDITS DU XIIIe SIECLE
On entend par «refrains» dans notre ancienne poésie lyri-
que, de très courts morceaux, empruntés, comme j'ai essayé
de le démontrer ailleurs ',à des rondets ou chansons à danser.
Laplupait de ces refrains ne présentent pas un grand intérêt :
beaucoup ne sont que de banales effusions ou protestations
d'amour, insignifiantes broderies sur un canevas bien usé.
Mais il en est quelques-uns en revanche qui se rattachent à
des thèmes populaires, trop dédaignés des poètes « courtois »,
et sont ainsi le dernier écho d'une poésie naïve et simple,
perdue sans retour. C'en est assez pour rendre le genre tout
entier digne de notre attention ; il serait fort désirable qu'on
en réunît tous les spécimens connus dans un recueil, où il
n'y aurait pas, sans doute, que des perles, mais où on trouve-
rait au moins quelques perles d'un rare éclat, et la variété
de ce recueil contrasterait heureusement avec la lamentable
monotonie des collections de chansons.
En attendant l'apparition de ce Corpus, et pour en faciliter
la préparation, il y a intérêt à publier tous les refrains que
l'on rencontre çà et là. Ceux que je donne ici ont tous été
recueillis dans les chansonniers décrits par M. G. Raynaud2.
C'a été, on le sait, une mode dans tout le cours du XIIIe siè-
cle de term iner les couplets de chansons par des refrains; les
chansons de cette sorte sont plus nombreuses qu'on ne l'avait
cru au premier abord 3. C'est d'elles que proviennent tous les
refrains ici publiés, et tous appartiennent à des chansons
inédites. Ils sont loin pourtant d'être tous inédits, car un
i Les Origines de la Poésie lyrique en France, première partie, ch. V.
8 Dans son excellente B ibliographie, dont je conserve naturellement les
sigles.
a J'ai déjà publié [Origines, p. 102, n. 2.) une série d'additions à la liste
de M. Raynaud; on verra que je n'avais pas réussi alors à être tout à
fait complet.
xlvi. — Mai 1902. 13
191 REFRAINS INEDITS DU XIIIe SIECLE
grand nombre se retrouvent ailleurs ; c'est seulement la leçon
ici publiée qui a droit à cette épithète et c'est en ce sens qu'il
faut entendre le titre inscrit en tête de ces lignes '.
A. Jeanroy.
I
N° 145. Texte de Pb3 163; pas de variante notable dans Pb11 126.
1 . Ce seroit folie se je n'amoie,
2. Car de bien an:er me vient ma granz joie.
3. Adès, adès servirai
Bone amor tant con vivrai.
4. On doit bien mieus valoir de bêle dame amer.
."). Por Dieu, car m'amez, bêle très douce amie :
Ja vos aim je plus que nule rienz qui soit.
6. De par moi li diras ceste cbançon : a Cornus,
Quant bone amors faudra, li siècle iert perdus ».
II
N° 150. Texte de Pb l2 107; var. de B2 15.
1. Por vos grief tlo'our sent, belle douce amie.
2. Li très dous malz m'ocit, que ne m'i lait durer.
3. Dame, merci, que la mort sent
Se de moi pitiet ne vos prant.
4. Sa bocbete vermoillette m'a mis en prixon.
5. Je Tarn sens repentir : jai ne m'en partirai.
2. B- ki ne me. — 5 manque dans Pb I2.
III
N° 839. Texte de Pb :i , 127 ; var. de Pb » 24 et R1 73.
1 . S'ele me voloit amer, je n'averoie mal.
1 Dans cette publication fragmentaire, il ne m'a pas paru nécessaire
de comparer cette leçon aux autres déjà publiées, ni même d'y renvoyer.
Elle est critique dans ce sens seulement que j'essaie de retrouver par la
comparaison des mss. la leçon du refrain qu'a voulu citer l'auteur de la
chanson. — Quelques-unes des variantes ici publiées ont été recueillies
par mes amis H. Guy et H. Teulié, que je tiens à remercier ici de leur
obligeance.
REFRAINS INÉDITS DU XIIIe SIECLE 195
2. Ma dame me garira
De mes maus quant li plaira.
3. Adès désir a veoir
Celé qui me fet doloir.
4. De bone volenté la serf sans repentir.
5. Vilaines gens, vos ne les sentez mie,
Les douz malz que je sent.
6. Ne vosrepentez mie de loiaument amer.
1. Pb" n'aroie. — 2. R'quele bien me garira «le chest mal q 1.
p. — 4. K1 j'atendrai de bon gré merchi. — 5. IV donne icile refrain
4 : en b. v. etc. — G. manque dans K1.
IV
N° 1240. Texte de Pb:1 176; var. de Pd 206, Pb', 09, Pb" 95,
Pb" 176.
1. J'ai, j'ai
Amoretes au cuer qui me tienent gai.
2. A la plus saverousete del mont ai mon cuer doné.
3. Amouretes ai
Jolietes, s'amerai.
1 Tout le cuer me rit de joie quant la voi.
1. Pb\jai jai jai; PbH ki tiegnent. — 2. Pb"ka la p. — 3. P
Pb6 jolivetes. — 4 manque dans Pb3 et Pb u.
V
N» 157. Texte de Pa 328 ; var. de Pb* 157, Pb6 190, Pb17 206.
1 . Nus ne set qu'est biens s'il n'aime
Ou s'il n'a amé.
2. A la plus savoreusete
Del mont ai mon cuer doné.
3. J'ai, j'ai amoretes au cuer
Qui me tienent gai.
4. Mesdisanz crèveront,
Ja ne savront
La joie que j'ai.
5. Hé bêle très douce amie, aiez de moi merci!
196 REFRAINS INEDITS DU XIIIe SIECLE
6. Je ne vivrai mie longuement ensi.
3. Pb 4 amorestes. — 4. Pb * mesdisant. — 6. Ce refrain et le cou-
plet qui le précède ne se trouvent que dans Pb '*.
VI
N° 803. Texte de Pb « 36 ; var. de Pb » 167.
1 . Amoretes ai
Jolietes, s'amerai.
2. N'i osaler, s'i envoi un très doue pensé.
3. Je proie Amors que nus n'ait amie
S'il ne la désert.
4. Ma loiaus pensée tient mon cuer joli.
5. Hareu ! je inuir d'amouretes !
Biaus dous cuers, alegiés m'ent !
6. Je senc amouretes au cuer nuit et jour.
2. envois . — 3. si ne.
VII
N° 391. Texte de Pb '" 220 ; var. de Pb '« 162 et Pb 6 182.
1. Vos le lerez, lerez, l'amer,
Mais je nel lerai mie.
2. J'aim trop melz que ne soloie
S'en sai mon cuer meilleur gré.
3. Hé Dex, li dous Dex, con s'amor m'atalenle !
4. Mes cuers s'iert sans fausser
Celé a qui mes fins cuers bee ;
Me puet bien joie doner.
5. Or oies, que volez vos?
Ne me puis tenir d'amer.
1. lerez lerer] Pb 17 lerez lelez; nel lerai] Pb fi Pb 17 nen 1. ; Pb v
nen 1ère. — 2. melz] Pb 4 meuz ; gvé manque Pb 4. — 3. Li dons dex
manque Pb *. — 5. Pb 4, Pb 6 oés ;puis] Pb 4 pu.
VIII
N° 444. Texte de Pb 3 152 ; var. de R « 74.
1. Sire Dex, cornent dure
REFRAINS INEDITS DU XIIIe SIECLE 1 97
Fins cuers qui n'aime par amors V
2. La joie qu'atent de li
Me tient inignot et joli.
•'!. Toz li cuers me rit de joie quant la voi.
4. Ne ja ne m'en départirai,
Ains la servirai
Tant que merci troverai.
2. R1 mi tient. — 3 manque R '.
IX
N° 452. Texte de Pb 5 76 (ms. unique).
Je les sent, Dex, je les sent,
Les m ius d'amer doucement.
Ce même refrain est répété après tous les autres couplets.
X
N° 459. Texte de Pb l7 230 ; var. de Pa 333 et Pb » 171.
1 . En non Dieu, ce sont amors
Qui dient : « Merci avrés. »
2. D' amors vient toute ma joliveté.
3. De debonairetez vient amors.
4 . Diex, je n'i os aler : avrai je ja merci ?
5. Ma dame a qui je sui, souvei^ne vos de moi.
G Hé, amors, très douces amors,
Cornent me partirai je de vos ?
1 . en] Pb 1T e ; dient] dans Pb '* di a été ajouté après coup en marge;
Pa dien. — 2. vient manque Pb '". — 3. Pb ,f debonaireté. — 5. Pb *
soviengne. — 6. Pb l c. départirai je.
XI
N" 503. Texte de Pb 3 120 ; var. de Pb " 120.
1 . Autrement n'os a vous parler
Fors qu'en chantant : merci vous quier.
2. Je ne sai si loing aler
Que vous puisse entr'oublier.
198 REFRAINS INÉDITS DU XIIIe SIÈCLE
3. Ce mJocit que je ne vous voi
Plus sovent, doce amie.
4. Dame de fin cuer amee, merci !
5. Dame, amer ne porroie
Nule autre que je voie.
2. Pb 3 que je vous. — 3. Pb " ke je ne.
XII
N° 548. Texte de Pb » 208 ; var. de P8 331, Pb* 159, Pb s 120,
Pb» 135.
1. Li très douz chans des ois elons
Me fait a bone amor penser.
2. A ma dame servir ai mis mon cuer et moi.
3. Grant joie a mes cuers quant je pens a li .
4. A qui les donrai je donc
Mes amoretes, s'a vos non ?
5. Nuz ne doit lez le bois aler
Sans sa conpaignete.
1. Pb v, Pb 5, Pb6 oiseillons... mi ; Pb 5 en bone a. — 4. Pb 5 donré.
— 5. Pb 5 ne doit les beax bois passer.
XIII
N° 672. Texte de Pbs 91 ; var. de P» 166, Pb11 90, Pb " 111.
1 . Ja por mesdisanz ne lairai l'amer.
2. La bêle qui mon cuer a me tient joli.
3. Ensi me confort Amors con je l'aing leaument.
4. Dame, merci ! Vos m'ociez.
5. La bêle m'ocit : Dex ! qui m'en garira ?
1 . Pb u ne lerai a amer. — 3. Pb u conme Pb *, Pb ''' loiaument.—
5. Pb 5 diex manque; me.
XIV
N° 806. Texte de Pb 4 101 ; var. de Pa 210, Pb 6 126.
1. Hé Dex, verai Dex, n'i porrai durer.
2. Dex, la reverré je ja
REFRAINS INÉDITS OU XIIIe SIÈCLE 199
Celé qui tout mon cuer a ?
3. Sanz aminé sui ge pas,
Non ère je ja, n'onques ne fui.
1. Pb 6 he des, he dex, n'i puis d. — 3. Pb 6 sanz amors.
X» 912. Texte de Pb 3 15G; var. de Pb " 148. La rubrique porte
Sire Adaru et non, comme le dit M. Rayaaud, Adam de Givenci.
1 . Soviegne vos de moi, bêle :
Je ne pens ja s'a vos non.
2. Quant pluz sa merci désir, pluz est crueus envers moi.
3. D'araors trop lointainne n'ateut nul confort.
1. Quant ces amors me fau Iront que j'ai,
Ja mais n'amerai.
5. S'ele me daignoit amer, je n'averoie mal.
4. ja mais] Pb" ja puis.
XVI
N° 979. Texte de Pb8 120; var. de Pb8 156, Pb" 211.
1. En simple plaisant brunete ai tôt mon cuer mis.
2. J'aing la bêle, la blonde, la sage,
Tôt mon cuer li ai do né.
3. Hé Dex, donez moi de mes Unes amors joie,
Ausi vraicment conme grarit mestier en ai.
4. Ma leaus pansée tient mon cuer joli.
5. Nus n'i a pooir, fors ma douce amie
A la grant dolour que j'aie alegier.
1. Pb8 pleisant doucete ; tôt manque, — 2. Pb8 je li ai mon cuer
donné ; Pb17 si li ai m. c. donné. — 3. Pb8 vrais diex donnés moi de
mes amouretez j. issi vraieraent eon je m. e. a. (ce refrain dans Pb*
suit le couplet 4) ; Pb5 veraiement; Pb" si veraiement. — 4. Ce refrain
dans Pb% suit le couplet 3. — ~>. Pb5 a ma dolour alegier (avant ce
mot, le scribe avait écrit d'abord raso, début de rasoagier, qu'il a
ensuite légèrement barré ; au lieu de ce refrain Pb9 donne le suivant : Et
douce baiselete, vous m'ocirrés se vous volés.
200 REFRAINS INEDITS DU XIIIe SIECLE
XYII
N° 1286. Texte de Pb4 126; var. de P» 256, Pb 6 114 (et non 144),
Pb8 93 (qui ne donne que les refrains 1, 3, 5), Pb17 173.
1 . Por Tamor que j'ai a li
Tien je mon cuer si joli.
2. Por Deu, ne m'en blasmez se mes cuers pense a li.
3. Est il donc droiz qu'Amors m'ocie? Nenil, voir.
4. Nule riens a bêle dame ne se prent.
5. Ja Diex ne me doint corage d'amer mon mari
Tant com j'aie ami.
2. m'enjPb4 me. — 3. PbG m'ocient. — 4. & manque Pa. — 5. P»,
Pb6 coume.
XVIII
N° 1367. Texte de Pb'7 201 ; var. de Pb* 152, Pb« 167, Pb» 158,
Pb17 201.
1. Espringuiez et balez liement,
Vos qui par amors amés loiaument.
2. Il n'est mie jor, savoreuse plaisant,
Si me conseut Dex, l'aloete nos ment.
3. Douce, très douce, douce amie
Pour Dieu, ne m'oubliez mie :
Je ne vos puis oublier.
4. Trop vos ai fait maus endurer,
Dous ami, pardonés le moi.
5. Ma dame a qui je sui, soveigne vos de moi.
1. Le deuxième vers manque Pb8. — 2. Pb '* s. et plesant. —
3. Le troisième douce manque Ph%.
XIX
N° 1301. Texte de Pb1 144; var. de B2 179, P» 303, Pbs 157,
Pb17 192.
1 . Ore a la bone eure
Ce sont amoretes qui mi queurent Seîure.
2. Se j'aim plus haut que ne doi,
Amors en blasmez, non pas moi.
REFRAINS INEDITS DU XIIIe SIECLE 201
3. Dex ! bon sera nez qui besera sa bouchetc !
Saderala, dureau, duron,
Saderala, durau, dureté.
1. P*, Pb6 qui nos. — 2. non pas Pb6 ne pas. — 3. B2 de bone
houre seroit n. ki baixeroit... saderoza deroza dure sai dei«
deroza durelle; Pb* sadera ; Pb8 duro, dureau; Pb17 duriau, du-
riau ; P' duriax, duriax.
\.\
N° 1382. Texte de Pb* 169; var. de 1'» 349, Pb» 159, Pb17 228.
1. Je l'avrai l'amor la bêle, ou je morrai.
2. Amors l'ait en sa baillie, qui tout entièrement m'a.
3. Mes cuers sans tricherie toz jorz vos servira.
4. Jolivetez me semont de chanter.
5. Sire Dex, comment dure fin cuer
Qui aime par amors?
6. Si proie qu'ele soit m'amie
Et je Tain de cuer entier.
1. Pbs lamour, lamour ; Pb17jc laurai la bêle sarnor. — 2. Les
quatre derniers mots manquent Pb8. — 4. Pb8 jolie tement. — 5.
Pb17 con dure; par amors I'b17 loiaument. — 6 n'eut que dans Pb8.
XXI
N° 1390. Texte de Pb4 52; aucune var. notable dans P- 162, Pb 5
118, Pb u 88 (sauf que dans ce ms. le dernier refrain manque) Pb l7
109.
1 . Je sui jolis pour ce que j'aim.
2. Dame, merci ! Vous m'ociez.
3. Sa biauté m'a mort.
4. Bone amour que j'ai me tient gai.
XXII
Nn 1449. Texte de Pb17 225; aucune var. notable dans P" 345,
Pb'* 167, Pb6 130.
1. Fins cuers ne se doit repentir de bien amer.
?0 2 REFRAINS INEDITS DU XIIIe SIECLE
2. Biaus très douz cuer, sans faindre touz jors vos
servirai.
3. De ma dame vient la grant joie que j'ai.
2. biaus manque Pb17.
XXIII
N° 1503. Texte de Pb* 176; var. de B2 201, Pb" 133, Pb 12 71.
1 . Amors font de moi lor voloir
J'endur les maus por joie avoir.
2. Se je l'aim, ne m'en blasmez mie;
Mes fins cuers ne pense aillors.
3. Encor soient ci mi oeill
S'est mes cuers la ou je vueill.
4. J'ai tôt perdu por loiaument amer,
N'onques n'en eu ne soulaz ne déport.
5. Aler m'estuet el douz pais
Ou je laissai m'amie.
1. joie] Pb3bion. — 4 manque Pb 12 ; amer] B2 servir ; nonkesnos
(noi?) de li confort. — 5. Pb u pais ou je morrai d'envie; B2 del
dous paix m'estuet partir a deu cornant m'amie.
XXIV
N° 1660. Texte de Pb3 156; var. de Pb " 170.
1. J'ai tant servi et servirai qu'il m'iert meri.
2. Je ai traï a escient
Celui qui m'amoit loiaument.
3. Je tieg volentiers mes ex
A li esgardor quant je ne puis mieuz.
4. Si mesdisanz ne me nuisoit
Pressui de ma grant joie avoir.
5. Qui loiaument sert s'amie
Bien li doit sa joie doubler.
6. La painne m'agrée que trai por li.
1. kil niait. — 3. jou tieug m. iex a li esg. — 4. ne m"i. — 5. dou-
blée. — 6. la] ma.
REFRAINS INEDITS DU XIIIe SIECLE 203
XXV
N° 1G69. Texte de Pb" 107;var.de Ba II, I" 158, Pb*50, Pb'«71 ;
pas de var. notable dans Pb(i 131.
1. Je ne m'en puis conforter
Por baler ne por joer :
Ce me font li mal d'amer.
2. Je sui feme a droit,
Car je n'amai onques celui qui m'amoit.
3. J'ai plus menti que voir dit celui qui m'aime.
4. Ja ne mi marierai,
Mes por amors amerai.
5. Ne venés plus sa, talent de bien faire :
L'en vos clorroit l'uis.
1. m'en Pl>l; me; B* porjueir ne porballeir; P', Pb '• pour baler
pourjoer. — 2. Pbuqui m'ama. — 3. P", Pb u qui j'aime. — 4. ja]
P»je. — 5. l'en] B2 Pbu com.
XXVI
N° 1725. Texte de Pb l7 228; pas de var. notable dans Pb • 340, Pb '*
169.
1. J'ai apris a bien amer, Diex m'en doint joïr.
2. Biau douz cuer, ne créés mie mesdisant félon.
3. J'ai trové ce que j'ai longement quis.
xxvu
N° 1740. Texte de Pb* 98; var. de P* 203.
1. Quel que part que li cors aut,
Li cuers remaint a m'amie.
2. Car l'en dit en reprouvier:
Qui bien aime a tart oublie.
3. Mes «'autrement,
N'ai de vous alegement,
Je sui mis a grant martire.
4. Quant me souvient
Que départir me couvient,
Ci a dure départie.
20 t REFRAINS INEDITS DU XIIIe SIECLE
5. Or me fet apercevoir
Por poi het qui n'aime mie.
4. qua d.
XXVI11
N 1820. Texte de P» 172; var. de Pb4 82, Pb fi 98, Pb lv 46, Pb l'
P23.
1. Je sui le mains amez du mont
Et ain plus que tuit cil qui sont.
2. Gardez bien vos amoretes,
Les moies m'ont mort.
3. Vous avez mon cuer et j'ai vostre amor
En ma prison.
4. Dex ! qui set pour coi il m'enchace?
Di je donc, faz je donc chose qu'autre ne face?
5. Dex! de mon cuer n'ai mie,
Ainz l'a ma douce amie.
1. ain] Pbvj'aim, Pblv et si aing. — 2. Pb4 gardez vos bien d'à.
— 3 il] P" el ; Pb '', Pb 14 me chace. — 5. manque Pb !'\
XXIX
N° 1852. Texte de Pb17 190 (ms. unique).
1 . Eu non Dieu, je m'en dueil et débris d'amer.
2. Li vers glaiolais m'a tolu mon ami.
2. et li v.
XXX
N° 1895. Texte de Pb» 107 (ms. unique).
1 . Elle m'i tient, en sa prison ;
Quant li plaira, si m'ochirra.
2. M'a trop... li malz d'amours
Dont ja mon cuer ne partira.
3. En bien amer ai mon cuer mis :
Son plaisir la belle en fera.
4. Dame, corn fins amans vous pri :
Aligiez moi ma dolour.
REFRAINS INEDITS DU XIIIe SIECLE 205
5. En vous ai je tout mon confort:
Quant vous plaira, j'avrai merci.
2. Pas de lacune indiquée; supp. navré (?).
XXXI
N° 1896. Texte de Pb3 122; var. de Pb " 121.
1 . S'onques nus lion morut por bien amer,
Dont ne vivrai je mie.
2. J'aim celé qui pas ne m' ai m me,
N'est pas cis gieus drois partis.
2. Pb11 j'aim celi. Dans Pb 3, comme souvent dans ce ms., un blanc
a été laissé pour des couplet* qui n'ont pas été copiés.
XXXII
N« 1943. Texte de Pb G 125 ; var. de Pb4 100 et P» 209.
1. J'oi le rosignol seur l'arbre flori
Joie mener.
2. Celé qni j'ai m'amor donée
Tient mon cuer joli.
3. En non Dieu, ce sont amors, — autre mal né, —
Qui me sont parmi les euz el cuer entre.
4. J'ai, j'ai
Amoretes au cuer qui me tienent gai.
5. Dex, tolez moi quanque je ai,
Si me rendez m'amie.
1. Pb * soi- l'abre ; P* Pb r' fueilli. — 3. Pb '* touz maus me font
ara. a. m. n. etc. — 5. Pb ' si men.
XXXI II
Ne 1963. Texte de Pb 9 3 (ms. unique).
1. Se j'ai amé, j'ai choisi
Del mont la plus bêle.
2. Puis que Diex fait de mon fin cuer sa chambre,
Joie en ai grant, cora raison le comande,
3 Je n'i voi cui je doie amer, fors une.
206 REFRAINS INEDITS DU XIIIe SIECLE
4. Se de lui ne me vient joie,
D'autrui ne la quier avoir.
5. Ne vous repentez mie de ceste dame.
XXXIV
No 1975. Texte de B 2 183 ; var. de Pb1* 140. Un couplet déjà im-
primé dans Eist. litt., XXIII, 826.
1 . Mes amors et les vos ne départiront mie.
2. Jai par longue demoree
N'iert fine amor obliee.
3. Je ne me plaing pais des mais ki m'ont greveit
Por la grant joie ou je bei.
4. Ki loiaulment sert s'amie,
Bien li doit sa joie doubler.
5. J'ai bien assise m'araor,
K'elle est a ma devise.
1. Pb 12et] ne. — 3. ki] B2 si. — 5. Pb ,2 ja se bien mis mes amors
ke sont a m. d. — Les couplet* 2, 3, 4 manquent dans Pb 12, mais
en revanche ce ms. en contient un autre, écrit -postérieurement, dont
voici le refrain: Deus ains (corr. doint) ke j'aie s'amor : s'iert
ma joie acomplie.
XXXV
N° 2035. Texte de B 2 47 (ms. unique) ; le ms. de Sienne, qui con-
tiendrait aussi cette chanson, selon M. Raynaud, donne (fol. 36) une
autre pièce, dont le premier vers est identique.
1. Souffrir l'estuet et endureir
Ki joie veult de bone amour.
2. Je ne m'i puis conforteir
Por jueir ne por chanteir,
Si me tient li mais d'ameir.
3. (Manqué).
4. Hé, très doulces amoretes, a tort m'ocieis.
REFRAINS INEDITS DU XIIIe SIECLE 207
XXXVI
N° 2039. Texte de Pb12 102 (ms. unique).
2. Alegiez moi, dame, les maus que j'ai.
4. Ne bien ne me puet venir
Ne joie, se n'est par li,
Ne d'autre n'en quier avoir.
Les couplets 1 et 3 ne sont pas suivis de refrains.
4. Ce refrain est altéré; voy. une forme plus correcte au n° XXXIII,
refr. 4.
XXXVII
N° 2064. Texte de Pb » 231 ; var. de Pa 356 et Pb * 173.
1. J'ai trové loiaus amoretes
Jolietes
Por amer.
2. Hé, Dex, verrai je ja le jor
Que soie amis?
3. Ma loial pensée tient mon cuer joli.
4. Hé amors, très douces amors,
Cornent me partirai je de vos?
5. Hé, biaus cuers dous, a vos sont mi pensé.
1. je manque Pb *. — 5. Pb * eu vos.
XXXVIII
N° 2072. Texte de B2 21 (ms. unique).
1. K' en ferai?
C'est la fins, coi ke nuls die,
J'amerai.
2. S'amor sospris m'ait, elais,
Jai cist mais ne me lairait.
3. Bien fussiés vous onkes née,
Gentils damoiselle !
4. Loiaul amor ai trovee,
Ne m'en pertirait riens née.
1. coi] ms. caie.
CORRECTIONS
A QUELQUES TEXTES PRÉCÉDEMMENT PUBLIÉS
(Revue, XXXIX, pp. 241-68 et XL, pp. 350-67)
Je dois la plupart de ces corrections à l'obligeance de
MM. G. Paris et A. Mussafia, qui me les ont envoyées par
lettre ; j'en emprunte quelques autres à un compte rendu de
M. P. Meyer (Romania, XXIX, p. 301). Les auteurs sont
désignés par leurs initiales.
TOME XXXIX (CHANSONS INEDITES DU MANUSCRIT DE MODÈNE )
P. 245, n° 1, v. 3: mis] corr. Guis (?) (G. P.)
— — 18, v. 4: rien à corriger; « foisonner » = suffire, être de
force à résister (G. P.)
— — 20, v. 7: les] corr. la. (G. P.)
P. 247, note, ligne 5 : au lieu de encor m'en met, lire en cou m'en tien :
ligne 7, au lieu de reprent, sosjient.
P. 248, n° I, v. 18: lire se no (= nel, ne li) ai. — Dirai li? Non.
(G. P. et A. M.)
— — v. 21 : ne voil] lire nen os (ms. neuos). (G. P.)
P. 250, n° II, v. 41 : faisoimes; lire probablement faisoiems. (G. P.)
— — — 44: en] conserver a. (A. M.)
P. 251, n° III, v. 13 et 14: point-virgule après ces deux vers. (G. P.)
— — v. 20 : la lacune est après ce vers, non après le vers 21 .
(G. P.)
— — v. 35: por amors] corr. de cuer vrai (?) (G. P.)
P. 252, n° IV, v. 5: effacer les deux points. (G. P.)
— — v. 9: en si] lire si en. (G. P. et A. M.)
— — v. 17: deux points à la fin du vers. (G. P.)
— — v. 22: triciers etfaus] lire tricieres faus . (G. P.)
— — v.23: conserver torteus (tortosus). (A. M.)
CORRECTIONS
209
P. 253, n° V, v. 1G: La vie u] lire la ujo. (G. P. et A. M.)
— ■ — v. 21 .- m'amors] lire ma mors. (G. P.)
— — v. 22: remaist] coït, renaist. (G. P.)
P. 254, n° VI, v. 2: cantent] coït, cante. (G. P.)
P. 255, n° Vil, v. 9: son'] corr. sans. (G. P.)
P. 256, n° VIII, v. 32: conserver la leçon du ms. (G. P. et A. M.)
— — v. 38: q'en] corr. me.
P. 257, n° IX, v. 16: va] corr. fait. (G. P.)
— — v.20: grand] lire grant
P. 258, n° IX, v. 36: granz) lire grant. (G. P.)
— — v. 39: talanz] lire talent. (G. P.)
P. 259, n° X, v. 18: n'est) m'est.
— — v.29: sui [je]. (A. M.)
P. 263, n" XII, v.35: dites) corr. di bien.{G. P.)
— — v 36: guardez] corr. guarde. (G- P.)
P.264, n°XIII, v.22: U] corr. si. (G. P.)
— — v. 24 : firent) corr. fièrent. (G. P.)
— — v. 26: mot] corr. met. (G. P.)
P. 265, n° XIII, dernier couplet : point après 35, point d'interro-
gation après 40. (G. P.)
P. 266, App. 1, v. 30: apertement, corr. apartenant. (G. P.)
P. 267, app. II, v. 11 : lire Cui de nous prïnt tes pi tés. (G. P.)
— — — v. 23-4: conserver la leçon du ms. ; v. 26, au lieu
de mire, miere. (G. P.)
P. 268, note, str. VI: les vers 3-4 entre parenthèses. (G. P.)
TOME XL (JEUX PARTIS INEDITS)
P. 354, n° I, v.20: le ms. a sail = s'a il. (P. M.)
— — v. 21: ms. plus c'un. (P. M.)
— — v.27: correction inutile. (P. M.)
— — v.30: ni] ni. (G. P.)
— — v. 39: M. G. Paris corrige : ausi a bien cil ens u cors.
C'est, selon M. P. Meyer, ce que donne le ms.
P. 355, n° I, v. 54-5: virgule après traire, point-virgule après
dehors. (G. P.)
— — v. 72: part) corr. péri. (G. P. et P. M.)
P. 357, n° II, v. 16: point après ce vers. (G. P.)
— — v.22: point-virgule après ce vers. (G. P.)
— — v.27: lire et se set g Me mater. (G. P.)
P. 358, n° II, v, 51 : lire envi. (G. P. et P. M.)
— — v.53: point-virgule après ce vers. (G. P.)
14
210 CORRECTIONS
P. 360, n° III, v.22: n'avez] m'avez (P. M.)
P. 362, n° IV, v. 14: lui] li (G. P.)
— _ v. 25: car] corr. qui; virgule après perdans (G. P.)
P. 304, n° V, v. 24: tant] cant (?) (G. P.)
— — v.30: sachiez] fâchiez (?). (G. P.)
P. 306, n° VI, v.27: lire nus navrait tel vie (?) (G. P.)
p. 307; — v. 49: conserver la leçon du ms. (G. P.)
— — v.51 : lire a tel[z] poeste[z\. (G. P.)
— __ v.53: point après ce vers. (G. P.)
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
(Suite)
si no son
Tsobrans
dis
215*
REAMBAUTZ DAURENGE
(= B. Gr. 389, 37)
I. Pos trobars plans
Es volguz tan
Fort mer grei
Car ben pareis
5 Qal l mot fai
Cane mais non foron.
[eantan
Qe cels com tôt iorn ditz e
[brai
Sapcha sis vol autra vez
II. Mos ditz es sanz [dir.
Don gap ses dan
Per tal ioi soi coindes e uans
Qe mais val neis
."> Désirs qieu nai
Qe2 anc nom ac semblan
Peis a sainz comqer en uer_
[zelai v
Dautre ioi com puesca iau-
[zir.
III. (p. 199) Son ben aurans
Car per talan
Solamen fo 5 francs et hu-
[mans
De dir ves leis
5 Ben nun6 fa7 gai
Qem val si per lieis8 trag
[mal gran
Si lo mal qen trac no sap
(lai
Mi eis voil daitan escarnir.
IV Ben so trafans
Qeu eis mengan
Car die aiso tan qe vilans
Cals pros me creis
5 Sien mal trai
Per leis sil no sapia lafan
Nomes don.-s pros ebe non9
[vai
Sim pens qe tan rie ioi désir.
V. Mos volers cans
Qem sal denan
Me fai creire qe futz es pans
Tan aut mespeis
5 Mon cor car s ai
Qe en fol maurei don faz
[lafan
Tôt voll cant vei respeit
[segrai
Respeitz loncs fai omen
VI. Sains vilians 10 [périr.
Con vauc torban
Soi serrazis o crestians
Qals es ma leis
* Voyez l'édition de M. Appel dans la Rev. d. I. r. IV. s., t. X,p. 414
ss. — • c. en: Qi tal — * Appel : Duna qe — 3 A. L: Pels — 4 A. : e uuerze-
lai — « A. : so — IJ c. en : nim — ~' A.: fas — 8 A. : lieis — 9 A. : nom —
10 A. L : iubanz.
212 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
5 Nonsai qe iai II. Tôt mes nou
Non sai qe iai
Ivfe posca de so qil deman
Et atrestan tost dieus sil
[plai
Co fes vin daiga esdeuenir.
VII . Pauc soi certans
Ves qeus reblan
Dôna de vous so niolt lon-
[dans
Ane nô destreis
5 Amors tan mai
Per qieu non creiria dun an
Caissius âmes pernegun plai
Si bes no men degues aue-
[nir.
VIII.Astrius e ma chanso vos
[man
Qe dos sautz sis ries, ar
[es sai
Lo ters aut on plus pot om
[dir.
216
REAMBAUTZ DAURENGE
(=B. Gr. 389, 3)
I. Aissi mou
Un sonet nou
On ferai e laz
Chanson leu
5 Pos vers plus greu
Fan fors ' dels fatz
Car er vist
Pos tan mes qist
Com son senuatz
10 Si com sol
Fora mos cors veiatz
Mascamiatlai.posqers vol.
Can veg sim mou
Fin amistatz
Far pos greu
5 Vos dig leu
Mas voluntatz
Tan ai aqist
Or ai ben vist
Tant poia gratz
10 Qal meu vol
For eu fort aut poiatz
Conqeirer mos cors lai on
III. Tantuipam2 [sol.
Mon cor qant rim
Qe sius datz
Tein de loin
5 Mas de près poin
Con fos amatz
Per ol 3 ioi
Dont sat1 ni croi
Nou un 3 solatz
10 Trop de rené
Car die qil mam. qassatz
Fai sim sofre qeu lam so-
IV. Amors rim [uenc.
Can 6 volet prim
Mas mes de latz
Ab qe poin
5 Cab colp de loin
Som près nafratz
Tôt mes croi
Can dautre ioi
Sol me toqatz
10 Si nous venc
Amors mala fin 7 natz
Qeu posca amar e mens non
Y. (p. 200) Ges un cen 8 [ten\
Nom [ires cant plou
Sim soi moilljatz
1 /. : sorz — ^ i.
: prim
3
e. en : cil — 4 Z. : fat — 5 c. en : an — 6 c.
en: Com — i c. en : fui — 8 /. :un ou
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOUOS
213
Freg ni nieu
5 Tant can pens breu
Dest ioi qem platz
Mas per crist
Pos mi fa trist
Can pens iratz
16 Car ai fol
Car am sols sens solatz
Aissi torn mon bon penz en
VI. Era plou [dol.
Ou sai mieu i
Tenc anz fas datz
Ar uinc breu
5 Vei cazer nieu
Anz es estraitz
Tant ai trist
Mon cor. per crist
Totz son chamjatz
10 Car ai dol
Et ai 2 ai gang viuatz
Veus me sabi e veus me fol.
VII. Cant nous vim
Se près3 al cim
Mos cors auzatz
Pois dais on ;
5 Non ac ni gon 5
Ves autre bras
Per qem coi
Cal res mi voi
Trop lam no fas
10 Non la tent 6
Em tant com al cor plaz
Cane pos la vi dais noj
[souenc.
VII I. Sus daut cim
Son car vos vim
Jos daualatz
Si nous iom 7
5 So atzis om
Sotz son liatz
Lui no voi
A mors prom coi
De lieis pensatz
10 Nous souenc
Ane dol esmai. me ditz 8
La mort car veires qe nom
IX. Trop me tenc [tenc.
Car lai no son anatz
Saber damor sanc lien so-
[uenc.
X. Nom souenc
Ane de liei so sapehatz
Mas una ves qem ten em
[tenc.
217*
REAMBAUTZ DAURENZA
( = B. Gr. 389,23 )
I . Car vei qe clars
Chanz sabriua
Dels aucels el prims fre-
[mirs
Tu 9 es douz e bels lor
[auzirs
5 Tan qe no sai coisim viua
Sens chantar. per qe co-
[menz
Una chansoneta gaia.
II. El sols blancs clars
Veg qeraia
Cautz greussecs. durs et ar-
[denz
* c. en : un ou — 2 ?.: ar — 3 /. : Se/npres — * l. : dais soin — s l. : nis
ioin — G L : tenc — 7 /. : ioin — 8 c. en: datz.
* Voyez l'édition donnée par M. Con;tans d'après les deux mss. de
Chdtenham dans la Revue d. l.r.III s., t. F, (1881) p. 272 $s. — » c.
en : Mi
214
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
Qem o frain totz mos bons
[talons
5 Mas una voluntatz gaia
Dun franc ioi qem mou
[dezirs
No uol cap flacs volers
III. Ges no mes clars [viua.
Ni mesqiua
Est iois don faz les sospirs
Ni sai sant > mi valc mos
[dirs
5 Ni mi noc e tem qem viua
Enaisi trop loniamen
Lamors qeil tenc meina
[gaia
IV. (p. 201) Mos cors es clars
E sesmaia
An sui a mestz grantz iau-
[zens
Plens e voigz de bel co-
[mens
5 Qe luna meitatz es gaia
E li autrama dorm. cossirs
Ab voluntat mort e viua.
V. Cus volers clars
Qem caliua
Mes peing enant e failli rs
Mostra tems. qe iauenirs
5 Val pro mais a loin qe viua
Qe cortz gaugz. per qes-
[pauentz
Satempra ab voluntat gaia.
VI. Vostr amies clars
Nous essaia
Dona [nius mostra paruens
Cores en] vos totz sos sens
5 Ni sap sil es dur o gaia
Tant vos tem qel descu-
[brirs
Lieis chars e no sap qes
VII. Qe non es clars [viua.
Ab complita2
Amies ni ab genz mentirs
Si nô tem so camatirs
5 Ieu 3 deu venir anz qel
[viua
Com non ama finamenz
Ses granz alqes gaia.
VIII. Ai francs cors clars
Res veraia
Dôna valliam chausimenz
.[ J4
5 Qem sapehatz per fondât
[gaia
Dir so qe vol mes suffris
Nom dan si voles qe viua.
IX. Domnal meilher res qe viua
De loing ses fueemes com-
[pres 5
Era donas voluntat gaia.
X Ai donsa res coind e gaia
Aram péris mara6 morirs
Si nom datz socois coin
r,
viua.
218
REAMBAUTZ DAURENGA
(= B. Gr. 389, 13)
I. Ar mer tal un vers faire
Qe ia nom feira fraitura
Qar es sauais mi escura
Cilqem faimal ses ben traire
5 A dolen
Faillimen
Fuz " qem ven
Ben a ela 8 donc pauc de sen
1 /. : sanc — 2 c. e?i: compliua — 3 c. en: Leu — 4 /.: Seu non sui tâhl
asapiens — 5/. : m'escompren — 6 /. : proismara.
7 c. en. : Fitz — 8 /. ; ac la
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
215
Seu atic fui vas leis ban-
caire.
II. Seignier dieus con aug re-
[traire.
Tan gran ma desauentura
Mais dol non ac hanc mesura
Qan trastornal cor enqaire
5 Si espren
Aspramen
Mon talen
Ira qe mon marrimen
Gant cl cuit far de gai te
[fraire
III. (p. 202) Em plorant serai
[chan taire
('ai- nuls gaugzno masegura
Pos mos ' respeigz peiura
Qem val mos chantars qar
[laire
5 Sol termen2
Vau seguen
Per paruen
Fils 3 non ai mais pessamen
E dol e dolor e braire.
IV. Desastrucsnasc dema maire
Per qe totz mais maiura*
Ben es fols qui mal mazura
Peigz com pose auer pe-
[chaire
5 Neus qim pen
Aut al ven
Anz presen
Qe tenrai per ben volen
Cels qels oils mi voira traire.
V. Dona dousa debonaire
Nom getet tant a nomeura
Neus qe tôt aias dreitura
Qab merces cors nous es-
[claire
5 Qeu atent
Chausimen
Sius es gen
Si no far mes pened.'ii
Issi fors de mon repaire.
VI. Qe per larma de mon paire
Sil vostre durs cors satura
Nom tenramurs ni clausura
Qeu non esca de mon aire
5 Mantenen
Ves tal sen
Don fort len
Me veiran. mais mei paren
Mis vos no mo presatz gaire.
VII. Domna dieus qens es inni-
[iaire 5
Perdonet gran forfaitura
Acel so diz lescriptura
Qez era traitres e laire
5 Lissarnen
Es crezen
Sil non men
Qi non perdona corren
Ja dieus non lier perdonaire.
VIII. Per vos am don ab cor vaire
Las autras tan col mons
[dura
Car son e vostra figura
Qe per als no son amaire
5 Neus la gen
Pauc valen
Mal volen
Nam cel qeus vezon souen
Mas no 1 >r nauz far veiaire.
IX. Domna pren
Ab couen
Auinem
Si mais paz comandamen
5 Ja nô perdonz neus veiaire.
X. E sius men
En couen
1 / : m. bos
1 /. : iutiaire.
2 /. : Fol tormen — 3 c. en : Sais — '■> l. : mapeiura —
21<î
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
Qeus prezen
Ogan sieu m
5 En tuisse guatz ab varaire.
Ogan sieu malamen
219
RAEMBAUTZ DAURENGE*
( = B. Gr. 389, 9 )
I. Anz qe haura bamas cal1
Girun vers damon daual
Qistmen guerrer. mal adreg
Si fan de gabar vassal
5 E caio se qest canal
Cai perdut maion destreit.
II. [p. 203) Ja per so uns non
[guabei
Sim perdem de nostrat nei
Qemqeras em tug el bal
Ancogan del autre freih
5 Farai tornar tal neueih
Al mestier bernnrt del gai.
III. Segnior eu no soi ges dur
Ni no veg can tenc sol duz
Ni de lôp ni de lairon
Nos pot gardar desast: ucs
5 Qon sai 2 cel qe esle sucs
Tost a emblar coinogutz.
IV. Ben sap cel de me solio
Sieu fas en tant con el fo
On bertran dels bauz on vx
Jamais non tengram blizon
5 Mas fait cuion auer pron
Car ni von caut con sam-
[bux.
V. Ane pois nols tinc per on-
[ratz
Pol camps fo desamparatz
Per els senes colp de bran
Qel caualer la meitatz
5 Degron tener les valatz
Qil eron be seis aitan.
VI. Segnior ben fai 3 qen estan
Auia penre un sol dan
Mas ar soi outra passatz
Et estortz daqel afan
5 Per qeu nauera doptan
Ar serai a ben donatz.
VII. Ane pos a ma dona plac
Qem volgues mal gaug non
Ni iamais nom deu parer
Bes pos eu mezeis mestrac
5 E qi nom tengues per fiac
Tôt ioi laissera caser.
VIII. Mas dieus no saub hant 4
uoler
Com de tôt se desesper
Per qem tenc e si mesmac
Donna car ben cud sabor
5 Qe iamais nous an veser
Mas ges per tant non 5 es-
[trac.
IX. Trobat per so nom estrac
Car mos cors si ben nés -
[mac
No men van6 a poder.
X. Espérât ai et esper
Merce sius ven a plazer
Donna per qe nom nestrac.
* Texte déjà imprimé par M.Klein, dans sa publication Die Dichtun-
gen îles Monchs von Montaudon [dans: Ausg. u. Abh. aus d. Gebiete -I.
rom. Philol. VII, Marburg, 1885, p. 94 s.). — ' c. en : lhaura brunas cale
2 c. en: fai — 3 c. en : sai — 4 e. en : banc—8 l. : nom — 8 «. en • ,\:,n.
LE CHANSONNIER DE BERNAUT AMOltOS
217
220
RAMBAUTZ DAURENGA
(=B. Gr. 389,21)
I. Brais chanz qils critz
Augdels auzelspels plaisa-
[duz '
Oc mais nols entrât 2 nj
[uols deign
Cun iram cem 3
5 Lo cor on dois ma près
r.iziz
Per qen sofer.
II. (p. 204) Trist e raarritz
Y.v mos chantars aisi fenitz
Pertotz temps mais tro que-
[lal deign
Ni pel seu mantein
5 Ki a bos mas ères delitz
Pos nol sofer.
III. Jois me fo gnitz
Un pauc mais, tost me fo
[faillit/
Sanc me vole arma eu des-
[deing
Corn non estieing
5 Can prec ni merces ni es-
Re non conqier. [triz
IV. Mos cors me ditz
Per qe soi per leis auelitz
Car sap qeu null autra nô
[deign
Per som cïestieign
5 Morrai car mos cors enfol-
[litz
Mais gës nom qer.
V. Co soi traitz
Bona donnab talant voutitz
Ali cor daral vueil ar nol
degn
VI.
VII.
VIII
IX
Mesclat ab gein
Volres qen torn folz ea-
[dormitz
0 qem esmer.
Trop son arditz
Dona mos serz es abozitz
Ma faitz dir fols motz qieu
[non deign
Contra mi reign
Tan son fors de mo sens
[issitz
No sen qun -1 fer.
.M ilt es petitz
Donal tortz qer sai ser au-
[zitz
Per qe vos maues en des-
deign
Faz nesdeneing
Pendutz fos aut [>er la ser-
[uitz
Qi a moilher.
, Humils ses giein
Vostre sers fais faillitz
Merce nos qer.
Pos pretz non sobrans. ses
[tegitz
K vos ier.
221
RAMBAUTZ DAURENGA
(= B. Gr. 389, 28)
I Kscoutatz mais no sai qe
[ses
Segnior. so qieus voil co-
[mensar
Vers estribot ni siruentes
Non es ni non lo sei trobar
5 Ni eu no sai cousil fezes
i /. : plaisaditz — 2 c. en : entent — 3 c. m : tem — '• /. : qim.
218 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
Saital nol podia cabar.
Cane hom dautal miga non
nausis far. ad home ni ad
femna en aqest segle ni
en laltre qe nés passatz.
11 . Si tôt mo tenes a soles '
Jes per aisso nom dei lais-
[sar
[■ • -I2
Cades nom cudon chastiar
5 Tôt qant er nom prez im 3
[poies
Vas so cades vei et esgar.
E sai vos ben dire, perqe
car seu uos dizia paraula
e non la trasia. a cap sai
qe tenrias men per fat. qe
mais am auer seis diners
el poign. qe mil sols al
cel.
III. (p. 205) Ja ten4 nom tema
[far qun s pes
M os amies aissol voil pre-
[gar
?al obs nom vol valer mânes
Pos im6profer. a lonc tanz
[ar7
5 Plus tost de lieis qe ma
[conqes
Non potnulla res enianar.
Tôt aiso dir8 per una dona
qem fai morir ab lonc res-
peig. etab bellas paroulas
pot mi donc bon esser
segniors.
IV. Qe ben a passât qatre mes
E a mi a cent anz. som par
Qe ma autreiat e promes
Qem dara so qem es plus
[car
5 Donna pos bon cor maues
[mes
Adol sai 9 me del dolz la-
[mar.
222
REAMBAUTZ DAURENGA
(= B. Gr. 389, 22)
I. Clars douz e fis ,0
Del bazeresc 11
Mes sos bas chanz
Vas cui mazerg
5 Cap ioi sespan
Viu ho noire
El temps qe grill
Prob del silure 12
Chanton el mur
10 Jois le caire13
Qes compassa esqaira ll
Sa uois. cha plus leu qe
[siura
Cora nuls non si asigura 15
Mal16 grils en la bazeresca.
Il . Clars iois e gens
Ses fuec grezesc
Els paucs enfanz
Bosc e coderc
5 Qe nul enian
Noi emploire
Mas los borcill
Noi vi auer ploire '"
Dom mi rancur
10 Qeil blanc vaire
Tant amistat pichenaira
1 c. en : foies — - /.: Que ieu mon talan non disses — 3 l. : un — 4 c. en :
ren — 3 l. : qim — 6 /. : mo — ' /. : tarzar — » /. : die — 9 /. : Adolsas —
1IJ /. : feinz — ll e. en: bazetesc — 12 /. : siure — 13 c. en : raire — u /. :
e sesqaira — IS L: azerga — lf; /. : Mas — 17 /.: pliure
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
210
Sauis er fols qi si pluira '
Qe grieu er qe les con-
[derga
Fis iois ses flama grezesca.
III. Glars brunz c tenz
Motz entrebesc
Pensius e pensais 2
Enqier en serg
5 Corn sim lam 3
Pogues roire
Lestrain roill
Vil fer tuire u
Don mon escur
10 Cor esclaire
Tôt cant iois gen esclaira
Maluestatz. toi e tiura
Et enclau iorien5. el sorga6
Por qira ioi entrebresca.
IV. Cuz7 naus ni leing
Ni Munis on pesc
Nom es enanz
Car vei soi8 borg9
.") Anz vau trobaa
Com vis doire
Qe mont el cill
Al fol vire '"
Tant vei pretz dur
10 Per qe laire
Lauzengiers conten e latra"
E sos auars digz enivra
Prez per qe iois fraing e
[borga i2
Qis vol critz qel pren e
[pesca.
V. Caurs es empeing
Cane non es presc
Vidal costanz
Mardi domerg
5 Nom pueis sc< bran
Dois decoire
Per qen torrill
< !ab un guiure
De mal aur
10 No istral paire
Don lo fils sofris e paira
Malvestat qel nafre el
[guiura
E fai costancha domerga
De domnei 4e noils les
[presca.
VI. (p. 206) Car petit meinz
Qe no paresc
Als paucs semblanz
Del menor derg
5 Qem van duptan
Aur per coire
Car al perill
Don ieta luire 13
Veig un tafur
10 Qi ner fraire
Qel nezirs maluatz sa fraira
Lai on lo francs fils se liura
E non crel iois plus aut
[derga
Qel crims nais an qel pa-
[resca.
Vil. Caurs on argens
Esmer e cresc
Ab ditz verais u
Con hom fai clers 13
5 Vau chastian
Près lo goire
Mas per un fill
Pot reuiure
Vas cui matur
10 De bon aire
1 /.: pliura. — 2 /. : pensans — 3 /. : lan — * l. : Nil fer tuire — K c.
en: iouen — 6 /.: serga — 7 c. en : Carz — » /. : ioi — 3 c. en : berg —
i° /. : iure — « l : laira — '2 l. : berga — l3 L: liure — '* /. : Ab durs
colps granz — 1S /.: clerc
2 2 0
LE CHANSONNIER DE BEKNART AMOKOS
Si col uenz vai sus en laira
Lo siens noms viu e reuiura
Pretz e ioi qel mergueitf
[clergua
Dieu prec caital baron tres-
[ca. '
VIII. Cel qi fal vers sacompaira
Ah les qe ia non escrima
Qe non tem correg ni verga
I,o fuecs qes compren ses
[esca.
IX. Raembautz torn e repaira
Lai on pretz viu. e reuiura
Al conte cui dieus azergua
On sabers e honors cresa. '
223
RAEMBAUTZ DAURENGE
(= B. Gr. 389, 14)
I. Eu non sui ies mais e as-
[ trucs
Anzson2mal astrucs adreitz
E pos malastrucs ma eleitz
Farai vers malastruc e-
[freitz
5 Qeu non trop malastruc
[adreitz
Qil malastruc cap empe-
[zeitz.
II. Car per tos temps'sui mal-
[astrucs
Per un grant malastrc qem
[ve
E qi per malastruc nom te
Dieu prec de malastre les-
[tre
5 Qe mil malastruc foran pie
De malastre qieu ai eu me.
111. Donna per vos soi malas-
[trucs
Qar per malastrem voletz
[mal
E sis3 ben malastruc ior-
[nal
Cane nuls malastrucs nol
[fes tal
5 Malastrucs truep i maues
[égal
Per qe de malastre non cal.
IV. Ar auias con sui malastrucs
Cant vi del malastre mouer
Eu sui plus malastrucs en
[ver
Qem malastrem laisse cha-
[zer
5 E pois vinc malastre qerer
Doncs autre malastruc es-
[per.
V. Sicu ia trobes dos malas-
[trucs
Canessen mais astres qe-
Anera malastrngamen [ren
Gadoues for eu malastrucs
[gen
5 Mas non truep malastrucs
[valen
Came de malastres prezen.
VI. [p207) Sieu soi aitan * mal-
[astrucs
Qe de malastre port la flor
E ai ben malastruc honor
Le ui malastrus de segnior
5 Ni chantes malastre ab pîor
Daqest malastruc amador.
VII. Cans es malastrucs de se-
[gnor
Et ieu sou malastrucs da-
1 mor.
' /.: cresca. — * l. : son ben - • I. : fis — * /. : aitan fort
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
221
224
REAMBAUTZ DAURENGA
(= B. Gr. 389, 12)
I. Ara non siscla ni chanta
Rossigniols
Ni cridairols '
En verrier ni dinz forest
5 Ni par flora groia ni blaua
B siin nais iois e chanz
E creis en veillians
Car nomiven consol somne-
[janz.
II. Car a mi donz atalenta
Qem loing dois
E serai be fols
Seu totz temps ab leis non
[rest
5 Pos frain ma dolor plus
Si qe fais ni afanz [braua
Nom pot esser dan/
Ni maltraigz nom dol panes
[ni granz.
III. Ca pauc le cors nom na-
Qeschirols [uenta
Non es ni cabrols
Tan lieus corn eu sui qel
[test
5 Mes la ioia qeu cercaua
Don son iais entrepainz
E serai tôt lanz
Pos ma dona vol mons
[enanz.
IV. Jes nocam espauenta
Lura estols
Dels fels fais e mois
Lanzengiers cui deus tem-
[pest
5 Sim prent mi don/ c men-
traua
Per jamais a mil anz
Tôt al seu cornanz
Qen als cors non col qeu
[meslanz.
V. Ja deus qel iornz fes qaran-
Dals mon sols [ta
Es tornet fillola
Don mi a don ni aprest
5 Mais reis si leis mi Baluaua
Anz li laisel talanz
Lo mon e mil tan/.
Contra leis qem toi totz
[enianz
VI. Cap con 2 cor qel mieu si
Sai qem tols [planta
Car donar o vols
Dona au 3 iois pais e vest
5 Tôt lenian qa me portaua
Gen Ion trais a sain iuhan
Ar men creis talanz
Don caira el sol ab las
[mainz
Vil. Ai dôna prezanz
Ar penz qeus a col cm bai-
VIII. Joglar vostrenauz [zanz
Voil e dieus lo vol mil ai-
[tanz.
225*
RAEMBAUTZ DAURENGA
(= B. Gr. 389, ï)
1 . (;;. 20S) Al prim qeil rim *
[sorzen sus
Pel cun ■' prim fueilla. del
Lbrancail
' /. : crida lauriols — 2 c. en : son — 3 /. : cui.
* Voyez Céditionde M. Appel dans la Rev. d.l. /•.. IV.*. t. X p. i09 s.
— *c. en : tim — 5 c. en : cim
0 ■) 0
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
Sagues raizoïi feir un bon
[vers
Pos ma dona no uol. qeu '
chan
5 Mais de leis. nil ven a ta-
[lan
E chanz si damomones faitz
No ual plus con ses douma
[amars.
II. Con a lei platz non die plus
Senes tôt marnes ill
E per dieu si es ben en vers
Qe non auz chantar dere-
[nau
5 De leis2 vas cui sui voitz
[denjau
E eels qieu pietz voil fers
[estraig
Er donc oimais voigz mos
[chantars.
III. Eaig virol segle de mon us
Lauzengier fais defaig uol-
[pill
Ai can nauran ia damors
[ters
Ab lur chan. parlar deui-
[nan
5 Per lur ditz. van dônas dup-
[tan 3
Qan '* mortz drutz ses colp
[atraig
Souen. per lur fais deuinars.
IV. Cant cist fut mil 5 maluatz.
per us
Chanton de solatz. emperil
Qe dizon de tort en trauers
De cels qe6 lur er en sem-
[blan
5 Domnes vers qieu entenda
[tan
Cil domna cuig en tôt tra"
[saig
Qe6 sos amies aia espars.
V. Ricshom toma tost en raus
Can sufre. com se merauill
Qe nom saus sa maizon fair
[fers
De cels qi venon corteian
5 Ges non an colpa cil co fan
Qel segnier nés de tôt for-
[fagtz
A cui en couen castiars.
[ Arglmento]
Gaubertz de poicibot si fo gen-
tils bom. e fo del vescat de lemozi
fils del castellan de poicibot. e fo
mes morgues cant era enfas en un
inoster qe a nom san leonart. e
saup be letras e ben chantar. e ben
trobar e per voluntat de fêna issi
del monester. e uenc sen a celui on
venian tuit aqil qe per cortezia
volian honor ni benfait an sauaric
de malleon et il li det arnes de
ioglars vestirs e cauals e pois anet
el per cortz e trobet e fes bonas
chaiizos et enamoret se duna don-
zella gentil e bella e fazia fa s '
chanzos délia e ella nol vol amar
si non se fezes caualers e nô la
tolgues per moillier. [p. 209) & el
o dis an sauaric con la donzela lo
refu saua donc sauaris lo fes caual-
ler eil donet terra & renda e tolc
1 Appel: qu?i — 2 A.: lei — :< A. : duplan — * A.: E an — b.l. : mit —
A. : que
' c. en: sas. Le second texte, écrit au folio 32 verso de lu dernière partie
du manuscrit , n'offre que la seule variante : las.
LE CHANSONNIER DE BERNAHT AMOROS
003
la donzela per mullier e tenc la a
grant honor et auenc si qel anet en
espalgniae ladonzelaremas& uns
cauallera dangleterra si eutendia
eu ella. e l'es tant e diz qe la mena
via e tenc la longa aaizo pi r druda
e pois la laissa malauient anar.
Gaubertz torna despaignia & al-
berga uua sera en la ciutat ont
ella era & el anet de foras pe/- volô-
tal de femna & entret en larberc
duna paabra femna qeil fo deit qe
la entre auia una bella donzela e
trobet la sua moilher e qant e la
ni & ella lui fo granz dolois entre
lors e granz vergogna ab lei estet
la noit e lendeman son anet con
ella e mena la en una mongia on
la tes rendre e per aqella dolor
laisset lo chantai- el trobar.
226
JAUBERTZ DE PUIGCIBOT
(=B. Gr. 173, 14)
I. (jp. 212) Una granz amors
[corals
Mi destreing en ' te
Si qeu non sai ren dir als
Mais clamar merce
5 E car me dais non soue
Sembli malfat entre las genz
Em par menre ma sabenza
Dont amors qem forz em
[venz
Degra venzer ma clamors
10 Cal venzedor es honors
Qe merces lo ueuz a.
II. Amora vostre noms es fais
< îar non amatz me
'v»ieu vos soi fis e leials
E voa am anc se
5 E pos aissi sesdeue
Qieu vo ibedienz
Damor e de bon volenza
E vos mes mala e cozens
Sens benfait e sen socors
lu Per dreit sei û u amora
E * malvoleuza.
III. Donc pos non val car soi
ta! ■
Com a drut coue.
Sim trouaua desleials
Auriam ia be
5 Ben leu i torneral fie
Mas non dei so ditz mos
[senz
Far per faillimeut faillenza
Per qieu voil mais ab tor-
[menz
Esser dels fiz amadors
10 Cab los fais galiadors
Far damor paruenza.
IV. A tort mi ven de vos mais
E non sai per qe
Mais daitant amors siuals
Mi venjarai se
5 Qacels qi 3 sabon re
[; • ]4
Dirai vostra captenenza
Don vos parez meinz valenz
E naurez meîs seruidors
10 Qi sabra mas granz dolors
Te cels 3 et temenza.
V. Vostrusatges es aitals
Ca celui queus cre
Merme de ioi sos captais
1 l. : em — 2 /. : E vos
senz — » c. en : Recels
J /. : qi no — * /. : Coiia vos est desconois-
£24 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
Car de vos non ve
5 Mas enians sas tota fe
E danz ses totz iauzimenz
E ses tôt plazer cozenza
Pro fait/, dautres faillimenz
Mas callar mi fai paors
10 Orgoils ez granz folors '
Qi a plus fort tenza.
VI. Pros vescomtessa plazens
Dalbusson tant vos agenza
Pretz per qieus taing grazi-
[menz
Part las autras el auzoï s
5 Qen vos a son luec valors
Ses tota faillenza.
227
GAUBERTZ DE POICIBOT
(= B. Gr. 173, 6)
I Merces es en chazimenz
Dumil creisser et aussar
Et orgoil sobrebaissar
Don faill amors vostre senz
5 Cant me crez * trobatz ven-
[cut
Humil e de bona fe
Dechaetz anc se
E leis qui vira lescut
Vers vos3 sus me
10 Qi nous tem ne vos blan
Non voles destregnier tan
Qe lorgoil baisses
[En uer uos sumelies].
II. (p. 213) Pero raizos es plus
[gentz
Perdre per humeliar
Qe per orgueil gazagniar
Qe lergoillos si ben veuz
5 Na blasme per tôt saubut
El humil son tôt lo te
Vil e bas sotz se
Sivals adreit conogut
Dont mes miels so cre.
10 Qumelia *
Feenganar5. quab engan
Mi don galies
Qe qel 6 tortz reman seu
[ades.
III. Tort ai 7 cai dit granz ardi-
[menz
E car lan auz encolpar
Non pas tang qeu dei amar
Oui es doues lo fallime»z
5 Meu caram & a8 reperdut
Lei qi non taing ni coue
Non es ges per qe
Car eu non ai mais pogut
E nô o fan ges ben
10 Qi meu va forzan
Amors qi men9 forza daitan
Car vol qieu lames
Forze... qe leis non forces.
IV. Pero car lauzor 10genz
Fai amor ver si clamar
Crei cai fan n leu pot forzar
Lei a far. so mandamenz
5 Per cai lonc temps atêdut
Et encar nomen recre
Qel seu dur cor pie
Dorgueil. mostres sa uertut
Amor per merce
10 E fara honor grau
Sami cui verz serz 12 afan
Verzer13 se laisses
1 l. : g. e f. — 2 c. en : qez — 3 l. : v. e - 4 /. : Qieu umelian — »/. :
Si imganatz — s /. : Qel — M. : Tort — 8 /. : cara ma — 9 /. : qim —
— 1U/. : las auzors - u l. : caissi — i2/. : venz senz— ^l.: Venzur
LE CHANSONNIER HE BERXART AMOROS
225
E lei qes defen uenqes.
V. A mors non es tan sabenz
Daitan vos pose ensegniar
Qe del seu merteia malme-
nai-
Es desmesura e nonsenz
5 Nol ten per descrezut
E qes tang ni don saue
Qe hom celui malme
Caura pel seu retengut
Per mi non die re
10 Mas c ir mes semblan
Qê fassas. vostre dan
Qanc hom qi greues
Lo seu no fo noi perdes.
Akgumento*
Pons de capdueil si fo del ves-
cat don fo guilliers de saint lai-
dier. ries hom fo molt gentils
baros e sabia ben trobar e violar
e chantai*, bos caualers fo darmas
e gen parlanz. e gen dôpneianz e
iiz e bels e ben enseguatz e
fort escars dauer mas si sen
cobriaab gent acuillir & ab honor
de soia persona. et amet per amor
ma dona alais de mercueir muller
den ozil de mercueir que fo filha
den bernait danduza dun onrat
baron qera de la marcha de
proenza molt lama & lauza e fes
m tintas bonas chanzos délia e tât
qant ella visqet non amet autra
dona e cant ella fo morta el se
croza e passet outra mar e lai
moric.
228
EN PONZ DE CAPDUEIL
(= B. Gr. 379,2)
I (p 214) Si ai perdut mon
[saber
Ca penas sai on mestau
Ni sai donc venc ni on*»vau
_ l ••• I1
5 E son daital captenenza
Qe non vueil ni pueisc dor-
[mir
Nim plas viure ni morir
Ni mais ni bens no magenza.
II. E per pauc non desesper
E nom rent monges a lau
0 nom met dinz vna frau-
E3 com nom pogues veser
5 Car traitz son en crezenza
Per cella queu plus dezir
Qem fai sospiran languir
Car mi frais ma couinenza.
III Jamais non eug ioi auer
Ni estar vn iorn suau
Pos mi donz ma solaiz bran
Nim torna e nonchaler
5 Nen sai on maia guirenza
CO plus ieu penz e consir
Coil pogues en grat seruir
Adoncs creis sa maluolli-
'enza.
IV. A gran tort mi fai daler *
E si eu pendutz en trau
Sanc pois segui autresclau
Pos mat5 près en son poder
5 Ni fiz en dreig leis faillenza
Mais sol daitan so mallnr
Car la tem e naus bë dir
* Le même texte est inscrit une seconde fois à la fin du ms.au f. '.j-\ V.
1 l. Ni qem fauc lo jorn nil ser — '2 c. en: fiau - 3 c. en: En — * L :
doler — ï< /.: mac
15
226 LE CHANSONNIER DE
E qar li port ben voillenza.
V. Per reu non puesc estener
Per1 nom lam e non la lau
Car la genzer corn mentau
Se non2 anz die uer
5 Ab qe prezes penedenza
Dels tnnnenz qem fai suffrir
E ses degna conuertir
Er complida sa ualenza.
VI. Eu son aicel qi non tenza
Ab midonz ni no mazir
Ni m sai de ren enardir
Mas de zo qa leis agenza.
229
EN PONS DE CAPDOILL
(= B. Gr. 326, 1)
I . Tôt franchament. dôna veng
[deuant vous
Penre comiat.pertotz temps
[a lezer
E granz merces car anc
[degnetz voler
Qeum 3 tengues de vostre
[amour plus gai
5[ ]l
Ben es razos qe si voletz
[auer
Drut dautra gent qeus sap-
[cha mais valer
Aissil vos salu. ja piegz
[nous en voirai
Qant aurem pois bon solatz.
[entre nos
10 Et estarem. con sant 5 pap-
[iar 6 nô fos.
BERNART AMOROS
II. (p. 2l5)Ma.s vos cuidatz car
[ieu sui adiros
Caissi del tôt njus o diga
[de ver
Mas derenant vos o farai
[parer
Car ai chauzit en leis cui
[amarai
5 E uos auetz chauzit si con
[leu ' sai
En tal amir8 qeus fara de-
[chaser.
& eu en leis qe voil pretz
[mantener
Don sappcha 9 jouens e de
[vous vai
Si tôt non ses de locs tau
[paratios.
10 E la es ben plus bella e plus
[pros.
III. Pero domna totz temps serai
[euros 10
Del vostrafar caisso voil
[retener
Cane nous pogui mètre a
[nonchaler
Aissi del tôt enanz vos ser-
virai
5 Fors qe iamais vostre drutz
[no serai
Si bem deuetz anqwra Io
[iazer
Qê promezetz qan nauriatz
[lezer
Nol dig pe?' so qe negun soin
[non hai
Mas seu en fos agutz anz
[poderos
1 /. : Qer — 2 /. : non i ment.
3 /. : Qeu mi — '« /. : Tant quant vos plac mas aras pois nous plai —
s /. : sanc — 6 c. en : parlât — " c. en : ieu — » l. : amie — 9 /.: sa-
propcha — i|J c. en : cutos
LE CHANSONNIER DE
10 Tal ora us ' qieu - fora plus
108,
IV E si! virars 3 ni! pleuira de
[ii is dos
Pot al partir de! amor dan
tener
Metam nos ambs en la man
[dun preuer
E soluetz raen qen vos en
Bolverai
5 E pois poirem aradui daqi
[en lai
Plus leialment nostr amor
[mantener
E sanc fetz ren qami
[doler
Eus en perdon tôt zo qa mi
[neschai
Tôt de bon tor. * questier
"non er la 5 bos
10 Si de bon cor non es faitz
[lo perdos.
V. M al a domna tro qera fezes
[gelos
Ni res non sap lo mal qel
^ gelos trai
5 Ni ren non sap gelos qe ditz
'ni fai
Ni nuls gelos non pot en
[luec caber
Gelos non a pauza matin ni
Per qe vous deu plazer. car
[men retrai
Qassatz va miels, a celui
[qes lebros
BERNA HT AMOROS 827
10 Qadonc sauala noi son tuit
[adiroB.
VI. Fe qem deuetz sitôt sui adi-
[rotz
Prendetz comniat de mi qel
[pren de vos.
230
EN PONS DE CAPDUEIL
(= B. Gr. 372, 2)
1. Ane mais nuls hom non fon
[apoderatz
.Mas eu o sui. e ren no sai
[per qe
Qestiers mon grat am e sui
[desamatz
Et enaissi ai o tengut anese
5 Desqefuitratz'nisaup esser
[amaire
E foJlei sols et eu nô puesc
[estraire
E fuig liiem8 pron. totzjorns
[e sec mon dan
E fatz esfortz qant eum co-
'nort ni chan.
II. [p 216) Pero tan es la so
[umilitatz
E la lauzors qe tota gens
[en te
Qeu anc non puec tant esser
[sos priuatz
Cane mi valgues ebauzimenz
[ni merce
5 Ni nul conort dom mala-
'Ldors 9 sesclaire
Mas brau respos cais qeu
lai mort son paire
1 /.: vi — : c. en : qien — 3 /. : iurars — W. : cor — 5 c. en : ja — 6 lacune
indiquée dans le ms,
1 l. : natz — * l. : mon — 9 1. : dont ma dolors
258 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
E qan la prec élan fai un
[semblan
Qe uo menten pins qe un
[al aman.
III. Pero tantes mos pensamenz
[onratz
Qel maltragz val dautre
[soiorns ganre
Tarn es valenz. cela cui mi
[sui datz
Qe nô a par en tant quant le
[monz te
l> La genzer es qe anc nasqes
[de maire
E la meiller zo nug a totz
[re traire
Per qeu non lauz. descubrir.
[mon telan
Mas per solatz can li autre
[en chan.
IV. Mas seu follei per lei tôt
[mes viutatz
E voil suffrir lo mal em
[patz el ben
Com non es finz ni drutz
[enamoratz
Ni es forsius. qe tan Jeu se
[recre
5 De sa domna ni no sap
[damor gaire
Cane ses afan rie gazain no
[vi faire.
Ai las qai dig sentirai de
[leis dan
Con plus mi fai languir plus
[la reblan.
V. Al valen rei. ' de pretz coro-
[natz
Sobrautres reis e qi miels
[se capten
On finz iois nais e2 reuouel-
[latz
Joi e iouenz ten. vai chanzos
[de se
5 En aragon on prendon tuit
[repaire
Bon faig valen qe francs reis
[deia faire
E saludan de perpigua enan
Cel o celas qe damor an
[talan.
VI. Pero tant es bos mos pensa-
[menz honratz
Qe de ren al mas de leis
[nom soue
E sos près es tan fis e tant
[point/,
Qesser eug reis de ioi can
[me soue.
231
EN PONS DE CAPDUE1LL
(=B. Gr. 375,13;
I. Lamoros pensamenz
El ries volers auzatz
Qeu aidôna valenz
De vostramor mi platz
5 Mil tanz qe neguns dos
Qautra far mi pogues
Car ben sai quamors mes
Vengan mi danz o pros.
II. (p. 217) Qals digz de totas
[gens
El 3 vostre cors onratz
1 /. : rei qes — 2 /. : cl. es.
* Voyez le texte publiè'jiar M. M. v. Napolski dans son ouvrage: Leben
u. Werke des Trobadors Pons de Capduoill. Halle 1880 p. 55 s.
s /. : Es
LE CHANSONNIER DE BERNA RT AMOROS
l'ros dompnet auiueus
Tant humils tan prezatz
5 Tantfiz tant cars tant bos
Tint adregz tant cortes
Qe caps es de totz bes
Sol meïs ' nù fos.
III. Doncs per qei es iouentz
N'a lors ni gais solatz
Honors e pretz e senz
Cortezi e beutatz
5 Eil lautraib cabalos
Et anc noi fo merces
Pos ieu non - truep ces
Qi fui tant fiz vas vos.
IV '. Qom liais o temenz
Sufriz lafan em patz
E non fui recrezenz
Nim vir uas autres latz
5 Ni no fui poderos
Poa i aie mon cor mes
E car sui vostre prez
Faitz mi bonas preizos.
232
PONS DE CAPDUE1L
(= B. Gr. 375, 4)
I . Hen es fols cel qi reigna
Loncs 3 temps ab seignjor
Don ia bez non lauegnia
Senz mil tanz de dolor
5 E qi per ben mal pren
Tain qe iois li sofraignia
E granz mais lien remai-
gnia
Saber pot veramen
Casaz a de qes plaignia.
II. Per bo plaing e men laignia
E qar sui lialmen
Daraor qim fo ■ nia
Em dais malamen
5 Sabetz p< r qe mair
Qel bon qe faig mauia
Mi tolc e fei 4 bauzia
Qom non dei enreqir
Lo sien e pois laucia.
III. Ben ses araors traia
Qamar :i e seruir
Et onrar la sabia
Miels ibezir.
5 E celar senz enian
Mas mal es sacoindanza
Qom non a benananz i
Qe pois non torn a dan
Per qieu 6 par 7 mesperanza.
IV. Tant es granz la rancura
Per qieu 8 sui iratz
Qe bos pretz en peiura
E gaiesce solatz
5 P<'/-o ades esper
Se tôt mos cors sesmaia
Câpres lira meschaia
Tais iois qim deig plazer
Sol finamors nom traia.
V. Tant pauc voil sacordansa
Q il> dreig leis plus non
[blan
Quna gentil qenanza
Son valen pretz prezan
4 On es sens e beutatz
Ab gran bona ventura
Si qa totz iorns meillura
Mas ab tôt so noil platz
Namors 9 ni non a cura.
V] p. 218) Mon andrieu fai
[valer
1 1.: m. merces — - /. : non la.
I. : Per 1. — 4c. en : fe — :i /. : Qar amar — ,; c. en: qien — 7 /. : part —
s /. : q.en — '' /. : Samors
2 30 LE CHANSONNIER DE
Fina valor veraia
E leis qes coind e gaia
Las qeu non auz ' vezer
5 Tan tem qamor no maia.
VII. Bem puesc damor tener
Qel danz qai presmesglaia.
233
EN PONS CAPDUEIL
(= B. Gr. 375, 7)
I. De totz chaitius sui eu aicel
[qi plus
Ai gran dolor e suffris gran
[turraen
Per qieu volgra mûrir e fora
[gen
Qieu maucizes pos tan sui
[esperdutz
5 Qe viure mes marrimenz e
[esglais
Pos morta es ma dôna naa-
[lais
Greu pensar fai lira.nil dol
[tal dan
Mors traiheris.ben vos puesc
[en ver dire
Qe non poguest el mont
[meillor aucire.
II. Ai con fora gueritz e ereu-
[butz
Sa dieu plagues qieu fos
[premeiramen
Morz laz chaitiu no noil
[mail 2 loniamen
Viure après lei ren. perdon.i
[me sus
5 Siegnier dreiturers e verais
BERNART AMOROS
Sabiatz la crist non la sobre
[toillatz
Larma rendes sain peire e
[sain ioan
Qe tuit si 3 ben i son com
[puesca dire
E de totz mais la pot hom
[escondire.
III. Seignier ben la deuem pla-
[gner chascuns
Cane no fo hom veges tan
[auinen
Qil auia tam bel captene-
[men
Que val beutatz ni bos pretz
[mentaubutz
5 Ni qe val senz honors ni
[solatz gais
Gen acuillirs de nuls coites
[esais
Ni que valon franc dig ni
[faig prezan
Segle dolen de bon cor vos
[aire
Moutvales pauc pos lo miels
[nés a dire.
IV. Jois e deleitz e iouenz es
[perdutz
E totz lo morz 4 es tornat/. e
[nii n
Qar comt e duc e maint baro
J valen
Neran plus pron ar no la
[ve negus
5 E mil donas valion pe/- lieis
[mais
Mas ar podem sabercab nos
[sirais
Nostre segnier. qi la fes
[valer tan
' l. : lauz — * c. en : uoil mais — 3 /. : li — 4 /. : monz
F,E CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
231
Caissi nos vole tolre solatz
[e rire
E donar mais dafan ede cos-
| sir,'.
V. Ai cala danz os de mi d
[lia/., liais
Non pusc als far mas de totz
[iois mi lais
E prenc comniat de ebantar
[dorenant
E plaing e plor e maint
[coral sospire
5 Man mes per lieis en engoi-
[zos martire.
VI. Amies naudrieu chamiatson
[mei dezire
Ni it lamor non serai mais
[seruire.
234
[EN PONS DE CAPDEIL]
(==B. Gr. 375,18)
I. (p. 219) Qui per nescicui-
[dar
Fai trop gran faillimen
A dan li deu tornar
E sa me mal ne ' pren
5 Ni ma donnam det iai -
Ben tain qar tal folia
Ai fai g per qe deuria
Morir dirae desniai.
II. E sien per sobramar
Ai teignat 3 follamen
Ni per mi donz proar
Si nagral cor iauzen
5 Sil ferm voler qieu ai
De leis seruir partira ;
Ai- conosc qeil plairia
IV j fol essai.
III. Enaissim fai trobar
Neis tôt lo cor el sen
Qe can cuig ergoil far
Totz nu" torn e uien
r> E gea de beo ao fai
Cam 5 mos cors sumelia
Orgueil ni cortezia
Jois de lieis non matrai.
IV. Mas ieu non i ai par
Mon cor ni mon talan
E sautram vos6 onrar
< rratz e merces len ren
5 E tostemps o farai
Qi es tiers ai qi mauciria
Mon fin cor nom partiria
Del rie luec ont estai.
V. Domnal genser qieu sai
Mais vos am senz bauzia
No fes tristanz samia
E nul pron non 7 ai.
235
EN PONS DE CAPDUE1L
(= B. Gr. 375, 22)
I. So quom plus vol e don es
plus cochos
E so corn a dezirat ni ten
[car
Deuem chascuns relinqir e
[laissar
Qar ben sabem qe luecs es e
[sazos
5 Qel ries seignier qes leials
[perdonaire
1 /. : en — * L: dechai — 3 /. :reignat — * /. : partria — 5 l. : Can —
6 /. : vol. — " /. : non i.
2 32 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
Rei de merces. dreturers e
[saluaire
Anem seruir qel nos fes de
[nien
E suffri mort per nostre sa-
[luamen.
II. Nos podem beasaber. qelfes
[per nos
Qel si laisset despinas coro-
[nar
Batre e sufrir e de fel abeu-
[rar
Et nous resems del sien sanc
[precios
5 Ai las chaitiu qa mal fan lor
[a faire
Al ' que noi van e cuidan. sai
[sobstraire
A lur vezinz lur terras fal-
[samen
Paor deuran auer al iutia-
[men.
III. Qui remanra non er sauisni
j pros
Qe sai nos pot luns en lau-
[tre fîar
Per qe ditz hom qe nô pot
[plus durar
Segles adoncs remanranuer-
[goignos
5 Li rie baros sil segles dura
[gaire
Ben es torbatz lo reis e lern-
[peraire
Si remanon guerreian. per
[argen
Ni per ira - lor fail breu-
[men.
3
IV. (p. 220) Qi qe remangamai
[voluntiers '•
Qom non pot ges lo ben
[guiardonar
Qe dieus na fag ni los tortz
[emendar
Per qieu li prêt 5 aissi com
[es pidos
5 Qil 6 clam merce. aissi con
[fes lo laire
E uailha. nos la soa douza
[merce 7
E sainzioanznos vailhaeis-
[samen
Cossi vêzâm aqesta falsa
[gen.
V. Sil qe sabon las leis et las
[leissos
Els mais els ben noi voillon
[ges annar
Qieum fai s tal un qautreia9
[deseretar
Mais crestianz qe sarrazinz
Criions
5 E si parlatz diraus vos es
[péchai re
E cil qes fan dels autre
[predicaire
Deuon e si predicar eissa-
[men
Mas cobeitatz toi lacleriel ,0
[sen.
VI. Cel darragon franc rei e
[debonaire
E sei nos " dieu de bon ci r
[humilmen
Esti ab vos e tuig digum
[amen.
1 l. : cil — - l. : terra si tôt — 3 c. en : r. ieu irai — * l. : voluntos
— 5 /.: prec — G /. : Eil — 7 /. : maire — s /. : sai — 9 /. : qama — 10/. :
clersial — " /. : E serues.
LE CHANSONNIER DE
236
EN PONZ DE CAPDUEIL
(= B. Gr. 375, 1 i)
I. Leiala amies oui amors ten
[ioius
Deu bon esser alegres e
[iauzenz
Larca et adreigz. arditz el
ii-os
Era qan par lo gais ter-
[minis gen
5 Qi fai las flore espandir ; er
la plaigna
El rossigniol chantar iostal
[ver foilh
Mas ieu non am sos douz
[chanz tant cansoil
Poz mi donz z iois mi
[sofraigna.
II. Pero ben sai qe es dreitz e
[razos
Qe ce) qi es amoros e pla-
[zen/.
Deu esser brauz e de plus
[mal respos
Pos non li val merces ni
[chauzimeu
5 Pos ma dona mes mala
[e estraignia
Leu j ot trobar en :: e mal
[e orgueil
Ja non maura. si nom vol
[tan can voil
Q?^n ren no fai semblan
■ de mil taigna
111. Totz malmenatz sui eu ll/.iis
e bo.s
E vulgra far Lot son coman-
BERNART AMOROS 2 33
Qel siens ries c rs >
' meiller can
Sol qe vaa mi fos fizel ni
.-•■h
5 Qe tarai doncs, seu vauc
[o .si remaTgna
Amors tostemps ma
trat orgueil
! ois es qi perl per /." <j<' no
izaigna.
IV. [p. 221 Non die ieu p-s qe
[tostemps >i us nû fos
E nô fezea t<>t son comâ-
uien
Si tôt non tain sos
[cors orgoillos
Mas si tôt es amoros e
plazena
5 Francs e humils e dauinen
[compagnia
•la nom aura si nû vol tôt
[qant voil
Ail <v. qem val si lam o si
o toil
Qen iê non fa paruen. (je
de mil laignia.
V. Per so nestau marri tz e
[consiros
Qar anc lamei ni falli tant
mon sen
Car per vn ioi don D
poderos
Soan aillors tôt autre iauzi-
[men
5 Aissi non sai conseil ab qe
[remaignia
Qautra nom plaz ez il mi
icoil
.M .s lieis nô qal sim pert per
qieu nom doil
1 /. : donz plai.
23 4 LE CHANSONNIER DE
Ni de samor non ai cor. qe
[me plaignia.
VI. Amors lonc temps ai estât
[em bretaignia
E faitz pechat qar mi mos-
[tratz orgoil
Sien plus qe tuit. lautrama-
[dor vos voil
Ni mais vos am es doncs
[dreitz qe men plaiprnia.
237
EN PONS DE CAPDUEÎL
(= B. Gr. 194, 6)
I. En tantaguizam mena amors
Qa penas sai sim dei chan-
[tar
0 si dei plagnier o plorar
Tant mi don ' gaugz e
[dolors
5 Perosel volgues dreitiutiar
Mais vai - mais qe bes e
[maiors
Mas tan am finamen
Qel mal teing a nien
E grazis e enanz
10 Los bens per qem platz
[chanz.
11. Bona donna près e nalors
E corteziab gent parlai-
Oils rizens amoros e clar
E beutat ab fresca colors
5 E agrat don nô aues par
E totz bos autres faigz
[meillors
Vos fan enteiramen
Sobre totas valen
Per qieu soi ben. amanz3
BERNART AMOROS
10 Damors dô soi clamanz.
III. Loigniat maues sospirs e
[plors
Ab pês e ab merces clamai"
Per zom deuetz tener plus
[car
E loigniar fegniens. preia-
[dors
5 Qe domna deu ben esquiuar
Los bruids dels fais deuina-
Car per un maldizen [dors
On fols semblan senten
Si leuon bruid tan granz
10 Camors en sembl enianz.
IV. (p. 222) Qes1 gent de tos
[amadors
Can fan zo qes tain ad amar
Ni hom nos deu damor
[doptar
Qe lai on blasmes e follors
5 No o toi sen sobra non par
Qe greus es de doas colors
Cors ni faitz loniamê
Sabetz qem vai voluen
Tem qe sial talanz
10 Lai on vei los semblanz.
V. Aissom toi enuegz e paors
Qim fazian desesperar
E de vos partir e loigniar
E preiar si pogues aillors
5 Mas tan gent sabesemendar
El sen triar de las follors
Car aman e sufren
E celan e temen
Vos conqerrai enâz
10 Cab mal ni ab bobanz.
VI. Na maria souen
Magradal pretz valen
Qe mais dei trauetz 5 tanz
Qe noi a obs mos chanz.
1 l. : dona — 2 /. : nai _ s /. : s. benananz^— 4 /. : Et es — s /. : daltrauetz
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS 235
238
EN PONZ DECAPDUEIL
(= B. Gr. 375, 1)
I. Aissi mes près con cellui qi
[cercan
Yai bon srignior en e>
[gan re
Qe tuit lonron eil fan vol
[tier ben
E chauzis nun tôt sol qe ren
[nol blau
5 Nil fai honor estiers qar la
[voil gen
E qar lo sab sobre totz plus
[val'Mi
Ainal mil tanz mais em per-
[don seruir
Qals autres totz de qe si pot
[iauzir.
II. E es razos e dreigz al naieu
[semblan
Com lo meillor am meils
[per bona fe
Si tôt noiî val fols es qi sen
[recre
Mas seruacles ' e ia rê non
[deman
5 Qe ben qier hom aseignior
[conoissen
Qi lonrel serdones sien lam
[finamen
Midonz oui son bem degra
[iois venir
Qel genzar es coin puesc i 1
[mon chauzir.
111. Si tôt maaci de bon eor senz
[eniau
Lim rent sil platza sa fran-
[cha merce
Cane pos la ni non aie po
der e mo
M 18 damar licis e d.'
[son coma n
5 Tant can la vei mi tel ve-
zers iauzen
E can men part son en tal
[pensam< n
Qen châtâ plor em vol lo
[cors partir
Enaissim fai samors viure
e nionr
IV. (j>. 223) Dieus qe la fe
belle tan prezan
Li salu eil gar lo bon pretz
[ijil mante
Qe non a hum tan dur cor
[si larex 2
Noil port honor. aissi \ai
[mellman
5 Tôt cant cornes ab valor3
[ab sen
Abeillir fai sos faitzatota gen
E als meillors. si sap miels
[far grazir
En totas res si garda de
faillir.
V. Tant fort conois tôt can les
[benestan
Per qieu soi mortz si de me
noil soue
E sâc amors ac nuil poder
[en se
Pos mi destreing forces
[lieis sol dailau
5 Qe non li enueg si lenqier
[humilmi n
Qe nom faza mûrir tan lon-
gamen
Qil chant e ri e ieu plaïg
[e sospir
1 l. : seru ades — 2 /. : la ve — 3 /. : coue ab v. el
236 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOMOS
En port souen lo maniai' el
[dormir.
VI. Rois cors cortes per vos
[lais veramen
Rie ioi daillors e de uos non
[lateu
E ges per tan non paesc
[mou cors partir
Qe mais e miels vos am
qieu non sai dir.
VII. Naudiartz am pel bon pretz
[qieu naug dir
Mon ' andreu rei 2 totz
iorns enantir.
239
EN PONS DE CAPDUE1L
(= B. Gr. 375, 19)
I. Sanc fiz ni dis mullja sazon
Ves vos euueg ni faillimen
Ni passei vostre manda-
[men
Ab franc cor 3 humil e bon
5 Vos mi don bella douza-
[mia
Em part de lautrui segnio-
[ria
E remanc en vostre inerce
Qalqem fassatz o mal o be.
II. Per aital couen vos mi don
Qieu non ai poder ni talen
Qe men parta al mieu viuen
Camors * en vostra preizon
5 Mas qar etz la meiller qe sia
E auetz mais de cortezia
Qel plus vil as es can vos ve
Cortes. eus porta bona fe.
III. Bem pogras trobar ochaizon
Mas tant vos sai doua valen
Franch e humil e conoissen
Per qiens qis franchamen
[perdon
5 E tem vos tan qals nous
[qerria
Mas senz enian esenz bau-
[zia
Vos am eus amarai iasse
E tôt qant vos plai voil e
[cre.
IV. (p. 224) Doncs pos nous auz
[qerre mon prou
E son vostre sers leialmon
Ben faretz mais de chauzi-
[men
E doblares lo guizardon
5 Sim donatz so qieu pl«.s
[volria
Senz pi'eiar qaital conipal
[gnia
Nos part cant senz. prec
[sesdeue
Cans 5 fis cors ab autre saue.
V. A penas sai dir hoc amors
Can no vei vostre gai cors
E humil e couinen [franc
Sim espert mon nai ben ra-
[zon
5 Qe totz lautre monz non
[poiria
Tener nul pron. si nous ve-
[zia
Ni seus vos non puesc auer
[be
Ver qieus er gen sius en
[souc.
VI. Beutatz e valors e coindia
Doua creis en vos chascun
[dia
i /. : E m. — 2 7. : vei.
3 /. • ,-. e — ' /. : C. ma — 5 c. en : Tans
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
237
Iî prec dieu qel don mal
astre
Totz cels can loigniai vos
[de me.
VII. Naudiartz paru1 on qe sia
Voil sa coindiae sa paria
Câpres faig enaa de2 raante
Tôt zo qa valen pretz coue.
240
EN PONZ DECÀPDUEIL
(=B. Gr. 375, 10)
I. Humils e francs e fiz soplei
[vas vos
Ab leial corbona donna va-
[lenz
Qar etz meiller del monteil
plus plazens
E plus gentils e plus fran-
[che plus pros
5 E genser e plus _
Per qieu vos am ia altre
[pro noi ai i
Tan finamen qe daltre nom
[soue
Neis :! eant prec dieu donc
[oblitper vos me.
II. E mais al cor vei en totas
[sazos
La bêla bocha els oils clars
[e rienz
El gai solatz els bels digz
nenz
E vostré cors ques tant cars
[e tant bos
5 Non crezatz quem nestraia
Cuns douzdezirs mi ten gai
[e rnapaia
E non ai plus ni non i trop
[merce
Mas tant valetz qel mais
[val dautr ta be.
III. Nui! autramora nom pot
faire ioios
Simpreiauon dautras d5na
[sine ceux
Cab vos son fadatz lis plus
conoissenz
Tan son cortes li semblan
[eil respos
5 Qen tan qan soleill rai a
Non a dona oui tan ries fat/
[seschaia
Ni miels fassa zo qa bon
pies coue
Doncs son astrucs qar vos
am e vos cre.
IV. (p. 225) Adreitz cors genz
[benestanz amoros
Nom auciatz vaillam francs
[chauzimenz
E leiautatz e fin amors qim
[venz
El bens qen die e merces e
[perdos
5 Nom voilliatz qieu dechaia
Qel loncs espers el dezirers
[mesglaia
Bona dona sol en dreg bona
[fe
Mi donatz ioi coin peitz trac
[nom recre.
V. Si vais daitan son bon ,f
[auenturos
Car sieu en muor. autres non
[veria rizens
Anz faitz mentir lo bruig
[dels malsdizens
1 c. en: pain — * c. en : enanc e. — 3 e. en : Ueis— ' /. : ben
23S LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
E reman fiz vostre pretz
[cabalos
5 Mal grat de gen sauaia
Qar totz iorns creis vostra
[valor veraia
Sobre totas e sai vos dir per
[qe
Car valetz mais e non failletz
[en re.
VI. Vostrom son donna gaia
E am vos mais qe landrics
[no fes aia
E sobre totz port las clans
[damar be
Per qieu aillors nom puesc
[virar mon fre.
241
EN PONS DE CAPDUEIL
(=B.Gr. 315,11)
I. Ja nom er hom tan pros
Qe non sia blasmatz
Cant es a tort fellos
Qel ries bar e lonratz
5 Nés plus car e plus bos
Can conois sas foudatz
Qaissi iutga razos
Las valenz els prezatz
i aiscel qe sumelia
10 De son grant faillimen
Deu trobar chauzimen
E lorgoillos feunia
Qar qi mal fa mal pren.
IL Fols es si tôt les gen
Qi es enamoratz
Carnors vol coin1 emë
Los autrui tertz 2 empatz
5 E non faza paruen
Qant er per dreg iralz
Anz sueffra leialmen
Or3 plus er malmenatz
E qar eu mi seguia '*
10 Maier guizardos
Estauc enamoratz1'
Qar mont fai gran follia
Qui trop am en perdos.
III. Domnaizo die per vos
A cui mera donatz
E sai qe son clamos
A tort car non amatz
5 Qel vostre taing qe fos
Coms o reis coronatz
Ab totz aibs cabalos
Tant es sobrepoiatz
Vostre pretz chascû dia
10 E ab ioi e ab sen
Qeil pro eil conoiscen
Vos porton seguioria
Mais qa las meillors cen.
IV. (p. 226) Mal aia sien ian
[meu
Per nul mal qê voillatz
Cane mas lacuillimen
Nom ac el gai solatz
5 E sieus ai loniamen
Bendig ies nô desplatz
Qar es tan auinen
Per qieu men part forsatz
Qar ges lieu non poiria
10 Esser oblidos
De las plazens faizos
Ni de la cortesia
Del vostre cors ioios.
V. Las mala fui iros
Car aissim son comiatz
Qanc pois nô fo sazos
Qwen fos gais ni pagatz
5 Anz son tan consiros
1 c. en : corn — 2 /. : tortz — a /. : On — ' c. : en cnmi se guia — 5/. :
desamoros
LE CHANSONNIER
Qe ren non sai qeni faz
Pos no vol qe pirdoa
Ni raerces ni beutatz
Mi vailla nim penria
10 Null acordamen
Bem fui lira dolen
Mas lamors maucira1
Per qieu non ai talen.
242
EN PONS DE CAPDEIL
(— B. Gr. 375, 21)
1. Se totz los gaugz els bes
E las finas lauzors
Els fagz els digz cortes
D.' totas las meillors
5 Pogues dieus tolz complir
En una solamcn
Saber cug veramen
Qe cella cui dezir
Na ben mais per un cen.
II. E mas de totas es
Caps e mirails e flors
Se tôt no men ven bes
Sim es lo granz* honors
5 Fassam viure o mûrir
Mais [dus 1er auinen
Sim tem iai e iauzen
Con mais me fai languir
Eu plus lam finamen.
III. Car el mont non es res
Sia senz o follors
Qem penses qil plagues
Nom fos gaugz e douzors
5 Zo qe vol mal azir
E aui cels bon amen
Qe son sieu benvolen
Al miels qe pot chauzir
DE BERNART AMOROS 239
Sun a son madame.
1 V. Enaissi ma conqia
E bj nom val amors
Vailliam ma bon i fea
E la soa ricora
5 Sam ors nom vol venir
El sieu bel cors plazen
El verais pretz valen
Deu garar 'le faillir
Qar sieu muer non 1er
V. Gentils cors ben après
Sobre totz amadors
Agratz mon fin cor met/
Ab un pauc de secors
5 Qe mort man li sospir
E vos per iauzimen
No suffratz mon turmen
Ni volliatz fais auzir
Cui er mal si bem ptê.
VI. Na biatriz grazir
Vos fais a totas gens
E entier e valen
Pretz e quin vol ver dir
5 Del bel semblan noi men.
243
EN PONS DE CAPDUEIL
(=B. Gr. 276, 1)
I. {p. 227) Longasazon ai estât
[vas amor
Humils e francs e ai fag son
[coinaii
En tôt qan puesc e anc per
[nul afan
Qeu en suffris ni per nulla
[dolor
5 De leis amar nom parti mon
[coratge
1 /. : mauciria.
*/.': L'ratz.
$10 LE CHANSONNIER DE
A cui niera rendutz de bon
[talcn
Tro qieu cognois en leis un
[fol uzatge
Al» qem dechai e macambiat
[mon sen.
II. A eut ma ia per leial serui-
[dor
Mas tan la uei adonar ab
[enian
Per qe samors nom mi plas
[de ren. an
Niim ] pot far be qe ia ma-
[gues sabor
5 E paîtrai men qaissim ven
[dagratdage
Pos ellas part de bon pretz
[eissamen
E ieu maloing tener altre
[viatge
On restaure zo dô ma faig
[perden.
III. Ben sai sim part de leis nim
[vir aillor
Qe non 1er greu ni nô so
[ten a dan
Mas si cuig ieu saber e valer
[tan
Caissi con sueil enanzar sa
[lauzor
5 Li sabria perchassar son
[dâpnatge
Pero lais men endreit mon
[chauzimen
Qar assatz fai qi de mal
[segnioratge
Si sap partir ni loigniar bo-
[namen.
IV. Em patz men part mas can
[cossir lerror
BERNART AMOROS
El dan cai près el destric
[leis coman
Hai corn magra trobat sens
[cor truan
Qeilscruira etengra en dou-
[zor
5 Nô pose mudar qe nom sia
[saluatge
Aissim conort qauzit ai dir
[souen
Cades passom primier per
[lo folatge
E pois taing ben qom san
[reconoiscen.
V. Hai con cuiei fos dinz daital
[color
Con aparec de foras pe?-sem-
[blan
& enaissi con il a beutat
[gran
E con val mais gardes gen-
[zeitz sonor
5 & enaissi con es de bel es-
[tatge
Degra en se auer retenimen
& enaissi con es daussor
[paratge
Con tra son pretz temses far
[faillimen.
VI. Ja non degra beutatz far son
[estatge
Ni remaner en dona altra-
[nen 2
Si non gardes sonor en son
[paratge
Enô agues en se retenemen.
1 c. en : Niun, l. : Nim. — 3 /. : allramen.
LE CHANSONNIER DE
244'
EN PONS DECAPDUEIL
(= B. Gr. 375, 24)
1- (p. 228) Tant mi destrein
[uns desconortz qim ve
Qab paucnonmoiz 'desmai
[e de cossiro
Qera nô sap qim so ni vo\
[mom be
La res el mon qieu plus am
[e dezire
5 Et a razon cane tan gran
faillimen
No fes. nuls hom qames tan
[finamen
Mas per paor de falsa gent
uaia
Ai estât tan de vezer son
[cois gen.
II. Pero tan sai son verai pretz
[valen
Per qai respeig qenqeras mi
[atraia
Humiltatz * m.-rces e chau-
[zimen
Tan es valenz e bella e
[coinde gaia
5 Anqeraura de! sien francha
meree
E non créa son cor cab
[leial fe
Serai tos temps sos hom e
[sos seruire
Malgrat dels fais qeil dizon
[mal de me.
III. Qe coites fai cel qi conois
[en se
BERNART AMOROS 841
Colpa cant la per qieu noil
ans desdire
Mas -mi midonz ve qe nos
il en re
Nim pot auer tort e vol-
[gues maucire
5 Qen leis amar. ai mes lo cor
[el sen
'• si lot ill nom ama nim
[consen
Si vais daitan mi reuen. e
[mapaia
Qe nulz aman/ non al ioi
[qieu naten.
IV. Las qe farai si de me noil
[soue
Quar si nom val donar. ma-
[greu martire
E il sabran lo uer si no
[mencre
Qen] telan. ai qe me mezeis
[nazire
5 Daital gui/a qil naura mar-
[rimen
\> <r senssamorteing lommi
[a nien
Ben a raizon qem confondem
[dechaia
l'an teignia vil si de leis
[mal mi pren.
V. ( hanzos vai ton a mi donz
[qim mante
E digas li qeil souligna de
[me
Qar mil aitanz val mais qieu
non sai dire
Honors e pretz qant sacord
[ab merce.
^.sas-i.'ï^.tîtr.r^rH:
16
212 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
245
EN PONS DE CAPDUEIL
(= B. Gr. 375, 25)
I . Tuit diten qel temps de pas-
[cor
Son plus alegre plusiauzen
Qan lauzel chanton finamen
E vei hom de maintas colors
5 Los vergiers florir e foilliar
Ben sen deu hom miels ale-
[grar
Qi ama sens cor tricha dur
E es amatz mas cel cui non
[apaia
Jois ni arr.ors noil tem pron
[floi'S ni glaia.
II. [p. 229) Pauc val totz lo
[mons ses amor
Per qieu iai mes finamen
Lo cor el saber el talen
Miels de negun altramador
5 Qar simaem poder bempar
Qieu non puesc de ren als
[pensar
Per som fes chauzir la gen-
[zor
Alei de si ' ma voluntatz
[veraia
Doncs pos tant val. non crei
[qel sieu dechaia.
III. Aissi com hom tenc per sei-
[gnior
Alixandre de tota gen
Dizon tuit qil es veramen
Sobre tota s caps e valors
5 Azautz e pretz lam fai amar
E qi ben ama deu gardar
En amor adzaut et honor
Per qieu mill ren ia plus de
[pro nol aia
A leis dessi ma voluntat
[veraia.
IV. Mais voil morir qem vir ail-
[lor
Quns francs esgartz doutz
[e plazen
Qem feiron sei bel oill rizen
_ [ ]
5 Sai ont estauc prez conortar
Qar sol mant degnat esga-
[rar
Man gitat desmai e derror
Merceslin rend .carfaisem-
[blan qeil plaia
Mos bes el danz.lhes enois
[el esmaia.
V. H ai valens domna cui adzor
Pz-endaus de me francs chau-
[zimen
E sanc fiz vas vos faillimen
Merce vos clam ab gran
[temor
5 Qel fiz pretz qeus mi f;ii
[amar
Vos fassa tan që voillatz far
Tal perda2qaprop ma dolor
Francha merces merce ab
[vos matraia
Qel iois qai tant dezirat men
[eschaia.
246
EN PONS DE CAPDUEIL
(= B. Gr. 155, 13)
I . Merauil mecom potnnlshom
[ehantar
1 c. en : fi — - /. : perdo.
LE CHANSONNIER DE HKRXAKT AMOROS 24 3
Si corn eu faz per leis qem
fai dolor1
Qe ma chaazo nou pose apa-
[reillar
Dos motz oual ters nom lais
[marritz chazer
5 Car no soi lai on estai sos
[cors gens
Douz e plazenz
Qe mauci dezirant
E non pot far morir. tant fin
mt.
II. E car nom puesc nulla ren
[tant atnar
Jes sa lois platz non deu n
[mort voler
Cane pos la vi nom poic dal
[re pensar
(p. 230) Mas corn pogues far.
[e dir soin plazer
3 Et es ben dreitz qel laus dels
[conoissenz
Es plus valenz
Per qieu mais nam lafan
De leis suffrir qe dautrauer
[ioi gran.
III. Maseunonlausmomessatge
[enuiar
Ni tant dardit nO ai quea lan
[vezer
E non o lais mas qar voil far
[cuidar
Al s fais deuinz qaillors ai
[mon esper
5 Perol decirs mes ades plus
[cozenz
El pensamenz
Car ieu noil son deran 2
Mans ioins aclins per far tôt
[son coman.
IV. Mais qen traia nom poi des-
[conort.ir
Tant la fai pretz sobre totas
vuler
Ni neguns hom nom la pot
| trop lauzar
Deus don qil voil humiltat3
[auer
5 Si con en leis es preezae
[iouenz
Beutatz e senz
Cane dona non ac tant
1 1 "nos qal tort nai pos nul
[autra nom blant.
V. Belladomna tant vos am eus
[teing car
Qf maintas vetz lo iorn non
[pueis tener
Qa mia partnon an tôt sols
I plorar
Si qieu nom pueis duna pessa
[mouer
5 Tal paor ai nS valia chauzi-
[menz
Car plus me venz
Vostramors sospirant
Qieu non sai dir ni retraire
[en chantant.
VI. Qeus sui garens
Plus vos am ses enian
Non fesyseutz son bon amie
[tristan.
Fin des chanzos de pons de
[capdoil.
' /. : doler — 2 c. en : deian, /. : denan — 3 l. : humilitat.
24 4 LE CHANSONNIER DE
247
LA COMTESSA DE DIA
(=B. Gr. 46,2)
I. (v. 231) Chantar1 merdaisso
[qeu non volria
Tan me rancur de lui cui sou
[ami a
Car eu lam mai? de nulla l'en
[qe sia
Ves lui non val merces ni
[cortezia
5 Ni mas beutatz ni mos pretz
[ni mos senz
Qautresi suienganade traida
Corn degresser seu fos des-
[auinenz.
II . Daisom conort car anc no fiz
[faillenza
Amies ves vos per nulla cap-
[teneuza
Anz vos am mais non fes se-
[guis valenza
E plaz memoutqez eu damai'
[vos venza
5 Lo meus amies car es lo plus
[valez
Mi faitz orgoil en ditz & en
[paruenza
E sius es francs vas totas
[autras genz.
III . Meraueilme con vostrecors
[sorgoilla
Amies vas me. per cai raizô
[që doilla
Non es ges dreitz. cautra-
[mors vos mi toilla
Per nulla ren qeus <liga nius
[acuoilla
BERVART AMOROS
5 E me»ibre vos cals fol co-
gneras a me» z
De nostramor sa2 dame deus
[no voilla
Ca ma colpa sial depar-
[timêz.
IV. Proeza granz qel vostre cor
[saizina
E lo ries pretz cauetz më
[ataina
Cuna nô sailundana ne ve-
[zina
Sius vol amar vas vos nô
[si aclina
5 Mas vos amies es ben tain
[conoissenz
Qe ben deuetz conoisst r la
[plus fina
E nembra3 vos de vostres v
[couinenz.
V. Valermi deu mos prez e mos
[paratges
E mas beutatz e plus mos fiz
[coratges
Per qeus man lai on es vos-
[tre estatges
Esta chanzon car mi sia mes -
[satges
5 E voil saber lo meus bel s
[amies genz
Per qe mi setz ta fers ni tan
[saluatges
No sai si ses orgoilz o malz
[talon/..
VI. Mas aitan voil digaus plus
, lo messatges
Qe trop dorgoil ten5 gran dan
[maintas genz.
M. : A ch. — 2 /. : ja - 3 l : membre - 4 c. en : nostres — 5 /. : an.
LE CHANSONNIER DE BEBNAHT AMOROS
2t5
248
LA COMTESSA DE DIA
(= B. Gr. i<-,, 1 )
I. (p. 232) Ab ioi et ab iouen
[mapais
E iois e iouenz mapaia
Qe nios amis es lu plus gais
Per (jeu son coind e gaia
5 E pois eu li fui ' verni a
1 !en taing qel nie sia verais
Cant 2 de lui amar no mes-
Ni ai cor që nestraia.
11. Moût mi plai car fai 3 qeval
[mais
Sel qeu plus dezir que maia
K cel que primes lom a trais
Deu pree que gran ioi latraia
5 E qi qe mal len retraia
Non creza fors qiel retrais
Com coil maintas ves los
'-liais
Ab qel mezeis si balaia.
III. Domna qen '• bon pretz sen-
[teu
Deu ben pausar senten-
[deuza
En nu pro caualer valen
Pois il conois sa valenza
5 Qe 1 .uz amar a prezenza
E dôpna pois ama prezen
Ja pois li pro ni li ualen
N\m diran mas auineuza.
IV. Qeu nai chauzit un pro e
[gen
Per cui pretz meillur e
geuza
Lart " e adreg e conoisser "
( >u es Benz e conoissenza
5 Prec li qe maia crezenz >
Ni hom voil ' poBca far cre-
/.ell
Qeu fassa vas lui faillimen
Sol non trop en lui fallenza.
Y. Amies la vostra valenza
Sabon li pro e li valen
l'er qieu vos qier de mau-
[tenen
Sius platz vostra mante-
[nenza.
249
NAIMERIC DE BELENOl
(= B. Gr. 9, 7)
I. {p. 233) Aram destreing
[amors
Tan amorazamen
Qels mais qem fai nom sen
Anz mes lafanz. douzors
5 E la humils paruenza
Eil fraucha eaptenenza
De lieis per cui ma pies
Amors ma si conqes
Qe vas on qieu estei
10 Lai on la ui la vei.
I I . Qe qant ieu venc dailliors
La gran beutat el sen
Truep doblat doblamen
]*cr qe ineu pren temors
5 Qe merces no lam venza
Mais daizo ai pleuenza
Qe anc ergueils nos mes
En tan franc luec som pes
Pero com qem guerrei
10 Amors so tais com dei.
III. Sa couinenz colors
1 c. en : sui — - /. : Cane — 3 c. en : sai — * /.
s /. : conoissen — 7 /. : noil.
l[e .'li
/. : Lare —
246 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOllOS
Eill oill clar e rizen
EU douz esgar plazen
El onrada valors
5 Mes tant e souinenza
Per qe totz iornz magenza
Qe mos leials cors mes
Mirails de totz sos bes
Qe eant aillors cortei
10 Pensant ab lieis dompnei.
IV. Tant es granz sa ricors
Qieu n5 laus far paruen
Com là forsadamen
Qieu non aten socors
5 Mais de sa conoisenza
Qieu lam ab tal temcnza
Qesgardar non laus ges
Qelam veia. ni res
Qe tant garda ves mei
10 En lesgart me recrei.
V. Pos aissim venz temors
La bella cui mi ren
Naia bon chauzimen
Qel mon non es dolors
5 Mastruep. longatenedenza1
Per qieu fas tal sufrenza
Qe si nom val merces
Ab leis e bona fes
Paor ai qe desrei
10 E car o die folei.
Nil per para 3 ges no fai
[esfort grant
Pero non die qazautimenz *
[non sia
5 Qi als granz obs son amie
faconia
Soin parria esfors e benes-
[tanza
E séria complida lamis-
[tanza.
II. (p. 234) Per vos domnaqem
[promesest o die
Vostre socors ab amoros
[semblâz
Qieu mestaua suau e senz
[afanz
Aram auetzem fe et emparia
5 Emblat mon cor e sufretz
[qieu maucia
Dun douz dezir plen de des-
[mesuranza
Dont a mes iorns non par-
[trai mesper;tnz;i.
III. En vos si5 mes e de mi si
[partie
Qan vos traisses las blan-
[chas mas dels ganz
E remas lai mos cors, dom-
[nenG liam
Ries e ioios en vostra se-
250
NAIMERIC DE BELENOI
(= B. Gr. 9, 8)
1. Cel qi promet a son coral
[amie
Son seruizi cant lo ue ben
[amant2
[gmoi la
5 E qar de vos non si part
[nueig ni dia
Jeu muer dire edenueie des-
[peranza
Car ses mi es en tan grau
[benanaza.
IV. Lo brausresposdomna mes-
[paoric
1 l. : longa tendenza.
1 l. : benanant — '■'• c. <:u : paia - * / : qe chausimenz * c. en: li —
a : domuen
I.K CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
? J7
Q te mi fezcs après dun bel
[semblanz
Per qieu nom part de vos
[nins vein deuanz
Qen pensansai ab vos. esieu
[vesia
5 Vostre bel cors demueia '
[mauciria
Pero mais voil lai morirsenz
[doptanza
Qe viure sai en tan grieu
[malananza.
V. Lo bel semblant amoros aut
re lie
El douz esgart el francs
digtz ben estauz
De uos per qieu met autre
[en son m/.
En dreit dama* salua lui-
[compagnia
ô An dinz mos oils. per meig
[fâcha lur via
Don man emblat lo sen e la
[membranza
l'or qieu non viu ab ioi mas
[per semblanza.
251
NALMERIC DE BELEUOI
( = B. Gr. 0, 18)
1. Pos le gais temps de pas-
[cor
Ivmouellae ve
Vestitz de fueill e de flor
Chan tarai de se
5 Catressi ses mos pensât/.
De fin ioi renouellatz
Car mi sobranciers volers
A cui nom platz vils pla-
zera
A trobat a sou talen
lu Domna de cor e de i a
Erguillosa ; hurail
De captenenza gentil.
11. Amar mi fai ad honor
Mos ries cors anc se
Sen/. blasme e sen/. follor
Dautrui e de me
5 Cane nom abeillitz beutatz
Ni paratges. ni rictatz
Si noi fo sen/, e sabers
Qi san '' far e dir plazers
E gardar de faillimen
10 Domne cel qa lui saten
E ai cor tan seignoril
Qaz autra amor nom apil.
III. (p. 235) Mais qui vol den-
[tendedor
Proar saraa be
Gart son sen e sa ricor
Ni con si chapte
5 Qe ses ben enamoratz
I.i faig eil dig el solatz
Seran plus rie qel deuers
Camors non es mal 5 pla-
cera
E tuit bel captenemen
10 Mot von clamar ° leialmen
M us ieu non truep antre
[mil
Un qi en sos faigtz non
[guil.
IV, Qi vol apenre dam r
Amar li coue
Qe ia per enseigniador
Non apenra re
5 Qe fin amors so sapehatz
Non es als mas volûtatz
1 /: denueia — 2 /. : damar.
3 /. : E. e — 4 1. : fan — s c. en : ma* — ,; Mouon dam n
?-! ?
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
Caduz inz el cor vezers
On la reten bels plazers
E via de dous pensamenz
10 Per cui qû am c retea
Ea aut luec o en sotil
Vesqez a rie cor o vil.
V. Mas tan a fiaa valor
Cella qem mante
Qe non cre lauzenjador
Ni fais ditz zo cre
5 Qel sieus genz cors1 pre-
[zatz
Complitz de totas beutatz
Conois menzonias e vers
Per qe nom tem fais j.la-
[zers
Cab son. soâna e pren
1(1 E iuia tan leialmen
Qe palais ten per cortil
Som noi fa fag agradil.
VI. Ni on [dus va u qeren
Terra ni baron ni gen
Tait autre fa et mi son vil
Tant son li vostr^ gentil.
252
NAIMERIC DE BELEUOI
(= B. Gr. 9, 12)
I. Merauil me com pot hom
apellar
Ainor sospir ni coials desi-
rers
Ni com pot hom de sa dolor
[chantar
Mais car nom puesc mon
[cor dire estiers
5 Jeu chan forsatz. ab alques
[dalegranza
Per zo qe tais aprenga ma
[chanzon
Qe la chante lai don nô
[parc ni non son
Ni descubrir non laus ma
malananza.
II. Tuit li cortes qi ren sabon
[damar
Lo deuon dir de gaug e
[volontiers
Qe chascuns deu en si me-
[zeus pensai*
Con es granz mal paors de
[lauzengiers
5 Qieu era ries de sola les-
[peranza
Caissi sal dieus dais non ai
[sospeizon
Ni ella cor tio lauzenier
[fellon
IVrcasseron ma mort e ma
[oranzi.
III. {p. 230) Auoir2 me fan dou-
[zamen senz cuiar
A la bella qem toltotz ale-
grers
Qe sa colors fresca el douz
[esg ir
El gais solatz sauis e pla-
[zen tiers
5 Man e mon cor bnstida. un i
]danz.i
Qem pren cant fui3 emniet
[en tal preizon
Qe issir nom puesc semortz
[ou amanz non
E la mortz es ma maie:-
[esperanza.
IV. Tant can puesc sols a una
[part estai-
1 /. : cors ries.
2 /. : Aucir — -j c. en : sui
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS 849
Me pais ab ioi mos mortals «-q-
[cou.- ii •
Q«emafagsiautrasresobli- NAIMERIC DE BELEUI
(= B. Gr. 9,9)
I . Domna flor
1 lamor
h dû vei luecs domna ni
[caualiers
5 -Mas entorn leia qem ten
[en remembranz.i Domna senz vilania
Son douz paia en sa g lia Resplandor
saizon :' '• color
Aqel pensars me plaz t»n "" tota cortez '
[em sabbon Vostramor
Qe ma dolois mo par grai /. 1<:" S0C01'
[alegrnnza. Aicel qen vos son fia
V. Pero daitan li veil merce [0 Trtl 1ePlor
clamar Ne dolor
Qe tan1 sera ab araanzdrei- Nou sen ve,"-"," mana
j, • Car de vos pies charn 3 hu-
Qem deign mo nom ab son [mana
solatz mesclar Jesuchrist qi lau e sana
Qe lais men er nonsabenz 15 Totz vostl'es amics de '"-l1
messatgiers Per confession leial.
5 Qemë faraal cor gran aie- 1L Ric ' iornal
[grau/, A *en tal
Cam^medira-daquelsolaiz Benedeita gloriosa
[confon Qanadal
K granz plazers qi bel ditz '" l?os e0"al
[perrazon Maire fillha e espoza
En dreg damor. engal dun re
[fagbalan/.i. Cor t captai
VI De nostre rei mi plagra da- in D°ne poderoza
[ragon
Qe per son «en disses doce
[de non
.-. • „ m . . Qe nois mes daqesta nid;
Ai.-si coin pretz o renier e '
Car noi trop tantes marrida
onranza. .„ r
lo Coït ni donna ni segnior
10 Un logal
Mi fait/, s il
Misericordiozn
' i
Senz trebail ni senz doli >r.
1 i. : can — - /.: Cant.
Voyez l'édition donnée par M. Ghabaneau dans la Itev. d. I. r. IV
s., t. IL p. 571 ss.. — '• Ch.i char — ' CI,.: Qui Lecture douteuse-,
en : reial— s L: Doua C/i. : misericoi
?r»0
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
III. {p. 237) Qihonoi-
Vol damor
En vos dôna entemla
Qe daillor
5 Ne ven 1 plor
Tôt ioi qe hom natenda
Eil meilhor
Fan follor
Guidon qe miels lur prenda
10 Cab sabor
Dan maior
E pert cascus sa renda
Mas la vostra amistanza
Dona ioi e alegranza
15 E tôt ire pensamen
[ ]»
IV. Ben i pren
Qui enten
En vous douse reina
Cab iauzen
5 Pensamen
Son dezirer afina
Cor e sen
E talen
Mi donatz e aizina
10 Qe viuen
Peneden
Ab vera disciplina
Dona mos pechatz fenisca
De tal guiza e delisca
15 Cal iorn derrer mi iutjatz3
Ab aicels cauran ben faitz.
V. Seignier en vos non perisca
Vostre prez e non delisca
Qe cant la mortz eis dagait
Tînt li cuidar son desfait.
254
EN BERTRAN DE LA MÂNO
(=B. Gr. 7G, 11)
I. Lo segles mes cambiatz
Trop laig don soi iratz
Qapenas sai qem dia
Qieu soil esser vezatz
5 De chant e de solatz
E de caualeria
Mesclat ab cortezia
E zo per qom valia
Era ma volontatz
10 Et en diylz et en faitz
En tôt zo qieu podia
E las domnas vezia
Cellas cui valors tria
Ab lur plazentz beutatz
15 Don era conortatz
Del rie ioi qeu nauia
E trac nen garentia
Amor qi me mouia
Del tôt mera donatz
20 Azo qe valor platz
Sil segles mo suffria
Ara tem qe blasmatz
Non fos e côdampnatz
Si ren daqo fazia.
II. Ara me sui viratz
Totz enics e forsatz
En zo qe non plaz mia
Car mi couen de plaitz
5 Pensar e dauoeatz
En far lihels tôt dia
E pois esgar la uia
Simils4 corrieus vêria
Qi men ven da totz latz
10 Polsos et escursatz5
1 l.: Deven? (67/. \ — - C/t. : E foi de paubre manen — s Ch.: jugatz
(impos ible pour la syntaxe comme pour la rime).
'•/. ; Si nuls — 5 /. : escuisatz
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
?:»l
Qe li cortz lo menui.i
E si me dit/, [follia
Blasmar non lauzaria
Anz me ditz totz] priuatz
15 Qen cor! es demandatz
El pena Bescriula
Qom nous perdonaria
&''S ' iorns en vos failli t
Segnor ar esgardatz
20 (p. 23S) A qe ieu 8ui
Si. mi sui ben a la lia [natz
qam aitan lo glatz
Qom faz las flors delà pr
Qar non sai on me sia.
III. Baron a dieu siatz
Qar nom qe viu forsatz
Trai piegz qe si muria
Al rei castellan plat/.
5 Qea sobre totz prezatz
Qieu tenga lai nia via.
IV. Qen lui mer restaura tz
Jois e ehanz e solatz
Qallors non reuenria.
255*
EN BERTRAN DE LA
MANNO
(=B. Gr. 7o\ 21)
1. Unacliauzonduneia2ai telan
Qieu la fassa ab gai sonet
[cortes
\i ges daitint. no mi for en-
i: emes
Mis foi'za men amors <>
[ma enanz > '
r> Per la bella qea tant pro
v. iléus
Qeu non laus dir '-oui m
[ab tiirn.
Per ((il «lirai chantan
malananza.
11. Lo primer Lorn qieu vi
cors prezan
Anz qem partitz denantz
| Iris mac conqes
Sa granz beutatz e si lassât •
e près
Cane pois non saup qe si foa
[benananza
."> Tant sui destreitzdangoissos
[pensamenz
Car nom mi val nierces ni
chauzimenz
E ia totz iornz dobla ma
deziranza.
III. Mas can remir son bel cors
ben istan
Nô merauill sen grant error
[ma mes
r sa beutatz [ | es 5
E sos Hz pretz. e sa gaia
[coindanza
5 Al sieu lauzar non sui eu
[pro sabenz
Mas aitals es cobs noi ha
mais ni meinz
Con hom pot meils fazonar
| per semblanza.
IV. Al sieu rie pretz no sui eu
pro liaient
Mis soin 5 valgues.per amar
[coralmenz
1 c. en : Sel.
' Voyez C édition de A/. Chabaneau dans lu Rev. d. I. r. IV s., t. II.
)>. 564 s. — 3 c en : dimeia — 3 Cit. : m'o enanza — ' Ch.: lazat — G C'A. :
Peut-être la lacune ett-elle entre beutatz et es — s/. : sim ('
852
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
Ben istera ' égal en la
| balanza.
Y. Del comte sai mo segnor
[vermen/. -'
Qe chi3 fara el chantz nû
[valra meintz
E per mo mal o '■ chantara
[en dan/a.
256
EN BERTRAN DE LA MANNO
(=B. Gr. 76, 5)
I . (j). 239) Délassai de proen-
[zam doill
Car al meu port nô passa
[ren
E car noi prenc zo qeu 3
[soill
Foi t menueia. cascus o cre
5 Mais segners faill qel sen G
[descor
E qant pot ben aue?- lur 7
[cor
E bon amor de tôt son co-
[munal8
Qel mils 9 trazaurs a senor
[tan no val.
II. La sal an mes a tan gran for
Per qeu tem fort e tem ancor
Qel prouerbis qes tau diz
[torn en mal
Condugz ab caru totz es
[perdutz per10 sal.
III. Qi aital ortolan acueill
Paor deu auer per ma fe
Qe uoil fai'ia mal eu loi 1 1
Ren qel ait de beu en torn
[se
5 Mas cre qel o fai per de-
[mor
Car tal cet", ccuuauz part12
[son tezor
E nous cuides qel o fassa
[per mal
Car a totz part son auer
[per égal.
IV. En bonafaci a rie cor
E non es ges cassatz el cor
Qe donals seus e los garda
[de mal
Per qe li son trastuit bon e
[liai.
V. Sil 13 qesa comparatz a troill
[Nos tenon sai estrec14 lo fre
E] nos teuon lo cap el soil
E noi troban 15 nulla merce
5 Mas non es senblanz ges
[encor
Qe gérez 10 sos enemics
[for
De sa terra on li fazion mal
Els francs baros degra17 far
[atretal.
VI. De la sal non an ges per lor
Anz li son tuit li autre for
Qe uô nau trait ensems un
[pieu grazal
1 Ch. : iflera (7. : istera) — 2 Ch. : ver[a]menz —H.: si ? (Ch.) — * l. : per
m'amo[r] lo?(C/(.).
' Voyez l'édition de M. Chabaneau I. c. p. ~><)~> s. — 5 Cli- : que [eu
- e Ch. : seu[s] - 7 Ch. : lux, 1. : lur — « Ch. : cumunal - ■' l. : Que (l)
nuls [Ch.) — 10 L : sens !{Ch.). Comparez: Bacons mal salez en charnier
empire Prov. au vilain p. p. .1. Toblerl'Sd, 7 — " c. en: iet— ,2 /. : per?
[Ch.) - "s Ch. : Sel — '* Ch. : estrel — '■' Ch. : trobam — 'G Ch. : getes
— - 17 Ch. : degran
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS 2:>X
Don prouerbis e pesatges
[pauc
VII. Qui1 mal semena malcoill
E qi mal penza mais li ve
E qi mal mi fai mal li voill
E prec deu 2 qe de mal
[lestre
5 Don daisso malegren 3 de-
| mor
E nai gran plazer .e mou
[cor
Qe ilius • non gie aueniar
[ben ni mal
Ter qen seran tuit venje tal
e tal.
VIII. (p. 240) Fines baros viz:i
[eus metetz ° for
Deseoratze noi ontassescor
E membre vos de', cor 7 de
[la sal
Si non iamais non seretz
ienzal.
257 *
PEIRE MILON
(= B. Gr. 349, 6)
I. Pois qe dal cor mauen farai
[chanzos
E [iois qeu vei espandre flor
[de nouel
E pois qeu \i alegrar li auzel
Qi van chantan sus larbre
[qe follios
5 E pois qeu vei lun del au-
tres iauzir
Ben [iiiesc auer | ensament
msir
Car anc un iorn. no fui ioioa
[ damar
Ni ia per mal damor non
pose estrair.
II. Domna en vos trobei. tais
[guierdos
Com t'a :il lop 1" chabrols e
lagnel
Qant enver lui ill coi en senz
[reuel
E laissam star las fedas els
[moulos
5 Aissi domna al pjv'm al mieu
all.ii'
Per la meiller ou8 vos cui-
dai chauzir
Mas iogador. ai vist souen
[iogar
Qe geta fal e si cuia en-
[trar.
111. Lai9 ma donat vostre cors
[orgoillos
Tota 10 daissi lira el capdel
H fassa mi sius plaz un
[semblan bel
E ia poissas non sera tai-
nos n
5 Merauill me car am tant ni
[dezir
Qe per merces no vol un
[prec auzir
E ia ar 12 merces lo sogner.
[deus dun lair
Qi en la crois li saup merce
clamar.
« Ch. I. : Ccl qui? — « Ch. ; don ( /. : dieu)— 3 Ch. : malogren : /. : mal
vu {Ch.) — 4 c.en:drus — 5: /. : vos(C/i.) c ''/>. : metes — ' Ch.: cor[e].
' Voyez l'édition de M. Appel d'après les »?.«. I a dans la Rev. <l. I. r.
IV .-.-. /. IX p. 193 ss. — 8 /. : meillor eu — '' Aj>pel : Hai — '0 c. en:
Tola — " A. : lainor — '* c. en : ac
2Ô4
LE CHANSONNIER DE BERNAUT ARIOKOS
IV. Las qo farai morrai tau
[cossiros
De ' qeu non puesc de leis
auer apel
E «oui H soi cascun iorn
[plus fizel
Eu mais la trop vas mi plus
[airos
5 E cant la veg encontra mi
[venir
Eu vauc vas leis tan ioios
[per seruir
Donc se capten escura del
[iogar
Mas ia vi far après scur
[temps ben clar.
V. A ra soi eu en carcer tenebros
Sa par no ui en mur ni en
[castel
Qe eu non puesc trobar clan
[ni martel
Qem puesca trar de leis
[mans deLleos
5 E pois merces qe~a claus
[de lubrir
{p. 241) Eu non la trop soi
[vencutz sens mentir
Ni ia per.zo nom recreirai
[damar
Qieu vi ia hom qera vencutz
[sobrar.
VI. Ai mala res dieus vos lais
[repentir
Del malqemfaitz.donmaues
[fait fiorir 2
Caissi com pert [tôt aiga
douz e mar
Son non sil pert] en vos
[amors son par.
258*
PEIRE MILON
(=B. Gr.349,7)
1 . Quant on troba dos bos com-
[batedors
Dengal proeza e dengal gar-
[nimen
E luns non pot plus de lau-
[tre nien
Donc me sembla qel locs
[fora maiors
5 E sil son dos sobra a un
[som par
Qi se combat qant qel pot
[pois merces
Sel lor clama, da blasmar
[non es ges
Nom merauil. sel sol non pot
[durar.
II. E pois qel dos qes del venzer
[segnor
Non an del sol merces ni
[chauzimen
Adouc sen fan blasmar de
[tota gen
E lor afar torna a deshonor
5 E sim 3 autre vengues sol
[aiudar
E venqes. son pois los dos
[semblant mes
Qe tota g'entz iutjera granz
[bes es
E da chascun il se feiran
[lauzar.
111. A vos merces complaing eu
[mas dolors
1 '■. en : Oc — 2 c. en: florir.
* Voyez l'édition de M. Appel d'après les Mas. I a dans la Rev. d. I. r.
IV s. , /. IX, p.Vi'i ss. — a Appel : s'un
LE CHANSONNIER 1)
Qe no mon pot aiudar om
[viuen
Qieu soi lo sols qis combat
[escien
Encontra dos ma domna et
[amors
5 E ia nom val merces tôt
[iorn clamai-
Or maiudatz. si vos platz
[gentils res
Qe chascuns hom grazitz
[los bes
Pos qe nom val ni ben dir
[ni ben far.
IV. E sieu pogues. eu fugira
[ai Hors
Mas lus dels dos menchauza
|em repren
Qi cor plus tost cauzel qi va
[volen
Estiermon gratmi fa tornar
[val ors
5 [E sa mei'ces plagues de
secors dar
Non o] pot far se il tôt o
[volgues
Qe ma donna nol vol q«€
[ma conqes
Anz vol qeu moir en lais
[désespérai*.
V. Ara pose eu tornar mon
[chant en plors
Pois qeu non puesc fugir
[qe lunz mi pren
E pois non puesc durai*, [dus
[nom defen
Pois de secors non pose
[auer valors
5 Las qe farai nom sai^.2-/2)
[acoisselar
E BERNART AMoROS 253
Se lus dels non sta vas mi
[cortes
Pois qe sos hom mi tent '
[liges e pre
Sol del peebat qelqe bem
[degra far.
VI. Ben es maluatz qis laissa
péril];
ar
Alcun caitiu saiudar li po-
[gues
Pois qen vas lei non es
[mespres
Mas sol daitan de seruir e
[donrar.
VII. Ai ma donna si vas vos mi
! valgues
Plor ni sospir ni maltrag
[qeu agues
Ja per nul temps ioi non
[eug demandai*.
259*
PEIRE MILON
(= B. Gr. 349, 9)
I . Si con lo metges fa crer
Al malaut qe crit e biai
Qan li ditz tu scanparai
E de! morir sap per uer
5 E pero sil relinquis
Enanz qeil mortz sia
Ni noi va tan can solia
Can siaproisma de la fis.
II. Aissi mi donz men promis
Em diz qe gauzenz serai
Dels mais traitz (je sufertz
[ai
Don torne mom plor en ris
1 c. en.: rent.— * Voyez l'édition de M. Appel d'après les manuscrits
N I Ka dans la Rev. d. I. r. IV s. IX, p. 198
£56
LE CHANSONNIER DE BKRNART AMOROS
5 Qeu cuiaua mom plazer
Auers senz bauzia
Ara veg qil no sufria
Dels sien- bels oils mi vezer.
III. E pero nom desesper
Ni ia nom desperarai
Ni desesperatz serai
Anz ferm en leis mon esper
5 Qe per bon esper enreqis
Paubrom mainta via
Per desesper non ac mia
Vidas tracher paradis.
IV. Dieus per qe ai mon cor mis
Lai don ia non iauzirai
l'ois qe sa promessa estrai
El non son hoc contradis
5 Peros doblal meu dolor
E ereis noit e diam
Mas som sembla gran folia
lui prometre non voler.
V. E per zo e nonchaler
Métrai el dezir qeu nai
Fols qe aidig. no farai
Qel nol vol cel qen poder
5 Ma per qeu mafortis
En sa compagnie
Qe samors tant fort me lia
Qe de tôt il ma conqis
VI. (p. 243) Eu soi cel qe nom
[geqis
Per respeig anz atendrai
Ni ia nom en recreirai
Anz serai de tôt aclis
5 Qel mont non es nul auer
Qirn des mauentia
Per qieu mais en sa bailia
Voill esser matin ' e ser.
VII. Chanzo dieus mi lai vezer
Qe tu dreita via
Anz midonz senz fallia
Far lo mieu maltrag saber.
260*
EN PEIRE MILON
(=B. Gr. 349,1)
I. Aissi mauen con cel qi sei-
[gniors dos
Seru p[er tjostemps ni nô ai
[guizerdos
E de ben far en vas loi' sa-
[fortis
E chascun iorn son plus
[contrarios
5 Ai per qel fan ia comanda
[razos
Cel qi ben fai deu ben tro-
[bar amis.
II. Ben puesc esser duna ren
[doloiros
Car anc damor no fui auen-
[ turcs
Ni de de doncs 2 e uas lor
[soi aclis
Coin en seruir met plus
[rnentencios
5 Eu mais los trop vas mi
[plus airos
Ni ro 3 faz re qe a lor abeil-
[iis.
III. Ara vei eu qe razos chai en
[ios
E qe orgoils poiarsenz faillir
[zos
Pois quel seruir del tôt si
[relinqis
' Appel : Voil e. mal
• Voyez l'édition de M. Appel d'après les manuscrits C 1 N a dans la
lier, des l. r. IV., t IX, p. 190ss. — a Appel : donas - » l. : no
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS 857
E qel befagz. es dcl tôt
' nuallios
5 Qan hom merces dernandon
[senz chaizos
R perdon qer daisso qe nom
faillis.
IV. Pois qe nom val merces
dreigz ni razos
Seruir ben far esser fizel ni
[bos
Pauo mi valgra son fols
[nienics
Pois qaissi es qe non trop
[garizos
5 Plore BOBpir etestauc tene-
[bros
Et enaissi viurai tosc ' e
[la fiz.
V. Bem mirauill qi anc no fon
[ioios
E semprestai. marritz et an-
[goizos
Compotviure qi damor non
i > j i -s
Ni non atent ni bels digtz 2
[ni bels dos
5 Qe si ma fag la bella de cui
[sos
Senz colp de fust ma mort e
[ma conqis.
VI. (p. 244) Ai dieus qe non
[pose esser amoros
De la bella qem fai star tant
irns
Mas cant ieu veg 3 sa bocha
[e son cler vis
Ab '* cor mi tocha. una tais
[passios
5 Corn la pogaes baizar per
[fin amors
No sai qien die tan son mei
[enemis.
Vil. Chanzo Lanzac «peu no voil
| autre mis
E va ten tost ab bella de
j cui sos
E <li i-r li ben qeu moir de
lamor sos
Si eu non bais los siens
[clars oils voltit/. .
261*
EN PEIRK MILON
(= B. Gr. 349, 5)
I. Pos lunsauzels envaslautre
[satura
De lais de critz de voûtas de
[chantar
E per amor per laire5 ses
[baudeia
Eil tuiG son clar qi corren
[per valeia
5 Ben son doncs fols qen
amor nom atur
E car no soi ara gai ni 7
[chan taire
Pois caissi es eu chant e
[mesbaudei
E pois qeu vei reuerdir pose
[e prea.
II. Per vos amors chascuns
[hom se meillura
Car hom nés lares e cortes
[e 8 sap far
'c.e?î:trosc — -.1 : digz — 8 A. : eu ueg — * A.: Al.
* Voyez l'édition de M. Appel dans la Rev. cl. I. r. IV s., t. IX, p. 187
s. — ''Appel: de plaire — ■ A.: lui, c. en : riu — 7 A. : e — 8 A. : et
17
258
LE CHANSONNIER DE
Tôt chauzimen. e per vos si
[domneia
Drutz en chambra, ab sa
[domna priuea
5 Ben soi iratz car per vos
[non meillur
E car nonsaupancor1 qe fos
[a faire
Non sap qe fos domneiar ni
[domnei
Qe ma domna del tôt sen 2
[es aléa.
III. Qel iorn qela se mira non
[a cura
De negun hom qe la pogues
[amar
Ni non auzira hom qi la veia
Per qieu uolgra qel mirador
[fos spea
5 Virar3 vos puesc domna qe
[dais non cur
Ester de vos de cui sui fiz
[amaire
Cant vostre cors auinent
[gart e vei
Mi par qe deu sia en la con-
[trea.
IV. Ai franca res non siatz tant
[endura
Pois qe sabez qeu no men
[puesc strar
Cant penz de vos e non saj
[con se seia
Tôt mart del dol lo ventre e
[la corea v
5 E ia non vol razon. qe lom
[sendur
Enuer celui qi no sen pot
[estraire
BERNART AMOROS
De lei amar de seruir on si
[sei
Mas tal razo a uos nés
[agréa.
V. (p. 245) De totz bos aibz
[poia e donc peiura
Car il merees. a leis non val
[atrair
Ar qe farai. pois merees
[non lautreia
Eu atendrai daitant lai
[afieia
5 Qe meillurar vol auanz qeu
[peiur
E sil plagues. qelam degnes
[agraire
Pois qe sos om liges a li
[mautrei
Er bon 5 sorgoil en li fos
[aualea.
262*
EN PEIRE M1LON
(= B. Gr. 349, 4)
I. Per pratz vertz ni per amor
Non chant ni per bosc
[foillutz
Ni per mai ni per pascor
Ni perclars rius cai vegutz
5 Ni per chant dauzel ni critz
Ni per vergier qes floritz
Mas per las bonas del mon
Domnas comenz machanzon
Cui eu am.
II. E non sui ies recrezutz
Si tôt amor me faillitz
Qeu nô am chant e desdutz
1 .1. : ancar — 2 c. en: sou — 3 c. en : iurar — * A. : coreia — M. : ben.
* Voyez l'édition de M. Appel dans la Iiev. d. I. ?•. IV s., t. JX,
p. 185 ss.
I
LE CHANSOXXIKK DE BEHXART AMoi;oS
2 59
E qe ioi non sei grazit/.
5 Gardât/, seu agues razo
De far gauz e mession
Corn fora de gran valor
Mas damor non ai sabor
Nin iauzi.
III. Tôt iorn mi stauc sbaitz
E soi en gran sospeizo
Ni ia mon cor ner sclairit/.
Qenaissi es la saizo
5 Camic senz cor trichador
Serai e fin amador
Mas car non soi conogutz
E mes cant fatz en descutz
Ni nom cal. '
IV. Bes non pot dar garizon
Si non cel qes bellazor
Doills 2 de cor e de faizon
E per zo soi en error
5 Ben par qel mont ai perdutz
Pois :i amor non ai agutz
Don totz temps soi eccubitz
E de cel mal fui garitz
Ni i ai pro.
V. Veiatz e qe qe rieor
Nom val. ont. en esser
[drutz
Si fa e coin ' la genzor
Gardatz si fai5 al saubutz
5 Non per qe qe tant ar° ditz
Non soi. non en malditz
Non pose als ar mi respon
Es lare oc e maluatz. non
Ni vilan.
VI. (p. 246) Saissi es non ses
[vencutz
Bu nô tro caial speritz
Sofre lo dart e lescutz
Eu oc qe tant ma bailli!/. 7
5 Manda li qet fassa un don
Eu oc besenz contenzon
Qun ris te don per amor
Saizo l'a/. ,j:i s don meillor
Nom es de9 plus.
263*
EN PEIRE MILON
(= B. Gr. 349, 8)
I. Sieu anc damor sufl'erc ni
| mal ni pena
Dol ni trebail ni destric ni
[rancura
Danz ni mais traitz. per cbalt
[ni per buzerna
Ni plors ni geins 15 ni consir
[ni sospire
5 A rail grasisc los bes qe il
[me dona
Lo gaug lenanzlo déport la-
[legranza
E lo solatz del tôt el M ben-
[voillenza
Qim plai aitan. qe nom par
[qe mal seia.
II. Auiatz lo pro el be camors
[démena
Encontra cel. enuas cui il
[satura
Qe chascun iorn I2 cui mal-
[uastatz gouerna
Samor fatrai la vas lui al
[mieu albire
5 Lo rent cortes lare e pros e
[sadona
1 .t.: val— 2 Appel : d'oils — 3.1. : Pois c' — * A. : con — 5 A. : ùi —
6 c. en : ai — 7 .1. : m'abeillit/. — 8 .1. : fa — ■' <:. en: N. des.
* Voyez : C. Appel : Provenz. Inedita aus Par. Hss. p. 242 ss. — '" /. :
gems — " /. : tota — 12 /. : hoin — »3 Appel: farai; c. en : satrai
260 LE CHANSONNIER DE
Vas los valenz e val miels
[sacoindanza
Ben mil ai tan e de moutz
[bes lagenza
Cel caisso fa mi pai* camar
[se dcia.
III. Fais blasmador lamada '
[qarentena
E lo malan aiaz qe vos fal-
fzura
Si mantenetz per qe la gentz
[seferna
Lo gaug del mon cor era
[plor 2 en ire
5 Qar vos blasmatz amor qe
[tant es bona
Sol per aisso car no vos
[da samanza
E non es dreitz pos qel es
[sa voillenza
Qe non vos am ni ia non vos
[guerreia.
IV. Chascus fa ben qi sa lenga
[refréna
E qi garda razo dreitg e
[mezura
Caisso no fa degresser en
[cisterna
E degra trair pen e danz e
[martire
5 E se eu fos segner de la
[corona
Ai mal astruc qi obren sa
[musanza
E paraulas laissanar senz
[temenza
De las gautas la lenga li
[traireia.
V. [p. 247) La mercedeudamor
[soi en cadena
BERNART AMOROS
E serai o mentre ma vida
[dura
Non laisarai si tolz rni en-
[ferna
Qeu non sia sos om e sons
[seruire
5 E dei o far quar il de tal
[persona
Vol qeu aia samor e sa coin-
[danza
La genzer es de 3 lo mont
[senz tenza
Grâces li ren. qelal4 vol e
[lautreia.
264*
EN PEIRE MILO
(= B. Gr. 349, 2)
1. A vos merces voil retrair
[mon afaire
De mal damor e de sa for-
[faitura
Per merceus prec entendetz
[ma rancura
Pois qen amor me mis sui
[fînz amaire
5 Con vos mercei merceian
[humilmen
Lafan damor el dan tôt eis-
[samen
Ni per merces il nom vol
[dar guirenza
Anz vol amors qeu moira
[ab suffrenza.
II. Per vos merces qi es tant
[debonaire
Nom vole amors far ten 5 qe
[fos mezura
1 /.: la mala — * l. : torn en p. e — 3 L: de lot — * A. : qc tal.
1 Voyez : G. Appel Prov. Ined. p. 239 ss. — 3 c. en : ren
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS 2G1
Sa vos plagues merces [ar V. Auc ab mos oils non vi 611a
ben dreitura [de maire '
Blasmatz amor e si es con- Qi de son cor volgues star
traire [tant endura
5 Senz vos merces] non es Sil oil gardon vas Ici fi/ e
[nuls hom viuen [mezina-
Carnor de dieu pose auer ni Mal mieu cor fiz aleis degra
[de gen [atraire
Ara mostratz merces vostra 5 Car per los oils se mes en
[vailleDza [aital ren
Encontramor non laissetz Qi en son cor non a merces
[per temenza. [nien
III. E si merces no fos al mieu Nil seu bel oil non curan
[veiaire [de tenza
Lamor de dieu non cre qa- p^i non curan del meu cors
[gués cura [per crezenza.
De negun hom qe ves mer- yi. [p. 248) Els sieus bels oils
[ces sendura [qin fan dun don donaire
Pero amors aiaz talan da- Aguessen cor de far ben
[traire [senz falsura
5 A vos merces e fares chau- us garderan meus oils et er
[zimen [dreitura
Car senes leis amors es q&\ prim esgart tôt el meu
[dengan pieu [corn esclaire 3
Aiatz merces merces a soui- 5 e daitan prec il sieus clars
nenza [oilz rien
E vos amors voillatz qe Qe aian C0I- de far mun ris
[merceus venza. [plasen
I V. [ E sil mei oil vezen tal cap-
[tenenza
] Ren sai mos cors iauzira
E pois mei oill gardar al [senz fallenza.
[sieu repaire y\\ p>ena domna aias damor
5 Ben degrals oils voler mal [talen
[senz conten e venza vos merces per tal
Qi al mieu «or fan dolor tan [couen
[souen Car mei oil fan voluntiers
Qeu sai camors dais oils [mantenenza
[primers comenza Enmoncoraitotamaconois-
Per qe mos cors en fa la Tsenza.
[penedenza.
1 Appel : da maire (/. : de maire) — 2 A. : mesura — s A. : cor m'e.
26 2 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOHOS
265
[ RAIMON JORDAN VESCOMS
DE SAINT ANTONI ]
{= B. Gr. 404, 11)
I. Vas vos soplei domna pri-
[meiramen
Per cui eu chant e cornerez
[ma chanzo
E sa uos platz entendetz ma
[razo
Qestiers nous aus descubrir
[mon talan
5 Aissi maue qan vei vostras
[faizos
La lengamfaill.el cornai te-
[neros *
Car qi non tem non ama
[coralmen
Per quieu ting car lo vostre
[segnoratge.
II . Bella domna merce trau per
[guiren
E pos merces nom vol dar
[garizon
Per merceus prec qe mer-
[ces venzal no
Ni ja daizo nom veires re-
[crezen
5 Anz clamarai tant merce a
[rescos
Tro qe merces tenga mos
[bratz ambdos
Entrels vostres e fora chau-
[zimen
Car nô er menz de certa.ii
[homenatge.
III. E seu follei ben lo fatz
[escien
Sabetz perqe car mi platz
[emsapbo
E dirai vos per cal enten-
[cion
Ben esperan.ven hom asal-
[uamen
5 E sim faitz ben molt en serai
[ioios
E sim faitz mal sufrirail per
[auzos
Grazirai lo ben el mal eis-
[samen
Aissi farai lo conort del
Tsaluatge.
IV. Eu vos ai dat per fe e leial-
[ment
Lo cor el cors don vos faitz
[tenezo
E platz mi molt quieu sai
[qe vostrom so
Us bos espers - de vos iau-
[zen
5 Qem bos segnor non perd om
[guizardos
Qui ben lo serf qeu vi main-
[tas sazos
Paubrenrequir per bon en-
[tendimen
Per qieu en voil ben afortir
[mon coratge.
V. Eu conoisc ben qieu faz
[gran ardimen
Qant ieu damar vos prec e
[nous sap bo
E non e puesc toler ma sos-
[peizon
Anz mo sai ben qi en 3 tre-
[baill per men ;
5 Tant es valentz vostre cors
[orgoillos
l. : temoros — 2 /. : e. mi ten — 3 /. : qen — 4 /. : nien
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS ?63
266
E tant puiatz. som penz de
[sobrels bos
Qieu men cossir. desmai e
[despauen
Tan sui cochos qieu mo tenc
[afolatge.
VI. {p. 249) Tant ai assis mou
[dezir finainen
En vostr amor don ia dieus
[ben nom do
Sieu mais nous am seruir
[tôt em perdo
Qe de uuill autr auer. mon
[mandamew
5 Ab tan grau gaug satrai mos
[cors vas vos
Qieu pos vos vi non fui dais
[poderos
Tan en sui enueios l del
[vostre cors gen
Qaqi mezeus remanc el vos-
[tre estatge
Vil. Garin ben sai chauzir. fe qe
[deg vos
En la genzor. e tu vail dire -
[chanzos
A la meillor. et a la plus
[valen
Quautra del mon non am de
[bon coratge.
VIII. Cbanzoneta [uai ten tost] a
[ma domna3
E portail mon rnessatge.
IX. E digasiqedepaubremanen
Serai totz temps el sieu rie
[segnioratge.
LO UESCOMS DE SAINT
ANTONI RAIMON JORDAN
( = R. Gr. 404, 2)
I. Ben es cambiatz ara mos
[pessamenz
E la turs fraigz don mi cuiei
[tener
Qe non ânes mai ma dôna
[vezer
Qabaital gieing. mi cuidaua
[défendre
5 Mas ara sai si merces no
[lan uentz
Qa mon dezir dei demandai'
[ma mort
Qaissi men prez qan de lui
[mi parti
Qan men auenc per sa terra
[passar
Qancnomsaubi de leis vezer
[gardar.
II . Mas re no sai si ses enchan-
[tamenz
Qe qan la uei de mi non ai
[poder
Qamors lam fai tant blan-
[dir. e tem 5
Qe nés mos precs nô lauze
[far entendre
5 Mas ill es tant aprez e
[conoissenz
Qe sap triar damor los bes
[els tortz
E de me sap qe de mas 6
[anc la vi
Nom venc en cor dautra
[douma preiar
1 l. : T. enueios sui — 2 /. : ,\{v _ 3 /. : a ma fj vaj ten _ 4 /. : E
digas li. 5 l. : temer — 6 /. : pois
264 LE CHANSONNIER DE
Ni nuls ' mal traigz no Ion 2
[fes oblidar.
III. Tantas penas nai suffertas
[cozentz
Per que douz gaugz men
[deuri eschazer
Pero ben sai no lam chai
[plus temer
Qe se merces ia deu en leis
[descëdre
5 Ben es sazose vaillamchau-
[zimenz
Bona donna qem detz ioi e
[déport
Si qe lesglai si parton tuit
[de me
Qar ben podetz las perdas
[emendar
Sein retenetz a vostre benes-
[tar.
IV. Car de las très meillors es
[plus plazenz
Per qe nô part de vos mon
[bô esper
Mas tantdorgoil faitz contra
[me parer
Perqieu volgra vostrabeu-
[tatz fos mendre
5 E si voil far tant vostres
[mandamentz
Qe cbascun iorn clam dieu
[e prec m oit fort
Qeus met en cor quem fas-
[satz bona fe
Cab vos guerrei a cui no
[maus tornar
Ni sai fugir ni puesc pion
[echauzar.
V. (p. 250) Ara son tant dôna
[vas vos tementz
BERVAHT AMOROS
Qe ses bon guit nous auz
[anar vezer
Tal paor hai qem voillatz
[dechazer
Mas tôt en artz ne cug bon
[segur pendre
5 E san iohan deu men esser
[guirentz
Qe dun bel dig ai trag tam
[belconort
Mas de près 3 soi sel disses
[enaissi
Qon ieu deman e irai o
[proar.
E vos digatz nel ver se deus
VI. Ja de preiar no serai recre-
j^zentz
Tro qe merces vos fassa
[dire ver
Et ora mais merce deuetz
[auer
Forze merces lorgoillos cor
[daprendre
5 Se nô ieu hai la mort entre
las dentz
Sera merces nom adutz a
bon port
E samic ai de preiar nos
thai
Car qi merce pot a vos aca-
[bar
Nom pot estiers mai tant
bon gazaignar.
VII. A ma domna fai ma razon
[entendre
Chanzoneta e pois vai e no
[len
A mon dezir. qe pens de mon
[conort
' c. en : mils — - c. en : lan — y- l. : doptos.
LE CIIANSOXNILU DE BKRNAKT AMOKOS 265
[ •••
Tôt enaissi con sap qes
[taing afar
5 Els compagnos sapchas mi
[saludar.
267
LO UBSCOMS
DE SAINT ANTON I
(=B. Gr. 404,6)
I. Per qal forfag o per qal
[faillimen
Qeu anc fezes encontra vos
imors
Mi destregnes nim tenetz
[enneios
Per la bella qe mos precs
[non enten
5 Truep demostratz e mi vos-
[tre [lod.'i-
E qi veneut ventz fai pauc
[desfors '
Si venqesses leis qe nous
[tem nius blan
A.donc sai ieu. qe nagratz
[honor gran.
II. Ben euiaua laissai* al es-
[cien
Que nô camies2 mais de
j vostras lauzors
Ni que iamais non reclames
[per vos
Qarmeratz tan de mal acuil-
\unen
5 Mas aissom toi donal sen
[el saber
Ca tota gen aug dire ad
[effros:i
Qel vostre pretz vai lo meil-
[lor sobran
Qe mal parliers nous en
pot tener dan.
III. E qar sabetz dona certana-
[men
Que dantramors nom ven
gaugz ni paors
Perpensatz vos sius pot
[esser nuls pros
Sim faîtz mûrir, ad aitan
[grieu turmen
5 Ben conossetz si no co faitz
[parer
Qil siens destrui qe non fai
[grant effors
Vostre sui ieu aissi ses tôt
[enian
Qe sien ren pert vos prenetz
[tôt lo dan.
IV. [p. 251) Car ieu vos am tân
[desegadamen
Cun pietz mi faitz la peu
[e la dolors
Adoncs aflam e sui plus
[cobeitos
5 De vostre amor e nai mai
[de talen
E non temetz domna pe-
[chat auer
Donc fez anc mais nuls hom
[tan grant effors
Com ieu car ai ses mort
[sufert aitan
Lo mal respos el orgoillos
[semblan.
V. La granz beutatz qe Bobrau-
[tras perpren
E lavostra flna fresca color
1 /. : ventz nn f. erran e. — - / : cantes — ■'■ I. : effors
266 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
El genz parlars eil bel oill
[amoros
Mi far ' estar domna e mar-
[rimen
5 Qar ieu non sai sim volretz
[retener
En aisso es sim métrai en
[effors
Hoc si voz platz lot al vostre
[coman
Mas tant o voill per qieu i
[vau doptan.
VI. Qan mi membra qe sol nai
[pensamen
Qe iam pogues venir tan
[gras honors
Ai tan gran gaug qen folei a
[sasos
Qel gaugz qeu nai mi ca-
[mia tôt lo sen
5 Donc qen dizetz. sen sabia
[lo uer
Sem metria de gaug en grant
[effors
Car ai tal gaug car 2 sol ne
[vau pensan
Cane mos ioios3 non conqes
[de ioi tan.
VII. Garin qe faitz car non la-
[natz vezer
Qe renon sap a qwes met eu
[effors
Qi non la ue o non lestai
[deuan
Tan auinen sap far son beu
[istan.
VIII. Chanzos vai ten e digas li
deuan
Qe sa leis platz qe taprenda
e chan.
Finis coronat opus.
Jacopo Teissierde Tharascone.
[268 (ca 127)]
PEIRE BREUMON
(= B. Gr. 331,1)
I. En abiil qan uei uerdeiar
Lo pratz uerç eluerçei"lflo-
[rir
E ui 5 las aiguas esclarir
Et aug los ausels allegrar 6
5 Lolors dun erba floiria
El dolç ebant qe lausel cria
Mi fan mon iois renouelar.
11. En qel7 temps soli eu pen-
Fsar
L
Corn sim 8 pogues damor
[iausir
Ab caualcar & ab guarnir 9
Ab gent seruir & ab donar
5 Cui aqes ,0 mesters auiia
Perço es amor seruia"
E pol on 12 hom meils cô-
[quistar.
III. Molt me sap gent lo cor
[emblar
Cam près con ia dei sa13
[uenir
Greus er mais iorn qeus nô
[sospir
Per un bel semblan qe il ui
[far
5 Qar ellam dis totas maria 14
1 /. : fan — 2 /. : can — 3 /. : a mos iorns.
L. S.: 4 uergiers — 3 uei — 6 demorar — ' qest— 8 Con eu — 9 burdir
- '° Qi aitals — » iauzia — >2 pol tan — >3 pris comnhat de sai —
'4 marria
LE CHANSONNIER DE
Qe fara la uostra amia
Bels ami cosim pois ' Iais-
[sar.
IV.2 Per ço non dei desesperar
Qanqera mi <lon non remir
Qar celui qim ta fei çequir
Lam pot far ben cobrar
5 E seu son en sa bailia
Era mais torn en suria
•li dcus no men lais mais
[torn a r.
V. Molt son de dieus merauil-
[har
Com sim poic do mi don - >-
[frir
E degral molt a grat tenir
Qar anc per lui la pois lais-
sar
5 Qil sa ben seu la peidia
Qe iamais iois dô auria
Ni hom oolapoira mendar.
VI. Chançon tu irai oltra mar
Fe qem dei uam 3 a mi à m
dir
Qa greus afan & a martir •
Me fai la noiç el iornesl
5 A guigelme daitam pria °
Bona domna chançon qel te
dia >
E uama mi don conortar. 8
BEl'.XAKT AMOROS
267
Vil. (83 r°) Qe filippe de mon
re al
Me ton pros en sa bailia
El ani tan sa compagnia
Qe sons lui no men pi
[tornar.
Su i cent aa /'. î-15r°: Ledonatz
proensals (v. éd. stengel,p. 1-39),
f. l.~> v°-28 v° : Las rasos de tro-
barde R. Vidal (v. in., p. 07-87),
/'. 29-33 une seconde copie de
la notice préliminaire de Bernart
Amoros etdesbiographiesde Gui-
raut de Rorneil, Arnaut Daniel,
Folquet de Marsilia, Peire Vidal,
Gaucelm Faidit, Peirol, Gausbert
de Poicibot et Pons de Capdueil
(r. ci-devant), j>uis /'. 34-38 r°
les biographies ci-dessous impri-
mes :
Gui duissel si fo de lemozi. gen-
tils castellanz et el e sei fraire e
soscosinsnelias eron segnor duis-
sel qe es uns ries castels e li «lui
sei fraire auia nom luns neble el
autre peire. El cozis auia nom
elias e tuit quatre eran trobador c
trobauan bonas chanzos. Gui tro-
i amies cui uoles — iL.S.non hà lu tre stanze contrassegnate (IV, V,
VII), ma ha di più questa:
Eu chant qi deuria plorar
Dira damor qem l'ai languir.
Tan mi remembron li sospir
Qem fai la noit elinni pena
5 Mais damor caissi languia
Qi nom laissa n ii1 ni dia
Qel iorn mi l'an eent uelz tremblar.
3 Adonc e uai — 4 Qabchantar mi dei esbaudir — » E anc non mai auz i
parlar — 6 Gom chantans qi plorar deuria — 7 Pero nom desi onorl mia
— 8 Qancar aurai loc de chaie
2 68 LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
baua bonas chanzos en elias bo-
nas teuzos e peire descaataua tôt
qan li trei trobauan. En gui si era
canorgues de bruide de monferrat
e si sen tende t longa sazos en na
malgarida dalbusson qera mailler
den rainait lo uesconte dalbusson
et en la comtessa de monferrat
don fes maintas bonas chanzos
mas lo legatz del papa li fes iu-
rar qe mais non fezes chanzos e
per lui laisset lo trobar el chan-
tar.
Gnillems de sainl leidier si fo
us ries castellans de uelaic del
euescat del poi sa«ta maria e fon
ornatz hom bons caualliers dar-
mas e lares donaire dauer e molt
enseignât (34 b) e molt cortes e
molt fiz amaire e molt era amatz
e grazitz et entendet en la mar-
qeza de polomiac qera serors del
dalfin daluergne e de nasail de
claustra e moillier del vesconte
de polomiac. Enguillems de saint
leidier si fazia ssas chanzos délia
e lamaua per arnor e disia li ber-
tran. e a nugo marescalc dizia
altressi bertran qe era sos com-
paign e sabia totzlos faitz els deitz
den guillem e de la marqeza e
tuit trei se clamauan bertrant lus
lautre.moltauien grant alegranza
ensemble tuig trei mas an Guil-
lem de saint leidier tornet en
grant tristeza qeil diu (l. : dui)
bertrant feiren grant fellonia de
lui.
En raimonz de mimnalsï fo uns
paubres caualers de carcases qe
non auia mas la qarta part del
castelde miraual et enaqel castel
non estauon LX homes mas per
lo seu bel trobar e \>er lo seu bel
dire, e qar el saup plus damor
e de dopnei e de totz los faitz aui-
nenz e de totz los ditz plaizenz qe
corren (f. 35 r° ) entremadors et
amairitz si fo molt honoiatz e
tengutz en car per lo conte de
toloza qel clamaua auderartz et
el lui. el coms li daua los cauals
e las armas els draps qe bezoig
li auian et era segner de lui e de
son aberc. e segner del rei peire
daragon e del uesconte de beders
e den bertran de faissac et de totz
los granz baros daqwella encon-
trada e non era nulla granz ualens
dôna en totz aqellas encontradas
qe nô dezires e non se pênes qel
entendes en ella. o qe li uolgues
ben per domestegessa. car el las
sabia plus onrar e fai grazir qe
nuls autron per qe neguna non
crezia estie prezada sel non fos
sos amies raimonz de miraual e
maintas dompnas entendet e fes
maintas bonas chanzos e no crezat
mais qel de neguna agues ben
en dreit damor. e totas lengane-
rent.
Raem haut-, de uacheiras si fo fils
dun paubre chaualier de proenza
del castel de uacheiras (f. 35 v°)
qauia nom peioebs qwera tengutz
per matz. en raembautz si se fes
ioglars et estet longa sazo corn lo
princep daurenga sil fes gran ben
e gran honcr el nauset el fez
conoisser e prezar a la bona gent
e uene sen a monferrat a mes lo
LE CHANSONNIER D
marqcs bonifaci et cstet en sa
cortz lonc temps e crée si de sen
e darnes e de trobar et enamora
sedelaseror del marques que auia
nom madonnabeatris q«e moillier
demie del corret. e troba de leis
maintas bonas chanzoseapellaua
la en sas chanzos mos bels
caualliera. e fo crezut q?/ella li
uulgties gran b<>n per amor. E
qant lo marques passeten roma-
nia el lo mena ab se e fes lo
cauallier e det li grant terra e
grau renda el resqisme de salamc
e lai el morie.
Nue brunec si fo de la ciutat de
rodes qes de la segnoria del
conte de tolosa e fo clergues et
emparet ben letras e de trobar. e
de sen natural. e fes se iuglar e
trobet bonas (/. <?6 r°) canzos mas
non fetz sos. e briget con lo rei
daragon. et con lo comte de
tolosa. e con lo comte de rodes lo
seu segnhorecon bernât danduza
et con lo dalfin dauerngne. et
entendet en una bergera dorliac
qe auia nom madruâ galiana. mas
ellanol uolc amar ni ritenir ni far
con lui uegun plaizer damor. e fetz
son drut lo comte de rodes e det
comniat an nue brunec. e nue
brunec per la dolor qel nac se
rendet en lorde chartossa ellai el
defina.
Gallium de montanghagnnut si
fo uns cauallers de proenza. e fon
bon trobador. e grant amador. e
entendia se e madona iauseranda
del castel de lunel. e fes per leis
maintas bonas chauzos.
E BERNART AMOROS 269
So7-<îcln fo de mantouana dun
castel qe uen apelat got gênais
catani [l. : gentils catanis) e fon
auinenz hom de la persona e fo
bon trobador. mas moltfon truâz
efals.de las dOnas edels(/'. 36v{
baros ab cui el estaua. et enten-
dia se e ma donna cunisa sor de
mesier eDgelin e de messeralbric
de roman quera moillier del comte
de saint bonifaci ab cui el estaua
e [ter la uoloutat de messeren-
gelim el emblet ma dona cunisa
e mana la uia e pauc après el
sen anet e no nedes (l. : en cene-
des) a un castel de qels destrus
de ser enric e de ser en guillem
e den ual pertiti qeran mot sei
unie et espozet una sa seror cela-
damenz qe auia nom ota e nenc
(l. : venc) sen pueis a treuis. e
qant aqel destrais lo saup. si li
uolian ofendre de la persona e los
amies del comte de saint bonifaci
l'Ks.imen don el estaua per la
terra si caualcaua en diestriers
ab grant compaignha de eaual-
liers. don per temoi-s daqels qeil
uolian ofendre el se partie et ana
en proenza. et estet ab lo comte
de proenza et amaua una donna
de proenza moût fort e lapelaua
dolz enemia. per cui el fez main-
tas bonas chanzos.
/'h lanfran c'igala si fon de
genoa gentils hom (/. 37 r°)e sauis
e fou iutges e caualiers mas uida
de iutie monaua. et era granz
amadors et entendia se en trobar
e fon bon trobador. e fes maintas
bonas chanzos e troba uoluntiers
de dieu.
270
LE CHANSONNIER DE 13ERNART AMOROS
En blachassete fon fils den bla-
chatz qe fon lo meillor gentils
hom de proenza el plus ornatz
baros el plus adret tz el plus lares
el plus cortes el plus grazios et el
fon ben adrecamen sos fils en
totz ualois et en totz bontatz .et en
totas larguessa. e fon grant ama-
dor et entendia se en trobar. e
fon bon trobador e fes maintas
bonas chanzos.
Perdigox si fo ioglars e saup
trobar e uiolar truep be e fo del
uescat de iaualda dun castel qe a
nom lesperon. e fon fils dun pau-
bre home qe era peseaire et per
so sen e per trobar poiet en gran
pretz et en grant honor qel dalfiz
daluergne lo tenc per son caua-
lier el uesti el arma ab se lonc
temps, eil det terra e renda. e
tint [l. : tuit) li princep eil gran
baron li fazian trop grant honor.
e de granz bonas auenturas ae
uengron li las malas quel perdet
los amies e las amigas el pretz e
lonor e lauer et enaissi si rendet
en lorde de sistel e lai el moric.
Arnautz de merueil ' si fo del
uescat de peirargos dun castel qe
auia nom meroil e fon clergues
de paubra generacion e car el
non podia uiure per la soasletras
el sen anet per lo mon e si saubia
ben trobar. e sentendeten la cort
de la contessa de burlac qe era
fillja del pro conte raimon muil-
lier del uesconte de bezers qe
auia nom Tailliafer. et aqest nar-
nautz era auinenz hom de la per-
sona. e chaDtaua ben e legia
romanz e la contessa sil fazia
grant ben e grant honor et aquest
si senamora en ella e si fazia
chanzos de la contessa mas no
lauzaua dir ad ella ne a negun
pro nom qel las agues f^itas anz
dizia qautres las fazian. mas si
lôc temps. (/. 37 v° ) mas molt li auenc qamors los forsa tant quel
camieron las bonas auenturas e fes una canzon délia (f. 38 r°) la
1 Cette biographie et les chansons d'Arnaut de Merueil manquent
dans la copie complémentaire du chansonnier de Bernart Amoros conte-
nue dans les trois cahiers manuscrits du fonds Campori de la biblio-
thèque de Modène, de même que les poésies de Folquet de Roman. Une
note à la page 500 en donne l'explication : « Arnautz de Merueil si fo
del vescat et cetera sono copiate tute le sue al altro fibro. » Comparez
une note analogue pour la biographie biû'ée et les chansons omises de
Guillem de Montagnhagout à la page 379 : « Non debbe esser scancellata
la vida seben le canzone non son copiate per esser ne' libri hauti dal
Gaddi e dall' Adriani (voir: Die beiden altesten prov. Gramm. heraus-
geg. v. E. Stengel Marburg 1878, S. IX)». M. Bertoni veut identifier le
ms. du cavre Gaddi au ms. de la Laurenziana ou plutôt à c* (l'ancienne
copie de c de ma propre bibliothèque} et le ms. de Marcello Adriani
au ms. F*. Il faut pourtant noter que ni c ni c" ne contient aucune des
poésies de Guillem de Montagnhagout, et que le ms. F* n'ajoute aucune
variante au texte des poésies de ce troubadour.
LE CHANSONNIER DE
cals comenset la franca c ipte-
nenzaqeu non pose oblidar. lit en
:i'l'/csta chanzo el li descobri la-
mor qellî auia. e la contessa non
lesqiuet an/, enlendet sos pièces
e lo receup el grazi. e garai lo de
granz arnes.efes li gran honore
det li baldeza de trobar délia e
uenc honratz ho m de cort. e si
fea maintaa boni- canzos de la
conl □ las qala el mostret
q«el nac granz bes e grans mais.
Daissi enan sou escrichas ten-
zos de donas e de caualiers. e
oenza la tenzos den foie e île
siegnhei- narnaut e den guillem.
{f. 38 y) Aissi son escrig li nom
dels trobadora qe son en aqest
libre e van luna après lautre
-i eon eill son escrig '.
1. En Girautz de bornell *
[=n" 1-53
18. Bernartz de ventadorn * =
54-86.
26. Arnautz daniel * = 87-96.
30. Folquetz de marseillia * =
[97-114.
35. Peire vidais * =115-132.
43. Peire daluerngne= 133-137.
44. Gaucelmsfaiditz*=138-171.
BERNART AMOROS 2*i 1
55. Peirols* = 172-196.
61. Peire raimonz de tolosa =
P. »7-201
63. Jordan bonel de cofemet =
202.
63. Raembautz daurenga=203-
[225.
69. Gaubertz de poncibot lo
[monge ' = 226-227.
71 . Peire d<; maenzac | manque
ns a)
71. Ponz de capdueil * = 228-
[246.
70. La contessa de dia = 247-
[248.
75. Naimeric de Belenoill = 249-
[253.
78. Bertran dalamanno = 254-
[250
79. Peire milon = 257-264.
81. Raimon Jordan vescons de
[saint antoni = 205-267.
s2. Ricas nouas = 208.
83. Gui duissel *
85. Peire dugon
85. Guillem de sain leider*
88. Guillem de cabescaing
90. Nue de sain sire
91. Nelias de barjols
92. Nelias cairel
93. (f.39 r») Nauneric(Z. : Nai-
[merics) de rocchafica
94. Marchabrus
Cette liste, déjà publiée pur M . Bartsch dans le Jahrbuch f. mm. u.
engl. Lit. "KIp. \'S ss. estici imprimée d'après ma collation sur le ms. — M.
Bertoni a publié dans le Giorn. slor. di lett. ilal. v. XXXI V p. 121 ss.
la liste correspondante <b's trois manuscrits de Modène (uoy. la note ci-
dessus au n° 50J et il vient d'en publier les poésies inédites dans les Stmlj
di iilologia romanza publicati da E. Monaci e C. de Lollis vol. VIII
p. 4-21-481.
1 Un * indique que la biographie du troubadour précède ou précédait
ses chansons.
27 ïf
LE CHANSONNIER DE
99.
Raimonz do miraual '
107.
Raembautz de vaqeiras*
107.
Nue de penna
108.
Naimerics de cariât (== sar-
[lat)
109
Naimerics de pueiluilan
113.
Nues brunetz '
114.
Alegretz
116.
SerchamoDZ
117.
Sadenetz (= Cadenetz)
119.
Guillem de montaingna-
[gout* '
120.
SorffëP
121.
Lafranc cigala*
126.
Bonifaei calvo
130.
Pojols
131.
Ricautz de berbezil
133.
En blachassetz*
135.
(ou 133?) Guillem de berga-
[dan
136.
Albertetz de cestairon
139.
Bertran del born
146.
Bermon( = Reimonz)rascas
146.
Bernartz martis
147.
Bertrantz de pessatz ( =
[pessars)
148.
Guillem de la tor
149.
Lo coms de peiteus
149.
Lo mongens de montaudo
152.
Arnautz de tintignac
153.
Peire toigiers (l. : rotgieis)
[de Mirapeis
154.
Girautz de calenzon 2
155.
Pistoleta
156.
Daude de pradas
RERNART AMOROS
160. Perdigos*
162. Jaufre rudel
162. Arnautz de merueil3
165. Giraudon lo ros
166. Guillem figueria
167. Folquet de roman3
169. Reforzat de très
169. (f39 v°) Luquetz gatelus
170. Peire cardenal
170. Calega panza
170. Namoros dauluc
171. Raumon de chastelnou
171. Ricautz bonomel fiaire del
[temple
171. Porceual douria
172. Peire de castelnou
172. Bertran de paris
172. Duranz sartres de carpen-
[tras
173. Engenim durre de valen-
173. Giugo de cabanes [tines
173. Bertiant ArrauL v
173. Lo priuceps dels bauz*
174. Lo fils den bertran del Bor.
De sai enan son escrig li
nom dels trobadors que fei-
ron las tëzos daqest libre.
En foie seigner arnautz e
[guillem
Girautz e peirônetz
Loste e guillem
Naugier e guillem
5 (f. 40 r°) Cabdenet e guio-
[net
1 Voyez la note à la page 270 — 2 Le complément de Modène fait pré-
céder aux trois chansons de Gir. de Cal. deux de Guillem Adesmar. Le
compilateur de notre liste aura sauté le nom de ce troubadour. —
3 Voyez la note à la page 270 — 4 Le ms. de Modône ayant perdu deux
feuillets à cet endroit, la fin de la chanson de Guigo de Cabanes, ainsi
que les poésies de Bertrand Arnaut et du Prince del Bautz, y inscrites,
n'existent plus.
LE CHANSONNIER DE BERXART AMOROS
273
Nelias c son cozin
Luqetz gatelus e bonifaci
[caluo
Jaufres e helyas
Nelias e son cozin lo cler-
igue
10 Sordel e johan
Nebles e guillem adesinar
[(l. : adesmar)
Nue de la bachalaria e
[gaucelim faidit
Na guillelma e lafranc ci-
[gala
Albert e naimeric
15 Rofin e doinna h.
Raimon e lantelm
Gui duisel e ma donna na
[maria.
Sauaric el prebost
Gaucelm faiditz e sauarics
[de malleo e de nue
20 Jaufre e Rainaut
Gaucelm faidit e naimeric
Guillem de bergadan e
[naumeric
Albert e naimeric
Dalfis daluergne e peirols
27> Gaucelm faidit e raembaut
Perdigo e gaucelm faidit
Gaucelm faidit e albert
Naugo e bauzan
Bauzan e migo (l. : nugo)
30 Nelias e son cozin
Albert e raembaut
Magnet (=Magret) e guillem
(f. 40 v°) Nebles e son segnor
Segner nisnartz e pel estort
35 Pomairol e guionet
Guillem de sain leider e una
"dôna
Vaquier e catalan
Marchabrus e segner nenric
Simon e lafranc
40 Guigo e joris
Gui duisel e rainaut
Bertraa e soa domna
Chardo e nugo
Folqwet de marseilla e totz
[temps
45 Albertz e gamli
Segner e lafranc e rubaut
Jacme e lafranc
Certan (= Bertran) e nugo
Lo comte e gai"~?.!m
50 Peire de mont albert e gau-
[celm
Albertet el monge
Guillem e lafranc
Guillem e guizenet
Pistoleta e blacatz
55 Bonifaci el Scot
Lo comte e narnaut
Naesmar e miraual
Peire guillem e sordel
Gauselm e son cozin
60 Bernartz e nelias
Simon e lafranc
•Simon e lafranc
(f. 40 v° c. 2) Ugon e ber-
[tran
Peirol e gaucelm
65 Peirols e son segnor
Guillem e narnaut
Madonna nisabella en elias
[cair[el]
Lemozin e bernart del ven-
[tadorn
Guizenet e raembautz
70 Lafranc e symon
En blacatz e peire vidais
Bertran de gordon e peire
[raimon
Taurel {ou : Jaurel) e falconet
Simon e jacme grill.
18
274
LE CHANSONNIER DE BERNART AMOROS
TABLE DES CHANSONS
DE LA PARTIE DU CHANSONNIER
PAR LES MSS. a Ca Fa (VOYEZ LA
d'après la liste donnée par M. Karl
Geschichte der provenz
BERNART AMOROS CONSERVEE
NOTE A LA CHANSON N° 50)
Bartsch, dans son Grundriss zur
alischen Litteratur
(* désigne les chansons tirées de c", ° celle tirée de f*J
9. 7
249
70.35
59
167. 9
150
242.12
58
242.71
47
S
250
36
54
12
162
13
34
72
33
9
253
37
79
14
165
16
6
73
27
12
252
39
80
15
155
17
15
74
46
18
251
41
56
18
149
18
17
78
42
29. 1
93
42
57
19
171
19
20
80
31
3
96*
43
70
20
146
20
18
81
45
4
90
44
74
22
159
24
23
243. 2
167
8
89
45
179
27
164
25
37
273. 1
202"
10
87
76. 5
256
29
160
28
32
276. 1
243
12
92
11
254
30
142
29
39
323. 1
38
13
94
21
255
31
145
30
36
11
136
14
88
80.28
121
32
1:8
31
2
13
133
16
91
124. 1
83
33
168
34
11
14
135
17
95*
2
84
34
161
36
12
16
137
30. 6
119
7
82
35
170
39
13
18
134
46. 1
248
132. 8
199
37
158
40
52*
326. 1
229
2
247
133. 5
122
39
156
41
1
331. 1
268*
47. 8
118
155. 1
105*
40
141
42
9
349. 1
260
70. 1
66
3
101*
43
147
43
10
2
264
3
55
5
103*
44"
153
45
28
4
262
4
68
6
111*
45
140
46
21
5
261
6
77
7
112*
49
157
47
4
6
257
7
69
8
109*
51
139
48
8
7
258
10
65
9
9S
52
163
49
43
8
263
12
75
10
106*
53
151
50
131*
9
259
13
78
11
114*
54
166
51
7
11
265
15
61
13
246
59
143
53
14
355. 5
200*
16
72
14
107*
61
148
54
29
10
197
18
63
16
100*
62
144
55
53*
14
201*
19
81
17
97
173. 6
227
58
3
16
198
21
76
18
102*
14
226
59
51*
364. 3
124
22
85
20
99
194. 6
237
60
16
4
126*
25
73
67
62
117
64
21
113*
242 1
50*
62
5
11
129*
27
28
»
29
22
104*
2
49
63
40
16
120
23
27
108*
110*
3
5
41
25
65
66
22
30
17
24
132*
130
30
86
167. 2
169
6
26
68
19
25
121
31
71
4
154
7
44
69
24
31
128*
33
60
6
152
11
48
70
35
33
115
LE CHANSONNIER DE BERNAHT AMOUOS
275
301.30
lia
360.13
194*
372. 2
230
379. 2
22S
389.21
220
42
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21 » i
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12
174
34
181
25
245
20
200
11
265
Errata : n° 58 = B. Gr. 70 (au lieu de 79), 22 _ no 167 au lieu du
168 et 168 au lieu de 167.
GURGUS
Lat. gurgus ; formes féminines et masculines
en provençal
Gurgus ne m'était connu que par Du Cange, qui en cite
plusieurs exemples tirés des chartes italiennes (charte de 957
en particulier dans Muratori, Scriptores Rerum Italicarum,
tom. 2, part. 2, col. 474 ; cf. Revue des Langues Romanes,
43, p. 69) ; l'italien gorgo ' réclamait un gurgus plus ancien
et qui existe réellement; il a été signalé par K. Sittl
[Zur Beurteilung des sogenannten Miltel/ateias, in Archiv. lat.
Lex. II, p. 578) et se trouve dans un vocabulaire de l'abbaye
de Saint-G-all. Ce gurgus est beaucoup plus que gurges le
substratum de la plupart des formes provençales.
Gurgetea. donné en effet normalement gourt (Alpes, Mistral),
gourd (forézien). De gurgum2 sont dérivés gourg, gou (Auver-
gne), goure (Alpes), gurc (Bordelais). Gours etgous qui exis-
tent dans le Var (Mistral, s. u. gourg) dérivent de gurgus
considéré comme indéclinable (cf. corpus ^> coz, u\mu$^> vins,
etc.). Le p du rouergat gourp s'explique sans doute par
l'analogie.
On a ainsi du même radical une double forme, masc. goure,
fém. gourgo. Le même fait s'est produit en provençal pour
d'autres mots : en voici quelques-uns.
Fructu a donné fru, frut, fruc, suivant les dialectes ; mais
il a existé aussi dans le latin vulgaire une forme fructa dont
il reste de nombreux exemples. K. Sittl [Loc. cit. ALL. II,
p. 569) en cite huit dont les plus anciens se trouvent dans
des documents publiés par Tardif (ann. 693-697) et dans les
Formulae Salicae Bignonianae [illa décima de omnia fructa.
Form. Bign. 236,5 ; ibid. 230,24). A cette forme féminine se
• Kôrtingdans la 2e édition du Lat. Rom. Wb.,ne donne que gurges.
8 Une déclinaison gurges, gurgis est également possible.
GURGUS 277
rattachent l'italien frutta, esp. fruta, port, frucla et les nom-
breuaes formes provençales frucho, fruecho^frutjo^ fruto, etc.,
suivant le3 dialectes. 11 faut noter que la l'orme féminine ;i le
sens collectif en provençal : ex. lu frucho aboundo (ap. Mistral
= les fruits sont abondants.
Voici une autre formation du même genre : horlus a donné
en provençal ort, jardin, petit jardin. La forme féminine
horta a donné orto, orta, grand jardin potager en langue-
docien, campagne en général en provençal (esp. huer/a, ital.
orta) K. Sittl (ALL. II, 569) cite de horta plusieurs exemples
dont le plus ancien est de 744 ; en voici un autre tiré dc^
Gromatici Veteres (347 , 23) hortua,([ul ne peut être séparé de
hurla.
Notons encore que si ramus donne prov. ram, ran, rama
des Gloses de Richenau donne prov. rama, ramo (amas de
branches, sens collectif comme pour frucho).
Le gaulois beccu est représenté en provençal par le mas-
culin bec et par le féminin bèco dont le sens est plus large
(croc, crampon, Mistral, Trésor, s. u ).
Le représentant provençal de discuta - pour discus — est
desc ; mais on trouve aussi la forme féminine desco <^ disca.
(A. Horning, Groeber's Zeitschrift 1901. p. 740). M. Korning
cite au même endroit le prov. empes venant de impensum ;
la forme empeso, venant de impensa, est signalée en Dauphiné
par Mistral.
M. P. Geyer, étudiant les traces du latin gaulois dans
Marcellus Empiricus (ALL. VIII, 475, sqq ), note le mot sablo
de sabulum;sabulum a donné la forme masculine sable, mais
le féminin saplo, saulo (cf. Mistral, s. u.) et l'italien sabbia
renvoient à sabula.
Culcilra donne prov. consséro; le masculin cousser, cosser
est attesté en ancien provençal et remonte sans doute à
* culcitrum.
Un traitement à peu près semblable nous est attesté par
mietch, miotch <^ modium et tremèjo, fr. trémie venant de tri-
modia '.
1 Le dauphinois dia que Mistral traduit par coup de doigt, empreinte
du doi'/t. s. u. detado ne représenterait-il pas la même chose que ital.
dita venant de 'digita ?
278 BIBLIOGRAPHIE
Ce changement de genre se trouve dans les noms d'ani-
maux, mais là il s'explique mieux. M. P. Geyer [toc. laud.),
note que le masc. lacertus (deux fois dans Marcellus Empi-
ricus) vit en français, en espagnol, en portugais ; la forme
féminine lacerto (plusieurs fois dans Marcellus Empiricus) vit,
dit-il, en italien. On peut ajouter aussi : en provençal : cf.
Mistral, s. u. leserto, forme plus rare que lesert. De même
pour merulus, cité aussi par M. P. Geyer : en espagnol et
en italien le masculin et le féminin alternent : il en est de
même en provençal où l'on a généralement merle (masc.) mais
aussi merlo.
La formation des féminins d'après des pluriels neutres est
un fait bien connu : pratum donne fr. pré, prov. prat ; mais
le fr. prée et le provençal prado postulent un féminin latin
prata. On le trouve en effet dans les Formulae Andecanenses
(5, 6) et dans les Formulae Augienses (pratas segaturias 358, 3).
En revanche, on ne trouve pas de forme féminine proven-
çale formée sur lectum ; seul l'italien letta renvoie à * lecta
(K. Sittl, ALL. II. 570). Mistral note simplement le genre
féminin donné à liée par les Niçards.
J. Anglade.
BIBLIOGRAPHIE
Diderot. — Paradoxe sur le Comédien, édition critique avec introduction,
notes, fac-similé, par Ernest Dupuy. Pari*, Société française d'impri-
merie et de librairie, 1902, gr. 8°.
Le 15 octobre et le 1er novembre 1770, Grimm insérait dans sa
Correspondance une dissertation qui portait ce titre : Observations de
M. Diderot sur une brochure intitulée Garrick ou les Acteurs anglais.
Soixante ans plus tard, en 1830, le libraire Sautelet publiait le Para-
doxe sur le Comédien, qui n'était que la dissertation de 1770 remaniée
et allongée du double environ. Par qui ce remaniement avait-il été
t'ait? A cette question tous les éditeurs jusqu'ici n'avaient fait qu'une
réponse : c'était Diderot lui-même qui, à une date difficile à déterminer
ou, pour mieux dire, à plusieurs dates successives, avait repris, inter-
polé, transformé son opuscule.
BIBLIOGRAPHIE 279
Cette solution, en apparence si simple, du problème aurait cepen-
dant pu soulever quelques objections.
Diderot se répétait volontiers : niais il y a vraiment dans !<• Para'
doxe un bien grand nombre de passages qui rappellent d'autres ouvi i
du même auteur! — Diderot pouvait exprimer des idées qui lui
fussent communes avec Grimm, avec Meister, avec Jean-Jacques, avec
d'autres encore : mais ces sortes de rencontres sont i'i bien nom-
breuses, et elles vont parfois jusqu'à une ressemblance étrange dans
l'expression ! — Diderot n'usait pas d'une composition bien serrée ni
bien méthodique : mais pourquoi cette fois semblait-il avoir pris à
tâche de gâter un écrit dont la composition était nette et l'intérêt
soutenu, en y introduisant après coup maintes citations ou anecdotes
peu utiles, en y multipliant les réflexions froides et peu en situation,
en en rompant sans cesse le développement et la suite des idées? —
Diderot n'écrivait pas toujours d'un style très châtié : mais par quelle
malechance se trouvait-il avoir ajouté dans une révision toutes sortes
de phrases mal faites et d'impropriétés, en même temps (chose éton-
nante de sa part!) qu'il expulsait les façons de parler familières:
changer de linge, par exemple, ou fourrer tout au travers ?
N'était-ce pas à croire vraiment que les Observations avaient été
revues par un beaucoup moins grand écrivain, qui avait pris à tâche
de les amplifier au moyen d'emprunts, notamment d'emprunts faits
aux œuvres de Diderot lui-même ; qui, donc, avait eu ces œuvres, pour
la plupart inédites, à sa disposition ; qui s'était cru le droit de retou-
cher ce que le philosophe avait écrit ; et qui professait des idées très
arrêtées sur les défauts de style de l'écrivain ? N'était-ce pas à croire,
eu un mot, que le Paradoxe, sous la forme où nous le lisons aujour-
d'hui, était l'œuvre de Naigeon, l'ami et le confident à qui Diderot,
en 1773, avait voulu que, le cas échéant, l'ont confiât ses manuscrits ;
qui avait été autorisé par Diderot à arranger, à revoir et à publier
une partie de ses œuvres ; et qui n'avait pas craint, en conséquence,
d'indiquer ainsi comment il comprenait son rôle d'éditeur : « Je com-
mence par une remarque générale qui me paraît très importante, c'est
que je ne connais aucun manuscrit de Diderot parmi ceux qui ont
quelque étendue qui puisse être imprimé dans l'état où il l'a laissé.
Je n'en excepte pas même les meilleurs ouvrages de cette riche col-
lection. Ils ont tous besoin d'un éditeur qui joigne à des connaissances
profondes sur divers objets un esprit juste, et surtout un goût très
sévère. Ces conditions sont d'autant plus nécessaires pour donner
une bonne édition des manuscrits de Diderot, qu'il avait, en écrivant
ses derniers ouvrages, deux tons très disparates : un ton domestique
et familier qui est mauvais, et un ton réfléchi qui est excellent. »?
Si, une fois, on avait soupçonné Naigeon d'être pour quelque chose
280 BIBLIOGRAPHIE
dans la rédaction définitive de ce Paradoxe, qu'il n'a pas publié, mais
dont il a parlé, on eût pu noter encore que, pour la pensée et pour
le style, cet écrit semble en plusieurs endroits porter sa marque, et
l'on eût pu faire la preuve morale que c'était à Naigeon, non à Diderot,
qu'il fallait s'en prendre de la plupart des défauts que l'on trouve dans
le Paradoxe sur le Comédien.
Cette démonstration, dont nul ne s'était avisé, M. Ernest Dupuy l'a
faite excellemment dans l'édition que nous annonçons. Mais il ne s'en
est pas tenu là, et un hasard heureux, comme il n'en arrive guère
qu'à ceux qui le méritent, lui a permis de fournir la preuve directe et
matérielle des remaniements de Naigeon. M. Dupuy, en effet, a décou-
vert un manuscrit de Naigeon, qui était dès l'abord une copie, déjà
allongée et remaniée, des Observations de Diderot, et qui s'est couverte
ensuite de corrections nombreuses dans les interlignes, ainsi que de
longues additions marginales. Ce manuscrit, à son tour, ou un autre
équivalent, a été reproduit, avec deux additions nouvelles, par un
manuscrit de Saint-Pétersbourg, que suivent assez fidèlement les édi-
tions imprimées du Paradoxe. Ainsi, pour mettre sous nos yeux toutes
les pièces du procès et, peut-on dire, pour nous permettre d'assister
au travail même de Naigeon, M Dupuy n'avait qu'à faire ce qu'il a
fait : imprimer face à face, sur deux colonnes, les Observations et le
contenu du manuscrit nouveau, soigneusement pourvu de ses variantes;
accompagner ces deux textes de celui de Saint Pétersbourg; et, au
bas de ce dernier, inscrire tous les rapprochements, toutes les remar-
ques littéraires qu'il comporte.
De ce commentaire très savant et très fin, aussi bien que de la
décisive introduction de M. Dupuy, je citerais volontiers quelques
extraits ; mais il faut laisser au lecteur le plaisL' d'étudier les argu-
ments de l'éditeur dans son livre. Ajoutons seulement que, si le Para-
doxe sur le Comédien a été l'objet d'une collaboration indiscrète, il
peut en avoir été de même d'autres œuvres de Diderot, publiées tardi-
vement, elles aussi, et dont les manuscrits n'ont jamais été produits.
Que les fureteurs etles critiques entrent doncavec ardeur en campagne!
M. Dupuy vient de leur donner l'éveil. Eugène Rigau
Piul Glachant. — André Chénier critique et critiqué. Paris, Lemerre,
1902, 1 vol. in-18 j. de IV-432 p., 3 fr. 50.
Quand il est mort, âgé seulement de trente-deux ans, André Ché-
nier avait plusieurs fois modifié son art et ses théories littéraires,
sans arriver à leur donner une forme définitive. Ses œuvres, depuis
1819, ont été successivement accrues par les apports des différents
éditeurs, sans parvenir encore, au XXe siècle, à constituer un recueil
BIBLIOGRAPHIE 881
complet. Il était naturel que, pour ces deux motifs, les jugements
multipliassent Bur André Chénier, disparates et contradictoires.
M. Paul Glachant, à son tour, apporte-t-il unjugeraenl nouveau?
. puisque plus de précision qo : svanciers, il montre ce
que Chénier a eu de classique, en quoi il se rattachai! îpécialeraenl
au XVIIIe siècle et à l'Encj |u'à quel point il a pu être
un précurseur pour les romantiques et Burtoul pour les Parnassiens,
comment il a rétabli dans la poésie française le lyris , et quel néo'
clas8icisme il tendait, vers la lin de sa vie, à inaugurer. Mais l'objet
propre de M. Glacbant n'est pas de juger, nue fois de plus, Chénier,
poète ou prosateur.
Son livre se divise pn deux parties.
La première : André Chénier critique, étudie les opinions littéraires
d'André d'après les œuvres antérieurement connues (comme l'épître
à Lebrun et le poème de l'Invention) et surtout d'après celles que
M. Abel Lefranc a publiées depuis l'ouverture des manuscrits de la
Bibliothèque nationale, le 10 mai 1899. Nous avons ainsi, rapidement
comparées à sa pratique, les théories du poète sur la poésie lyrique,
— sur la poésie épie i-didactique, — sur le théâtre, — sur la pasto-
rale, — sur l'élégie, — sur la satire, — sur l'épître, la fable, le conte,
le sonnet. Des \ les de M. Glachant rendent particulière-
ment neufs et instructifs les chapitres sur le théâtre et la satire.
La seconde partie, sous le titre: André Chénier critiqué, forme une
bibliographie raisonnée, qui rendra de grands services, iïile se divise
en trois sections : diverses phases <•>• l'histoire du texte, — livres et
articles de critique sur A. Chénier et si'// œuvre, — ouvrages d'imagi-
nation ayant trait au poète, à son histoire et à ses œuvres.
Des polémiques etdes appréciations discordantes sur André Chénier
quelques vérités se dégagent, qui semblent définitivement acquises.
Ainsi la seconde partie du livre, dont on aurait pu croire d'abord
qu'elle ne tenait en rien à la preiière, conspire avec elle à nous
montrer combien la physi momie littéraire d'André Chénier a été- chan-
inte, quelles difficultés on a dès lors dû éprouver a la saisir, et
sous quels traits, en définitive, il paraît juste de se la représenter.
Eugène Rigal.
Firmery (J.). — Notes critiques sur quelques traductions allemande
de poèmes français au moyen âge = Annales de l'Université de Lyon,
nouvelle série, II. Droit, Lettres. Fascicule 8, Paris, Lyon, 1901
[152 p.].
La littérature épique allemande du XIIIe siècle • -t une p
d'imitation ; personne ne le te plus aujourdui. Les Minnesânger
282 BIBLIOGRAPHIE
sont avant tout des traducteurs ; mais il ne manque pas d'éditeurs
allemands de leurs œuvres qui déclarent encore actuellement qu'en
traduisant ils sont restés originaux et qui prétendent démontrer que
leurs productions sont supérieures aux modèles français par l'élégance
de la forme, l'art de la composition, la « courtoisie » des idées, la
profondeur psicologique.
Le mode de démonstration est très scientifique en apparence, puis-
qu'il repose sur des statistiques. L'éditeur réunit tous les passages
où la traduction diffère peu ou prou de son original : suppressions,
amplifications, additions, changements ; puis il place arbitrairement
chaque difféience notée dans telle ou telle catégorie de sa statistique,
de manière à montrer qu'à chaque fois il i a de la part du traducteur
perfectionnement.
Pour éprouver la valeur de cette démonstration, M. Firmery exa-
mine chaque fait en particulier, non plus dans une statistique, mais
à la place qu'il occupe dans le texte. Il commence par le roman
d'Eneas et la traduction allemande qu'en a faite H. von Veldeke. Il
montre que cette traduction suit pas à pas l'original et que toutes
les divergences que l'on constate proviennent de ce qu'elle est en
vers. Le stile de Veldeke est naturellement lâche et traînant, mais la
poursuite de la rime a continuellement obligé le traducteur malabile
à cheviller, à accumuler les épitètes inutiles, à délayer, amplifier et
se répéter. Si bien que sa narration, loin d'avoir une allure plus vive
que celle de l'original, a pour caractère dominant la prolixité et la
diffusion. Lorsqu'il i a dans une description ou dans un discours des
transpositions, elles ne sont pas motivées par la recherche d'un arran-
gement meilleur, mais appelées par les besoins de la rime, et il en
résulte le plus souvent confusion et désordre. D'idée originale et
étrangère au modèle, il n'i en a pas, et quand dans un endroit appa-
raît un développement que l'auteur français n'i présente pas, il est
simplement tiré d'un autre passage. En somme c'est une traduction
gauche, diffuse, maladroite et misérable.
Dans la traduction du Chevalier au lion par Hartmann von Aue,
on retrouve les traits caractéristiques de celle de Veldeke, mais avec
la différence du talent : Hartmann a su se pénétrer de la forme agréable
et gracieuse de son modèle ; sa langue est d'une limpide clarté et
d'une impeccable élégance; sa versification est d'un artiste. Gottfried
von Strassburg dans son Tristan est de l'école d'Hartmann von Aue
en ce qu'il a donné à sa traduction un caractère plus réfléchi et plus
didactique et çà et là une couleur plus lirique ; mais plus encore
qu'Hartmann, il est élève des trouvères français et il a su s'approprier
leur manière jusque dans les moindres particularités du stile et de
la versification. Seulement les ornements qu'il leur emprunte, figures,
BIBLIOGRAPHIE 283
antitèses, jeux de mots ou de rimes, il les prodigue avec plus d'abon-
dance que ses modèles. Quant à la courtoisie et à la décence dans
la peinture de l'amour, e'esl encore aux poètes français que les onl
empruntées Hartmann von Aue el Gottfricd von Strassburg ; mais
cbez leurs prédécesseurs, Veldeke, Herbort, Otte, la pudeur des
descriptions est souvent remplacée par nue insistance Inutile et
grossière sur les détails les plus crus si les plus obcènes.
En somme, la prétendue démonstration des édit* urs allemands est
complètement retournée par M. Firmery, et il résulte de son étude
que les Uinnesànger sont Don seulement les élèves et les traducteurs
des poètes fiançais, mais que leur originalité est nulle et leur supé-
riorité artistique introuvable.
Maurice Gkammont.
Oréans (Dr K.) — Die Leygues'che reform der franzôsischen syntaxund
orthographie und ihre berechtigung, Bielefeld, Karlsruhe 1901 [150 p.].
Le 26 février 1901, M. Leygues, notre ministre de l'instruction
publique, a pris un arrêté rendant exécutoires les réformes relatives à
la simplification de la sintaxe française, sur lesquelles l'accord venait
de s'établir entre le Conseil supérieur de l'instruction publique et
l'Académie française. Ces réformes portent sur des points très divers
et l'arrêté les énurnère successivement, mais ne les justifie pas.
Comme il s'agit la plupart du temps do règles pour lesquelles l'usage
a varié aux différentes époques, ou bien d'un usage nouveau tendant
substituer à l'usage ancien, M. Oréans a cru faire œuvre utile
en résumant brièvement l'istoire de chaque question. Les faits qu'il a
rassemblés étaient connus et épars un peu partout, mais nulle part
réunis. 11 les expose d'un" façon très succinte et sans aucune préten-
tion à une originalité que le sujet ne comportait pas. 11 s'est abstenu
d'ailleurs généralement déjuger la réforme ; mais l'impression qui
se dégage de l'ensemble est plutôt une approbation.
Et en effet en général il n'i a qu'à approuver; mais nous devons
reconnaître que, puisqu'il s'agit A\me simplification, il est mauvais
de tolérer plusieurs usages cote à côte. Si la tolérance est recom-
mandable en matière religieuse, dans les autres domaines elle n'est
qu'anarchie et confusion, ("eux qui peuvent ordonner que la sintaxe
et l'ortografe soient enseignées conformément à certains principes,
..ut évidemment qualité pour réglementer ces principes. Ils ont le
droit de rendre des à une simplification ; ils en ont
même le devoir. Mais il faut que les simplifications proposées soient
réelles et reposent sur la logique. Une tolérance ne peut être admise
•pour une période de transition; il est nécessaire d'en venir bien
284 BIBLIOGRAPHIE
vite à des règles fixes. Ainsi, à propos du mot gens, l'arrêté déclare
qu' con tolérera, dans toutes les constructions, l'accord de l'adjectif
au féminin avec le mot gens. Ex. : instruits ou instruites par l'expé-
rience, les vieilles gens sont soupçonneux ou soupçonneuses ». La con-
struction avec tons les mots an féminin est seule logique au point
de vue moderne, et, comme le dit M. Oréans, elle constitue une sim-
plification qui est fondée à la fois sur l'ancien usage et l'ethnologie.
Mais pourquoi ne pas écarter l'autre? Même lorsque le double usage
a existé autrefois, ce n'est pas une raison suffisante pour le tolérer
ou le réintroduire aujourdui : « Avec une négation , on tolérera
l'emploi du mot aucun aussi bien au pluriel qu'au singulier. Ex. : ne
faire aucun projet ou aucuns projets ». C'est l'usage ancien sans doute,
mais nous sommes des modernes. Pour nous, aucun avec une néga-
tion est l'équivalent àe pasun : Il ne fait aucun projet vaut il ne fait
p>as un projet ; si l'on veut se rendre compte de ce qu'il i a de bar-
bare à écrire aujourdui aucun avec un s dans ce cas, on n'a qu'à pren-
dre un exemple comme : Il n'a fait aucun acte coupable, mettre un s
à aucun et prononcer : il n'a fait aucun z actes coupables.
« On tolérera l'absence de trait d'union entre le verbe et le pronom
sujet placé après le verbe. Ex. : est il ? » Sans doute encore, comme
nous le dit M. Oréans, c'est l'usage ancien, mais ce trait d'union
n'est-il pas un bénéfice pour notre ortografe? Si on écrit est il, com-
ment écrira-t-on aime-t-il? Il ne faut pas oublier qu'une ligne écrite
n'est souvent intelligible que grâce aux ressources de l'ortografe
usuelle et qu'une écriture strictement fonétique serait dans la pratique
une source continue d'erreurs. Si l'auditeur comprend ce qu'on lui dit,
grâce à la prononciation avec les diverses intonations quYlle com-
porte et souvent grâce aux gestes qui l'accompagnent, le lecteur a
besoin d'être averti par des signes particuliers qui les remplacent.
De là l'invention des points d'interrogation et d'exclamation, par
exemple. Presque toutes les fois qu'une confusion était à craindre,
l'ortografe usuelle a trouvé un moyen de l'éviter. Ainsi à l'époque où
l'on ne disposait que d'un seul et même signe pour l'w et le v, on a
imaginé de mettre un h devant la sillabe initiale ui- pour empêcher
qu'on ne fût tenté de lire vi- et de confondre par exemple le mot uitre
[huître) avec vitre. L'ortografe espagnole est citée partout, et avec
juste raison, comme un modèle de simplicité ; elle a néanmoins eu
recours au même procédé dans une situation analogue. Il s'agit de la
sillabe initiale ue- qu'elle a fait précéder d'un h pour qu'on ne la prît
pas pourve- et qu'on ne lût pas veso par exemple le mot hueso « os »,
ce qui aurait amené une confusion avec beso « baiser ». Aujourdui Vu
et le v sont suffisamment distincts pour que Vh soit devenu inutile
dans ces cas particuliers ; mais en principe on ne doit pas rejeter un
BIBLIOGRAPHIE 885
moyen diacritique inventé par l'ortografe usuelle, tant qu'il peut
rendre des services.
Il i a des distinctions subtiles qui ont été introduites assez tard
dans notre langue par une recherche de grammairiens et dont les
titres de noblesse ne remontent pas très aut ; est-ce une raison pour
les supprimer? en aucune manière. Une nuance de plus dans une
langue, c'est un gain, et la beauté artistique des langues est due aux
affînements successifs qu'i ont introduits au cours des siècles les écri-
vain-, les grammairiens ou d'autres encore. L'arrêté • permet d'écrire
indifféremment: elle a l'air doux ou douce ». Sans doute dans cet
exemple le sens est au fond à peu près le même dans les deux cas.
Mais si vous êtes assis à une table qui n'est pas d'aplomb, qui chan-
celle, vous pourrez, dire « cette table a l'air boiteuse », non pas
« boiteux ». L'accord n'est don.- pas indiffèrent dans cette tournure.
Voici qui est plus grave : « Lorque deux adjectifs unis par et se
rapportent au même substantif de manière à désigner en réalité deux
choses différentes, on tolérera la suppression de l'article devant le
second adjectif. Ex. : L'histoire ancienne et moderne, comme l'histoire
ancienne et la moderne ». M. Oréans fait observer qu'on supprimait
déjà l'article quand les deux adjectifs et le substantif désignent un
ensemble, un groupe de choses, expriment une idée unique : L'anti-
quité grecque et romaine (« klassisches » altertum) ; mais il devrait
ajouter que ce n'est pas ici le même cas, puisqu'il s'agit dans la
règle de « deux choses différentes ». L'histoire ancienne et moderne
c'est Vistoire d'une manière générale; l'histoire ancienne et la moderne
ce sont deu.e istoires ou deux périodes de l'istoire considérées indi-
viduellement. De même : Lt chien blanc et noir désigne un seul chien,
le chien blanc et le noir eu désigne deux. Il n'i a plus ici affaire
d'accord ou d'ortografe ; c'est au fond même de la langue que l'on
touche et c'est une maladresse de s'i attaquer. C'est courir du reste
à un échec certain. La tolérance proposée ne simplifie rien, elle
fausse le sens. Dans ce cas on peut s'offrir des décrets et des lois à
volonté : ils resteront vains.
Ce qu'il fallait réglementer c'est notre ortografe ; il fallait la sim-
plifier en la débarrassant des chinoiseries sans nombre dont elle est
érissée. On écrit trafiquant à côté de fabricant, holocauste à côté de
olographe, rythme à côté de diphtongue, embonpoint avec un m devant
le b et un n devant le p, phonétique en face de fantastique, néphréti-
que en face de frénésie, triptyque en face de glyptique, apocalypse eu
face de éclipse. C'est là qu'il faut porter la ache. La tolérance en
pareille matière est une utopie. Dire : « On écrira comme on voudra »,
est une ineptie. Dire : « On écrira phonétique avec un /comme fan-
tastique », n'est point une simplification, mais une complication,
28(3 BIBLIOGRAPHIE
puisque c'est ajouter un cas particulier à d'autres cas particuliers.
La seule manière logique de formuler une règle en matière d'orto-
grafe, la seule qui soit une simplification est la suivante : « Le groupe
ph sera remplacé par un/ dans tous les mots où il existe encore et
il disparaîtra de l'ortografe française ».
Voilà le génie de réformes qui s'imposent. Mais supprimer les
nuances d'une langue parce qu'il i a des gens qui ne les sentent pas,
c'est du démocratisme mal compris, c'est aussi chimérique que de
vouloir égaliser les fortunes ou les intelligences.
Maurice GraMmont.
E. Bourriez. — Les mots espagnols comparés aux mots gascons (époque
ancienne), Bordeaux, librairie Féret. in-8°, 23 p. [Extrait du Bulletin
hispanique, octobre-décembre 1901].
Le titre de l'article de M. Bourriez est un peu trop vaste en com-
paraison du sujet traité. M. Courriez nous avertit, d'ailleurs, dès le
début, qu'il recherche simplement les origines de quelques analogies
lointaines, anciennes, entre le gascon ou le béarnais et l'espagnol.
M. Bourciez — qui a été récemment indulgent pour quelques-unes
des théories de M. Mohl (cf. Revue critique, 1901, II, 151) — appli-
que à ses hypothèses cette méthode rigoureuse qui, dans le domaine
scientifique, sait arrêter les écarts de la « folle du logis ». Le résultat
en est que les conclusions d'une étude si hérissée de difficultés sont,
dans l'ensemble, parfaitement vraisemblables.
Les relations ont toujours été assez étroites entre l'Aquitaine et la
péninsule ibérique: à l'époque romaine plus qu'en tout autre temps.
De là, dans le vocabulaire des deux pays', un certain fonds com-
mun. Ces analogies, d'ailleurs, débordent quelquefois l'Aquitaine et
on les retrouve en Languedoc.2
Certains mots dérivés du latin classique sont peu probants; on peut
dire d'eux qu'ils paraissent avoir été plus favorisés dans la région
ibéro-aquitanique : ainsi sol, ?iaj)us ; lucrare, latrare, etc. Mais M. B.
reconnaît que casa est commun à la plupart des langues romanes (le
fr. chez prouve qu'il a été populaire même dans la France du Nord ;
à rapprocher du béarnais a case, l'expression ad casam que j'ai relevée
1 Peut-être aussi pourrait-on examiner si leur syntaxe n'a pas quelque
trait commun.
2 Faut-il expliquer celles-ci par des influences ibériques ou sont-elles
dues à des emprunts modernes ? Il est, en tout cas, vraisemblable que
les Ibères ont occupé une partie de la Narbonnaise (cf. Grundriss de
Grœber, I, 299; A. Darmesteter, Rcv. Celt., 1901,263).
BIBLIOGRAPHIE 287
dans les chroniques de Frédégaire, Revue de philologie franco
1900, p. 151).
D'autres exemples sont plus probants : Saltus, abies, calcaneum,
perna, etc. Mais encore ici tous ces mots n'appartiennent pas exclu-
sivement à la région ibéro-aquitanique : pèmo est encore connu eu
narbonnais avec le sens de quartier, portion d'un tout; ' abetem pour-
rait bien vivre encore dans le narb. abets, employé exclusivement au
pluriel et servant à désigner les balles du blé qui se séparent du graiu
au dépiquage et qui ressemblent aux enveloppes du même genre qui
B'entassenl au pied des sapins. Kn revanche, les représentants de
larcm et de cuna, de faecem et de taxum, des mots abstraits comme
m> (uni et fatum viennent confirmer la thèse de M. Bourciez.
hlle se trouve confirmée également par nombre déformes tirées du
latin vulgaire : l'esp. pâjaro et le béarnais passaroo renvoient tous
deux au passai' de YAppendix Probi; béarn. cuûat, esp. cunado ren-
voient tous deux à 'cûgnatus. A propos de chalare j'ajouterai que le
narbonnais dit calhd (avec l mouillé), qui me paraît être emprunté à
l'espagnol. L'hypothèse de de(la)xare, pour expliquer les dérivés de
laxare commençant par d n'est pas heureuse; on connaît assez la ten-
dance contraire qu'ont eue les populations romanes à faire revivre le
simple dans les composés et même à l'occasion à y replacer l'accent.
La différenciation de l en d ne me paraît pas plus admissible qu'à
M. Bourciez. L'analogie seule doit expliquer ces formes: faut-il voir
ici l'influence des verbes dare, donarel M. B. étudie ensuite quelques
dérivés communs aux régions ibériques, 'nidale, ' d extraie (mais
celui ci existe aussi en provençal, cf. Mistral, Trésor, s. u. des-
trau) et certains mots dont l'évolution sémantique est identique dans
les mêmes régions ' [serra, portas, cibata, dont M. B. reconnaît que
l'emploi ne se limitait pas, au nord des Pyrénées, à la seule Aqui-
taine). Le béarnais seubemay — à côté de l'espagnol madreselva
(chèvrefeuille) — est plus significatif et l'emploi de natus est tout à fait
probant. Je n'en dirai pas autant de plicare de la Siluiae Peregri-
natio; il n'est pas sûr que ladite Silvia soit une Aquitaine; j'incline-
rais même à croire qu'elle était plutôt provençale, et plega pourrait
être aussi ancien en provençal qu'en gascon. 2
M. Bourciez a étudié, en dernier lieu , quelques mots d'origine
indigène qui ont passé dans lesparlers romans des régions ibériques.
1 Secare est aussi resté vivant dans l'ouest de la langue d'oïl, où Ton
dit encore seier du blé (Maine, Bretagne).
2 L'édition Gamurrini, malgré les mérites de ce premier éditeur, est
bien faible en comparaison de l'édition qu'a donnée récemment Paul
Geyer (Corpus Script, eccl. lot . t. XXXIX).
288 BIBLIOGRAPHIE
Mais on sait assez que, sur ce point, c'est le fonds qui manque le
plus. Aussi M. Bonrciez n'en a-t-il traite que quelques-uns (cusco-
lium, 'artïga, arrogium, esp. arroyo, etc.). Je ne sais pas quel chan-
gement de sens le lang. conscoulho en est arrivé à signifier constitu-
tion: a bouno conscoulho = il a bonne constitution, santé. Le mouloun
et le mouroun doivent être deux mots distincts : le premier ne peut
venir que de mola; cf. prov. amoulouna, mettre en bas, entasser.
(Cf. a. fr. meulon, meulonner, in-Godefroy )
Il y a donc bien quelque? différences locales dans le latin des
Gaules; mais on voit à quoi elles se réduisent pour une région déter-
minée. Il se peut, sans doute, que quelques faits aient échappé à
M. B. et que des travaux ultérieurs viennent compléter la liste des
mots qu'il a dressée; mais on peut dire, apriori, que les additions ne
seront guère nombreuses ; et si l'on veut parler un jour d'un latin de
Provence ou d'Aquitaine opposé au latin de la Gaule du Nord, il
devra rester entendu que ces dénominations ne se justifient que par
quelques différences dont le nombre ne sera jamais suffisant pour
rompre l'unité du latin qui est à la base des langues romanes.
J. Anglade.
Erratum. — Notre confrère et ami, M. Weudelin Fœrster, membre
honoraire de la Soeiété des Langues Romanes, a célébré, le 26 octo-
bre 1901 , le vingt-cinquième anniversaire, non pas de son entrée
dans l'enseignement supérieur, comme nous l'avons |dit par mégarde
dans le numéro de janvier dernier, mais bien de son entrée en fonc-
tions comme professeur à l'Université de Bonn et successeur de Diez.
La Rédaction.
Le Gérant responsable: P. Hamelin.
SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
DU PAPAGAI
La nouvelle provençale du papagai, l'un des rares spéci-
mens du genre, pose à l'historien un problème littéraire que
son récent éditeur, M. Savi-Lopez,ne paraît pas avoir défini-
tivement résolu '. Si, en effet, on néglige les fragments qui
nous en sont conservés par trois autres manuscrits, le chan-
sonnier J ^Florence, Ribl. naz., F. 4776) et le manuscrit R
(Paris, Bibl. nat., fr. 22553) sont les seuls à nous donner
l'ensemble du récit ; or, si dans l'un et dans l'autre, sauf des
variantes de détail, la première partie est identique, la
seconde est, dans chacun d'eux, à tel point différente, que nous
avons en réalité deux récits très distincts par la matière, par le
ton et par l'esprit. C'est donc une question de savoir lequel est
le récit primitif et, comme la version de R mentionne expres-
sément comme son auteur un Arnaut de Carcasses, dont du
reste l'on ne sait rien, on se demande si cet inconnu fut le
premier à mettre en vers notre nouvelle, dont «/ ne nous
aurait conservé qu'un remaniement, ou, si tout son mérite
aurait consisté à compliquer, à dramatiser le récit plus simple
de J, en lui donnant un sens et une portée que n'avait pas le
récit original.
Les deux opinions avaient été successivement exprimées,
1 Paolo Savi-Lopez. La Novella provenzale del Papagallo, in-4°, 82 pages,
Napoli, 1901 (Extrait des Atti dell Accademia di arckeologia , lettere e
belle arti. Vol. XXI).
xlv. - Juillet 1902. 19
2 90 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
celle-ci par AI. StengeP, celle-là par Bartsch2, pour qui au
contraire Arnaut de Carcasses, auteur de la version con-
servée par R, était bien le poète du texte original. Mais le
débat ne pouvait être tranché qu'après que Ton aurait réuni
et étudié tous les manuscrits. Il appartenait donc à l'éditeur
du premier texte critique de départager les partisans des deux
opinions contraires, et c'est ce qu'a fait M. Savi-Lopez, en se
rangeant très nettement à l'avis de Bartsch, qu'il s'efforce
d'appuyer de nouveaux arguments. Pour lui, la version de
H est bien le texte original et par suite Arnaut de Carcasses
est bien le véritable auteur de la nouvelle.
Il importe pour examiner la valeur de ce jugement de
résumer le contenu de chacune des deux versions. Cette ana-
lyse précisera celle qu'a donnée M. Savi-Lopez et apportera
sur un point essentiel une correction nécessaire. Ainsi que
nous l'avons déjà dit, le début est identique dans les deux
récits. Un papagai vient au nom de son maître Antipha-
nor supplier une dame de lui accorder son amour. La dame
commence par s'y refuser et par alléguer l'attachement qu'elle
a pour son propre mari. Mais le papagai se montre si éloquent,
qu'il parvient à la convaincre. Elle promet d'aimer Antipha-
nor et dit expressément à son messager :
V. 108. D'aitan lo podetz conortar
Que pels vostres precx l'amaray
E ja de luy no* m partiray.
Avec ces vers s'arrête la concordance des deux récits. Il
importe de le remarquer dès à présent, car, pour n'en avoir
pas tenu compte, M. Savi-Lopez a entièrement faussé les
conclusions que l'on peut tirer de la comparaison des ma-
nuscrits.
Dans «/, après cette promesse de la dame, le papagai revient
auprès d'Antiphanor qui, sur le conseil de son messager,
s'empresse d'aller trouver la dame. Celle-ci le fait asseoir
auprès d'elle, ne lui cache pas la bonne impression qu'elle a
i Cf. Rivista'di filologia romanza I, 36 sq.
2 Cf. Zeitschrift fur roman. Philologie II, 498-499.
DU « PAPAGAI» 291
de lui et lui avoue que, cédant aux belles raisons du papagai,
elle est toute prête à l'aimer. Qu'il lui jure seulement de
l'aimer d'un cœur sincère. Antiphanor se déclare prêt à jurer
tout ce que voudra la dame, quand celle-ci, gagnée sans doute
par l'accent de sincérité d'Antiphanor, renonce à ce qu'elle
exigeait et s'abandonne à la bonne foi de celuiqu'elle aime. Les
amants se livrent à leurs transports et leur joie ne prendrait
pas de fin si le pa/>agai ne revenait en toute hâte leur annon-
cer l'arrivée du mari et la nécessité pour eux de se séparer.
Antiphanor prend congé de sa dame et lui fait promettre
qu'elle lui ménagera bientôt l'occasion de la revoir. Le récit
devrait s'arrêter là, mais, de façon assez étrange, Antiphanor
répond à cette promesse par de nouvelles protestations
d'amour qui ne remplissent pas moins de cinquante-six vers.
On dirait qu'il tient à placer le serment qu'avait d'abord
exigé la dame et dont elle l'avait ensuite dispensé. Le récit
se termine après qu'Antiphanor a donné son coeur à la dame
en gage des promesses jurées par lui sur l'Evangile.
Dans li, la dame ne se contente pas de promettre au
papagai qu'elle aimera Antiphanor; elle lui donne, en gage
d'amour, un bel anneau et un cordon de fin or qu'il remettra
à son maître. Elle le prie de retourner en hâte auprès de lui
et de le ramener dans le jardin où elle les attend. Le papagai
rejoint Antiphanor, lui rend compte de sa mission et lui
remet les présents remis par la dame. Mais au lieu de venir
au rendez-vous donné, tous deux se préoccupent du moyen
d'entrer dans le jardin. Le papagai, ingénieux, a un plan tout
préparé : il mettra le feu à la tour qui commande l'entrée et,
grâce au désordre, Antiphanor pourra arriver jusqu'à sa
belle. Celui-ci renvoie le papagai mettre au courant de ces
dispositions la dame qui, de son côté, s'inquiétait de savoir
comment Antiphanor pourrait la joindre. Séduite et rassurée
par le plan du papagai, elle n'a plus qu'à souhaiter la prompte
venue de son amant. Tout s'accomplit comme ils l'ont décidé.
Avec du foc grezesc, le papagai met le feu au château ; la
dame profite de l'émotion générale pour faire entrer Antipha-
nor et la joie qu'ils ont d'être ensemble est telle qu'ils se
croiraient en paradis. Mais le papagai revient leur annoncer
qu'on s'est rendu maître du feu et qu'il leur faut se séparer.
29 2 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
L'amant prend congé de sa dame et s'en va. Le récit se ter-
mine par quelques vers où l'auteur Arnaut de Carcasses donne
la moralité du récit, qui est fait pour railler les maris jaloux
et leur recommander de se fier davantage aux inclinations de
leurs femmes.
Ces deux versions, très nettement distinctes, sont, dans leur
fond, également acceptables. Sans doute, dans 7, le long ser-
ment d'Antiphanor, qui termine le récit, a quelque chose de
choquant et nous verrons, qu'en effet, c'est une addition
maladroite au texte primitif. De même on peut trouver
qu'il ne contient pas la mention expresse de la séparation
des amants et du départ d'Antiphanor, le tout pouvant,
comme dans B, former la matière de deux vers1. Mais nous
n'en avons pas moins un récit qui, dans sa simplicité, donne
à l'aventure qui fait le fond de la première partie une suite
naturelle et vraisemblable. D'autre part, la version R, par le
développement et l'agrément des épisodes qu'elle imagine, est
plus variée, plus dramatique et, si Ton veut, plus intéressante.
Mais de cela on ne peut rien tirer touchant l'antériorité de
l'un ou de l'autre récit. Comme M. Savi-Lopez l'a reconnu
lui-même2, un texte plus simple peut provenir d'une rédac-
tion plus richement développée ou, au contraire, celle-ci peut
n'être que le développement d'un texte originairement plus
sobre et moins chargé de matière. En fait, pour trancher la
question qui nous occupe, nous n'avons comme éléments
d'information que la comparaison des manuscrits d'une part,
et de l'autre, l'étude attentive du contenu de ces deux récits.
1 V. 304-305, Antiphanor s'en torna leu
Com filhs de rey ab son corrieu.
2 Cf. loc. cit., pp. 33 et 34.
DU « PAPAGA1 » 293
Ce qui ressort le plus clairement de la comparaison des
manuscrits, c'est ce que nous avions tout d'abor I soupçonn ■.
que la longue protestation d'amour qui termine le récit de ./
n'en faisait pus primitivement partie. Outre qu'elle prolonge
hors de toutes limites l'entretien de* amants, alors que le
retour du mari leur fait de la séparation une née issité,
humbles supplications de l'amant et la demande qu'il fait à la
dame d'agréer son amour ', n'ont pas do raison d'être si on les
attribue à Antiphanor. Celui-ci n'est plus un amant en expec-
tative et il n'a pas à souhaiter les menues faveurs de l'amour,
puisqu'il en a déjà goûté los réalités2. Ce n'est donc (dus
Antiphanor qui parle , et le long monologue de ce nouvel
amant est complètement étranger à la conception primitive du
récit. Et, en effet, dans le manuscrit D (Modàne, Chansonnier
d'Esté) les cinquante-six vers qui forment cette addition sont
conservés seuls comme un morceau à part, et dans le manus-
crit G (Milan, Bibl. Ambros , R. 71) qui, à quelques feuillets
d'intervalle, contient la partie commune aux deux récits, ce
même morceau vientaprèsla pièce d'ArnautdeMaruelh Domna
genser qu'eu no sai dir, sans, du reste, qu'on puisse l'y ratta-
cher avec plus .le vraisemblance. Que ce soit une pièce com-
1 Cl". Savi-Lopez, loc. cit., p. 66, v. 41.
E vos, dompna, prometetz me
Qu'ali franc cor et ab liai fe
Mi retengatz per servidor,
E datz mi baizan vostr'amor,
E levatz pueis de ginoillos,
On eu ai eslat denan vos.
2 Cf. Savi-Lopez, loc. cit., p. 60. v. 279.
Antiphanor intr'el vergier
Eu un lieg dejotz un laurier
Ab sa dona s'anet colcar,
E lunhs nom non o sap contar
Lo gaug que l'o entre lor dos,
Cals pus fo de l'autre joyos.
Vejaire lor es, so m'es vis,
C'aquo sia lur paradis.
201 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
plète en elle-même1, ou seulement un fragment d'un récit plus
important, il est certain qu'il ne fait pas, à proprement parler,
partie de la version J et que son addition est le fait d'un rema-
nieur maladroit. Enfin, son intercalation entre l'adieu de la
dame et les vers qui mentionnaient le départ de l'amant a eu
pour conséquence de faire omettre ces vers et de laisser le
récit inachevé. Il y a donc eu du texte de </ un état antérieur où
l'adieu de la dame était immédiatement suivi de la séparation
des amants, et c'est cette rédaction primitive qu'il faut com-
parer avec le récit de R. C'est entre eux et eux seuls que se
pose la question d'antériorité2. Sur ce point précis il semble,
tout d'abord, que l'état actuel des manuscrits ne puisse guère
nous renseigner. Nous n'avons pas de manuscrit donnant le
texte original de la version J, et quant aux deux chansonniers
J et /?, ils sont sensiblement contemporains et de valeur à peu
près égale. Le chansonnier d'Esté (Z))3 est à écarter puisqu'il
ne contient précisément que le domnejaire et, de même, on ne
saurait faire état d'un manuscrit de Florence (Bibl. Riccard.,
2756), qui n'a conservé qu'une cinquantaine de vers repro-
duits parle scribe au hasard de la mémoire4. Reste le manus-
1 C'est l'opinion de Bartsch qui la rangeait dans cette catégorie des
saluts d'amour auxquels on donne le nom de domnejaires. Cf. Grundriss,
p. 41. Il faut remarquer qu'elle ne rentre guère dans la définition donnée
du genre par M. Paul Meyer dans son étude sur le Salut d'amour dans
les littératures provençale et française (in Biblioth. de l'Éc. des Chartes,
XXVIII, p. 124 et sq.). Mais surtout la caractéristique du salut d'amour
la formule de salutation, fait complètement défaut, et il faudrait au moins
admettre que nous n'avons conservé de ce salut qu'un texte mutilé dont
les premiers vers auraient disparu. En tout cas, je ne vois rien qui jus-
tifie l'hypothèse exprimée dans la Romania, XXXI, 169, et d'après laquelle
ce domnejaire serait d'origine italienne.
2 Une fois cela établi, il fallait résolument écarter de la discussion ce
domnejaire qui dénature le récit primitif. On pourrait reprocher à
M. Savi-Lopez de ne pas l'avoir assez fait, et quand il s'offorce dec;>:
tériser le récit de / d'avoir tenu trop de compte de cette addition étran-
3 Les variantes de D ont été publiées par Max von Napolski. Cf. Zeits-
chri/t fur roman. Philologie, II, PP- 498-499.
* Cf. Wesselof.swski, Romania, VII, 326-329 et Savi-Lopez, loc. cit.,
pp. 34 et 42.
DU « PAPAGAT » 295
cvitG ' qui, lui aussi, ne contient qu'une partie de la nouvelle,
mais dont précisément l'état incomplet a fourni à Bartsch et
à M. Savi-Lopez un argument en faveur de leur thèse. Le
fragment qu'il nous a conservé comprend 98 vers, qui,
sauf les variantes de détail, concordent avec le lexte de 7, et
s'arrête au vers 140 du texte établi par l'éditeur2, c'est-à-dire
à l'endroit même où, d'après Bartsch et M. Savi-Lopez,
commencerait la divergence entre les deux récits de J et
de li. La concordance de G et de J pour les vers conservés
en commun attesterait leur dépendance d'une même source;
d'autre part, comme le fragment de G s'arrête au moment où
les deux récits complets de H et de «/ commencent à différer,
cette source commune à G et k J ne saurait être qu'un texte in-
complet du récit primitif. Le manuscrit G aurait respecté, en
quelque sorte, la mutilation de son modèle et l'aurait repro-
duit sans chercher à le compléter, au lieu que J voulant le
compléter, mais, ignorant la suite du récit primitif, aurait
comblé la lacune en inventant de toutes pièces un dénouement
convenant tant bien que mal à la première partie de la nou-
velle. Ainsi serait prouvé ce que l'on s'efforçait d'établir, à
savoir que R seul représentait le récit primitif et que «/ ne
nous en offrait qu'un remaniement postérieur.
1 Les variantes de G ont été publiées par Max von Napolski, loc. cit.,
pp. 498-499.
* Ce qui difiérencie G de / c'est l'absence des vers 25-28 et surtout des
vers 55-76. Ces lacunes ne se retrouvant pas dans H, il est certain
qu'elles sont le l'ait du scribe de G. Il a, semble-t-il, voulu reproduire,
en l'abrégeant, le récit qu'il avait sous Les yeux, sans se douter qu'en
supprimant les vers 55-7(5 il faisait disparaître du dialogue l'un des pas-
sages les plus vivement et les plus agréablement menés. Toutefois, l'on
peul 'lire que, d'une façon générale, le fragment G comprend tout l'en-
ien du papagai et de la dam.'. Leur séparation, le retour du messager
auprès d'Antiphanor et le commencement du discours où il lui rend
compte de son ambassade. Les derniers vers sont :
Pois li a dit : « Senher, jamays
Non er noiritz nul papag
Qe faza tan per son senhor
Com yeu ay fat per vostr'amor. »
Ils correspondent aux vers 137-140 du texte de M. Savi-Lopez.
296 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
Le raisonnement est ingénieux, mais repose sur des données
inexactes. Tout d'abord, il n'est pas sûr que l'on doive consi-
dérer le fragment de G comme la reproduction d'un texte
incomplet.il se trouve, en effet, dans une partie du manuscrit
où l'auteur à réuni un peu pèle mêle et comme au hasard de
ses lectures des pièces d'origine très différente '.Peut être ne
doit-on pas attribuer une très grande autorité à un recueil
dont on ne se représente pas mieux la composition. De plus,
la présence dans cette même partie du recueil du domnejaire,
si surtout l'on admet qu'il n'est lui-même qu'un fragment d'un
récit plus complet, pourrait nous faire supposer que c'était
chez l'auteur un parti pris de ne transcrire pour certaines
œuvres que les fragmsnts qui l'intéressaient. En tout cas, pour
expliquer l'état incomplet de G, l'hypothèse de M. Savi-Lopez
n'est pas la seule possible. Pour lui ce ne peut être que la
reproduction d'une rédaction tronquée et restée incomplète.
Avec tout autant de vraisemblance on pourrait dire que le
fragment conservé par G est un extrait fait consciemment
d'une rédaction complète de la nouvelle. Il faudra voir si
dans le récit ainsi coupé et limité nous ne découvrons pas des
caractères et une unité qui expliqueraient chez l'auteur du
manuscrit le dessein arrêté de ne conserver que cette partie
de la nouvelle, considérée comme pouvant former un tout.
Mais sur cette question le témoignage des manuscrits ne peut
rien nous apprendre, et nous ne pourrons avoir une opinion
qu'après avoir étudié le contenu des deux récits complets et
du fragment conservé par G.
Mais les rapports que l'on suppose entre JG et leur source,
évidemment identique hR pour la partie couservée en commun,
sont-ils eux-mêmes si solidement établis? L'argumentation de
Bartsch et de M. Savi-Lopez ne pourrait être probante que si
jusqu'au dernier vers de G, entre J et G d'une part, sauf les
lacunes particulières à G1, et de l'autre la version conservée
par R, la concordance était complète. Or, il n'en est pas ainsi.
1 Cf. Griitzmacher, in Archiv fur das Studium der neueren Sprachen,
XXXII, p. 399 et Grœber, Die Liedersammlungen der Troubadours,
p. 546.
2 Cf. Supra, p. 294.
OU « PAPAGAI » 297
Nous ne relèverons pas certaines lacunes de // ' , ni non plus
telle ou telle interpolation de vers qui, après tout, peuvent
n'être que le fait d'un copiste négligent. Mais, comme on Ta
déjà vu -', dans la partie qui précède immédiatement l'endroit
où s'arrête G, et à partir duquel J et It diffèrent entre eux
absolument, ilya tout un passage pour lequel J et G offrent un
texte très distinct de celui de R. Sans doute, dans ses variantes,
M. Savi-Lopez constate bien que les vers 111-122 ne se trou-
vent que dans H ; de même pour les vers 125-130 il remarque
que H est seul à offrir ce texte auquel correspondent dans J
et clans G deux vers au lieu de six, et totalement différents.
Mais il a tort de considérer ces lacunes et ces remaniements
comme intéressant seulement la tradition du texte et non pas
la composition de la nouvelle. Si, en effet, pour le passage en
question on compare le texte de J G et celui de R on constate
que l'on a affaire non pas à deux textes diversifiés par les
procédés ordinaires des copistes, mais à deux rédactions
foncièrement différentes 3. Ce sont bien dans l'une et dans
1 Ci. notamment les vers 19-2i du texte établi par l'éditeur et de même
les vi'is 133-136 qui ne sont donnés que par /et G et qui cependant doi-
vent être rétablis.
- C\. Supra, p. 290.
3 Nous reproduisons, sauf les variantes secondaires, le texte de ce
passage tel qu'il est dans R et dans G.I. Onrcmarqnera que la divergence
imence non pas comme le 'lisait M. Savi-Lopez, avec le vers L40,
mais dès le vers 111. Pour ne pas troubler la concordance et rendre La
comparaison plus aisée, nous conservons la numérotation des vers de
l'auteur, et nous laissons en blanc, dans le texte de R, les quatre vers qui
ne sont conservés que par J G.
Texte de /.'
108. D'aitan lo podetz conorlar
Que pels vostres precx l'amaray
110. E ja de luy no-m partiray.
E portatz lrm aquest anel,
Qu'el mon non eug n'a va pus bel
Ab sest cordo ab aur obrat,
Que-1 prengua per ma amistat
Il . E gardatz vos crue non estetz :
Kn sest verdier m'atrobaretz. »
29$ SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
l'autre les mêmes faits qui sont racontés, mais au lieu que
dans JG, il y a comme un parti pris de brièveté et de sim-
Ab tan lo papagays respon :
« Dona, fay s'el, si Dieus be-m don,
Mot a aisi azaut presen,
120. Et yeu portar l'ay veramen
E car avetz tan bel esgart
Saludar l'ay de vostra part.
Dona, sel Dieus que no mentic
Vos do d'Antiphanor amie
125. Em lays vezer c'abans d'un an
L'ames de cor ses tôt enjan. a
Ab tan parton lor parlamen,
De layns car ac gran talen
De la don 'e d'Antiphanor
130. Del vergier joyos ses demor
Dreg a son senhor es vengutz
E comtad com s'es captengutz
135.
Pueys li a dig : « Senher, jamays
Non er noiritz tais papagays
Que tan digua per son senhor
140. Com yeu ai dig per vostr'amor.
Texte de / G
108. D'aitan lo podetz conortar
Que pels vostres precx l'amaray,
110. E ja de luy no-m partiray. »
« Dona, sel Dieus que no mentic.
Vos do d'Antiphanor amie. »
Lo papa gai fo moltjoios,
Et issi del vergier cochos.
115. Davan son senhor es vengutz
E mostra-lh com s'es captengutz.
Premeiramen l'a comensat
Lo gran pretz e la gran beutat
De la domna, si m'ajut fes,
120. E d'aisso a fait que cortes.
Pueys li a dig : « Senher, jamays
X<»n er noiritz nuilhs papagays
Que fassa tan per son senhor
124. Com yeu ay fag per vostr'amor.
PU « PAPA GAI » 2 99
plicité, il est manifeste que R a voulu détailler et développer
le récit.
Ainsi, dès que la dame a promis d'aimer Antiphanor (v. 108-
1 10), J et G sont d'accord pour ramener rapidement le papagai
auprès de son maître. Sur une brève formule de souhait il
s'élance hors du jardin et va annoncer à Antiphanor le succès
de son ambassade. Au contraire, dans II, la dame ne se con-
tente pas de sa promesse. Elle charge le papagai de porter
à son maître les gages d'amour qu'elle lui destine. Elle lui
renouvelle la prière déjà faite (v. 103) d'avoir à se hâter et lui
dit expressément qu'elle les attend, Antiphanor et lui, dans le
jardin. De son côté, le papagai loue la beauté des présents
qu'il portera à l'amant avec les saluts de la dame. Il souhaite
aussi, mais avec plus de mots, de voir bientôt l'effet de ses
démarches. Puis en six vers au lieu de deux, qui y suffisaient
dans l'autre rédaction, le poète mentionne le départ du papagai
et son retour auprès d'Antiphanor.
Il est donc certain que nous avons là non pas deux états du
même texte , mais deux textes différents dont l'un est le
remaniement de l'autre. Lequel est la forme remaniée et lequel
le récit primitif? L'étude seule de l'ensemble des deux récits
peut nous l'apprendre. Toutefois, si l'on compare les trois
textes de R, de ./ et de G, pour la partie conservée en
commun (v. 1-110), l'on voit bien que,pourtelle ou telle raison,
R omet certains passages1, que, de même, G laisse de côté
certaines parties du récit2, mais J semble bien reproduire le
texte intégral, puisque c'est toujours d'après son témoi-
gnage qu'il est possible de combler les lacunes des deux
autres manuscrits 8. 11 est dès lors assez peu vraisemblable
que, dans le seul passage qui nous occupe, «/ ait voulu, de parti-
pris, abréger la rédaction originale. En admettant même
l'hypothèse de M. Savi-Lopez et qu'à partir du vers 140
' Cf. les vers 19-24 et 133- 13G omis par l'auteur de R.
2 Cf. les ver- 25 28 i l 55-76 omis par l'auteur de G.
Les seules lacunes qu'y relève M. Savi-Lopez sont celle des \
111-122, commune également à G, et celle des vers 125-130 remplacés
par deux vers particuliers à JG. Ce sont précisément celles qui différen-
cient les deux rédactions du passage que nous examinons.
300 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
l'auteur ait inventé de toutes pièces, on ne voit pas pourquoi
il aurait supprimé les détails que donnait pour ce passage
l'original conservé par R. En fait, ils s'accordaient très bien
avec la suite qu'il imaginait1. De plus, si vraiment cet auteur,
en présence du texte incomplet qu'il utilisait, a été si embar-
rassé et si dépourvu d'invention qu'on nous le dit2, on se
demande pourquoi il aurait ainsi délibérément négligé les
indications que lui offrait ce modèle et qu'il pouvait déve-
lopper à son gré. Il semblerait donc que dans ce passage, ce
n'est pas J qui a abrégé le texte original, et, cette hypothèse
étant exclue, il resterait uniquement que c'est R qui l'a déve-
loppé. Nous verrons si l'examen interne des deux récits
confirme cette conclusion. Pour le moment, il nous suffit de
constater :
1° Que jusqu'au vers 140 l'accord absolu qu'on prétendait
exister entre les textes, du moins entre les deux rédactions
de JG et de R, n'existe pas;
2° Qu'avant l'endroit même où s'arrête G et où commence
la divergence absolue de J et de R, il y a un passage attestant
de la part de JG, ou de celle de R, un remaniement conscient.
Les rapports établis entre les trois textes ne sont donc pas
les vrais et l'hypothèse de M. Savi-Lopez est à rejeter, puis-
qu'elle est impuissante à rendre compte du remaniement
ainsi constaté. Pour lui comme pour Bartsch, il n'y avait
remaniement à partir du vers 140 que parce que JG prove-
naient d'un texte incomplet et qui s'arrêtait à cet endroit
même. De plus J était le seul qui, pour combler la lacune,
inventait une suite, c'est-à-dire, en somme, remaniait. Or,
comme nous venons de le voir, du vers 111 au vers 140, G
remanie aussi bien que J et de la même façon: l'accord entre
leurs deux textes est absolu. De plus, la comparaison entre le
texte de JG et celui de R montre que le remanieur, quel
qu'il soit, n'invente pas : tous deux ont le même fond
1 L'invitation pressante de la dame avenir la retrouver dans le jardin
convenait très bien avec le dessein de /, qui nous montre Anliphanor et
le papagai se rendant sans tarder dans le verger. De même l'envoi des
gages d'amour, et tous les autres détails de E s'accordaient très bien
avec la seconde partie de J.
2 Cf. Savi-Lopez, Op. cit. p. 33.
DU « P A PAG AI » 301
commun1. Que JG soit la forme remaniée ou, au contraire,
que ce soit R, les concordances constatées entre eux suppo-
sent nécessairement que J et G ont connu la rédaction R ou
inversement. Dans l'une et dans l'autre hypothèse, le texte
remanié suppose à sa base l'autre rédaction, et le remanieur
n'invente pas mais modifie les éléments fournis par l'autre
récit. Enfin, s'il remanie, ce n'est pas pour combler une lacune,
mais en vue d'un dessein à lui particulier, qui doit corres-
pondre à un changement dans la conception générale de
l'œuvre. On pourrait en dire autant de la divergence qui existe
entre les deux rédactions à partir du vers 140. Pour être plus
complète que celle que nous avons constatée du vers 111 au
vers 140, elle peut être cependant de même nature et corres-
pondre elle aussi à un changement dans la conception du
récit. Ainsi rien n'est moins sûr que les rapports qu'on pré-
tendait établir entre J et G et, d'autre part, entre ces deux
états du même texte et l'autre rédaction. Les deux textes de
J et de G ne dépendent pas nécessairement d'une source
commune et G p ut aussi bien n'être qu'un abrégé de </.
D'autre part, sous sa forme actuelle, J n'est pas non plus
nécessairement une forme remaniée du texte original repré-
senté par //. Tout ce que nous apprennent les manuscrits
c'est qu'à partir du vers J il2, nous avons deux récits diffé-
rents qui peuvent, l'un aussi bien que l'autre, représenter la
nouvelle primitive.
1 II y a plus dans R, mais à l'exception des vers 113-114 de JG,
auxquels correspondent les vers 125-130 de R, tous les vers de JG se
iv trouvent dans l'autre rédaction.
2 Les divergences constatées du v. 111 au v. 140 ne sont, en effet, que
le commencement du remaniement total qui, à partir du v. 140, diffé-
rencie absolument les deux rédactions.
302 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
C'est donc uniquement l'examen interne des deux récits et
l'étude attentive de leur contenu qui peuvent nous renseigner
sur leurs rapports réciproques. C'est par là seulement que
nous pouvons arriver à déterminer quelle était la rédaction
primitive. Si M. Savi-Lopez s'en fût mieux rendu compte, au
lieu de demander à cette étude de venir confirmer les conclu-
sions combien douteuses qu'il tirait de la comparaison des
manuscrits, il eût été amené à la pousser plus loin et eût
ainsi évité des appréciations fausses résultant évidemment
d'un examen trop superficiel *. 11 ne suffit pas, en effet,
pour démontrer l'antériorité de la rédaclion R, de déclarer
que son récit se développe harmonieusement et que, dans
l'ensemble, chaque épisode a sa place bien déterminée. C'est
le principal et presque l'unique argument de M. Savi-Lopez2.
Tout d'abord, il ne semble pas que ce soit là une caractéristi-
que suffisante, ni que cela permette de distinguer R de J dont,
à vrai dire, l'on pourrait dire la même chose et dans les
mêmes termes. Une fois le domnejaire écarté, le récit de J peut
sembler moins vivant, moins varié, moins dramatique, et si l'on
veut même, moins intéressaut, mais au point de vue de la
simplicité et de la clarté de la narration, il est impossible d'y
rien relever de choquant ou d'inacceptable. La suite et le
dénouement qu'il imagine à l'entretien du papagai et de la
dame peuvent rappeler les données traditionnelles de Yalba
et, par suite, ne sembler ni très originaux, ni très neufs. Ils
sont, étant donné la fiction, aussi naturels que vraisembla-
bles : il n'y a rien que l'on en doive retrancher; rien non
plus, à l'exception des deux ou trois vers de la fin3, dont on
puisse constater l'absence. Tous les détails du récit trouvent
1 Cf. Savi-Lopez, op. cit., p. 35 : « Il giudizio a cui dà logo l'esame
esterno dei testi sarà ancor meglio confermato da un brève sguardo al
contenuto ».
2 Cf. Savi-Lopez, op. cit.. p. 35 :« Il racconto di R si svolga armonico
in ogni sua parte, come ogni episodio abbia confini ben misurati nel
disegno générale ».
s Cf. Supra, p. 292.
DU « PAPAGAI » 30 3
dans le récit lui-même leur raison d'être et leur justification.
Or, peut-on en dire autant de l'autre rédaction?
Il semblerait qu'une fois l'aveu de la dame obtenu, après
qu'elle a prié le papagai de vite retourner auprès d'Antipbanor
pour qu'ils reviennent la trouver dans le verger où elle les
attend, celui-ci n'eût plus qu'à accourir pour goûter les joies
que lui aménagées son interprète. Nous touchons au dénoue-
ment et la situation ne semble pas comporter de longues péri-
péties. Du moins, celles qu'a imaginées l'auteur de H sont-elles
vraisemblables? Il est curieux, tout d'abord, que, de retour
auprès de son maître, le papagai, qui lui raconte les incidents
de sa mission et lui remet les présents de la dame, ne lui dise
pas la chose essentielle, la seule qui intéresse vraiment Anti-
phanor, à savoir qu'il l'a convaincue qu'elle devait l'aimer,
qu'il en a reçu l'aveu et que, dès ce moment, la dame l'attend
dans son jardin. Combien est plus naturel dans l'autre rédac-
tion le discours du papagai, qui après avoir rapidement loué
la beauté de la dame, va droit à ce qui importe le plus :
Pueys li a dig : « Sentier, jamays
Non er noiritz nuilhs papagays,
Que fassa tan per son senhor
Corn yeu ai fag per vostr'amor,
Que la dompna ai gazanhada.
Anas ades esta vegada
Parlar a lieis en sel vergier
Tôt mantenen ses destorbier.
Et là-dessus le chevalier s'en allait au rendez-vous donné
par la dame. Au lieu de cela, sans même dire à Antiphanor
que la dame l'attend ni où, l'auteur de R se préoccupe unique-
ment des moyens à employer pour pénétrer dans le verger.
Le papagai expose son plan : il mettra le feu au château et,
grâce à la confusion générale, son maître pourra arriver jus-
qu'à sa belle. Ici encore il semblerait que, ce plan étant bien
arrêté, il n'y eût plus qu'à l'exécuter. Mais auparavant Anti-
phanor croit nécestaire de mettre la dame au courant de leurs
projets. En des vers d'ailleurs mal venus et qui trahissent
le remplissage, il dit au papagai :
304 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
V. 164-166 Tornatz premier al parlamen
A lieys parlai', si a vos platz,
Donc sestas razos li mostratz.
Le papagai revient donc auprès de la dame, mais, cette fois
encore, il semble oublier ce qu'il doit avant tout lui dire. Des
dispositions arrêtées entre Antiphanor et lui pour pénétrer
dans le jardin pas un mot, mais seulement six vers remplis
de formules banales pour exprimer un souhait bien inutile,
puisqu'il est déjà réalisé :
V. 173-179 Dona, aisel Dieus que vos fetz
Vos done so que mays voletz,
E'us gar de mal e d'encombrier,
Sol qr.e lo vostre cavayer
Vulhatz amar tan lialmen
Com el fay vos ses falhimen.
Autant un pareil discours serait naturel au début de la nou-
velle, lors du premier entretien du papagai et de la dame,
autant il est choquant ici où il tient la place d'un autre dis-
cours qu'on attendait et qui n'y est pas. Ce qui souligne plus
encore l'invraisemblance, c'est que ce n'est pas le papagai,
mais la dame qui aborde la première le véritable objet de cet
entretien. C'est uniquement parce que la dame se préoccupe,
elle aussi, des moyens pour Antiphanor de pénétrer dans le
jardin que le papagai se rappelle ce pour quoi il était venu. Il
expose donc son plan, recommande à la dame de bien saisir
le moment favorable et celle-ci accepte:
v. 209-210. Ab tan la dona ditz : « Platz me
Et anatz lo querre desse. »
C'est la seconde fois qu'elle invite le papagai à lui amener
Antiphanor et avec la même impatience.1
1 Déjà elle lui avait dit en deux vers qui ne nous sont conservés que
par li :
v. 115-116. E gardatz vos que non estetz
En sest verdier m'atrobaretz.
DU « PAPAGAI » 305
On pourrait déjà trouver qu'ainsi conçu cet épisode ralentit
beaucoup l'action et qu'à ce seul point de vue l'art du narra-
teur dans Ii est moins parfait qu'on ne voulait nous le faire
croire. Mais les invraisemblances que nous y avons relevées
nous forcent à supposer qu'un état du texte à dû exister où
elles n'étaient pas, que nous avons par conséquent affaire à
un épisode interpolé ou fortement remanié et en tout cas
étranger à la conception primitive de la nouvelle. Cette sup-
position se trouve confirnu'e par l'examen d'un passage par-
ticulier de cet épisode qui nous livre en même temps avec
la preuve certaine de cette interpolation la manière dont a
procédé son auteur.
Il s'agit du passage où, pour la première fois, le papagai
expose à Antiphanor son ingénieux stratagème. Il se montre
d'abord préoccupé des difficultés qu'ils rencontrent et dit
expressément:
1 Cf. v. 153-160. Mas jes no say per cal razo
Non prenguam sonh ni ochaizo
Que puscam el verdier intrar ;
Jes no vos en say cosselhar.
Mas yeu métrai foc a la tor
Et al solier, per vostr' amor ;
E can lo focs er abrassatz
Poiretz intrar per esperatz.
Autrement dit, c'est le papagai qui avoue son embarras, qui,
en présence des difficultés, avoue à son maître qu'il ne sait
quel conseil lui donner, pour, dès le vers suivant, lui exposer
dans tous ses détails le plan qui assurera le succès de leur
entreprise. Sans aller plus loin, on peut, dès à présent, affirmer
qu'il j a entre les vers 156 et 157 une contradiction tellement
manifeste qu'il est impossible de les laisser subsister tels quels,
à la suite l'un de l'autre, dans le même texte. Le texte de Ii
est ici évidemment corrompu et il faut chercher la correction
nécessaire.
Elle nous est suggérée par la comparaison avec un autre
passage où le papagai expose, à la dame cette fois, comment
20
306 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
il compte s'y prendre. C'est elle, nous l'avons vu ', qui songe
la première aux obstacles que rencontre l'exécution de ses
désirs amoureux. La chose, au surplus, paraît assez naturelle,
car mieux que personne elle connaît la disposition des lieux
et les précautions dont elle est entourée.
v. 183-186. Mas aquest verdiers es trop claus,
E las gardas non an repaus :
Devon velhar tro al mati
Car lunha nueg non prendo fi.
Le papagai qui a dans la tête son plan tout fait lui demande
avec malice :
v. 187. Dona, e no y sabetz cosselh ?
A quoi la dame réplique par l'aveu très franc de son embarras :
v. 188-189. Ieu no, e no m'en meravelh
Se vos cosselh non y sabetz.
Et le papagai répond, tout fier de montrer son ingéniosité,
en lui détaillant tout ce qu'il a imaginé.
Cette partie du récit, conduite du reste avec vivacité et
agrément, nous montre les deux interlocuteurs dans leur rôle
véritable, avec les sentiments et les idées qui leur sont natu-
rels. C'est à la dame de se trouver embarrassée et au papagai
de se montrer un intermédiaire ingénieux. Dès lors, l'on se
rend compte que si, dans l'entretien du papagai et d'Anti-
phanor, il est question de l'embarras de quelqu'un, c'est uni-
quement de la dame qu'il doit s'agir et non pas du papagai.
La correction a apporter au texte de R dans le passage que
nous avons reconnu comme corrompu, apparaît dès lors comme
très simple. Il suffit, au vers 153 et au vers 156, de corriger
le mot say en sap, forme très voisine et dont on s'explique
aisément l'altération. Grâce à cette correction, l'incohérence
que nous signalions tout à l'heure disparaît et le sens de tout
le passage est le plus naturel. C'est la dame qui s'est montrée
* Cf. Supra, p. 303.
DU « PAPAGAI » 307
préoccupée du moyen de faire pénétrer Antiphanor dans le
jardin et c'est le papagai qui l'a trouvé.
v. 153-158. Mas jes no sap per cal ra
Non prenguam sonh ni ochaizo
Que puscam el verdier intrar
Jes no vos en sap cosselhir.
Mas yeu métrai foc a la tor
Et al solier, per vostr1 amor.
Il est vrai que dans le premier entretien de la dame et du
papagai (v. 7-126) aucune allusion n'a été faite à ces préoc-
cupations et qu'il n'en sera question que dans leur second en-
tretien, c'est-à-dire bien après l'allusion qu'on y fait ici. On
pourrait sans doute supposer que le premier entretien ne nous
a pas été rapporté dans tous ses détails. Le papagai ferait ici
allusion à une idée qui lui aurait été bien réellement exprimée
par la dame, et que le récit aurait laissé tomber. Mais autant
nous admettrions, nous, la possibilité de tels sous-entendus,
autant ils sont étrangers aux habitudes littéraires du moyen
âge. Le soin avec lequel nos anciens conteurs nous rapportent
les entretiens sous la même forme et, le plus souvent, avec
les mêmes mots, nous force a exclure une telle supposition.
L'allusion faite par le papagai à l'embarras de la dame et à
l'aveu qu'elle en fait, n'est possible que si vraiment la dame
lui a auparavant avoué cet embarras. Or, il n'en est question
qu'aux vers 183-190, dans le second entretien du papagai et
de la dame. La conclusion à tirer de là c'est que l'allusion faite
dans les vers 153-156 à un sentiment, à une idée, qui ne seront
exprimés que dans la suite du poème, ne peut être que le fait
d'un remanieur maladroit. Ainsi se trouvent confirmés les
cloutes que nous avions sur l'authenticité de cet épisode et
l'hypothèse d'une interpolation que nous avaient suggérée
l'inutilité et les invraisemblances du second entretien du papa-
gai et de la dame. Nous pouvons maintenant affirmer que la fin
du premier entretien du papagai et d'Antiphanor (v. 153-166),
et la seconde rencontre du papagai et de la dame (v. 167-210)
sont fortement remaniées, et que l'idée même de ce dernier
épisode était probablement étrangère auréoit primitif qui est
à la base de la rédaction R.
308 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
Il peut sembler arbitraire de vouloir refaire d'après nos
idées à nous modernes des œuvres que d'autres ont écrites
pour d'autres temps et pour d'autres lecteurs. Il est à tout le
moins loisible de profiter de la maladresse des remanieurs
pour dégager dans l'œuvre qu'ils ont prétendu embellir ce
qui leur revient et ce qui appartient à l'auteur véritable, ce
qui est ajouté et ce qui est primitif. Dans le cas présent, il
est aisé de voir en quoi^a consisté l'art du remanieur. Si vrai-
ment aux vers 153-157 il ne peut être fait allusion à l'em-
barras de la dame, le papagai n'a pas non plus à nous dire
le stratagème ingénieux qu'il mettra en action. Dès lors son
retour auprès de la dame, qui n'a d'autre raison d'être que de
lui communiquer ce beau plan, se trouve sans objet, et l'on
peut affirmer que l'idée de ce second entretien était étrangère
à la conception primitive de la rédaction R et à celle du poème
original. Celui-ci devait essentiellement se composer de trois
parties, l'entretien du papagai et de la dame, celui du papagai
et d'Antipbanor, enfin la rencontre des deux amants. Nous
les retrouvons dans la rédaction J et si, pour des raisons qu'il
n'est pas impossible de démêler, de ces trois parties la pre-
mière seule a surtout été développée, l'économie générale
du récit y est conforme à la vraisemblance et au naturel. C'est
seulement par le développement donné aux deux dernières
parties que devait en différer la rédaction originale de R, et
l'on peut en retrouver l'ordonnance primitive.
Il était naturel que, dès son premier entretien avec le papa-
gai, après qu'elle a consenti à aimer Antiphanor, la dame se
préoccupât de la réalisation de son désir. Les vers 179-210,
dont nous avons relevé l'invraisemblance à la place qu'ils
occupent, auraient leur place naturelle dans ce premier entre-
tien, après la promesse de la dame et l'envoi des gages d'amour.
La suite des idées est si naturelle que l'on peut presque affir-
mer que c'était celle de la rédaction dont R n'est que le rema-
niement. Que l'on transpose le morceau à la suite du vers 115,
il est impossible d'imaginer un développement plus naturel
des sentiments et des idées. La dame remet au papagai l'an-
neau et le cordon d'or fin qui prouveront à Antiphanor son
amour. Elle donnerait bien davantage encore et le monde
entier, s'il était à elle, pour son amitié. Mais comment
DU « PAPAGAI » 309
pourra»t-elle le voir, le jardin étant clos el gardé comme il
est? Elle désespère de surmonter tant de difficultés , mais le
papagai vient à son aiie et lui expose son plan. La dame
opte et supplie son interlocuteur d'aller vite lui chercher
Antiphanor :
Ab tan la dona dit/. : « Plat/, me
210. Et anatz lo que ire desse. » •
Suivaient le souhait du papagai pour la réalisation de ses
désirs et son retour auprès d'Antiphanor.
Une transposition analogue sutiit à faire disparaître toute
invraisemblance de l'entretien du papagai et de son maître.
Qu'on fonde en un seul les deux discours du papagai à anti-
phanor, en plaçant les vers 220-234 immédiatement après le
vers lu2, ce discours venant après l'unique entretien du papa-
gai et de la dame, les idées se présenteront dans l'ordre le
plus naturel et le plus vraisemblable. Le papagai rendait
compte de sa mission et remettait à Antiphanor les présents
de la dame. Il lui disait l'embarras de la dame pour le faire
entrer dans le jardin et le stratagème imaginé par lui. Après
l'exposé de son plan, la deman le du foegrezesc suivait, en quel-
que sorte nécessairement, et la version originale de II racon
tait à peu près de même façon que R lui-même l'exécution et
le succès du plan du papagai.
Sans doute dans le récit ainsi obtenu certains vers sul>-
■nt. qui apparaissent comme probablement ajoutés ou
modifiés par le remanieur. Pour relier entre eux les passages
remaniés, il devait naturellement retrancher et plus souvent
encore ajouter çà et là quelques vers. Mais outre qu'il y aurait
quelque arbitraire à décider si tel ou tel vers en particulier
appartenait ou non à la rédaction primitive, il n'entre pas
dans notre pensée de restituer intégralement la rédaction que
R a remaniée. Il nous suffit d'avoir montré qu'il y a dans le
texte actuel de R des impossibilités et des invraisemblances
qui ne s'expliquent que dans l'hypothèse d'un remaniement.
1 Les vers 115-11G qui terminent de même façon Le premier entretien
de la dame et du papagai et qui t'ont en réalité double emploi, sont
très probablement dus au remanieur.
310 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
Ce remaniement, on le voit maintenant, a consisté, suivant
une formule très suivie au moyen âge, à dédoubler deux
épisodes. On a coupé en deux le premier entretien du papa-
gai et de la dame ; on a pareillement dédoublé le discours du
papagai à Antipbanor; on a intercalé les différents discours
ainsi obtenus qui supposaient plus de mouvement, plus d'allées
et de venues, et tout cela en vue d'allonger le récit et de
prolonger le plaisir du lecteur.
Dès lors, il apparaît clairement que c'était mal poser la
question que de se demander, comme on l'avait fait jusqu'ici,
lequel des deux textes actuels de J et de R représentait la
rédaction originale. Il est désormais certain que R n'est qu'un
texte remanié d'une rédaction dont nous avons entrevu les
éléments essentiels, et la question d'antériorité ne peut plus
se poser qu'entre la rédaction / et cette rédaction ainsi
définie. L'bonneur que l'on voulait faire à Amaut de Car-
casses, d'avoir le premier mis en vers la nouvelle du papagai
et de la dame, apparaît en tout cas comme immérité. Il est
inadmissible que dans les derniers vers de R, où figure ce
nom, le remanieur ait laissé subsister celui de l'auteur de la
rédaction qu'il modifiait. Tout ce que nous savons des habi-
tudes littéraires du moyen âge et de la facilité avec laquelle
un remanieur quelconque croyait par des changements de
détail, souvent très contestables, s'approprier un sujet déjà
traité avant lui, nous permet d'affirmer que cette signature
est celle du poète qui, travaillant sur la version que nous
avons déterminée, en fit ce que nous a conservé le manuscrit
R. Arnaut de Carcasses ne fut donc qu'un remanieur, et encore
assez médiocre. Tout son mérite a consisté à allonger, en le
gâtant, un récit dont il n'était pas l'auteur. Peut-être aussi
est-ce lui qui a voulu donner au récit une portée moralisante
et du conte plaisant, assez voisin par la donnée du Castia-
gilos, de Raimon Vidal, et qu'il s'efforçait de renouveler, faire
une leçon à l'usage des maris jaloux. Il aurait ainsi formulé,
en l'exagérant, l'idée qui était au fond du conte, et les der-
niers vers de R seraient bien en effet d" Arnaut de Carcasses.
De ces mêmes vers on a cru aussi pouvoir tirer la preuve
que cet inconnu avait composé d'autres nouvelles et qu'il
aurait ainsi plus de titres encore à figurer dans l'histoire de
DU « PAPAGAI » 311
la poésie provençale. En fait, le manuscrit. H se borne i dire
de façon peu claire :
v. 306-312. So dis n'Arnautz de Carcasses,
Que precx a faitz per m an tas res
E per los maritz castiar
Quo volo lors niolhers garar,
Que 'ls laisso a lor pes anar,
que may valra,
E ja degus no y faillira.
En plus de l'avant-dernier vers qui est mutilé, mais dont il
n'est peut-être pas impossible de deviner le complément1,
M. Savi-Lopez suppose une lacune après le vers 307 et de
son aveu même2, nous n'aurions là qu'un texte corrompu
dont, par suite, Ton ne saurait rien tirer qu'avec la plus grande
prudence. Il est certain, en effet, que, dans ces vers, nous
devons supposer une lacune, mais non à l'endroit indiqué
par l'éditeur. Le sens, pour être parfaitement acceptable,
n'exige rien entre les vers 307 et 308 et quand M. Savi-Lopez
suppose entre eux l'absence d'un ou plusieurs vers, il n'a,
sans doute, d'autre raison que de vouloir trouver au moins
un autre vers rimant en -ar et de faire disparaître ce qu'il
trouve de choquant, dans ce groupe de trois vers terminés
par la même rime. Or, c'est toute une question de savoir si
dans le genre particulier des novas rimadas, il faut toujours
chercher à retrouver des couples de vers rimant de deux en
deux et s'il ne comportait pas plus de libertés qu'on ne saurait
d'abord porté à le supposer3.
1 Cf. les notes critiques publiées à la suite de cette étude, p. 328.
2 Cf. Op. cit.. p. 40.
3 11 est certain que, de plus en plus, on a tendu à faire exactement
rimer les vers de deux en deux et à alterner régulièrement les rimes
masculines et les rimes féminines. Mais il n'en a pas toujours été ainsi
et L'emploi de l'octosyllabe, qui est le vers propre du genre, était, à
l'origine, beaucoup plus libre quo ne l'ont fait les théoriciens postérieurs.
Si l'on en croyait Azaïs [Breviari d'Amor, I, cxi, sq.), la versification des
novas rimadas jouissait de tant de libertés qu'en fait on pouvait violer
le principe même de la métrique romane: sans avoir égard à la dernière
syllabe accentuée du vers, on pouvait réunir dans la même pièce des
"il2 SUR LÀ NOUVELLE PROVENÇALE
C'est, à mon avis, le sens et le sens seul qui doit nous faire
admettre l'existence d'une lacune, et, de ce point de vue, rien
ne nous oblige à penser que le vers 308 ne peut pas suivre
octosyllabes à rimes masculines ou en accen agut, et des octosyllabes à
rimes féminines ou en accen greu, ceux-ci comme ceux-là n'ayant exac-
tement que huit syllabes et la finale atone d'un vers à rime féminine
cmiplant comme une syllabe véritable. En fait, certaines rédactions du
Breviari eFAmor sont tout entières rédigées d'après ce principe: l'effet
pour nos oreilles en est monstrueux. C'est, il est vrai, une question de
tir si le poème original a été rédigé d'abord sous cette forme étrange,
ou si les rédactions qui la présentent ne sontpas des formes postérieures
el altérées. Mais si l'on a pu prendre une telle liberté avec la constitution
même des vers, on conçoit que leur groupement ait pu être à l'origine plus
libre qu'on ne le dit d'ordinaire. D'abord, l'alternance des rimes mascu-
lines et féminines n'est une nécessité qu'à une époque très récente. Les
Leys d'Amors, elles-mêmes, I, 38, disent expressément: « E no reputam
a vici si hom en novas rimadas pau/.a ad una ni quatre ni .VI. o mays
bordos terminans en accen greu solamen o en accent agut, cant que
depueysh aysso nos continue ». Il ne faut pas oublier non plus qu'on
rencontre parfois l'octosyllabe groupé en très longues tirades sur une
seule assonance ou rime (Cf. Stengel, Romanische Metrik in Groeber,
Grundriss II, 28, 29j. De ce type sont les fameuses épitres de Raimbaut
de Vaqueiras. Dans notre texte même, nous voyons que l'alternance
n'est pas rigoureusement observée : au vers 25 de la seconde partie de
/(Savi-Lopez, op. cit. p. 62-63), nous avons une suite de quatre vers
rimant en -en et de même au v. 39 une suite de quatre vers rimant en
-or. De même, si, à l'ordinaire, l'on groupait les octosyllabes en couples de
deux rimant ensemble, il se peut que cet usage ait comporté quelques
exceptions. Qu'il y ait eu quelques irrégularités, c'est ce que semblent
avouer les Leys d'Amors, I, 140, où il est dit : « Pauzar rim tornat en
novas rimadas vicis es quar adonx l'obra desparia coma si hom comen-
sava alcunas novas rimadas pauzan las acordansas finals dels verset/, de
dos en dos bordos ayssi quo es acostumat de far e pueys ne pauzava
très acordansas finals ad una. » Ce qui revient à dire que si, à l'ordi-
naire, on accouplait les vers de deux en deux, la même pièce présentait
parfois des groupes de trois vers construits sur la même rime. L'auteur
des Leys considère que c'est une faute, mais cela n'est sans doute vrai
que pour l'époque où il écrivait. Il est bien obligé de constater l'exis-
tence de telles exceptions dans les œuvres antérieures, et,ne pouvanl les
condamner absolument, il s'efforce de les excuser: «Variamen de compas
de sillabas e de rims en novas rimadas son escuzat en cas de nécessitât
coma per interpositio d'alqun dictât per causa d'ishemple o per autra
maniera aqui pauzat. » (I. 140). En effet, toute la dernière partie du
Breviari d'Amor, le Perilhos tractât d'Amor et la fameuse nouvelle de
Raimon Vidal En aquel temps c'om era jais, qui sont en grande' partie
DU » PAPA GAI » 313
immédiatement le v. r. Au contraire, l'impossibilité pour
ns de rattaoher i
a faitz] ; •
à ce <|tii procède semble indiquer qu'entre les deux \
et 1507 quelque chose d'essentiel a disparu. Quel sens, en
com] . noua monl renl quelles libi !
on se permettait dans l'emploi d I tosyllabe qui
■i effet, le fond du récit, et les citations sonl naturellement
m. t -i curieux, c esl de voir < ommenl •
v dans '•■ irs. Parfois la citai ■
nettement d le la nom iprès ou avant un cou
complel de deux octosyllabes rimant ensemble. Par exemple, dan
i; \ dal :
mans n'a faitz d'aut bas baros
El per so dis en Pi
■ paratje non mai re
M .■-■ qu'en a m lis i 7 qui mieths se capi
E podetz conoisser qu'es dreitz
E pei sol i adreitz
Bartsi a, i
Mais le plus souvent li île demi t citation, qu
que n'él . ' couple et rimenl avec un octo-
qui préci de ou qui suit, el qui fail pai
m me. Par exemple, en i la même
E fetz issautz
i Raimbautz
E cels quim vol auzir m'escoul :
« /' ' ms ai cor estout
hum il e bai
E
I oui
h ed'a ■ out
M mi
l I agra ne R baut. »
No • R limb lui
El i 221, \. 5-6, \. 13-1 ,
En i
il de
mesure différente, un coup! réel. Les ible
311 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
effet, attribuer à ce mot de precx, si, comme nous forcerait à
le croire l'état actuel du texte, l'antécédent de que est Arnautz
de Carcasses? L'éditeur le traduit tantôt par « demande
d'amour, invitation amoureuse », et tantôt aussi par « exhor-
tation ». Mais, quel que soit le sens véritable, le mot désigne-
et, en une certaine mesure au moins, l'octosyllabe reste isolé. Sans doute
ce sont là des pièces d'un genre particulier: il n'en reste pas moins que
si l'on a pu y traiter ainsi l'octosyllabe, c'est que le genre des novas
rimadas n'était pas pour le groupement des rimes, asservi aux règles
strictes que l'on a imaginées depuis. Il ne faut donc pas être trop cboqué
si l'on y rencontre soit plusieurs couples de deux vers rimant ensem-
ble, ce qui est assez fréquent, soit des groupes de trois vers sur une
seule rime, soit peut être même des vers isolés. On remarquera que dans
notre texte, quand une irrégularité métrique détermine l'éditeur à sup-
poser une lacune , le sens est cependant acceptable et n'exige aucune
restitution de vers. Cf. de même dans le Castia-gilos de Raimon Vidal, le
passage suivant ou Appel ÇProvenz. Chrestom.) croit nécessaire de sup-
poser une lacune pour faire disparaître un vers isolé, alors que le sens
est très acceptable :
Veus aisi vostr'amic coral
E per Dieu nom tengatz a mal
C'uey ai per vos l'anar laissât
De mo senhor a cui fort peza
Mas l'amors qu'en me ses espreza.
Raynouard, Choix, III, 406.
Par contre, dans un autre passage de la même pièce on Ut :
Que en vostras terras estan
Que donas tan gran poder an
Elas an be tan gran poder
Que messonja fan semblar ver
Et ver messonja eissamen
Gan lor plai tan an sotil sen. Iôid., 412.
Le vers transcrit en italiques est tellement inutile, que je serais assez
porté à croire qu'il a été rajouté par un remanieur, afin de retrouver un
couple de deux vers. Il y aurait, on le voit, une étude intéressante à
faire sur la métrique des novas rimadas. Mon sentiment est qu'il ne
faut pas être dupe de la régularité établie par les théoriciens pos-
térieurs, que le genre comportait beaucoup de libertés, que la seule
consi lération de l'irrégularité métrique ne suffit pas pour autoriser
l'hypothèse d'une lacune, et que c'est le sens seul qui doit décider s'il faut
ou non supposer l'absence d'un vers.
!'[ « PAPAGAI » 3 15
rait,dans la pensée de M. Savi-Lopez, d'autres œuvres de cet
Arnaut de Carcasses, qui ainsi aurait écrit en plus de la nou-
velle du papagai, soit des « demandes d'amour », soit des
nouvelles à tendance didactique et moralisante '. C'est là,
nous semble-t-il, une supposition toute gratuite et que rien,
par ailleurs, ne vient confirmer. De plus, entendre precx au
sens de « exhortation » est peut-être arbitraire et l'on n'y est
autorisé par aucun des emplois que l'on connaît du mot. Le
seul qui soit possible est celui de « demande d'amour», mais
la difficulté est d'attribuer ces precx, ces «demandes d'amour»
à. Arnaut de Carcasses. Ce n'est que par un étrange abus de
mots que l'on pourrait dire que, dans la nouvelle qu'il vient
de nous conter, c'est lui, Arnaut, qui prie la dame d'amour.
Comment aus-à, dans cette hypothèse, entendre le per manias
' Dans la nouvelle du papagai, celui qui fait le prec c'est
le héros véritable du récit, celui qu'un long passé traditionnel
confirmait dans la possession de ce rôle de messager amou-
reux. Et si maintenant l'on admet qu'il était naturel de voir
rappeler dans ces vers de conclusion le nom du principal
acteur, on pensera peut-être qu'il manque au texte de II
la mention du papagai et du caractère qu'il a dans le récit.
Il suffirait, au surplus, d'un vers rimant, lui aussi, en -es, et
qui pourrait être
Del plazen papagai cortes2.
L'expression per mantas res serait restée vague à dessein,
comme une allusion au rôle ordinaire du papagai. Dans cette
hypothèse, Arnaut de Carcasses n'a rien à prétendre sur
les precx qu'on lui attribuait, puisqu'il s'agit des precx du
papagai; nous n'avons pas à regretter la perte d'autres
res, puisque il ne s'agit pas de poésies d'un genre parti-
culier, et Arnaut de Carcasses n'est toujours qu'un remanieur
1 Cf. Savi-Lopez. op. rit., p. 10.
- Plazen et cortes sont ailleui appliqués au papagai. Cf. 136
e d'aisso a fait f/ue cortes et dans ./. p. 62, v. 5, le vers car hieu vos vei
tan plazentier qui, dans le texte, désigne Antiphanor, doit en réalité
s'appliquer au papagai.
316 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
médiocre qui a eu la chance de nous léguer son nom ' alors
que l'auteur du récit primitif restait inconnu.
Une dernière question reste à examiner. Puisque à la base
de la rédaction R nous distinguons un récit plus simple, mais
toujours différent de / par les péripéties et par le dénoue-
ment, il nous faut décider maintenant laquelle de cette ver-
sion disparue ou de celle qui est conservée par / est vérita-
blement la forme originale de la nouvelle. Mais la première
partie du récit étant identique dans l'une et dans l'autre, et
celles-ci ne différant que par la suite donnée à ce début com-
mun, la question consiste à démêler laquelle de ces deux
continuations continue le mieux le récit. Quelle est celle qui
se conforme le mieux à l'esprit, au ton du début, et, par suite,
appartient à la exception originale de la nouvelle? On peut,
en effet, a priori, s'attendre à ce qu'un remanieur unique-
ment préoccupé de renouveler l'intérêt de son récit, trahisse,
pirdes diseonvenances, son travail de réfection. C'est parce
qu'on a cru trouvé de ces dissonances dans le texte de J qu'on
en avait imméiatement conclu que cette version ne pouvait
être la version originale 2. En fait, tout ce qu'a pu reprocher
M. Savi-Lopez au récit de </, c'est de raconter avec moins
d'agrément, et surtout avec moins de détails, la fin de l'aven-
ture. Il peut ne pas ressembler à R, sans qu'il y ait entre les
deux parties qui le composent disconvenance de ton et d'es-
prit. Et, en effet, il est impossible de rien trouver dans la
seconde partie de ./ qui ne soit en parfaite harmonie avec la
première. C'est le même ton de la narration simple, et, si les
discours y tiennent la plus grande place, c'est un trait de res-
semblance de plus avec l'autre partie. Ceux qu'y échangent
la dame et Antiphanor ne diffèrent en rien de ceux que
1 On n'est morne pas fixé sur la valeur de ce nom. M. Savi-Lopez
{op. cit. p. 38-39; dit qu'on peut considérer Carcasse* soit comme dési-
gnant tout le pays de Carcassonne, soit comme le nom d'un petit vil-
lage de cette région. En fait, nous n'avons aucune raison de choisir l'un
plutôt que l'autre. L'auteur d'un compte-rendu paru dans la Romania
XXXI, p. 169, adopte délibérémenl le second sens, mais sans nous
]>"iirquoi.
'-' Cf. Savi-Lopez, op. cit. pp. 35-36.
DU «PAPAGAI» 317
tenaient le papagai et la dame. Il y aurait ainsi entre les
deux parties de J plus d'unité de ton que ne semble le croire
M. Savi-Lopez et qu'il n'y en a en réalité entre les deux
parties qui constituent le récit de R. Car, si le ton de R et de
la version qu'il remanie est bien toujours celui de la narra-
tion, encore faut-il reconnaître que la seconde partie fait aux
péripéties et à l'élément extérieur une large part qu'ils
n'avaient pas dans la première. Une fois indiquée, et très
sobrement, la donnée générale et le cadre, toute cette pre-
mière partie consiste en un dialogue, du reste agréablement
conduit entre la daine et le papagai. Au lieu de cela le dia-
logue n'est plus, dans la seconde partie de 11, la chose essen-
tielle et l'intérêt va tout entier aux péripéties imaginées par
le narrateur, aux allées et venues du papagai, au stratagème
de l'incendie, à la rencontre d'Antiphanor et de la dame, au
retour du papagai et à la séparation des amants. C'est donc à
l'original de li qu'on pourrait reprocher de ne pas présenter
dans les deux parties sinon la même unité de ton, du moins
la même unité d'intérêt. A ce point de vue, il serait certai-
nement inférieur à l'autre version et ce pourrait être une
preuve que, par rapport à 7, l'original lui-même de R n'était
sans doute qu'un remaniement.
Il est en effet certain que l'intérêt de la première partie
commune à R et à J consiste dans la discussion entre la dame
et le papagai. On le voit d'abord au parti pris du narrateur
de négliger tout ce qui pourrait localiser la scène et lui don-
ner quelque réalité. Pas de description du verger où le papa-
gai rencontre la dame, sinon que c'est
v. 1. Dins un verdier de mur serat.
Rien non plus sur la façon dont le papagai y pénètre. Des
deux int Tlocuteurs, on ne nous fait aucun portrait, ni moral,
ni physique. Antiphanor ' est un fils de roi et la dame
1 M. Savi-Lopez (Op. cit. pp. 8-9) a fort bien montré que ce nom n'a
rien de grec, et que c'esl à torl que Bartsch avait vu dans ce nom ainsi
i[ue dana la mention du foc une preuve de l'origine orientale de
notre nouvelle. Par contre, p. 33, il reproduit la remarque de Bartsch
(lue, dans la première partie de ./, le nom d'Antiphanor est menti-
S18 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
n'a même pas de nom. Tant il est vrai que pour l'auteur de
cette première partie ce ne sont ni les circonstances, ni le
cadre, ni les personnages eux-mêmes qui sont intéressants,
mais uniquement la question qu'il s'agit de discuter et le
débat qu'il imagine entre deux interlocuteurs du reste quel-
conques. Aussi bien, en avons nous la preuve certaine dans
le récit lui-même et un vers, que jusqu'ici on semble avoir
laissé inaperçu, nous révèle le véritable caractère de ce
début dans la pensée de son premier auteur. Qu'on se reporte
aux premiers vers de la nouvelle qui servent à l'auteur à
introduire son récit.
Dins un verdier de mur serat.
A l'ombra d'un laurier folhat
Auzi contendre un papagay
De tal razo corn ye*us diray.
Quand on sait l'usage à peu près constant chez nos auteurs
du moyen âge d'indiquer très nettement dès le début le genre
auquel appartient la pièce ou l'ouvrage qu'ils composent ', il
est évident que l'auteur du récit original s'est avant tout pro-
posé de nous rapporter une contenso ou tenso, c'est-à-dire un
débat entre un papagai et une dame 2. L'intérêt devait aller
cinq fois, au lieu que la seconde partie paraît l'ignorer. Gomme
Bartsch, il semble voir là la preuve que la seconde partie est un rema-
niement postérieur. A moins d'admettre que cette seconde partie existait
indépendamment de la première et qu'on l'y a réunie arbitrairement,
l'absence du nom d'Antiphanor ne prouve rien. Dans l'hypothèse même
de M. Savi-Lopez, l'auteur de J voulant donner une suite à la pre-
mière partie où figurait ce nom, n'avait qu'à le reproduire tel qu'il le
trouvait. S'il ne l'a pas fait, c'est qu'il n'y attachait pas une grande
importance. Son chevalier n'avail pas d'individualité et ce nom n'était
pour lui qu'un nom quelconque.
1 Cf. le début d'un débat inédit de l'âme et du corps contenu dans le
ms. de la Bibliothèque Nationale, franc. 14973, f° 1, r°.
L'autrier ausiy una tenson
vos dir en quall rason
An que vollyas estar e pas
E s'entendes et escoylas
2 Pour être moins fréquent que tenso, le mot contenso s'emploie pour
désigner des pièces du même genre tout comme joc partit, partimen cl
partida.
DU « PAPAGAI » 3 19
surtout à la question qui en fait l'objet, une de celles qui
furent sans doute les plus débattues entre théoriciens de l'amour
courtois : l'amour conjugal exclut-il pour la femme la possi-
bilité de tout autre amour? Le développement même de la
discussion, l'ingéniosité du papagai a triompher du refus et
des objections de son interlocuteur attestent que c'est bien là
l'objet essentiel du récit, et l'admiration manifestée à plusieurs
reprises ' par la dame pour l'éloquence de son interlocuteur
nous atteste le plaisir que les lecteurs du temps prenaient à
de telles discussions. Si tel était bien le dessein de l'auteur,
l'on voit pourquoi dan3 la version J la suite de l'entretien est
rapidement contée au point de paraître presque sacrifiée.
L'essentiel étant le débat lui-même entre la dame et le papa-
gai, une fois l'aveu de la dame obtenu, l'auteur avait dit ce qu'il
voulait dire, et peu lui importait le dénouement. Il est même
inutile de considérer ce dénouement comme une imitation de
Yalba : ce n'est vrai que pour la version R, qui manifestement
lui emprunte son décor et ses acteurs ordinaires las gâchas.
Le retour du mari était, dans la donnée du récit, le dénouement
le plus naturel, et, si l'auteur l'a emprunté à la vie journalière,
sa banalité même ne fait que mieux ressortir l'intérêt de la
première partie et le caractère véritable de la nouvelle primi-
tive. On voit aussi maintenant comment l'auteur du manuscrit
G, qui évidemment a voulu conserver un extrait du récit primi-
tif, a pu l'arrêter au retour du papagai auprès de son maître.
Si on peut lui reprocher d'avoir négligé certaines parties de
l'entretien du papagai et de la dame qui sont peut être les
plus agréablement racontées, il n'en reste pas moins que cet
entretien suivi du retour du papagai et du témoignage qu'il
se rend à lui-même pour son ingéniosité et sa fidélité forme
un ensemble ayant son unité et présentant un intérêt véri-
1 Cf. v. lJ7 sq. Papagay, si Dieus m'acosselh,
En cara- us die que 'm meravelh
Car vos tan gen sabetz parlar
Cf. de même dans J., p. 62, v. 16.
Cf. v. 55. sq. Papagay, trop es bel parliers
Par me, si fossetz cavayers,
Que jen saupratz dona prejar.
3 20 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
table. Le fait que lui aussi néglige la seconde partie confirme
notre façon de comprendre le récit primitif. C'était essentiel-
lement un débat dont tout l'intérêt consistait dans la question
discutée et dans l'art de conduire le dialogue. L'auteur s'ef-
forçait de le raconter tel quel et pour lui-même sans chercher
à l'entourer de circonstances et d'aventures plus ou moins
rares, sans vouloir non plus lui attribuer une portée ni satiri-
que ni moralisante.
Cette double préoccupation caractéristique de la version R
et du texte remanié par son auteur, nous permet d'affirmer
qu'ils représentent tous deux une tradition en contradic-
tion avec la conception primitive de la nouvelle et par con-
séquent postérieure. D'une part, l'importance que prend
dans l'une et dans l'autre l'élément purement narratif, la
recherche du pittoresque, l'effort fait pour donner à toute
cette aventure un air de réalité, attirent l'intérêt aux dépens
de ce qui était l'objet propre du récit primitif. D'autre part,
la transformation de la nouvelle en une sorte de Caslia-gilos,
est une déformation de la donnée originale. Or, si c'est
Arnaut de Carcasses qui le premier a tiré formellement de
l'aventure la morale que l'on sait, en fait, cette morale était
en quelque sorte à l'état latent dans le récit qu'il rema-
niait. Le débat primitif était déjà devenu le conte plaisant
destiné comme le Castia-gilos de Raimon Vidal, à faire rire aux
dépens des maris jaloux, mais cela même n'était qu'un déve-
loppement postérieur. Dans la partie commune à J et à R, il
n'est permis nulle part de soupçonner la jalousie du mari.
Les sentiments qu'il inspire à sa femme ' et qu'elle-même
invoque pour repousser d'abord les prières du papagai, ne
sont pas ceux que d'ordinaire lesja'oux inspirent à leurs victi-
mes. Dans tout le récit de «/, le mot de gilos ne se trouve pas
et même au moment, où, pour terminer l'entretien des amants,
il fait revenir le mari, rien ne permet de supposer que c'est un
mari jaloux. En réalité, cette jalousie du mari est une invention
l Cf. v. (')<;. Ali tan vos ai yeu doncx venrut,
Qu'eu am mon maril may que re
Que si' el mon, de bona fe,
L lunh aulr' amador no vuelh.
DU « PAPAGAI » 321
du remanieur. Elle a pu lui être suggérée par ce «vergier
de mur serat» où le récif primitif situait, de façon bien
vague, la scène Au surplus elle était trop naturelle pour
qu'un remanieur, qui voulait renouveler le récit, pût négli.
ce qu'elle apportait en soi de pittoresque et de dramatique.
Mais ainsi, ni la version remaniée par Arnaut de Carcasses,
et qui nous est conservée par le manuscrit H, ni le récit
lui-même qui a servi à ce remaniement et qui, quoique moins
développé, en reproduisait les lignes essentielles ne sont la
forme primitive de la nouvelle du papa g ai. Contrairement
aux conclusions de Bartsch et de M. Savi-Lopez, c'est la
version J qui représente le récit original et ce récit est l'œu-
vre d'un inconnu.
Nous pouvons donc de ce même récit distinguer et retrou-
ver quatre états successifs. Le premier, qui n'est plus repré-
senté par nos manuscrits, était constitué essentiellement par
le récit dey débarrassé de l'addition du domnejaire et terminé
parles quelques vers de conclusion que cette addition a fait
disparaître. La version qui s'en rapproche le [tins est celle de
7, identique en son fond mais gâtée, vers la fin, par l'addition du
domnejaire. Le troisième état qui, lui non plus, n'estpas repré-
senté directement dans nos manuscrits, est celui de la ver-
sion qui est à la base du récit de R. Elle différait du récit pri-
mitif par le développement de la seconde partie, l'importance
nouvelle donné à l'élément purement extérieur et la ten-
dance à ridiculiser les maris jaloux. Enfin, le remaniement
d'Amant de Carcasses, est la dernière forme prise par le
récit. Elle est obtenue par le dédoublement de deux des
épisodes de la version précédente et ne cherche, en allongeant
la narration, qu'à prolonger le plaisir du lecteur.
Cette constance à remanier et à s'efforcer de renouveler un
même thème narratif, n'a rien qui doive nous surprendre. Elle
est bien dans les habitudes littéraires du moyen âge. Mais
elle confirme ce que nous savons par ailleurs du faible déve-
21
32 2 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
loppernent que reçut en provençal le genre de la nouvelle, et
d'autre part, elle rend plus frappante une pauvreté d'inven-
tion qu'atteste déjà la médiocrité du récit original. Déjà,
M. Savi-Lopez, avait très bien montré que la version de /?,
considérée à tort par lui comme le texte original, résultait
uniquement de la juxtaposition de deux thèmes très répandus
dans toute la littérature du moyen âge, celui de l'oiseau
messager d'amour et celui des oiseaux incendiaires1. C'est
non plus à Arnaut de Carcasses, mais à l'auteur de la version
remaniée par lui que revient le mérite d'avoir ajouté le
second thème au premier, en faussant, il est vrai, la concep-
tion de la nouvelle primitive. Quant à celle-ci, on voit main-
tenant à quoi elle se réduit. Elle est essentiellement, sous la
forme narrative, un débat sur l'une des questions sans doute
les plus rebattues de la doctrine courtoise. C'est une tenso
comme en échangeaient entre eux les troubadours. Qui sait
même, si ce débat n'a pas existé sous une forme lyrique? La
question qui en fait le fond, nous nous la posons encore quand
nouscherchons à démêlerce que fut l'amour courtois. Comment
les troubadours auraient-ils pu ne pas la discuter ? On voit
alors à quoi se réduirait le mérite de l'auteur de la nouvelle
primitive. Peut-être a-t-il uniquement consisté à transposer
sous la forme narrative une tenso lyrique et à introduire
comme interlocuteurs une dame sans individualité et un
papa g ai.
1 Savi-Lopez, op. cit., pp. 10-31.
DU « PAPAGAI» 32 3
NOTES CRITIQUES
La conclusion du travail qui précède c'est que l'édition de
la nouvelle àupapagai devait être comprise autrement que ne
l'a fait M. Savi-Lopez. Pour lui, R étant le seul manuscrit qui
contienne tout entière la nouvelle originale devait être à la
base de l'édition. Même pour la partie qui se retrouve dans
les autres manuscrits son autorité est incontestable, car il est
de beaucoup le plus rapproché du texte original, et les autres
remontant plus ou moins directement à une même source ne
représentent qu'une même tradition *. D'autre part, ceux ci
ne conservant que des textes remaniés, il n'y avait qu'à les
négliger pour ne chercher à reproduire dans sa pureté que le
texte original d'où R dérive directement. Par suite, l'édition
de la nouvelle ne devait être que la reproduction du manus-
crit R et il ne fallait avoir recours aux autres manuscrits qu'en
présence de lacunes certaines et de fautes évidentes. C'est
aussi ce qu'avait pensé Bartsch, qui, négligeant même toute
comparaison avec les autres manuscrits , s'était borné à
reproduire presque tel quel le texte de R, ne le corrigeant
qu'en cas de nécessité absolue et à l'aide de conjectures2.
Le texte de M. Savi-Lopez n'aurait donc pas dû différer
beaucoup de celui de Bartsch. A l'exception des lacunes de R,
qui devaient être comblées par la comparaison des autres
manscrits , c'était partout sa leçon qui, sauf impossibilité,
devait être préférée et reproduite. En fait, au point de vue de
la méthode, on reprochera au nouvel éditeur de s'être montré
beaucoup trop éclectique et d'avoir admis dans son texte des
leçons de J ou de G, les préférant sans raison à celles de R.
Cf. notamment aux vers 7, 14, 15, 36, 58, 60, 70, 77, 81, 82,
1 Cf. Savi-Lopez, op. cit., pp. 42-45.
2 Cf. Chrestomathie Provençale. f>* ùdit., pp. 259-266.
324 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
103, 137. Mais surtout Ton voit maintenant que les principes
mêmes qui l'ont guidé ne sont pas les viais. D'abord il semble
bien démontré que c'est J qui nous a conservé la nouvelle
originale. C'est donc le texte de cette nouvelle qu'il fallait,
avant tout, s'efforcer d'établir et presque exclusivementd'après
ce manuscrit. Pour la seconde partie c'est une nécessité,
puisque il est seul à la donner. Il n'y avait qu'à rejeter dans
un appendice ou même à supprimer entièrement le domnejaire
qui n'a rien affaire avec la nouvelle elle-même. Mais même
pour la partie conservée en commun avec G et avec R, c'est
encore l'autorité de J qui devait être prépondérante. 11 est, en
effet, le seul a donner le texte intégral et c'est lui seul qui
permet de combler les lacunes particulières kGetkR. Mais,
de plus, R étant un remaniement et son auteur ayant pris
avec le fond du récit les libertés que l'on sait, les leçons
particulières à /?, dans cette première partie, peuvent être,
elles aussi, considérées comme des changements arbitraires
du remanieur.
Par contre, une fois établi le texte de la nouvelle originale,
il y avait intérêt, en raison de l'agi ément de certaines de ses
parties, à publier le texte de R et à donner ainsi, après l'oii-
ginal, le remaniement. Ici le manuscrit R reprenait toute son
autorité. Une fois comblées, grâce aux autres manuscrits, les
lacunes certaines de son texte, il n'y avait qu'à le reproduire
en corrigeant seulement les leçons fautives. Telle aurait dû
être, à notre avis, l'édition double de la nouvelle du Papagai
Sur l'édition même que nous en a donnée M. Savi-Lopez,
voici quelques remarques et corrections suggérées par le
lecture du texte et des notes qui l'accompagnent*.
14. L'argument donné pour préférer la leçon de ./ que ùnsti
» On remarquera que, en trois endroits (v. 30, 48, 154), mes observa-
tions concordenl avec celles qu'avaient déjà faites M. Antoine Thoma
qu'il avait communiquées à l'auteur d'un i ipte-rendu paru dans la
Romania, XXXI. 169-170. Ce travail était rédigé quand j'ai eu connais-
sance de ce compte-rendu et je n'ai pas cru devoir supprimer les passa-
ges où jeine suis rencontré avec mon maître.
DU « PAPAGA1 » 325
per vos lu torney ne prouve rien. Dans tout le reste du pi
rien n'indique que la dame connût auparavant Antiphanor et
sa galanterie.
19-21. Sans doute ces vers n'ajoutent rien d'essentiel
qui a été précédemmeni exprimé, mais aux vers ?,'.)-'.) l
anc auzetz dir (pie dones
va ni que la prezentes
il est fait allusion à des paroles et à une proposition du papa-
gai qui disparaissent si, comme le fait fi, Ton omet les vers
19-21.
23. La leçon de J que d nuira esser poderos est aussi accepta-
ble que celle de II. L'antithèse entre mûrir et viure qu'admire
M. Savi-Lopez pourrait bien n'être qu'une recherche du
remanieur.
30-31. Ainsi ponctué, le passage n'a pas de sens. La note
correspondante confirma que l'éditeur n'a pas compris. Il faut,
évidemment, ponctuer
Et a li dig : « Amie, e don
Sai es vengutz e que sercatz ?
et entendre don = d'où.
45. La leçon véritable ne serait-elle pas celle de G non
amaz. Dans tout le discours de la dame il n'a pas été question
d' Antiphanor et l'on ne voit pas quel pourrait être régulière-
ment l'antécédent de lo dans non l'amatz. De plus, la réponse
de la dame n'est possible que si le papagai a parlé d'aimer
sans désigner précisément la personne.
48. Vouloir retrouver dans cal une forme du verbe caler,
c'est se condamner à ne pas comprendre. Comme l'avait bien
vu Rajnouard, cal n'est ici que le pronom interrogatif : « Et
vous [aimez] qui, ma dame ? »
S. Du point de vue même de M. S. L., il fallait conserver
ici la leçon de // nom vue h laissar.
91 92. On peut d'autant mieux accepter sas vertutz ou las
vertutz et y voir une personnification des vertus allant avec
Amour, que M. S.-L. lui-même (p. 13) cite un passage de la
Messe des Oiseaux de Jean de Condé, où le papagai enseigne,
dans un véritable sermon, les quatre vertus de l'amour:
obéissance, patience, loyauté et espérance.
526 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
93. La forme d'infinitif dezir = dir, dire, particulière à R,
est une forme unique et R est trop souvent fautif pour que
son autorité soit suffisante. Cf. E. Lévy, Provenz. Supplem.
Wœrterb., Il, 24, qui semble la considérer comme devant être
rejetée.
125. La leçon de R cabans d'un an est en contradiction
avec ce qu'a dit précédemment la dame, v. 105, Queu
m'acordaray en breumen. Le papagai est plus expéditif, cf. v.
193. Encar a nueg l'en menaray. Il faut évidemment corriger
cabans deman.
127-128. Aucune raison de supposer entre ces deux vers
une lacune. On ne voit pas, du reste, au point de vue du sens,
ce qu'on pourrait intercaler entre eux. On peut très aisément
entendre de layns même venant après le vers qui précède
dans R. La seule difficulté sérieuse c'est l'absence d'un sujet
nettement exprimé des verbes ac et es vengutz. Encore n'y
a-t-il rien là de particulièrement choquant. Le papagai est
toujours le principal acteur. C'est lui qui a parlé le dernier et
le vers 127 interrompant à peine le récit, il est facile de
suppléer le papagai comme sujet des deux verbes. La correc-
tion de M. Stengel Ab tan part de lor parlamen reste au sur-
plus possible, et R qui est le seul à donner le passage, n'a
pas une telle autorité qu'on ne puisse parfois le corriger.
141. Le manuscrit dit miray que Bartsch corrige en maney
qu'accepte M. Savi-Lopez. Il faut probablement lire intrey,
dont on s'explique plus aisément l'altération en miray.
144. L'éditeur imprime telle quelle la leçon du manuscrit
may volrCesser soutz que près, à laquelle il est bien difficile
de donner un sens satisfaisant. Ne doit-on pas corriger volria
en volia et soutz en lentz? « J'aimais mieux être lent, aller
lentement qu'être pris » ; ce qui concorde avec les précautions
du papagai pour pénétrer dans le jardin.
153-156. D'après ce que nous avons dit (cf. supra, p. 304-
3091 de la contradiction existant entre les vers 156-157, il faut
certainement rétablir comme il suit ces vers :
v. 153. Mas jes no sap per cal razo
v. 156. Jes no vos en sap cosselhar.
En outre, il faut corriger au v. 154 non prenguam en nos
prenguam.
DU « PAPAGA1 » 327
159. Corriger abrassatz en abrasatz.
1(50. La correction per esperulz est à rejeter comme inutile
et peu satisfaisante. Il faut, au contraire, maintenir la leç m
du manuscrit/^/- espatz, qui est une locution courante signi-
fiant à loisir, cf. E. Levy Provenz. Suppl. Woerterbuch, 111,
2 17. Il est certain que la correction de Bartsch be per espatz
est une conjecture ; elle n'en est pas moins très vraisemblable.
On ne voit pas pourquoi M. S.-L. se refuse à dériver espatz
de spatium, ni surtout pourquoi il n'admet pas une forme
espatz, au moins aussi régulière que espas.
173. La leçon du manuscrit Dona sel Dieu que vos criet est
évidemment fautive, puisqu'elle supprime la rime avec voletz,
mais la correction
Dona aisel Dicus que vos felz
qui suppose une double faute, n'est probablement pas la bonne.
Il faut, sans doute, lire Dona sel Dieus que vos creetz et
entendre creetz comme la 2e p. plur. In lie. prés, de crezer,
creire= croire: « Madame, le Dieu que vous croyez, en qui
vous croyez .... ». Bartsch corrigeait aussi de façon assez
voisine que vos crietz, mais il entendait crietz comme une
3e p. s. Ind. parf. de crear, ce qui est impossible. C'était, du
reste, le seul exemple qu'il donnât de cette forme. Cf. Chrestom.
provençale p. 435.
182. Etant donné que Yamislat d'Antiphanor est chose
acquise à la dame et qu'elle n'a plus à la souhaiter, ne doit-on
pas corriger per la vista d'Antiphanor? La. suite des idées
serait alors toute naturelle et l'on s'expliquerait qu'aussitôt
après, la dame se préoccupât des moyens de le voir. Cf. Dom-
nej'aire, v. 36, ni per para da ni per vista.
188. Mettre une virgule après meravelh.
193-196. Aucune nécessité au point de vue du sens de
supposer une lacune. De même, les vers 301-303 et 309-311
présentent des groupes de trois vers rimant ensemble sans
que l'on puisse davantage, pour le sens, soupçonner une
lacune. Cf. supra p. 311, note 3.
204. Corriger évidemment per fors' escantir. Je ne connais
pas d'emploi de per fort au lieu que la locution per forsa
est courante.
32S SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
224-225. Supprimer toute ponctuation après cami, sans
quoi il est difficile d'entendre viatz.On pourrait songer, il est
vrai, à le prendre pour une interjection: « Allons, vite »,
mais l'on ne connaît pas d'exemple d'un pareil emploi. Peut-
être faut-il tout simplement corriger viatz en anatz.
232. Il faut probablement corriger faitz me'n liurar. Cf. 234
li'n fa y liurar.
238. La leçon du manuscrit Vuna va et Vautra s'en enquier,
est évidemment fautive, mais ni la correction de Bartsch Vuna
ra et Vautra Venquier, ni celle de M. Savi-Lopez Vuna va,
Vautra s' en enquier, ne sont satisfaisantes. Quel sens donner au
verbe va ? Ce mot va est évidemment une faute pour uca, 3e p.
s. Ind. pr. de ucar, qui désigne l'habitude qu'avaient les guet-
teurs ou gâchas de huchier. Cf. Raynouard. Lexiq. V, 444,
citant en anc. français Tote noit fist ses gaites et huchier et
corner. Le vers tout entier doit être lu : Vuna uc e Vautra
enquier. « L'un crie, l'autre interroge ».
262. La correction /eu fag n'ai/ est une correction quel-
conque. On lirait avec au moins autant de raison : Ben fag
n'ay tôt V assemamen.
284. Ecrire de Vautre.
302. Ici encore, uniquement parce qu'il est choqué d'un
groupe de trois vers rimant en -etz, M. Savi-Lopez suppose
à tort une lacune ou une interpolation. Il est inexact, du
reste, de dire que en est segle exprime la même idée que tant
cant viuretz.
305. Corrieu a évidemment ici le sens de courrier, piqueur
et désigne le cavalier qui accompagne ou précède un per-
sonnage d'importance. Ici le mot est appliqué de façon
plaisante au papagai.
307. A notre avis (cf. supra, p. 314) il faut supposer ici une
lacune d'un vers qui pourrait être Delplazen papagai cor tes.
311. Si l'on admet que que-lslaisso a lorpes anar fait allu i m
au fait que la dame était enfermée dins un verdier de mur
serat, il est vraisemblable que le vers suivant contenait une
allusion à l'autre précaution attribuée au mari et à la pré-
sence des guetteurs ou gâchas. On pourrait supposer dans
l'original de R
DU « PAPAGAI » 329
Que*la laisso a lor pea inar
E ses (juchas, que may valra.
Continuation de J à partir du vers 1 1<>. Savi-Lopez, Op. cit.,
p. 62-64.)
5. Effacer la virgule après analz.
1415. Les deux vers
Per vostre papagai vos val
Car hieu vos vei tan plazeutier.
contiennent une contradiction. La <lame avoue à Antiphanor
que c'est à ce papagai qu'il doit d'être accueilli par elle. Il
faut donc corriger le second v ira et lire
Car hieu no-n vui tan plazentier
« Car je n'en connais pas d'aussi plaisant. »
37. Le manuscrit porte : Mas ieu non o die per vos qui est
fautif. L'éditeur propose : Mas ieu j a non o die per vos. On
corrigerait au moins aussi bien en lisant: Mas ieu non o die j es
per vos.
51. Aucune raison da corriger la leçon du manuscrit el cava-
le er près comiat. Ou ne voit pas pourquoi après es\ préférable
à /ires et l'emploi de comiat comme trisyllabique est attesté
par ailleurs.
Cf. 277. Et a ubert ses comiat
De las gâchas e mal lnr gi'at.
60. L'éditeur, après M. Stengel, conserve la leçon du
manuscrit
e prec vos que lo mien don man
à laquelle il est difficile de trouver un sens. M. Savi-Lopez le
reconnaît lui-même. Il faut certainement corriger lo mieu
doman. Le cavalier rappelle à la dame la demande qu'il lui a
faite aux vers 52 -■ La tonne doman est moins fréquente que
deman, mais a sûrement existé. Cf. E. Lévy, Prov. Supplem
Wcerterb., citant les formes doman dar, domandador.
330 SUR LA NOUVELLE PROVENÇALE
Texte du Domne faire (Savi-Lopez, Op. cit., p. 65-67).
3. Corriger évidemment totz vostres mandamenz.
45. Le vers est corrompu dans les manuscrits. Il faut cor-
riger e'm levatz paeis de ginoillos.
65. Le vers dompna per aquest sanz avangelis est probable-
ment altéré. Au point de vue du sens aquest ne s'explique pas
très bien. Mais surtout s'il faut considérer ce vers final comme
un vers isolé analogue au Senher marques qui termine les
épîtres de Raimbaut de Vaqueiras1, je doute qu'on puisse
admettre que ce vers avait neuf syllabes, le récit tout entier
étant en octosyllabes. Les Leys d'Amors connaissent bien un
genre de novas rimadas se terminant sur un vers isolé et
admettent bien que quel que soit le genre des novas rimadas,
annexas, parionas ou comunas, le dernier vers, verset, o bordo
peut être biocatz, c'est-à-dire incomplet. Le vers qui termine
les novas rimadas peut donc rimer avec un autre vers, ou
être isolé, et s'il est isolé, il peut ou non être incomplet. Mais
jamais on ne voit qu'il puisse êire plus long que le vers em-
ployé dans le corps du récit. Il faut donc faire un octosyllabe
du vers Domna per aquest sanz avangelis et corriger Domna
per los sanz avangelis. Cf. du reste au v. 33. E per los avan-
gelis sanz.
Jules Goulet.
1 Savi-L«pez, Op. cit., p. 35.
BIBLIOGRAPHIE
Emile Faguet, de l'Académie française. — La politique comparée de
Montesquieu, Rousseau et Voltaire. Paris, Société française (Timpi
de libr., 1902, in-16, 3,50.
L'auteur des Questions politiques et des Politiques et moralistes
du dix-neuvième siècle continue son enquête sur « les différentes
questions qui nous préoccupent, qui nous divisent et qui nous ruinent
depuis cent vingt ans », et, cetto fois, il cherche ce qu'en ont pensé
« les trois hommes les plus considérables du dix-huitième siècle »,
Montesquieu, Rousseau et Voltaire. Successivement il passe en revue
Vidée de patrie, — la liberté, — l'autorité, — l'organisation sociale :
socialisme et individualisme, — /<! centralisation et la décentrali-
sation, — le pouvoir judiciaire, — l'Etat et les Eglises, — l'Etal et
V éducation, — l'Etat et l'armée, — certaines réformes administra'
lives et de législation ; et, sur ces divers points, il constate qu'en
dépit de quelques hésitations et contradictions, les trois écrivains
représentent des doctrines fort nettes et distinctes. Montesquieu le
libéralisme, Rousseau le despotisme démocratique, Voltaire le des-
potisme royal. Quant aux opinions propres de M. Faguet, elles ne
s'étalent pas indiscrètement, mais elles se laissent voir partout, et ce
ne sont pas elles qui donnent au livre son moindre intérêt. Libéral
convaincu, M. Faguet est le plus souvent d'accord avec Montesquieu,
dont il accommode à notre temps les théories.
Sa conclusion est loin d'être optimiste :
« Le rêve de Voltaire, le vrai, la monarchie absolue, sous un titre
ou sous un autre, mais la monarchie absolue, ennemie de toute
liberté, concentrant tous les pouvoirs, intelligente quand elle pourra,
c'est-à-dire une fois sur dix, persécutrice, défiante, tracassière et
tyrannique toujours, protégeant peut-être les arts et les lettres, qui
n'ont pas besoin d'être protégés ; c'est à quoi il faut s'attendre et ce
qui nous attend. Ç'à été le premier résultat de la Révolution fran-
çaise, c'en sera le dernier. C'était la philosophie politique de Voltaire.
Elle sera réalisée. L'avenir appartient au roi Voltaire. 11 appartient
aussi au roi de Voltaire. »
Nous ne pouvons songer à examiner ici en détail, et moins encore
33 2 BIBLIOGRAPHIE
à discuter, un livre qui touche à la politique plus encore qu'à la litté-
rature. Mais il était bon de le signaler à l'attention de tous. On sait
de quelle variété de connaissances, de quelle intelligence pénétrante,
de quelle puissance de pensée témoignent les ouvrages de M. Faguet.
Il force à réfléchir ceux mêmes qui sont le moins disposés à l'approu-
ver. Et pourra-t-on jamais assez réfléchir sur les matières qui sont
traitées dans cet important ouvrage ?
Eugène Rigal.
Jules Lemaître, de V Académie française. — Quatre discours. Paris,
Société française d 'impr. et de libr., 1902, in-16, 2 fr.
Le volume de M. Jules Lemaître contient des discours prononcés à
diverses dates : sur Racine et Porl-Royal, — sur les Prix de vertu,
— en réponse à M. Berthelot, entrant à l'Académie française, — aux
Femmes du monde. Le premier seul touche à l'histoire de la littéra-
ture : il est exquis.
E. R.
Bernardin (N.-M.). — La Comédie italienne en France et les Théâtres
de la Foire et du Boulevard (1570-1791). Paris, édition de la Revue
Bleue, 1902, in-12, 2 fr. 50.
Auteur d'une très savante thèse sur Tristan l'Hermite et conféren-
cier toujours applaudi de l'Odéon, M. Bernardin, outre qu'il connaît à
fond l'histoire du théâtre, possède à la fois les qualités austères de
l'érudit, auquel la vérité est sacrée, et les qualités aimables de l'ora-
teur, qui doit plaire au grand public. Aussi n'y a-t-il pas lieu de
s'étonner qu'il ait expliqué avec exactitude et avec esprit comment la
comédie italienne s'est établie à Paris, comment elle s'est modifiée,
comment elle adonné naissance à l'opéra- comique. « C'est, dit-il, l'his-
toire de cette installation, de cette évolution, de cette transformation
enfin, que je veux rapidement conter depuis le seizième siècle jusqu'en
1791, m'arrêtant seulement aux faits principaux, aux écrivains les
plus célèbres et à leurs œuvres les plus importantes; car ce qui me
paraît intéressant ici, ce n'est pas de réunir une quantité de noms, de
titres et de dates, mais bien plutôt de dégager de ces œuvres oubliées
et parfois mutilées, l'esprit même de la Comédie italienne et de mar-
quer l'influence qu'elle a pu exercer sur notre Comédie nationale; et
c'est aussi de montrer la part que sont en droit de revendiquer fière-
ment avec elle les Théâtres de la Foire et du Boulevard dans cette
conquête de la liberté des théâtres, qui devait être si féconde en
heureux résultats ».
MULIOGHAPniE 333
Rien de plus agréable que la lecture île ce joli volume, d'ailleurs
orné de nombreuses illustrations. Si la Bibli<>thè</ue théâtrale illuth
que la Comédie italienne de M. Bernardin inaugure et qui paraîtra
sous la direction de M. Paul Ginisty, compte beaucoup d'ouvrages
comparables à celui-ci, son succès sera grand et de bon aloi.
Eugène Rigal.
Vendryès (J.). — Recherches sur l'histoire et les effets de l'intensité ini-
tiale en latin. Paris, Klincksieck, L902 XIV, 348 p.].
11 i a cinquante ans que Dietrich a émis l'ipotèse d'un accent
d'intensité initial en latin; elle lui paraissait indispensable pour
remlre compte de certains faits de siDeope et de mutation vocaliijue
qui apparaissent dans l'intérieur des mots de cette langue. Depuis, la
question a été maintes fois reprise, étudiée à nouveau, fouillée, retour-
née de toutes façons ; mais on n'est pas arrivé à des conclusions suf-
fisamment démonstratives pour entraîner toutes les adésions dans
un sens ou dans l'autre, et l'on peut dire qu'il reste deux camps en
présence dont l'un considère l'existence d'une intensité initiale en
latin comme un fait acquis et indiscutable, tandis que l'autre la
rejette comme une ipotèse dépourvue de tout appui et d'ailleurs
inutile. Ces derniers reconnaissent les mêmes faits de sincope et de
mutation vocalique que louis adversaires, mais ils croient pouvoir
les expliquer autrement, et chacun reste sur ses positions. 11 va de
soi pourtant que l'une des deux téories doit être erronée ; et il est
à supposer a priori que si ses adversaires n'ont pas pu démontrer
nettement par où elle prête le flanc, c'est qu'on s'est surtout borné
jusqu'à présent à étudier des points particuliers de la question indé-
pendamment des autres N'arriverait-on pas à une solution définitive
en reprenant tout l'ensemble du problème et en confrontant tous les
faits qui le concernent? C'est ce qu'a pensé M. Vendryès et ce qu'il
a essayé de réaliser. L'entreprise estardie, non seulement parce qu'un
sujet qui a été pendant cinquante ans remis sur le métier sans
résultat concluant par des savants de premier ordre présente évi-
demment des difficultés peu communes, mais encore parce que le
latin est l'une des moins claires de toutes les anciennes langues indo-
europénnes. L'auteur ne s'est pas fait d'illusions à cet égard, mais il
s'est senti mieux outillé que ses devanciers parce qu'il disposait de
deux instruments de plus, le contrôle de la fonétique expérimentale
d'une pair, et en même temps une métode nouvelle qui est en onneur
en Fiance depuis quelques années et qui consiste à éclairer les
Lingues mortes par les vivantes, à expliquer le passé par le présent,
et d'une manière générale lorsqu'un fénomèue est obscur dans une
334 BIBLIOGRAPHIE
langue et clair dans une autre, à user des lumières que fournit celle-ci
pour dissiper les ténèbres qui planent sur celle-là.
La première partie est destinée à donner une base solide à la
seconde. Elle a pour objet d'établir l'existence et de fixer les limites
de l'intensité initiale. L'auteur examine tous les témoignages dont
on dispose, c'est-à-dire ceux qui sont fournis par les langues roma-
nes, par les grammairiens latins, parlafonétique latine. Il arrive aux
conclusions suivantes : pendant la période classique, qui va du
II* siècle avant J.-C. au IVe après, la langue latine possédait la
distinction des longues et des brèves et de plus un ton ou accent de
auteur qui, suivant les cas, prenait place sur la sillabe pénultième
ou sur l'antépénultième ; pas trace d'un accent d'intensité. Dans la
période préistorique, le latin présentait les deux mêmes caractères
puisqu'il les tenait l'un et l'autre de l'indo-européen ; mais il avait
en outre un accent d'intensité, dû non pas à l'élévation de la voix,
mais à l'effort musculaire. Cet accent d'intensité, qui frappait l'initiale,
était une innovation du latin ; il cessa de se manifester à l'époque
où apparurent les premières œuvres littéraires. A la fin de la période
classique le sentiment de la quantité s'efface peu à peu, le ton devient
progressivement accent d'intensité et les sillabes accentuées s'allon-
gent tandis que les autres s'abrègent. Cet état de choses caractérise
une troisième période, la période romane, qui dure encore aujour-
dui.
La seconde partie est consacrée à l'étude des effets de l'intensité
initiale; les principaux sont la loi des mots iambiques, la sincope et
la mutation vocalique. Aucun de ces fénomènes n'est dû à l'intensité
seule, mais à la lutte de l'intensité avec le principe quantitatif ou au
concours de ces deux éléments. L'intensité suffit à expliquer le double
traitement sitis /dûs, mare/ far(r) ; mais elle ne rend pas compte à elle
seule du double traitement de abl et abïuissem; celui de abl résulte
à la fois de l'intensité initiale et de l'imprécision quantitative de la
finale. Le cas de senectùtem s'explique par le concours de l'intensité
initiale et du ritme quantitatif. On saisit en même temps pourquoi les
deux sillabes de l'élément iarnbique obi, senec- sont inséparables et
doivent entrer dans un même demi-pied, et aussi pourquoi un mot
commençant par trois brèves, tel que miser ia, n'a pas normalement
chez Plaute l'ictus sur \x seconde. La formule générale de la loi de
sincope reste telle qu'elle avait été énoncée en France en 1893, mais
on voit aujourdui pourquoi aucune sincope ne se produit dans les
mots du tipe facilius, ni dans ceux dont la seconde sillabe est lon-
gue de position.
En résumé, nous avons affaire ici à un excellent livre et la question
qu'il traite peut être considé nme définitivement tranchée. Aussi
BIBLIOGRAPHIE 33 5
ne chicanerons-nous pas l'auteur sur quelques menus détails qui
gagneraient peut-être à être interprétés autrement, sans que cela
change rien à l'ensemble. Nous n'avons pas dit que cet ouvrage est
une tèse de doctorat, parce que cela n'a aucune importance et n'inté-
resse personne, étant donné que certains obtiennent le même grade
avec des travaux dénués de toute espèce de valeur. Ce qui vaut
mieux, c'est de pouvoir constater que l'auteur est remarquablement
documenté et fait preuve de beaucoup de sûreté et de pénétration;
son étude marque l'apparition d'un nouveau linguiste digne de ce
nom, que nous ajouterons désormais à la liste si courte de ceux dont
la France pourrait s'enorgueillir.
Maurice Gkammont.
LIVRES ET BROCHURES ANNONCÉS SOMMAIREMENT
Ascoll (G.-J-). — Ancora délia sibilante tra vocali nel Toscano (Estralto
dair Archivio glottologico italiano), 1902.
M. Ascoli montre que l'a intervocalique latin est rendu en toscan
par s sourd dans les mots comme famoso, peso, preso, etc., & par s
sonore (z) dans les mots comme uzo, vko, uccizo, etc. Dans la pre-
mière catégorie l'a intervocalique provenait d'un ancien -ns-, dans la
seconde d'un ancien -88- simplifié après voyelle longue. 11 résulte de
la constatation de M. Ascoli une conclusion importante pour la pro-
nonciation du latin, c'est que l'a de famosus était nettement sourd,
tandis que celui de usu8 était sonore ou « volgente al sonoro ». Les
grammairiens latins sont muets sur cette différence de prononciation ;
mais, d'une manière générale, ils nous ont dit si peu de choses, & ils
ont si mal observé leur langue que leurs témoignages sont le plus
souvent à peine dignes d'être pris en considération. M. G.
Onoranze a Graziadio Ascoli. — Une brochure in 4°, 32 pp. Milano,
tip. Bernardoni di C. Rebeschini, 1901. (Pubblicazione del Comitato per
le Onoranze.)
Nous avons précédemment signalé [Revue, 1901) le volume de
Mélanges de linguistique publié pour fêter le soixante-dixième anni-
versaire de la naissance de M. Ascoli (10 juillet 1829) et le quaran-
tième de son professorat (3 janvier 1801). Le présent opuscule
complète ce volume de Mélanges. 11 contient un court récit de la
formation de ce comité, de son œuvre, de la fête où le volume fut
offert au vénérable professeur, et les discours prononcés en cette
circonstance. Le plus intéressant est celui de M. Ascoli lui-même,
qui a rappelé les origines de V Accademia scientijîco-letteraria de Milan,
où il professe, et présenté des hypothèses intéressantes sur ses
destinées probables. L'Académie devait être, selon la pensée de ses
3S6 CHRONIQUE
fondateurs, Mamiani, Carlo Tenca, Gabriele Rosa, etc., une sorte
de Collège de France, lombard et italien : elle est devenue une
Faculté de lettres de plus. Ascoli compte sur la transformation, pro-
chaine et nécessaire, de l'enseignement classique secondaire en Italie,
pour rendre inutile la coexistence, à Milan et à Pavie, de deux
facultés de lettres, et il espère que l'Accademia reprendra alors sa
destination première et son caractère véritable: « Risorgerà allora
per Milano l'aspirazione al gran modello del Collège de France, e
vuol dire la scuola che non fissa il numéro délie catedre, non i corsi,
non i programmi e anzi esclude la reiterazione di un medesimo
corso. » — Il est intéressant de constater la réputation de notre vieux
Collège de France à l'étranger, à l'heure où certains chez nous sem-
blent n'en pas bien comprendre la raison d'être et l'utilité.
L.-G. P.
CHRONIQUE
Dans un des derniers numéros de l'Archiv fur das Studium der neue-
ren Sprachen und Litteraturen (tome cvii, p. 338, suiv.), M. C. Appel
s'occupe à son tour de Vamour lointain de Jaufre Rudel et apporte
une explication bien originale. Uamors de terra lonhdana dont parle
le poète serait un amour éloigné de la terre (p. 343) et nous aurions ici
une des plus anciennes applications du langage de l'amour terrestre
à l'amour céleste. M. Appel qualifie lui-même son hypothèse de «(ha-
sardeuse » : mais les efforts qu'il fait pour la justifier et pour détruire
les objections qui se présentent l'amènent à une discussion des plus
serrées, qui, si elle n'entraîne pas la conviction absolue, a le mérite
de présenter l'énigme sous un jour tout nouveau. J. A.
Le docteur LudwigFraenkel, professeur au Gymnase réal d'Asehaf-
fenbourg, consacre dans les Berichte des freien deutschen Hochstiftes
de Francfort s. M. (Neue Folge, Band XVII) un intéressant article au
Kritischer Jahresbericht de Vollmôller. Nos lecteurs connaissent cet
annuaire si complet qui donne un résumé fidèle de tous les travaux
qui se rapportent à la philologie romane. Il se divise en quatre parties
principales : Grammaire des langues romanes, Littérature, Sciences
auxiliaires, Enseignement des langues romanes. Parmi les subdivisions
de la première partie, nous nous contenterons de citer : a) Grammaire
et Lexicologie de l'ancien provençal; b) Grammaire et Lexicologie
du provençal moderne; c) Ancien provençal (textes); d) Provençal
moderne (textes) ; e) Patois provençaux. Enfin, dans la subdivision
Grammaire du provençal moderne, une place est faite à la, Langue des
félibres. Cet aperçu , quoique incomplet, suffit à montrer la place
qu'occupe le provençal dans Y Annuaire critique de M. Vollmôller, et
les volumes déjà parus prouvent que ce n'est pas là un vain pro-
gramme. J. A.
Le Gérant responsable: P. Hamelin.
RECETTES DE FAUCONNERIE
ET ÉLÉMENTS DE MÉDECINE
Le texte de fauconnerie que j'ai publié dans cette Revue il y
a déjà longtemps (voyez a. 1896, t. xxxix, p. 289), est certaine-
ment l'œuvre d'un copiste italien qui prenait son bien ou il le
trouvait, entassant pêle-mêle des recettes latines, italiennes
et provençales; peut être avait-il sous les yeux un petit traité
de Peire de l'Astor. Les deux dernières recettes ne sont peut-
être pas de la même source; des mots comme ardoir (ligne
187) et le sel (à coté de sal) trahissent une provenance fran-
çaise pour l'avant-dernière ; et la dernière est toute eu italien
à peu près correct. Quelques mots demandent une correction :
ligne 4 saur 1. savi — ligne 39 salvar doit être salvatge —
ligne 59 le sens exige de biffer non — ligne 118 defea 1. defeci,
maladie dont parle Daude de Pradas au chap. LXXXVII de
son Roman dels auzels cassadors (Studj di filol. rom. V, 147).
Encore je ne sais pas quelle maladie, ni quel mot ce soit,
d'avoir fantamas aux pieds (1. 72) ; Yoli de sussoim (1. 157) est
peut-être sizaml = sésame ou huile de jvgeoline.
Dans le verso du f. 52, il y a encore quelques recettes trans-
crites de la même main, mais on ne s'est pas donné la peine
de les traduire ; elles sont pêle-mêle en italien et en latin.
Quelques formes des deux qui sont en italien (la lre et la 1 lme)
accusent une provenance, ou une habitude de prononciation
méridionale et probablement sicilienne : unu, de miillu. una
gamma, ïunu coll" autru, vinu caldu.
En voici le texte :
1. [Fol. 52 verso] Ad fare airare unu ociello che auesse retenu ta
soa piumata, falcone o astore — Prendi iij grana de scatapuzça et tre
grana depepe et partile per mezo, et poy le mitti tucte dentro duno
morsello de carne, et dalile seuçaltro, poy lo metti su la pertica et
lassalo stare, che uon de multu gectarâ la piumata et quello sella
xlv. - Septembre 1902, 22
i
338 RECETTES DE FAUCONNERIE
[ = se l'ha] ; se nolla (id.) gectarà pur quello. Allô spelveri o smeri-
glio dânelli per mita.
2. Ad faciendum prohicere plumatam : da sibi una?» fabam mundam
ia modico pastu, et statim ip[s]am prohiciet si ha&ebit, et erit levius
primo. Si est astu?' uel falco, da sibi duas.
3. Ad avem que haieret oua : da sibi cum pastu de uernice cuni qua
scribitur in q«(mtitate unius granelli tribus uicibus, et curabitur.
4. Pro aue habente dolorem. in pedibws : habeas lixiuun» cimas
édere et de sale, et fac omnia simul bulliri tamqwam cderaconsumatur,
et de illo lixiuio calido laua ubi dolet et curabitur.
5. Pro aue que haberet asmu?» : da ei de oleo recenti amigdalarum
dulcium, et sanabitur.
6. Ad auem que haberet malum in ore quae se non posset bene pa-
scere, ungas malum oris àictâe auis de suco celsarum, et in modico
tempore sanabitur.
7. Ad auem que haberet oculos pannosos : distempra çuccar cum
modica aqua, et ei mittas in oculis dictée auis [en marge : et claudas
oculos].
8. Ad auem quae haberet goreiam et pectus plénum da ei intestina
porcelle iuvenis, et eam vacuabunt. Et scias quod cor porcelle iuvenis
de lacté est optimum pastum [en marge : auibus qui sentienti (sic) de
lapide, uel que proiceret pastum], et detur ei calidum.
9. Pro aue que haberet tingiolam. Recipe cortices mali granati, et
cimas mortille, et fac bulliie in uino puro et lava locum.
10. Ad auem que prohiceret pastum : fac eum satis ieiunare, post-
modum pasce eum de uno aue uivo scoriato, non des sibi aliquod os
necpennam, et quod dédisses sibi in primo unosemel, dasibi in tribus
uicibus. Aliqui vero in magnam horam ante pastum ponunt sibi in
gorcia aliquantulum et parum vini greci uel boni vini cum modico
puluere gariophilortm, ut fétus discedat de gorcia, et ego satis laudo,
non fatigando auem illis tribus diebws postmodum.
11. Ad repunere una gamma che fosse rocta. Agi un poco de
oncenso, duy grana de sale, et pista lunu collautru et la chiara dellouo
et una peçça larga una oncia, et bangala colle sopradicte cose, et
legala bene et raderiçça bene la gamma, che serra guarito ad tre di.
Selli facesse tedio la peçça collo uinu caldu e^leualanne.
12. Ad curandum accipitrem de clouardo. Recipe radicem alidonie,
et conquassa aliquantulum, et recipe très maççocchios melli gi'anati
&niequam aperiatur, uel quasi sint in aperire, iiostmodum mitte \n
aceto, et peraiitte ibi, et de illo aceto fréquenter inunge dictum
clouum subtus pedem accipitris, et curabitur aceipiter.
13. Ad curandum accipitrem de clouardo: fac decoctionem balaus-
ET ELEMENTS DE MEDECINE 339
ti.nuin et uino albo pontico, elbulliat usqwe ad tertiam partem, e/ cum
illo uino misceatur acaçie holi armenici et calcis congelate ex frigore
in muro ; ana : partes equales, et misceantur in modum unguencti, et
utere. Deo gratias. Amen.
ELEMENTS DE MEDECINE
On peut, sans aucun manque de respect, passer des recettes
pour les faucons aux recettes pour les hommes. En effet, si
tous les étudiants de médecine, au moyen âge, n'avaient eu
d'autres traités pour apprendre leur art que celui dont je vais
m'occuper, j'avoue que j'aurais plutôt souhaité, à mon lit de
malade, le bon Peire de l'Astor, ou n'importe quel de ses con-
frères. La science médicale, quoique en pratique plus libre-
ment exercée, en théorie était encore enveloppée dans les
absurdités de l'alchimie et de la cabale astronomique dont
elle n'a pu se dégager que très tard ; même dans ses plus
illustres représentants, comme Arnaud de Vilanova, on ren-
contre cette fâcheuse alliance. D'où un certain air de mistère
qui voile l'exposition scientifique, un empressement enfantin
et minutieux d'employer des chiffres, des figures, des couleurs
conventionnelles pour dérober aux profanes les hautes vérités
de la science ; ce qui est, d'ailleurs, une des conditions carac-
téristiques générales de l'esprit au moyen âge. Mais nulle part,
je crois, on n'a poussé plus avant cette manie que dans le
petit traité qui suit. A ce qu'il paraît, on avait des Anlics
començaments de medicina, qui donnaient les préceptes usuels
en langue au moins intelligible : on donnait là les quatre dis-
positions du corps humain, calor, secor, humiditat, fredor aux-
quelles correspondent les humeurs colérique, mélancolique,
sanguine et phlégmatique. On en tirait une branqua en très
partes: natural, innatural et contra natura ; et quoique on
puisse se demander pourquoi, par exemple, menjar, heure, dor-
mir et vetlar soyent considérés comme innaturels, on pouvait,
en somme, comprendre cette science fantaisiste, mais claire.
Trop claire, même, pour le moyen âge ; et pour la couvrir on a
disposé une segonda branqua laquelle es novellament atrobada
a espondre la primera artificialment et methaphoricalment. On
a substitué aux mots des lettres et des chiffres en quatre
34 0 RECETTES DE FAUCONNERIE
couleurs, vert, bleu, rouge et marron, et on a compliqué
cette mosaïque par un excès d'abréviations capricieuses qui
rendent souvent la lecture très pénible l.
J'ai nommé plus haut Arnaut de Vilanova, parce que ce
traité est d'origine évidemment catalane, ce qui n'a pas em-
pêché que le manuscrit, qui est à la Marciana à Venise, ait
été catalogué jusqu'à nos jours entre les codici francesi. Le
Catal. Zanelli le désigne au n° XXV qu'il conserve encore
aujourd'hui et note : in-4° cartaceo, di fogli 58, del secolo XV
in circa. Trattato di medicina in lingua francese senza nome
d'autore. Il me semble de la fin du XIVe siècle. Et M. Ciam-
poli, dans ses Codici francesi délia Bibl. di S. Marco (Venezia,
Olschki 1897, p. 70, 71) n'ajoute que quelques indications sur
la mesure [0,290 x 0, 220] et sur V arbre des maladies qui en
forme le frontispice, dont il n'a pas bien lu certains mots, et
qui est nécessaire à l'intelligence du texte. Les extraits sui-
vants suffiront, je crois, à apprécier tout l'ouvrage.
En haut du frontispice, il y a, en rouge, le titre : « Arbre
DELS COMENCAMENTS DE MEDECINA ET LA RODA ES LA RAYT ».
Au pied de l'arbre, dont nous donnons un croquis à part, on
a, en rouge, cette déclaration :
« Dews que sois subirana uertut delà quai totes altres uertuts
receben comewcament et peHeccio ab gratta et ab ajuda uostra et per
ente?itio de uos honrar et seruir comenz lart que es dels comenca-
merats et dels graus de medicina per la quai luma eutenjment sexalça
sigue?it la manera delà art ahreujada de trobar ueritat a entendre los
secrets medicmals et naturels. »
[Fol. 1 verso], « del prolech »— 2 Com toda art aja sos comenca-
1 Dans les deux figures ci-dessous reproduites les couleurs ne sont
pas représentée? puisque le lecteur pourra s'en rendre compte en obser-
vant la diversité des lettres correspondantes. (Voyez la note de la page
suivante).
2 Je mets entre guillemets les rubriques qui sont en rouge dans le
manuscrit. En baut des pages et tout au long des marges, il y a des
indications sur la matière traitée dans le texte, des notes nombreuses,
des recettes en cbillre, de diverses mains, que je ne copie pas parce que
elles sont toutes en latin. Où le ms. porte le petit signe rouge qui
sépare les périodes, je sépare en allant à l'autre ligne. Je conserve
l'ortographe du texte, quoique souvent, à côté des formes correctes, on
en donne des fautives; la cédille, par exemple, manque ou est placée à
caprice.
ET ELEMENTS DE MEDECINE 341
inents pcr ço nos comenca/*; aquest libre en loa comencaments de
medecina per los quais haurem cône iments.
Départi»! aquest libre abreujadament en. x. distinctios ; la primera
es la disposicio de tôt lo libre. Segond' es del triangle uermeill. Tertia
es del triangle uert. Quarta es del triangle groch. Qiuta es del
c-mmncament dels graus. Sexta es de v io et corrupcio. Septima
es de febres. Octaua es de urjnes. Nona es de pois. Décima es
metafora.
« Delà primera distinctio delà disposzcio desta art » — Natura
de entenjment que entend mils per demostracio fêta per vista et per
ornament que per cor tant solament, et per co nos al comencament
libre formam .1. arbre esta manera per tal que ab les
il,;- rem ueritat de ço que encerca al hu?na entenjment, lo
qu il arbre es apellat arbre dels comencaments de medicina. La rayt
del arbrees una roda composta de letres significans los iiij humors et
<;o es departida en iiij partes, la primera part es delà colera,
md es <• t es delà fleuma, Quarta es de melcucolia.
lui enquadrangle es demostrada la. epuracio delà humor et la febra et
lo mesclament dels éléments et la major decesio delà febra et les altres
coses ques contenen eu la condicio del arbre.
A fer et aformar los demostraments ques coucnc» a aquesta art
sotsposam a esser calor, b secor, C humiditat, d fredor1. Et daquestes
letres compouem los quadrangles delà roda segons ques mesclen los
humors et segons que les unes han actio o passio en les altres et aco
tes demostrat en la rayt del arbre.
Delà rayt nexen dues branques. La primera es dels comencaments
de medicina segons que es recomptât per los antichs que son passats.
Aqwella branqua es en très partes : la primera es natura], la quai ha
.vij. dors, ço es a saber éléments, compactions, humors, membres,
virtuts, operacions, spirit. Item, ha en la dicta brancha .iiij. Hors, ço
saber état, calor, diuersitat de mascle et de femna, et forma. La ij
[segunda] es jnnaïural, la quai ha .x. llors, ço es a saber aer, exercici,
repos, menjar, beure, vetlar, dormir, eomplir, buydar, accidens danima,
ço es goig et tristitia. La iij branqua es contra natura, la quai ha .iij.
flors, ço es a saber malautia, causa, accidens.
1 Les lettres et les chiffres qui se rapportent à l'arbre des maladies
sont toujours dans le ms. en rouge, marron, bleu et vert selon la branca
à la quelle elles appartiennent ; pour pouvoir les distinguer typographi-
quement nous avons employa isset fort pour le rouge [a], le petit
-set pour le marron [b], la majuscule pour le bleu [C], et la petite
majuscule pour le vert [d],
34 2 RECETTES DE FAUCONNERIE
La sego?id[a] branqua es nouellame?it atrobada a espondre la pri-
mera artificialment et methaforicalment, et es departida en .ij. parts.
La primera part es departida en a b C d, la segond' es departida en
los .iij. triangles que son en los comencaments delà art abmijada a
tiobar ueritat, et en .j. quadrangle delà figura de predestinacio la quai
se conte en la art damunt dita.
La a es departida en .iiij. graus demostrats per les figures del algo-
rism ço es a saber en .4. 3. 2. 1. et aco meteix se seguex (sic) de a
b C n. Er' a demostrar los graus damuut dits coue elegir xvj herbes
en gênerai et cascuwa de significacio de les altres herbes que son de
sa corapliccio, et çascuna de les xvj herbes sia nomenada per letra a
ella apropriada per descripcio, per tal que mils et pus abreujadament
sen pusca fer demostracio, et coue que en les letres no sia .j. ques
sembla ab lo primer nombre dalgorism ni noy sia .x. que significa
no7?ibre de deu. Lo nom dels herbes et dels letres es aquest.
Vos sotsposam et deym que e es una spe<ia de simple medicina et
es en -I grau de a, et en 3 de b, et en 2 de C, et en 1 de d.
La f es altra spetia que es en 3 de a, et en 2 de b, et en | de C-
La g es altra speft'a que es en ^ de a, et en 1 de b.
La h es altra spe/ia qwe es en 1 de a.
La k es altra spetia que es ainsi de suite jusqu'à la dernière
spetia, la y que es en 1 de d.
Per estes letres decorre esta art, et sens que hom no sapia les letres
no enten la art.
Cascuna dels letres coue esser flor en larbre et coue hauer propria
color et sos graus, per ço que les letres et sos graus se couengue// a
fer la demonstracio ; hon per co nos apropriam a la : a. e. f. g. h.
color uermellaeiaquesta color metexa dona??i alsgrausque sondecalor.
A la : b. k. 1. m. n. dona??i color negra et aco meteix als graus que
son de secor. A la : C. 0. P. Q. R. donawi color blaua et aco meteix
de sos graus que significan hu??iiditat. A la: d. s. t. v. y. donam color
uert et a los graîts que son de fredor.
Lo triangle uermell es en très flors, ço es : comeHçament, miga et
fi. Lo triangle uert es en altres très fiors, ço es diuersitat, corecordanca
et contrarjetat. Lo triangle groch es départit en altres très flors ço
es a saber en majoritat, egualtatetminoritat. Lo quadrangle es départit
en .iiij. flors ço es: esser, priuucio, PERFEC10, defalliment.
Esser es de color uermella et perfeccio de color blaua [Fol. 2 verso]
et priuacio de color negra et deffalliment de color uert. Quin aqwesta
art uol entendre ni saber a saber li coue lalfabet damunt dit, et coue
que les flors del arbre traslat en altres flors mouables colorades per
tal que pusca demostratiuameut mesclar et formar et eguallar et erexer
o minuar ab les altres.
ET ELEMENTS DE MEDECINE 34 3
« Dels condicio//< àél arbre » '.
[Fol. 3 recto' « D< la enteaco Begons la qwal los ils trian-
gles son eu esta art » — « De la entencio per la quai es eu esta art
lo quadrangle et la rayt del arbre et generacio et corrupcto » — « D<
la entencio sego//s la quai tracta/// en esta art 'le febra et dorina etàe
pois et de methafora »: [Fol. 3 verso] Corn febra sia la pas uniuersal
malaltia et cor [l. corn] esta art sia abreujada per ço que en breu de
temps tragam de treball los scola>-> pobres i|«e perpobretat han treball
en continnar lo studi de medicina, et coin los comencaments uniuersals
son démonstrations als comencaments particulars, per co nos eu gen< rai
tracta/// de les febrea tanl solament etesquiu&m tractar de les altn -
malalties per ço que no alonguem lait, etc.
[Fol. 4 recto] « Comenca la .ij. distinctio et de .e. ».
Fol. 5 recto] « De miga et de .e. ».
Fol. 6 rectoJ « De fi et de .e. ».
[Fol. 8 recto] « Comenca la .iij. disti/ictio que es de diuersitat,
concordanca et conirarjetat e/ primerament de diuersitat ».
Fol. 9 recto] « De concordanca et de .e. ».
[Fol. 1 1 recto] « De c//n/m/-ietat et de .e. ».
[Fol. 12 recto] « De la .iiij. distinctio de maior, menor et equal cl
de .e. ».
[Fol. 13 verso] « Comenca la .v. distinctio en la quai se domastra
[sic) la manera segons la quai los grains deucn esser encercats ».
[Fol. 11 verso] « En quai manera coue encercar les kalitats dels
herbes segons los dits dels actors et segons los comencame??ts naît-
rais ».
[Fol. 15 verso] « Dels comuns comencaments narrais ab los quais
deuen esser encercats los graus en les coses medicinals ».
[Fol. 16 recto] « En quai mauera deuen esser encercats los .iiij.
gratis en la hu/nana spefc'a ».
rFoL. 17 verso] « Comenca la .vi. distinctio qne es de generacio et
de corrnpcio ».
[Fol. 18 verso] « De generacio et corrapcio en lo mesdames de :
e. f. g. h, k. 1. m. n, 0. P. Q. R, s. t. v. y. per orden segons ques
coue ».
[Fol. 10 recto] « De generacio et corrnpcio en animais »
[Fol. 20 verso] « De generacio et corrnpcio en los metalls ».
[Fol. 21 recto] « Comenca la .vij. distinctio de febres ».
[Fol. 22 verso] « De febra qwartana dobla ».
' Sauf un ou deux traits in!< re^sants, je me borne dorénavant à donner
les rubriques du texte.
344
RECETTES DE FAUCONNERIE
[Fol. 23 verso] « De tercana dobb/ ».
[Foi,. 24 recto] « De febra cothidiana » — « de febra continua et
aguda — « I i la .vnj. distmctio de urjnes » — [id. verso] « de
orina colerica ».
[Fol. 25 recto] « De orina sanguim/a » — « do orina fleumatica »
[id. verso] « de orina malincolica » — .< Comenca la .ix. distincio de
pois » — « de pois colerich ».
[Fol. 26 recto] « De pois sangujny » — « de pois fleumatich » —
« del pois melencolich» [id. verso] « La .x. distinccio de metha-
fora ».
(Fol. 29 verso] « De la spera de la nit » : Si tu fas de lanto o
daltre mettall o de paper una rota que a lo nom damurct dit et cpie es
jnstrument a conexn- les hores delà njt. lo quai jnstrument sia fet
segOHs esta figura tu poras metaforicalmejit apercebre per la figura
en quai ora delà nit regen a b C d plus fonne?it, car cada letra lia
sego«s lo moMJme/it del firmame/it major pu 1er en la .j. qî^adrangle
de la nit que en laltre ; et si tu aco coneixs poras saber la bora q«es
coue a donar la medicina segom ques coue ab la qiialitat dels letres et
ab les hores, et si tu estudies o uas per lo canii sabras conexer per la
spera en quai hora es de la nit.
ET 1 r BMENTS DE MÉDECINE 3 15
Pcr lo forât q I • ! • '
muntana cl ull par ço '|"-' mils 1 1 put
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i parlar delà comenca-
■ aatura io aem li aie
• al» ajuda i
de ;
11 ma compétence d ■ cherche)
quelle place peut oce i lité dans l'histoire de la
1 Environ à moitié du 'o.
1 Dans l.i ; a on a écril de main plus
lité qui suit au fol.
/ "• antequam legatur
Au
et 3î
incompl
ET I I BMENTS HE MEDECINE 347
Médecine. J'' me bornerai plutôt a rappeler ici '|u>' noua
avons, m Bologne, le Traité de Roger, mis en vers provençaux
(on en poasè le même ane tra Inetioo en prose), et à Florence
la version provençale du Traité d'Henry de Mon :■ ville'.
Une autre profession, 'l'une grande importance au moyen
âge, dont nous n'avions, que je sache, aucun traité eu pro-
vençal, et ijui tient également de lascience, pour sa manualité
pratique, et de l'art, pour les remarquables compositions
qu'elle nous a laissé, 681 celle de l'enluminure ou min ature.
Cette laoune vienl d'être comblée par le petit ti nivant,
trouvé et publié par M"e AnnaVolta, docteur ès-lettres -'. Le
manuscrit en est aussi à Bologne. Evidemment, la Haute-Ital e
du XIV" Biècle n'élait pas envahie seulement par les Trou-
badoui a ; au dessous de la poésie -e mouvait un large courant
de e ■• . - ;re en prose provençale, qui trouvait chez
nous un bon accueil et des louanges même excessives. ESn
effet, c'est bien contre la langue vulgaire de Provence « mca-
simamente di lingua à 0 ;ue le plus grand des Italiens éte-
indra : » la gran bontà del valgare di Si ».
A. R.BSTORI.
' Y. mon .11 i littér. prov.— Montpellier, Hamel n 1894, p. L23.
2 II <ira pub] i i ; i i 1 1 fasi
NOTERELLE PROVENZALI
1. Sopra due componimeuti di Cercalinon
Una data veramente fondata e taie da non sollevare dubbio
di sorta intorno a uno <le' primis3imi poeti di Provenzi c
sempre un buon guadagno per chi volga suo studio al primo
flore délia lirica occitanica.
LTacquisto riesce poi a niaggior ragione prezioso quando si
tratti di Cercalmon — o Cercamon J — , pel quale fanno
quanto mai difetto quelle notizie e quei dati sicuri , che si
desidererebbero intorno a un trovatore che possedette un'arte
assai raffinata e ad essa educô un célèbre poeta provenzale :
Marcabruu.
Il bisogno di guadagnare per la biografla di Cercaimon un
punto fisso, intorno a cui si fosse svolta l'attività poetica del
nostro trovatore, fu già sentito dal Rajna, il quale s'adoprô,
parecchi anni sono, intorno alla tenzone : Car vei fenir a tôt
dia 2 e trasse da essa alcuni ingegnosi argoraenti, che erano
sfuggiti ail' editore dei componimenti di Cercalmon :i e che
provano essore stata la tenzone scambiata nell'anno 1137,
dopo la morte di Guglielmo VIII, conte di Poitou e X duca
d'Aquitania, e prima délia assunzione di Luigi, figlio di Luigi
il Grosso, ad erede di parte dei^ossessi del Conte (9 aprile —
30 maggio 1137\
Dopo Farticolo del Rajna, comparve nella Zeitschrift del
1 Cercalmon dà sempre il ms. D in testa ai componimenti e nell' in-
dice a capo del codice
2 P. Rajna, Cercamon, Car vei fenir a tôt dia, in Romania VI,
j. 115-9.
3 Malin, Der troubadour Cercamon, in Jahrb. f. roman, u. engl.
Lit. I, 83.
NOTERFJ.LE PROVFXXAI.l 3-19
Grober uno studio di K. Zenker, che cercô di contestare
l'attribuzione délia tenzone : Car vei, contenuta in un solo
manoscritto,aCercalmou e penso di identificare il «maistre»,
che in essa figura, con Rainion de Mira val '. In tal modo
verrebbe tolto di mezzo Cercalmon e il componirncnto per-
dei'ebbe in gran parte il pregio délia sua ragguardevolis-
sima antichitù.
La questione era troppo importante per la storia délia lirica
provenzale perché a'.tri non sentisse il bisogno di ritornarvi
90pra. L'opinione del dotto tedesco trovù infatti un forte e
acuto oppositore in A. Jeanroy % il quale si studio di ricer-
care su quali fond amen ta si reggessero le nuove argomenta-
zioni e dopo un attento esame di esse, si mostiô disposto ad
accettare le conclusion! del Rajna scrivendo : « Je remar-
» querai que le système de M. Rajna les explique toutes (le
» allusioni storiche) de la façon la plus satisfaisante, tandis
» que celui de M. Zenker n'en explique aucune, lime semble
» donc qu'il est prudent de s'en tenir, jusqu'à nouvel ordre,
» en ce qui concerne cette pièce, à l'opinion exprimée ici, il
» y a treize ans, et de continuer à regarder la pièce Car vei
» fenir comme le plus ancien spécimen conservé de la ten-
» con 3 ».
a
Un nuovo testo di Cercalmon pubblicato da poco diploma-
tieamente negli Studi del Monaci e De Lollis4 viene a confer-
mare la relazione del nostro poeta con Guglielmo di Poitou e
ribadire la data del 1137. E questa volta la conferma è sicura
e non occorre certamente gran sforzo per dimostrarla taie.
Si tratta di un p/anh scritto da Cercalmon per la morte di
un « Conte de pitieu » (v. 13) che non puô essere altri che
Guglielmo di Poitou 3 Questi infatti mon il 9 aprile 1137 nel
i Zeitschrift f. rom.Pkil., XIII, 298.
- A. Jeanroy, Sur la tençon, Car vei fenir a tôt dia, in Romania,
XIX. 394.
k cit., pag. 'k>-\
* Studi di filol. rotn. iasc. 23, p. 5 delT estr (a0 IV).
- Recentissimamente la opinione é stata emessa dal Meyor in
Romania, XXXI. p. 1G0. Alla morte di Guglielmo VIII si alludc anche
da Maivabrun nell' ultima strofe del Vers del lavador, corne fece osser-
vare il Meyer stesso in Romania, VI, pag. 123. Si cl'r. V. Cresciai,
350 NOTERELLE PROVENZALÏ
santuario di Conipostella ' dopo aver compiuto un devoto
pelle grinaggio, e Cercalmon alludendo a cid, dice :
Saint Jacnie (ms. iacine), membre'us del baro
qe devant vos iai pelegris.
Il pianlo è adunque dei più iraportanti per la biografia del
nostro poeta e per la storia provenzale. Conservatoei in un
testo non del tutto corretto, si lascia in più luoghi migliorare
con non grande difficoltà e certamente formera buon argo-
mento di esame al futuro editore di una edizione critica di
Cercalmon.
Ma lo scopo délia présente noterella non è tanto quello di
segnalare Timportanza di questo pianto e di attestare con
un nuovo documento la data 1137, quanto di ricliiamare l'at-
tenzione degli studiosi sopra un componimento, che nel Grun-
driss del Bartsch figura sotto il nome di Peire Bremon Ricas
Novas, mentre nell' edizione del Mahn leggesi tra le poésie
di Cercalmon.
Il testo che ci intéressa : Pois nostre temps comenza a bru-
nezir, cosi com'è, puô infatti dar luogo a molti dubbi circa la
sua attribuzione2. Ma fortunatamente noi potremo d'ora in-
nanzi, giovandoci dell' autorità dello stesso canzoniere, cui
appartiene il planh, toglierlo al Ricas Novas e darlo a Cercal-
mon senza scrupolo di errare. Infatti, quel testo, quai è
conosciuto, è mutilo e manca precisamente di alcuni versi,
che tolgono di mezzo il problema, poichè, secondo un uso
assai noto nell' anticalirica di Provenza, contengono il nome
del trovatore. Questi versi vengon subito dietro alla 5 strofe
— l'ultima del Mahn — del nostro componimento e non
possono essere ritenuti un ' aggiunta posteriore per due
ragioni ; anzitutto perché la poesia sarebbe senza di essi man-
cante di tornada; in secondo luogo perché lo stile, il concetto
Testo critico e illustrazione d'uno dei più solenni canti di Marcabruno,
in Atti del R. Istituto Veneto di Scienze, Lettere ed Arti, T. LIX, P. II,
pag. 707.
' Rajna, Op. cit., pag. 117.
2 Rajna, Le origini délia Epopea francese, Firenze, 1884, pag. 517.
Quivi si tocca del nostro componimento sotto il rispetto metrico.
NOTERET.LE PROVËN2AL1 35 1
e le rime dirnostrano ch' essi vengono a integrare il testo di :
Pois nostre temps.
Eccoli nella lezione del ras. (pag 309).
Cercamonz di/. qe uas amors sirais. merauill es com pot lira
suffrir. (jira damor es paors e<esglais. enon pothom trop uiure
ni mûrir.
Fagz el lo ueis enon deu ueillezir. segon aisso qe monstra la
razos qanc bonamors. non galict ni frais, anz dona ioi als
arditz amoros.
Non mi è noto quale lezione per questo componimento dia
il ras. C, il solo che lo attribuisca a Cercalmon 1, e non so
conseguenteraente se ivi pure si legga questa doppia lornada.
Se si, potremo a maggior ragione ritenere questo nostro
testo opéra di Cerca'mon.
Se non ci siarao ingannati, due fatti abbiam cosi messi in
cbiaro riguardanti due diversi ordini di cose : l'uno si rife-
risce al piccolo bagaglio poetico di Cercalmon ; l'altro viene a
fissare un punto sicuro e a illuminare d'uno spiraglio di luce
le moite ténèbre, ond' è avvolta la sua vita.
Cercalmon eraguascone e suddito perô di Guglielmo VIII,
suddito affezionato e devoto, corne si apprende dalla strofe
IV dello stesso plank :
Glorios Dieus, a vos me clam
Car mi tolez aquel(s) q'ieu am :
Aissi com vos formetz Adam,
Lo defendetz del fel liam
Del foc d'efern qe non l'aflam...
Il pensiero del poeta si ferma perô in particolar modo alla
sua terra natale :
Gasco, cortes, nominatiu,
Perdut aves lo segnoriu.
Fer (ms. ser) vos deu esser et esquiu
Don iovenz se clama chaitiu,
1 Dal Grundriss parrebbe che C fosse edito in Malin, Gedichte, n° 908,
ma veramente qui abbiamo null' altro che la lezione di I, secondo la
quale il Malin dà il suo testo in Jahrb. cit.
35 2 NOTERELLE PROVENZALT
Qar us non troba, on s'aiziu,
Mas qan n'Anfos, q'a ioi conqis.
Chi sarà questo Alfonso? La scelta puô cadere sul re di
Castiglia e di Léon Alfonso VIII o anche sopra Alfonso Gior-
dano conte diTolosa dal 1112 al 1148.
L'uno e Taltro di questi principi fu cantato da Marcabrun
e nulla toglie ch' essi possano anche esser stati conosciuti
da Cercalmon, il quale, a sentir la biografia provenzale,
derivô il suo nome dal lungo suo errare di paese in paese. In
verità io non saprei decidermi frai due ' e parmi che l'allu-
sione si presenti in se troppo indefinita per permettere una
identificazione sicura. Un accenno storico j)iù importante
abbiamo nella strofe seguente : « Lo piangono Francesi e
Normanni e ben lo deve piangere il Re, a cui lascio la terra
e la proie ». Si allude chiaramente a Luigi, il cui figlio era
stato eletto da Guglielmo a sposo di Eleonora, che recava in
dote i dominî di Aquitania e Poitou.
Qesta allusione si riconnette a quelle, che trovansi nella
tenzone : Car vei, la quale fu certo composta intorno al mede-
simo tempo.
In questi due soli componimenti Cercalmon si compiace di
toccare avvenimenti del suo tempo : tutte l'altre sue poésie
sono ispirate alla natura e ail' amore e, benchè in générale
semplici e piane, rïsentono un po' di quel convenzionalismo,
che costituirà poi la nota prédominante nella lirica provenzale.
2. Un nuovo testo délia canzone
alla Vergine, Flors de Paradis,
e una parafrasi del Patfr.
Il primo testo è contenuto nel ms. Ashb. délia Laurenziana
luô:l-h, cosi magistralmente descritto dal Meyer 2, e sfuggi
sinora, ch' io sappia, ail1 indagine degli studiosi.
i II De Lollis (Studi di fil. rom., fasc. 24, p. 2 dell' estr.) tocca soltanto
di Alfonso di Tolosa.
2 Romania, X1Y, 485-548.
NOTERELLE PROVENZALI 353
A sottrarlo aile ricerche erudite concorse senza dubbio il
fatto che nel catalogo dei codd. Ashb., dovuto al Paoli , esso
è indicato corne un' operetta di carattere religioso in prosa '.
La sua importanza non è certo grande, ma non va dimen-
ticato che precisamente dal coufronto di questo componi-
mento col serventese di Guilhetn Figueiras contro Roma il
Rajna fu indotto ad esporre una nuovateoria intorno al génère
poetico del serventese 2. A questo titolo soltanto io offro ai let-
ton parte del testo del cod. laurenziano : 3
[Cod. Ashb. 105'-, c. 21r].
1 . Flors de paradis regina de bonayre auos imiren clins penedens
sens coruayre forfag emesquins preguas per mi saluayre que
guizes abon port e me gart de la mort dêferns don conort
degun homs nô pot trayre D neguna sort.
2. Uerges al mieu tort uoshay trop ofenduda repenedimen fort
(fort) requeri uostra iuda donas mi çfort que nô sie perduda
marma car caszut soy si la uertut dedieu non ânes al port el
fuoc nos defen daques trop deyfendut.
3. Uerges lo san frut que de uos près naysensa de dieu desendut
per uera cmoysensa nos arezemut de mort ede temensa siben
confesat siam et êpas dccort attirât aueracjnoycensa ploran los
pecast.
Tralasciodi citarealtre strofi perché il testo ashburnhamiano
non présenta alcuna particolarità di qualche rilievo; riporto
invece per intero una parafrasi ancor inedita del Pater, che
si legge, a c. 4 délia prima parte dello stesso ms. I primi versi
furono pubblicati dal Meyer.
1 I Godici Ashburnhamiani délia R. Biblioteca Mediceo-Laurenz. di
Firenze. Vol. I, fasc. 1°, Roma, 1887 (Pubbl. del Ministero délia Pubblica
Istruzione).
* Giorn. di filol. rom.,1, pag. 84. Si veda di contro : Bartsch, Zeitschrift
f. roman. PMI., IV, 439, ove si impugna l'antichità délia nostra can-
zone alla Vergine.
3 Si cfr. l'edizione del Bartsch in Denkmàler. 73, 26, e si tenga présente
che un altro testo di questa preghiera esiste, corne avverte il Rajna, nella
biblioteca di Siena.
23
S54 NOTERELLE PROVENZALI
Parafrasi in versi
del Pater '
[105* c. 4 r.]
Payre nostre qui es cels
Permas en toz savis feels,
Mons de pechatz et de ruzihls
Moudaz nos quauem nom tosfils
5 Degrasia que siecit plas
Tôt nom et nos santifia
Enaysi con sem drey crestia
De Crist siam fermet sertan
Eus comandament de ta ley
10 E que siam humil ues tu
Per lesperit delatemor
De te los nostre bon senhor
Per tal quelregne auer puscam
Celestial que cobeytam
15 Que auran si contuas dig
Cil que son paure en esperit
Pueys ti preguam ereqwerem
Bels dois payre si con deuem
Que anos lotieu règne uengua
20 Et enaysi mondar nos decha
Quel rené amnos enos amte
Bels sentier dieus si con couen
Per lesperit de pietat
Quens aias se ti plas donat
25 Per so que ben puscam tener
Leretatat quesperam auer
En terra de promecihon
On crecamrem gran guisardon
E gran ganh e gran benestansa
30 De durabla bonauransa
A quil cobedente sont
Tan can uion en aques mon
Preguem te per ta santeta[t]
Quens fassaz far satauclût (?)
1 Ne do una riproduzione struttamente diplomatica.
NOTERELLE PROVENZALI 355
35 Enterra sels quetamarant
Aysi com langcl elcel fan
En don lesperit de siensa
Que sapchamauer conoieêsa
Cnm nos puscam eschirgaytar
40 Dels diable e pusca?«. plorrar
Pels falhimens epels forfayt
Qua uem en aquet segle fag
Et après P laper donansa
Del ticu îenue hô ses dobtâs[a]
45 Crezem que serem confortât
Sil que con fes auran plorat
Senher doua nosalauzar
Lopa dont hom deu co?tforta[rJ
Las armas els cos cascundfar]
50 Ses erguelhe ses fellonio
Per lesperit dafortimentl l
Quauran tuit sil perfi t; |
Cui tu daras talauentur.i
Qaurant amasat dedrechuil
55 Quel celerchus coronat|
De te quies pas uin saludan|
Per douanas per ta mistat
Los pechat dont sera ecep|
E n aysi ean nos perdonan|
60 A toz fiels cil que tamaral
Per lesperit dacordamel
Car be sabem uerayanien
Que sil ueyran perdonas
Mas qui debon cor non perdon
65 [c. 4 v°] Ja non aura el sel corona
Mot ci deu doc espauentar
Tôt hom que nô uol perdonar
Quan lo payre nostre adig
Quenaysi con aue sauzit
70 Seguon drez eseguon razô
Cuer a dieu que aia nô perdon
Quar qui non a merce dautruy
Non es dreg dieus laia deluy
' La lineettn indica che il margine délia carta ù stato ritagliato forse
in causa délia legatora del codice.
356 NOTERELLE PROVENZALI
Apres si querem altre don
75 Non ameus en temtat ion
Ni non nos layces tan temptar
Que nos pucca sobremontar
Lo diable nostre enemic
Mas uers dieus et uers amies
80 Dam dam lesperit de ten demê
Que conosquam lentendemë
Del tempdador cui terrem
Etenaysi nos enguardem
Que paradis per ton plaszer
85 Puscam la tiua facia uezer
Dieus deyliyra nos de tôt mal.
E de nostre enemic mortal.
Lo diable que nos batalha.
Que nô es iorn que nô nos asalha
90 Dans lesperit de sabieza.
Que puscam uenser cobeeza.
Erguel e tôt los autres uiszes
Et en eysi cisplas nos guizes
Quem pas estem et permanhan
95 E pas anem emant enc guâ
Per tal que siam apellat.
Li tieu bon fil benaurat
E quecel gauc puccam gauzir
Que aurelha non pot auzir.
100 Uelhs uezer ni boca parlar.
Ni negu cor dôme pessar
Car aquest asaparelhat.
Atot sels que taurâ amat
Cest gaug aiam cominamë
105 Tuit li tieu fiel amen.
Giulio Bertoni.
(A suivre.)
LA TRADUCTION DU NOUVEAU TESTAMENT
EN ANCIEN HAUT ENGADINOIS
Par BIFRUN
L'G CUDESTH DELS FATS DALS APOSTELS
CAP. XVI.
(1) Et arriuô à Derben & â Lystram, & uhé un schert dis-
cipul era allô cun num Thimotheus filg d'ûna scherta duonna
liideaua, chi craiaua, mu l'g bab era Grec. (2) Ad aquaisti l'g
dêuan buna testimuniaunza tuots l's frars chi eran â Lystris
& ad Iconijs. (3) Aquel uous Paulus chi gies cun el, & Vg
hauiand prais in cumpagnia, schi l'g armundô el parmur dais
liileaus, quaîls chi eran in aquels lous. Perche tuots sauaiuen
che ses bab era Grec. (4) Et passand els très las cittêds, schi
dêuan é ad aquels aschantamains da saluer, quœls chi eran
hurdenôs dais apostels & dais preers quels chi eran â Hieru-
salem. (5) Et in aquella guisa las baselgias s'cunfarmêuanîlla
fe, & in immiinchia di creschaiua [451] l'g inumber. (6) Et
siand passés très la Phrygiam à la cuntrêdgia Galatica, &
chels eran scumandôs delg saine spiertdapredgiêr in Asia, (7)
schi sun els ieusin Mysiam, et apruêuan dad ir in Bithyniam,
& l'g spiert nu Fs laschô. (8) Mu cura che fiitten passés très
Mysiam, schi gitten é giu â Troadem, (9) & îlla not es stô
uais à Paulo iina uisiun,unhum da Macedonia chi eraauaunt
el &l'g aruêuadschant: VitteninMacedonia&n'ssacuorra.(10)
Et sco el hauét uis la uisiun, schi hauain nus impestiaunt
scherchiô dad ir inMacedoniam, siand aschertôs, che l'g signer
haués clamô nus â predgièr ad aquels l'g euangeli. (11) Et
par aqué cura che nusfûschen mufts da Troade , schi gnisthen
nus à dastaiséd. dastais cuors â Samothracem, <i. îlg di dsuain-
terâNeapolira(12)c\: dalonder âPhilippis, quaelachi es la prima
cittêd colonia da la part da Macedonia^. Mu nus dmurêuan
allô in la cittêd uerzequauns dis. (13) Et l'g di delg sabath
358 L G CUDESTH DELS FATS DALS AP03TELS
ischens ieus oura de la cittêd dspera Y g fliïm, innua chi
s'sulaiua fêr l'uraciun, & seziand faulêuans cun las dunauns,
quselas chi eran guidas insemmel.( 14) Et era iina scherta duonna
cun num Lydia, iina chi uendaiua purpur, de la cittêd da
Thyatiri, quêla chi seruaiua â dieu, chi atadlô : 6: l'g signer
aurit l'g cour d'aquella, par chella faschés sursen ad aquelles
chiôses, qua3las chi gniuan dittas da Paulo. (15) Mu si-[452]-
and battagiêda, ella et sia chiêsa, schi aruô ella, dschant :
Schi uus hauais giiidiohiô ch' eau saia fidêla agli signer, schi
gni aint et stêd in mia chiêsa. Et n'sstfurzô nus, (16) et
dchiappô giand nus â fêr uraciun, che ùna scherta matella,
quaela chi hauaiua l'g spiert da Pythonis, inscuntrô in nus,
quaela chi dêua iin grand guadang à ses patruns cun ingiu-
uinêr. (17) Et aquaista giet dsieua Paulum & dsieua nus
cv clamêua dschant: Aquaist[s] hummens sun famalgs dalg
hutischem dieu, & predgian â uus la uia delg saliid.
(18) Et aqué faschaiua ella bgiers dis. Mu hauiand Paulus
aqué inuidas, schi s' uuluét el & dis agli spiert : Eau cumand
à ti per l'g num da Iesu Christi, che tu giaias our d'aquella.
Et in aquell' hura giet el oura. (19) Et ueziand l's ses patruns,
che la spraunzada lur guadang fus sinida, pigliaun é Paulum
& Silam & l's trassen alla plazza tiers l's parzuras (20) & l's
apresthantand als mastrôs, dissen : Aquaists humens ingua-
rinan nossa cittêd, siand els Iiideaus, (21) & predgian mœds da
uiuer, quels chi nun ôdan â nus da prender sii né da saluer,
siand nus Rumauns. (22) Et currit l'g pœuel incunter els, &
l's mastrôs hauiand dstramô lur uesckimainta, curnmaVn-
daun chels gnissen battieus cun perchias. (23) Et cura chels
l's hauetten fat hgierras plêias, schi l's chiatschaun é in
praschun, cumandant alg guardiant de la praschun, chel l's
parchiiirâs cun [453] diligijntia. (24) Quasi hauiand arfschieu
tal cummandamaint l's chiaschô in praschun dadains, stran-
schand lur pês îlg schep. (25) Et da meza not Paulus & Silas
urant ludêuan dieu. Et aquels chi eran praschuns l's udiuan.
(26) Et subittamaing es gnieu iina granda terratrimbla, da
sort che l's fundamains de la praschun s'asthquassêuan. Et
impestiaunt sun auerts tuots l's hiisths, &. dsthliô l's liams da
tuots. (27) Et l'g guardiant de la praschun es astdastdô sii, &
cura chel uezét l's hiisths de la praschun auerds, hauiand trat
L G CUDESTI1 DELS FATS DALS APOSTELS 359
our la dêia, schi s' uulaiua el amazêr sesues, pissiand chels
praschunijrs fiïssen fiigieus uia. (28) Mu Paulus clamé ad liôta
uusth, dschant : Nu fêr A ti duessa iinguotta d'mêl, per che
dus ischen zuonds aqui. (29) Et hauiand dumandô ùna liûsth,
schi s'inscurzo el aint tremblant d' te m ma, cV s' bittô giu als
pes da Paulo & da Silœ, (30) l's hauiand mnôs oura, schi dis
el : Signer, che stou eau fêr, ch'eau uigna sait ? (31) Et els
dissen : Craia îlg signer Iesum, schi uainst ad esser salf tu &
tia chiêsa. (32) Et predgiaun agli l'g plêd delg signer, & â
tuots aquels chi eran in sia chiêsa. (33) Et el prandét aquels
in aquella prœpia hura d'not, & l's lauô giu las plêias, ce es
adiintrat battagiô & tuotta la sia braiêda d'chiêsa. (34) Mu
cura chel hauét aquels mnô in sia chiêsa, schi mattét el ad
aquels giu maisa, oc stet [454] led, par chel hauaiua craieu â
dieu cun tuotta sia chiêsa. (35) Et cura che uen di, l's mastrôs
tramtetten l's mes, dschant : Lascha ir aquels humens. (36) Et
l'g guardiaunt dis aquaists plêds â Paulo: l's mastrôs haun
tramis che uih daias gnir laschôs ir. Huossa dimê izen cun la
psesth. (37) Mu Paulus dis ad aquels: N's hauiand battieus
auertamaung, sainza udir la chiaschun, siand nus Rumauns,
cv n's haun chiatschô in praschun, ce huossa ad ascus n's
uœglian chiatschêr oura? Nha par l'g uaira, dimperse uignen
els suessa (38) & n's mainen oura. Et l's mes purtaun aquaista
uerua als mastrôs. Et els tmetten hauiand udieu che fussen Ru-
mauns, (39) & uennen & l's arua[u]n, et l's hauiand mnôs oura,
schi l's aruêuan é che giessen our da lur cittêcl. (40) Et siand
gnieus oura da la praschun, schi gietten é aint tiers Lydiam,
& hauiand uis l's frars, schi l's haun é cufurtôs & sun tiiôs
uia.
ANNOTATIUNS
Purpur] iina scherta gui.sa d' pan u d'ualiidda culur
d' briinchiœschen, chi sulaiuen iisêr l's grands signuors in
uesekimainta. Spiert da Pytkonh] un spiert dalg diêl Apolli-
ne, un spiert ingiuuinêl] un spiert dalg gimuni, chils acradan-
têua. Colonia] es iina cittêd quaela chels inimichs aguadaguen,
cv prenda oura la lieud chi es alaint, & metta aint lur œgna
lieud. par manti-[455]-gner la cittêd, sco faiuen l's Rumauas.
Maslrôs] superiours, arischaduors, pudastêts.
360 l'G CUDESTH DELS FATS DALS APOSTELS
CAP. XVII
(1) Et hauiand fat strêda très Amphipolim & Appoloniara,
schi uennen é â Thessalonicam, innua chi era la Synagoga
dais Iiideaas. (2) Mu Paulus suainter sia ûsaunza giet aint
tiers els & per trais sabaths dispùtêua cun els our da
las scrittiiras, (3) mettant! oura & apruand, che Christus
haués stuieu indûrêr à: aresiistêr dais muorts, 6: che aquaist
saia Christus Iesus, queel ch'eau ( dschaiu'el ) predgia â
uus. (4) Et qualchiiins d'aquels craietten, & s'accumpagnaun
cun Paulo & cun Sila, & bgiera lieud dais deuots Grecs & da
las inauaunt dunauns brichia pôchias. (5) Et l's Iiideaus, chi
nu uousen crair, amuantôs da l'inuilgia, hauiand prais cun
els in cumpagnia alchiùns sthgualanots d'iïna mêla uiita cV
hauiand araspô sii la lieud, schi amuentaun é sii la cittêd,
& faschand forza à la chièsa da lasonis, scherchiêuan dais
mnèr oura agli pœuel. (6) Et nu l's hauiand achiatôs, schi
traiaiuen é Iasonem & qualchiiins dais frars tiers l's parzuras
délia cittêd, clamant : Aquaists sun aquels chi haun sthguar-
dinô l'g erses de la terra, <k sun gnieus er aqui, (7) quels che
Iason ho prais aint ad ascus, & aquaists tuots faun incunter
Fs aschantamains dalg Cœsaris, dséhant, che sa-[456]-ia un
ôter araig Iesum. (8) Et amuantaun sii l'g pœuel, <k l's mas-
trôs délia cittêd, udiant aquellas chiôses, (9) et hauiand arf-
schieu buna cuntentezza da Iasone & dais ôters, schi l's
laschaun é ir. (10) Mu l's frars adiintrat in la not tramtetten
dauent Paulum &. Silam insemmel in Berrhœam. Qurels cura
che fiitten ariuôs, schi tiraun é uia in la synagoga dais
Iiideaus. (11) Mu aquaists eran dais plii nœbels trauntêr els,
d'aquels chi eran â Thessalonica, qusels chi hauaiuen arf-
schieu l'g plêd cun tuotta praistezza da la uœglia, examinand
inmiinchia di las scrittiiras, schi aquellas chiôses fiïssen
uschia, (12) &. bain bgiers d'aquels craietten, & er hundrêdas
dunnauns Grascas & hummens brichia pougs. (13) Et cura che
l's Iiideaus da Thessalonica sauetten ch'er â Berrhose fiis
predgiô l'g plêd da Paulo, schi uennen é, & er allô amu-
antêuan sii arimur. (15) Alhura impestiaunt l's frars tram-
tetten dauend Paulum, chil gies sco ir alg mêr. Mu Si'as cv
L'G CUDESTH DELS FATS DALS APOSTELS 361
Timotheus arumagneten allô. (14) Et aquels chi accumpa-
gnêuan Paulum l'g condiïsthetten infina ad Athenis. Et hau-
iand prais comischiun tiers Silam & Thimotheum che gnissen
su l'g plii praist tiers el,schi sun els tirôs uia. (1G) Et intaunt
che Paulus aspettêua els ad Athenis, schi s'asckiudôua sieu
spiert in el, ueziand el tuotta la cittêd chi era dêda alg
seruezzen de las immêginas. (17) Et el dimê disputêua in la
sjnagoga cun l's Iii- [457] -deaus (éd. Iùdia) & cun las per-
sunas deuotas, & in la plazza inmiimchia di cun aquels chi
giauen par uentiira tiers el. (18) Et iinqualchiiins philosophi
dais Epicureis & dais Stoicis chiampastêuan cun el, & qua-
lchiiins dschaiuen : che uuol dir aquaist schanschêdar? &
alchiiins ôters dschaiuen: el pêra esser lin chi disth da nuofs
dimunis, per che chel predgiêua ad els Iesum & l'aresiïs-
taunza. (19) Et l'g hauiand apigliô Yg mnaun é alla plazza
da Marcij, dschand : pudaia nus sauair, da che guisa saia
aquella nouua duttrina, queela chi uain da te araschunêda?
(20) Per che tu mettas aint in nossas uraglies schertas chiôsas
nouuas. Nus uulain dimê sauair, che aqué uuol esser. (21) Mu
tuots aquels da Athenis & er l's fullastijrs chi afdêuan allô,
nun attendaiuen ad ôter co dir u dad udir iinqualchiôsa da
noef. (22) Et stant Paul us in meza la plazza da Marcij, dis :
Hummens d'Athenis, eau uez uus intuottes chiôses bunamang
memraa supersticius, (23) par che passand eau très & cuschi-
drant las uossas deuociuns, schi hse eau acchiattô un hutêr, in
aquœl stêua scrit sii : agli nun cunschieu dieu. Aquel dimê che
uus nun cunschiand hundras, aquaist predg eau â uus : (24) Deus
quasi chi ho fat l'g muond & tuottes aquellas chiôses chi sun in
el. Aquaist siand signer delg schil & da la terra, nu sto in
taimpels fats cun mauns, (25) né [458] uain agli seruieu cun
mauns humauns, nun hauiand el bsiing d'unqualchiôsa, siand
el quasi chi do â tuots lauitta& rgflêdpertuot:(26) & ho fat our
d'un saung tuotta la giniïra délia lieud, par chella afdâs sur
l'uniuersafatscha de la terra, & ho determinô hurdenôs tijmps,
& ho ourauaunt ifichiô aint L's terms da lur afdaunza, (27) par
che scherchiassen dieu, schi par uintiira l'g apalpen <k l'g
acchiatten, cutibain chel nun es dalœnsth da scodiin d'uus. (2*)
Per che très el uiuain nus & n's amuantains (éd. amuantaim)
& ischens : da co ch'er qualchiiins dais uos poets haun dit : Nus
36 2 L'G CUDESTH DELS FATS DALS APOSTELS
ischen er da quella sclatta. (29) Siand nus dimê de la sclatta
da dieu, schi nu daiuen nus pisser, che la deitad saia sum-
giaunta agli ôr c\: argient, u ad iiua pedra intagliêda cun art ;
u â qualchiôsa spiêda delg hum. (30) Et hauiand deus infina ad
in huossa laschô passer uia F s tijraps da quaista ignuraunza,
huossa fo el assauair alla lieud, per che tuots da per tuot im-
giuran ; (31) par chiaschun chel ho aschantô iin di, in aqurel
chel uain â giiidichêr cun giiistia Y g crês de la terra, très aquel
hum, par aqo?ul el ho hurdenô, hauiand fatfe â tuots, cura chel
l'g ho hagieu astdastdô su dais muorts. (32) Et cura chels
hauetten udieu l'aresustaunza dais muorts, alhura alehiiins
ariauen del, & alehiiins dschaiuen: Nus uulain aunchia d'a-
[459J- que udirte. (33) Et uschia Paulus es ieu our da miz els.
(31) Et qualchiiins humens stand tiers el craietten agli, in
aquaels era Dionisius areopagita(éd. arœpagita)<k iiaa duonna
cun num Damaris, & ôters cun els.
ANNOTATIUNS
Phi/osopJii] amêdars de la sahbijnscha. uschia anumnèuan
é l'a sabbis da tijmp uijlg. Epicuri u Epicurei] eran lieud
d'iina upiniun, chi managiêua, che la mêr beadijnscha fus â
uiuerbain & à triuphêr senza ôter pissijr in aquaist muond.
Stoici] eran d'iina upiniun, che la mèr beadijnscha fus â
uiuer hunestamang ec indret, & nu pigliêr pissijr da las
chiôses da quaist muond, dimperse las laschêr passer uia.
Areopagita] iin acusglijr u giudisth ad Athenis.
CAP. XVIII
(1) Dsieua aqué es Paulus tirô uia our da Athenis, 6: uen
â Corinthum, (2) c\; hauiand acchiattô iin Iiileau cun num
Aquila de la naciun Poutieus,qua3l chi era gnieu da poick da
Italia cun sia mugliêr Priscilla, par chiaschun che Claudius
hauét cumandô che tuots Iùdeaus dessen s'pariir our da
Ruma : <k el giet tiers aquels, (3) perche el era d'aqué prœpi
îuastijr, schi stêua el tiers aquels & lauurêua. Et lur art a?ra
da tessijr pauigliuns. [460] (4) Et dispiitêua inmùnchia
LG CUDESTH DELS FATS DALS APOSTEI.S 303
sabath in la synagoga, & intraguidcua l's Iudeaus & l's Gr^es
insemmel. (5) Mu cura che Silas cV Timotheus fiitton gnieus
da Macedonia, schi gniua Paulus stranschieu delg spiert, chel
doua testimuniaunza als Iiideaus che Iesus fus Christus. (6) Et
cunterds liant aquels & blastraant, hauiand el sthquassô giu
sia uesckimainta schi dis el ad aquels : Vos saung saia sur
uos chiô. Dad huossa inuia uœlg eau ir net tiers l's paiauns.
(7)Etsingiét dalô & giet aint in la chiêsa dad'iin, quasi chi hau-
aiua num giiist, qusel chi seruiua â dieu, la chiêsa da qusel
tnchiêua la synagoga. (8 Et Crispus parzura de la synagoga
craiétagli signer cun tuotta sia chiêsa, &: bgiers dais Corin-
ters udiant craiauen & gniuan battagiôs. (9) Et l'g signer dis
d'not très iina uisiun â Paulo:Nu tmair, dimperse fauella,c\:
n u taschair, (10) par aqué ch'eau sun cun te, & iïngiiin nu uain
â t'assaglir par t'dêr fadia, per che ch'eau hae un grand poeuel
in aquaista cittêt. (11) Et stet allô un an & sijs mais amus-
sand aquels l'g plêd da dieu. (12) Mu siand Gallio guuerna-
dur dal'Achaiae, schi s'aluaun su l's Iudeaus pariina incunter
Panlum, & l'g mnauii allahaunchia de l'araschun (13) dschant:
Aquaist intraguidalalieud daseruir â dieu incunter la lescha.
(14) Et in aquella che Paulus s'pardarschaiua par aurir la
[461] buoehia, schi dis Gallio als Iiideaus : 0 Iudeaus, self elg
es qualch ingiiirgia u quai niêl trat, schi ataidl eau uus
appussaiuel : (15) Mu sch' elg es dabat dalg plêd u da nums
& da uossa lescha, schi guardô uus suessa. Per che eau nu
uœlg esser giiidist[h] daquaistas chiôses.(16)Et dsthchiatschô
aquels uia da la baunchia de l'araschun. (17) Et tuots Graecs
hauiand appigliô Sosthennem parzura de la synagoga Vg bat-
taiuen auaunt la baunchia de l'araschun né Gallio hauaiua
ùngiuna chiiira d'aquellas chiôses. (18) Et Paulus dalonder
inuia es dmurô allô bgiers dis ; alhura hauiand prais cumiô
dais frars nauigiô in Syriam, Tgaccumpagniand Priscilla cv
Aquilla, dsieua chel haués araes l'g chiô in Cenchreis, per che
chel hauaiua uut. (19) Et dsieua arriuô el ad Ephesum & laschô
aquels allô. Et el giet aint in la synagoga <k dispiitêua cun
l's Iudeaus. (20) Et aruand els chel uulés plu bgier tijrap stèr
cun els, schi nu uous el dêr tiers, (21) dimperse prandét cumiô
dad els, dschant : Eau stou ignameed fêr la festa chi uain fi
Hierusalem, mu schi deus uoul schi uœlg eau darchiô turnêr
364 L'G CUDESTH DELS FATS DALS APOSTELS
tiers uus. Et muet da Epheso, (22) & cura chel fut arriuô â
Csesaream Oc chel fut ieu sii oc hauét saliidô la baselgia, schi
giet el giu ad Antiochiam. (23) Et dmurô allô un pô d'iin
tijmp, oc es chiaminô, giand très da lœ in lœ suainter huor-
[462] -den l'g paias da Galatica oc da Phrisgia, cunfermand
tuots l's discipuls. (24) Et un schert Iiideau cun num Apollos,
da naciun Alexandrin, un hum parlaint, ariuô ad Ephesum,
chi era pusaunt in las scrittûras. (25) Aquel era intraguidô
in la uia delg signer, oc fafiêuacun Yg spiertbugliaint,cc amus-
sêua cun diligijncia aquellas chiôses chi sun delg signer,
sauiand sullamaing l'g bataisem da Iohannis. (26) Et aquaist
cumenzôâfafiêrliberêlmang in la synagoga.(27) Qusel hauiand
udi.;u Priscilla oc Aquilla l'g prandetten tiers els, oc mettet-
ten our â gli plii perfettamaing la uia delg signer. (27) Et
uuliand el ir in Achaiam, schi l'g intraguidaun l's frars, oc
scriuetten als discipuls, che l'g dessen arschaiuer. Qusel siand
arriuô, ualét bgier ad aquels chi hauaiuen craieu très la
gracia. (28j Per che chel cuuanschaiua fickrs Iiïdeaus, amus-
sand auertamang très las scrittiiras che lesus era Christus.
ANNOTAT1UNS
Claudius] qusel chi era imperadur â Ruma.
CAP. XIX.
(1) Et es duantô siand Appollos â Corinthi, che Paulus
siand passô très l'g paias zuras chel uen ad Ephesum, &
hauiand achiattô alchiùns discipuls, (2) dis ad aquels : Nun
hiuais uus arfschieu Tg saine spiert, da pœia che uus hauais
craieu ? Mu [463] aquels dissen ad els : Bain plii nus nun
hauain pur udieu, schi l'g es Tg saine spiert. (3) Et el dis ad
aquels : Schi cun che bataisem dimê isches battagiôs? Et els
dissen: Culg bataisem da Ioannis. (4j Et Paulus dis: Ioannes
ho bain battagiô culg bataisem de l'aruflijnscha, dschand agli
pœuel da quel, qusel chi daiua gnir dsieua el, par che craiessen,
.que es da Christo Iesu. (5) Et hauiand udieu aqué schi sun
els battagiôs îlg num dalg signer Iesu. (6) Et cura che Paulus
L G CUDKSTH DELS FATS DAI.S APOSTELS 365
liauét mis l's mauns ad aquela, schi uen \'g saine spiert sur
els, & failêuan launguax et profesêuan. (7) Et erari tuots
intuorn dudesth humens. (8) Mu siand ieu aint in la synagoga,
schi fciflêua el trais mais da lung, disputant & intraguidant
delg ariginam da dieu. (9) Et cura clie alchiiins s'indiiritten
né craietten, dschant mèl auaunt la lieud de la uiadalg signer,
schi es el tirô uia our da quels, & ho zauurô oura l's discipuls,
dispiitand inmiinchia di in la scoula dad un schert Tiran.
(10) Et aqué es duantô duos ans da lung, da sort che tuots
aquels chi afdêuan in Asia, udîuan l'g plêd dalg signer Iesu,
l'a li'uleaus & l's Grades insemmel. (11) Et deus faschaiua très
l's mauns da Pauli uirtiids brichia commiinas, (12) da sort
che s' purtêuan er da sieu chiœrp l's fazolets & las schintas,
oc l's mettaiuen su l's amallôs, par che las malatias tirassen
uia dad els, oc l's mois spierts giessen oura. (^13) [464] Mu
qualehi uns dais Iudeaus, quael [s] chi giauen intuorn scungiiirand
apruaun de clamer in agiûd sur aquels, chi hauaiuenl'g mêl
spiert, l'g num dalg signer Iesu, dschant : Nus scungiurain
uus par Iesum, qusel che Paulus predgia. (14) Mu elg era
scherts set filgs da Sceua Iiïdeau parzura dels sacerdots,
quœls chi faschaiuen aqué. (15) Et Tg mêl spiert arespondiant
dis : Eau eugniousth Iesum & eau sae Paulum, mu uus chi
isches? (16) Et l'g hum, in aquœl chi era l'g mêl dimuni, saglit
in aquels & l's hauét sur maun oc l's uanschét, da sort che
lugitten our da quella chiêsa, niids & plaiôs. (17) Et aqué es
gnieu â sauair â tuottels Iudeaus & Grsecs, qusels chi stêuan
ad Ephesi, cV es gnieu una granda temma sur aquels tuots, &
l'g num dalg signer Iesu gniua adhuzô. (18) Et bgiers da quels
chi craiauen, gniuan ce cunfessêuan, & dschaiuen oura lur
fats. (19) Et bgiers dels, qusels chi hauaiuen adruô arts da
striceng, hauiand purtô insemmei l's cudesths, & schi l's
ardetten é auaunt tuots ce siand fat quint da lur pritsths, schi
acchiattaun é da schinquaunta milli danêrs. (20) Uschi ferm
craschaiua l'g plêd da dieu & s' cufermêua. (21) Siand cum-
plieu aqué, schi prandét Paulus auaunt se l'g spiert, che cura
chel aués passé Macedoniam &Achaiam, chel uulés ir â Hie-
rusalem, dschant : dsieua ch'ea(sic) uing ad esser stô allô, schi
stou [465] eau er uairRuma. (22) Et hauiand tramis duos da quel s
chi l'g seruiuan, numnêdamang Timotheo oc Erasto, in Mace-
366 l'g CUDESTH DELS FATS DALS APOSTELS
doniam, schi arumagnét el par un tijrnp in Asiam. (23) Et in
aqué tijmp es aluô su sthguardin brichia pitschentrês aquella
uia. (24) Per che un schert cun num Demetrius, lauurêdar delg
argient, qusel chi faschaiua chiapellas d'argient da Diana?,
dêua brichia pitscben guadang als artischauns, (25) quaels
bauiand el clamô insemmel, oc er aquels chi eran laurains da
tal chiôses, dis: Humens, uus sauais che our da quaist mas-
tijr es â nus guadang, (26) & uezais & udis che brichia sullet-
taniang ad Ephesi, mu bunamang per tuotta l'Asia aquaist
Paulus ho surpladô & uuluieu un grand pceuel, dschant che nu
saien disels, aquels chi uigna[u] fats cun maun. (27) Et brichia
sullettamaing uain aquaista part â nus in priuel, chella nu
vigna arfiidêda, mu bain er che l'g taimpel de la grauda diela
Diana uigna aestmô par iinguotta, èc che uigna â gnir che
uigna er sthdriit la sia maiestêd quaela chi guard'oura tuotta
l'Asia et l'g muond. (28) Hauiand aquels udieu aquellas chiôses,
schi sun els gnieus plains d'ira, & bragitten, dschant: La
granda Diauna dais Ephesers. (29) Et tuotta la cittêd es gnida
plaina d' confusiun & pariina faschetten els iin sthfors îlg
Theatro, <k apigliand Gauis et A -[466]- ristarcho da Mace-
donia cumpagniungs da Pauli. (30) Et uuliand Paulus ir aint
tiers l'g pceuel schi nulg uuosen laschêr ir l's discipuls. (31)
Et qualchiùns er dais priims da Asise, quels chi eran ses amichs,
tramtetten tiers el, Yg aruant chel nu s' laschâs aint îlg
theatro. (32) Chi clamêua par aqué d'ùna guisa, chi clamêua
d'un' ôtra. Per che la communitœt era suot sura, oc la mêra
part nu sauaiuen perche chiasohun els liissen gnieus insemmel.
'33) Et traietten our delg pceuel Alexandrum l'g astumpland
oural'slùdeaus. Et Alexander hauiand culg maunaggiauuschô
che s' taschés, uulaiua arender araschun agli pceuel. (34) Quasi
sco els cunschetten chel fus un liideau, schi s1 aluô su iina
uusth da tuots bunamang duos huras dalung da quels chi cla-
mêuan : La granda Diauna dais Ephesers. (35) Mu cura che l'g
scriuaunt hauét aquaidô l'g pœuel, schi dis el : Humens
Ephesers, chi es aquel hum chi nu sappia che la cittêd dais
Ephesers saia seruiainta de la granda diaela Diauna tk da l'imê-
gina gnida giu da loue ? (36) Siand dimê ch'ungiiin ad aqué nu
cunterdia, schi bsiigniasses stêr quaids, ce nun fer iinguotta
memma imprescha. (37) Per che uus hauais mnô aquaists
l'g cudesth dels fats dalô apôsîels àêl
humens, chi nu sun né lêdars da baselgias né blastmaduors in
la uossa disela. (38) Che schi Demetrius c\: aquels artischauns
chi sun cun el haun qualch araschun incunter al -[467]-
chiiin, schi es é drachiùra c^: sun guuernaduors; s'acchiùsen
liiin liôter. (39) Mu schi elg es che uus s1 dumandês da ôtres
chiôses, schi s' ladina cun iina ligiaisma communitêd. (40) Per
che elg espriuel, che nus nu duaintan culpauns da quaist ari-
mur d'huoz, nun hauiand alchiiina chiaschun cun aquôla che
nus possan arender araschun da quaista curraria. Et hauiand
dit aqué schi laschô el ir la communitêd.
ANNOTATIUNS
Diê/s et diêlas] dees u deas dais paiauns. Theatrum] l'g
palaz. un lœ innua chi si fo tramelg u cusselgs u drachiiiras u
cumoen. Schinqunnia milli danêrs] fo 125.000 sckiiids. da
loue] da lur deus Inpiter.
CAP. XX.
(l)Mu dsieua che fût passô uia la rimur hauiand Paulus
clamô Ts discipuls tiers se, schi imbraschô el aquels & es tirô
uia par ir in Macedoniam. (2) Et siand passô très aquels
paias & hauiand mis â maun ad els, schi uen el in Greciam, (3)
& cura chel fiit stô allô trais mais, schi agli mis dsieua spias
dais Iiideaus, cura chel era par nauigiêr in Syriam, & el
hauaiua îlg sen da turnêr très Macedoniam. (4) Ma Sopater
da Berrochae l'g ho accumpagnô infina in Asiam : & da Tessa-
lonica Aristarcus & Secundus & Gaius Derbseus & Timo-
theus. [468] Et de Asia Tychicus & Trophimus. (5) Et aquels
passauri auaunt <k aspettaun nus â Troade. (6) & nus dsieua
l's dis dels Azijms nauigijschens da Philippis & ariuaschen
tiers aquels â Troadem in schinc dis innua che nus hauain
dmurô set dis (7) Et îlg prûm di da l'hemna, siand gnieus
insemmel Ts discipuls par arumper Tg paun, Paulus araschu-
nêua cun els, s'uuliand îlg di dsieua partir, & surtras l'g plêd
inlîna à meza not. (8j Et eran bgierras liiisths in la saela
innua che nus eran araspôs. (9) Et seziand un giuuen cun
num Eutijchus su la fenestra& gniand aggrauô d'un hôt sœn,
368 l'g CUDESïH DEt.S FATS DALS APOSTELS
araschunand dich Paulus, es el plu fick chialchiô dalg sœn, &
es tumô da la terza ssela, & es prais &ù mort. (10) Et siand
gnieu giu Paulus, s'imbrunchiô sùn el, l'g pigliô in bratsth cv
dis : Nu's cunturblô, per che la sia huorraa es aunchia in el.
(11) Et siand ieu su & hauiand aruot l'g paun & mangiô, schi
hol dijch faflô cun els infina alla damaun, alhura alla dauous
tirôl uia. (12) Et mnaun Yg giuuen chi era uif, & sun fick
cufurtôs. (13) Mu nus siand muntôs in barchia gnischen ad
Asson, allô daiuens prender aint Paulum. Per che chel hau-
aiua uschia hurdenô, chel uulaiua fêr Yg uiêdi par terra. (14)
Et cura nus fùschen gnieus insemmel ad Asson, Yg hauiand
prais aint, schi gnischen in [468] Mitylenem, (15) & nauigiand
da londer, îlgdi dsieuagnischens ad arriua â Samum, cv ischens
dmurôs â Trogijlli, é: ilg prossern di gnischens in Miletum.
(16)Per che Paulus hauaiua prais auaunt se da passer uia
Ephesum, per nu cusiiniêr uia l'g tijmp in Asia. Per che el
stinéua, schi fiis â si possibel, da fer l'g di d'schinquaisma â
Hierusalem. (17) Et hauiand tramis mes da Mileto ad Ephe-
sum schi clamé el l's preers de la baselgia, (18) qusels cura
che fùtten arriuôs tiers el, schi dis el ad dels : uus sauais che
dalg prùm di inné ch1 eau sun antrô in Asiam, in che mœd
ch' eau sun stô adùna cun uus, (19) seruiand agli signer cun
tuotta humilitaed dalg cour : è: cun bgierras lharmas & atten-
tamains, qusels chi sun â mi crudôs tiers, tpês la malizchia
dais Iiideaus. (20) Co ch' eau nun hae sckiuieu iinguotta da
quellas chiôses, quselas chi eran in uos iittel, ch' eau nun
hêgia dit â uus auertamang & par scoduna chiêsa, (21) dant
testimuniaunza & er als Graecs da rariiflijnscha chi es uia â
dieu, & de la fe quaela chi es uia â nos signer Iesum. (22) Et
huossa uhé cunstrit dalg spiert uing eau â Hierusalem, aqué
chi uain â mi ad interuegnir aqué nu sse eau, (23) arsaluô
che l'g spiert ssenc par tuottas las cittêds do testimuniaunza,
dschant : ch'eau [470] daia d'aspettêr liams & astijns. (24)
Mu da que nu hse eau iingiiin pisijr : ner la mia uitta es âmi
mues chiêra, pur ch'eau dfinescha mieu cuors cun algrezchia,
& Yg ufici ch'eau hê arfschieu dalg signer Iesu par dêr testi-
muniaunza alg euangeli de la gracia da dieu. (25) Et huossa
uhé eau sse che aqui dsieua uus tuots, très aquaels ch'eau sun
passé preilgiand l'g ariginam da dieu, nu gnis â uair mia
l'g cudesth dels fats DALS APOSTELS 869
fatscha. (2G) Très aqué clam eau uus in testimuniaunza îlg di
d'huoz, ch'eau sun net d'alg saung de tuots. (27) Per che eau
nuu hae skiuieu, clie nun hêgiapredgiô â uus tuottelgcusselgda
dieu. (28) Par a [ué attende â uus & à tuottelg trœp, in aquael
l'g spiert 88Bnc ho aschantô uns huastgs par arischer la basel-
gia da dieu, quaelachel ho accunchiiistô cun sieu saung. (29)
Per che eau sse aqué, che dsieua che eau suit tirô uia, che
uignen ad antrêr in uus grefs luis, quaels chi nu uignen à
schioagiêr l'g trœp. (30) Et our da uus suessa uignen â s'aluêr
piï humens chi uignen â schanschêr l'g cuntrêdi par mnêr l's
discipuls dsieua se. (31) Très aqué uagliô algurdaiuels ch' eau
nu hae pussô par trais ans da lœng d1 di ce d' not da auisêr
scodiin cun lharmas. (32) Et huossa arcumand eau uus frars â
dieu oc agli plèd de la sia gracia, quel chi es pussaunt da' s
se lifichier & dêp à uus l'hierta traunter tuots santifichiôs.
(33) Eau nun lue aggia-[47J)- niischô argient ce ôr, u la
ueskimainta d'alchiûn. (34) ce taunt plii uus sauais che als
mes bsiings oc ad aquels chi eran cun me, haun suruegnieu
aquaists mauns. (35) Eau ha3 tuot amussô â uus, che in
aquella guisa s'affadiand s'astouua prender su l's flaiuels : &
s'algurdêr dalg signer Iesu, per che el ho dit suessa: Che elg
es plii biêda chiôsa â dêr co ad arschaiuer. (3ô) Et cura chel
hauét dit aqué, schi s' metjtét el giu insthnuoglias oc urô cun
tuot aquels. (37) Alhurafut cumanzô un grand cridêr, ce s'bit-
têuan dintuorn l'g culoez de Pauli, ce l'g biitschêuan : (38)
hauiand mêla uitta al g postiitt da quel plêd chel hauaiua dit,
che nu gnissen â uair plii la sia fastcha. Et l'g accumpa-
gnêuan â la nêf.
ANNOTATIONS
Santifichiôs] fats saencs.
(A suivre.) Jacques Ulrich.
24
IV
DOCUMENTS SUR LES RELATIONS
DE
L'EMPEREUR MAX1MILIEN ET DE LUDOVIC SFORZA.
r.N l'année 1499
(Suite)
[21 mai]
Illm0 et E\mo signore mio obsermo, Dapoi la partita de la Cesarea
Maestàdi questo locho non se è inteso altro, salvo che qui è venuto
aviso como Suyceri, havendo inteso che la predicta Maestà se era dri-
zata verso Felchirch, havevaao anchora loro mandato grosso exercito
contra la Maestà sua. Ma per divertire e dividere le forze de Suiceri,
oltrachele gente quale se ritrovano ad Basilea dovessino moversi da
(jiiella banda, questa sera furono inbarchati duo millia fanti in questo
locho etaltritantisenedoYevanoimbarcharearîUberling,perunirsetutti
insieme e fare demonstracione de voléfe intrare nel paese de Suyceri
che e sopra questo lacho, acio non havessino faculta de mandare tutto
el sforzo suo verso la Cesarea Maestà. La quale, per quello se è inteso
per veio, non havera cum se mancho de 20.000 fanti e 1.500 cavalli.
Credo non passaiano doi di chel se intendera qualche cosa, e sono
certo che per la via de Chiavena, al quale locho sera vicino el facto
per due giornate, la E. V.havra più presto lo aviso che da me; enien-
tedimeno io ne daro etiam noticia e più vera che si potra.
Essendomi voluto ben informare se de' capitanei de Suyceri quali
havesseno fama, ne erano stati morti in queste guerre, me è stato cer-
tifichato che la magior parte de H principal! capitanei loro sono man-
chati, et in spetie del locho de Urania ne sono stati morti circa qua-
ranta de li primi, e fra li altri Aman Bernardino ; sono etiam stati
morti doy fratelli del abbate de Santo Gallo, quali erano li principal!
capitanei che erano stati sempre al servitio de Francesi; de Zuiïgho no
sono manchati asay, e novamente se è inteso esser stato preso uno de
li principali del dicto locho de Zurigho verso Basilea ; el quale per
esser fa:to presone e nonmenato per li ferri corne se fa ogniuno gène-
MAXIMILIEN ET LUDOVIC SFORZA 371
ente, se estima sia proceduto per intendere tutti li desegni de
Suyceri, e che li aiuta e soccorre.
La Cesarea Maestà, fin queati di passati, scripse alli reali de His-
pania questi movimenti de Suyc tndoli esserli mossa queBta
: i per instigatione de Francesi; quali aon solo erano causa de
questi movimenti, ma li nutrivano et aiutavan hando a quelle
e Maestate che,e p sr L'obligo e per la affinita, volesseno moversi e
fare contra Francesi ; e perhohaven do l'Ex.tia V.rascripto sopra qm
ta materia, aon sera aecessario ricordare altramente alla Cesarea
Maestà che scriva, bavendo , ma s ilum significarli quello
che la E. V. ba scripto ley in conformita di questo.
Alla I11"1U S. Yra continue me ricomando.
Ex Lindo, xxi maii 141»'.».
Excme Ill'ne Dominationis Vrc minimus servitor,
Marchesinus Stanga.
(Lindau, 23 mai)
Illmn et exm0 signor mio obsmo,
Havendo expedito el présente cavallaro solo j»ercln- l'Ex. Yraiuten-
da quello me ha scripto la Cesarea Maestà e sapia dove havera a dri-
zare li cavallari che hora venerano, me è anche li quello
che in questo di se è inteso in questa terra. Gli significo aduncha
como de verso Constantia è venuto aviso che quelle gente de la Cesarea
Maesl sb se ritrovanolihanno brusatomoltilo ùceri, evedendo
: Suiceri nonpotere resistere aile gente da cavallo che se ritrovano
:n quelle confine, per levarli le facultàcossi del brusare facilmente le
terre, como del vivere de li cavali inimici, loro medesimi hanno brusati
H strami in le terre sue e reducano tutte le robe alli loci più securi.
Epsi Suiceri sono constreti ad tenere le forze sue divise in tre loci:
perho che dal canto de Basilea è uno exercito grosso del qnale è
capo M. Federicho Capeller et el conte de Furstembergo ; et in questo
exercito è la guarda de Burgogna che sono 800 cavalli ellectissimi et
lertissimi; adCostanza è un altro exercito, e dove se ritrova la Ce-
sarea ^Iaestà un altro. El duca Federicho de Saxonia ellectore, secun-
do è stato dicto qui, è arrivatoad Olmo lontanoda Costanza due gior-
n.ite et cum lui se dice essere el duca de Pomoro, quali veneno cum
comitiva de 800 cavalli e 0.000 fanti. Queste cose sono state affirmate
qui, e i le h; ho intese ho voluto significarle alla IU1"* S. V. In
boj ia de laquale continue me ricomando.
Ex Lindo xxiii maii 1499.
E. lllrae D. V. minimus servitor
Marchesinus Stanga.
372 MAXIMILIEN ET LUDOVIC SFOR2A
(23 mai i Î99)
Illra0 et exmo sigaor mio observai!™0,
LaCesarcaMaestàper uuo cavallaroraandato ad posta, me ha scripto
quello che per la inclusa lettera vedera la Ex. V., laquale me è parso
mandarli acio habia del tutto et intenda quanto epso mi ha scritto per
le lettere de la predicta Maestà mi ha ricerchato dirrective alli subdit
de l'Ex. V. in Valtolina che provedano aile gente sue de victualie :
htvcudo epsa scripto alla p. ta M. ta che lhaveva dato bono ordine
circa questo. Io ho scripto al capitauo de Valtolina et Giov. Angelo de
Baldo quello che per l'inclusi extracti potera vedere, eperho, quando
Giov. Angelo habia havuto commissione sopra questo, mi persuado la
«xeguira ; quando anche non l'havesse havuta, la E. V. li fara quella
provisione parera alla prudentia sua. Ho mandato Augustino da la
Maestà sua como ha ricerchato Domatina me levaro anchora io
dequa, e me inviaro ad Malzo,dove saro in quatro di eli altri ambas-
ciatori che sono qua restarano, non havendo loro ordine alchuno ne de
stare ne delevarsi. Alla Illm» Slia- V*a continue mericomando. Ex Lin-
do, 23 maii 1499.
E. Illme D. V. minimus servitor,
Marchesinus Staxga.
[28 mai]
111. mo et ex.mo signor mio obs.mo,
Le cose occorse verso Malzo da poy la partita mia da Lindo non
hanno permesso che io mo li sia possuto transferire, como haveva deli-
berato et era designato da la Cesarea Maestà. Ringratio bene Dio che
non habia voluto me sia ritrovato tanto inante ad questo camino chel
ritornare non fusse poi stito in faculta mia. De quelle cose che sono
accadute li,sapendo che l'E. V. e da Jo. Colla e da Augustino Somenza
ne è stata longamente avisata, io non li replicaro el medesimo per
non fastidirla. Questo li diro solum, chel numéro de li morti in questo
conflicto non è stato tanto quanto se era vociferato; e per fermo se
tene che de Grisani ne siano morti el doppio più de li Gesarei, et el
numéro depsi Cesarei pare non sia stato se non 800.
Io sono arrivato in questo locho de Himbst, vicino ad Malzo cin-
quanta millia italiani, dove ho ritrovato lettere de la Cesarea Maestà,
per lequale me commette che me debia firmare fin che me scrivera
altro, attribuendo el farmi dimorare qui allacarestia del vivere et alla
pocha securita de la via. Quanto al periculo de la via, ho creduto
facilmeate al scrivere de S. Maestà, ma quanto al vivere, non so como
MAXIMIL1EN ET LUDOVIC SFORZA 373
per la via si possa ritrovare mono, non alchuna ne
perel viverede le persone ne de cavalli. Tuttavolta se fara al m<
se potera per obedire la Maestà sua.
Allaill™" Signoria vostra continue me raccomando.
Ex Himbst, 28 maii 1499.
Mininimua servitor Marchisinus Stanga.
18
Giorgio Soprasasso à Ludovic Sforza '
Sion en Valais, 26 mai 1499). Analyse.
M i.i 'li! una lettera <lol Re de Franza a Blés, de 24 aprilis,
alli coufederati, per confortarli allô assetto de la guerra, accio che
V ra Excellentia intenda quando per el mezo suo seacconcianoleco.se
che fin habia parturire la pace.
Kl Re scrive che, considerando quanto detrimento sii per portare
a loro li inimici e a tntto el christianesimo la guerra sua cou Suevi
et adherenti, li è parso interponere l'opéra sua per sedare questa
il per I tquale se porriano sminuire le forze de la christianità,
et augumentare quelle del Turco ; perô manda soi ambasatori a loro et
alli inimici per trac tare dicto effecto; pregandole, per la reverentia
del Salvatore, per la fede nostra e de tutto el cristianismo, vogliano
exhibirse prompti e parati, et perché forse li ambassatori non por-
riano arrivare cossi presto, fare tregua per qualchi di, accio non se
venga ad conflicto inante la zouta loro : che saria perniciosa cosa.
M. Zorzo subjunge che' Suiceri hano mandato incontra aile bom-
barde del Re de Franza; che Bernesi li hano scripto chel voglia
drizare le lettere che se scriverano per V.ra Excellent
Circa la resolutione de Vostra Excelle itia per li soi mille fiorini dice
che gli pare sii honesto che li dinari prestati siino restituiti a V.ra
Excellentia, e lui li haveria dmiandato a Monsignore quando fusse
stato el termino, quale è a Kalcn. Julii, ma expectara voluntera pur-
che la causa de M. Matheo non se differischa, o se li usi negligentia
per questo ; el che non se poria fare senza incommodo de Vostra
Excellentia, non essendo bastante la vechieza de Monsignore a domare
quelli populi.
Che in la pensione de li soi ducento ducati gli sono retenuti ogni
anno venticinque ducati, perche non se paghino senon fiorini quattro
1 Milan, ibid. Pot. E Svizzera. Copie. Summario de lettere de Val-
lesi de M. Zorzo Supersaxo, die 26.
3 74 MAXIMILIEN ET LUDOVIC SFORZA
l'uno, se doveriano pagare a 4 floiini 8; che lui non creda sii mente
de V. Ex., hâve n do lui servito e in tempi de guerra e pace, non senza
mazore spesa, de laquale non ha mai domandato ne havuto cosa
alcuna. Gli basta la gratia de V. Es. se la po havere.
19
Les lieutenants et conseillers impériaux d'Inspruch
à Ludovic Sforza i
(Inspruch, 27 mai 1498 [sic])
Illustrissime etexcellentissime princeps, doniinneobservandissime,
paratissimum semper obsequendi animum comendacione prsemissa,
Ex spectabili viro illustrissimœ Dominationis Vestra? cancellario,
nobis ob ejus virtutes et prudentiam quibus is in agendis rébus
prsestare videtur prœcipue accepto, sa3pe intelleximus devotionem
illam et benivolentiam quibus Dominatio Vestra Illustrissima erga
sacram régiam Majestatem et dominum nostrum graliosissimum
terrasque suas et subditos afficiatur. Unde etiam factura sit quod
illi de Liga Grisea segre ferant prœsertim de eo quod D. V. Illus-
trissima in complacentia Régie Majestatis inhibuerit ne ex terris
suis ulla victualia sibi advehantur. Quam quidem benivolentiam et
favorem sacre Régie Majestati accurate significavimus,ejusque eapi-
raneo exercitus inimicorum, si contingeret subditos Dominationis
Vestrse illustrissimae ab hostibus predictis molestari, illis proviribus
auxilio et defensioni esse; nec dubitamus ipsam regiam Majestatem,
quaa nunc terris suis hereditariis (contra quas bellurn agitur) appro-
pinquavit illasque iugressus est, iu hiis et longe majoribus erga
Dem Vr,m 1111"»111 quam gratiosissime et amicissime se ostensuram. Sed
pro eo quod cupit Dominatio Vestra 111. ma de successuetactibus belli
certior reddi, eidem significandura duximus hiis diebns proxime tran-
sactis in Valle Venusta non mediocrera stragem factam esse, ubi
circiter quinque milia hominum utriusque partis interierunt, nostro-
rum videlicet infra duo milia, hostium vero numerus residuus. Est
etiam Regia Majestas illius conaminis et propositi contra eosdem de
Liga Grisea tanta auctoritate agere et procedere ut eorum temeritas
taliter opprimatur quod non solura ipsa Majestas Regia, sed et Ili"1*
Dominatio Vestra et utriusque terre subditi posthac quietius tutiusque
perrnaneant. Quod Dominationem Vestram Illustrissimam, ad cujus
beneplacita et obsequia nos paratissimos offeriraus, latere noluimus.
i Milan. A. D. S. Carti-ggio Générale. Original.
MAXTMILIEN ET LUDOVIC SFORZA 375
Kx oppido [nsprugg, x\viima die mensis Maii mcccclxxxxvjii70.
Etomanorum Régis Domiui nos tri gratiosissimi locumtenentes et
consiliarii iu Iusprugg.
20
L'ambassadeur milanais Jo. Colla à Ludovic Sforza '
pruch, 31 mai L499)
Illustrissime etexcellentissimosignor, signoremio observandissimo,
Ho commtmicato a questi regenti quanto rn'ha scripto la Excel-
lcntia Vostra haverli dicto Zoanne Antonio, a nome de M. Jo. Jacomo
Triullio, delà ! ssdicta de li vinti di e li altri avisi de Suiceri, e cosi la
commissione facta a Bodino de li doi milia faoti, e la descriptione se
fa sul Lago Maggiore, e li rispecti per che se fa questo : loro hanno
demonstrato grandissima displicentia de la desdicta de M.Jo. Jacomo,
persuadendi ise perô ehe la sïa più presto demonstratione eha chel n'ha-
Iria reuscire ad effecto. Li è beue summameate piaciuto l'aviso de la
mala contentezza de Suiceri del re de Franza. Quanto al ricordo fa
la Excellentia V >r questi avisi possono cognoscere essere
lo tempo de cas ti gare i Suiceri, dicono che sperano de bene spendere
questa opportunità ne havere in animo una minima scintilla de fare
pace, e più se si dovera fare, sara cum reputatione secura e cum ho-
norevole inclusione de la E. V. Tutavolta sperino in Nostro Signore
Dio che la Maestà Cesarea e la E. V. insieme che li ha adiutati debel-
larano e triumpharano de questi rustici Suiceri, e che ringratiano la
E. V.de li avisi e del ricordo; el quale, cosi como amorevolmente li ù
sposto da la E. V., cosi fidelmente el tenerano secreto e il metarano
in opéra. Me domandarono se la E. V. avisava la Maestà Cesarea de
questo et havendoli risposto ch'ella ne scriveva al magniâco M essor
Marchisino, hano pur perô ordinato de scriverne a la Maestà sua, loro
parendoli avisi de non pocho momento. Da laquale si maravigliano
che non habino qnalche aviso gia doi giorni passati, sebbene sono certo
che la Maestà sua sia in coutinuo exercitio per finir la impresa contra
Grisani.
In bona gratia, et ;.
Ex Hispruch, ultimo maii 1499.
Jo. Colla.
1 Milan, A. d. S. Polenze Estere, Germanià. Original. Lettre en partie
chiffrée, mais avec le déchiffrement de la chancellerie milanaise. Sus-
cription: 111. mo principi et cxmo Dn° meo observmo Domino duci Medio-
lani.
3 7 6 MAXIMILIEN ET LUDOVIC SFORZA
21
Ludovic Sforza à Maximilien '
(Milan, 7 juin 1499)
Minime opus erat qnod Vestra Majestas a me peteret ut opéra Au-
gustini, quem in Vallem telinam misit, uti posset pro comeatibus ad
exercitura suum transmittendis ; nam cum suum sit mihijubere, et ego
nil magis cupiam quam ei morem gerere, persuadere sibi débet posse
uti dehis qui mihi serviunt, non secus ac si Majestati Vestre servirent.
Sed, cum jam antea, audiente Majestatem Vestram finibus Dominii mei,
quod suum est, appropinquare, a me ea provisio adhibita sit, per quam
comeatus ad eam confluèrent; et nunc quoque, intellectis his qiue Au-
gustinus significavit Majestatem Vestram cupere, omnia diligenter et
céleri ter expediri curaverim (sicut ab ipso Augustino intelliget), et
insuper miserim D. Balthasarem Pusterulam , equitem et eonsilia-
rium meum, Tiranum cum aliis ministris qui huic negocio intendant,
arbitior M.tem V.ram non moleste laturam quod Augustinum ad eam
redire jusserim... Etiam e re sua erit ut eam sequatur, [ut melius] in-
telligat quod a me scribi contigerit, et ipse de felicibus progressibus
M.tis V.re, et, si ipsa aliud me jubere volet, monere possit.
22
L'Impératrice Bianca Maria à Ludovic Sforza '
(Fribourg, 10 juin 1499)
Bianca Maria, Dei gratia Romanorum regina semper augusta.
Illme princeps patrue et pater carissime,
Heri recevessemo le lettere de la Signoria Vostra de 9 e 12 del pas-
sato. In una ne faceva intendere quanto havesse havuto grato l'officio
per nui a suo beneficio fatto apresso elserm0 signor Re nostro consorte,
ringratiandone d'esso e pregandone a continuare; ne l'altra diceva
esser advisata che nui bavessemo scritto lettere al R.mo et Ill.mo
signor vicecanceliere suo fratello, et ad al tri , in favore de uno per
i Milan, ibid. Pot. Estere, Germania. Minute originale. Suscription :
Régi Romanorum.
1 Milan, ibid.: Pot. Ext. Germania. Original. Suscription: Principi pa-
truo et p[at]ri [carissi]mo D. no Ludovico Marie Anglo, duci Mediolani.
MAXIMILIEN ET LUDOVIC SFORZA 377
la coadiutoria pel vescovato de Gurza, quai e promessa a M. Petro,
da Trieste, instante el serm0 signor Re predicto, e ne pregava ad scri-
ver de novo ad chi havessemo scritto per questa cosa, reducendola
al proposito de M. Petro. Ad la prima, dicemo esserne piazuto asai
sentire che a la Signoria Vestra con tanto meglior animo e promp-
teza, haveremo a perseverare ne lo advenire ; de una cosa ne recresse,
non posser fare tanto quanto desiderariamo per la Signoria Vostra.
Ma almancho in ogni tempo se deportaremo in tal modo verso de
quella, che cognoscera non esserne manchata la volunta de giovarli.
Cossi non devevemo essor ringraciate de cio, perche quello fazemo
lo fazemo per debito, volendo satisfare a li obligi havemo a la Sig. V.
e eonrisponder al paterno anio ne porta quella. A la parte de la coa-
diutoria, respondiamo nui esser nove de le dicte lettere; che, quando
le havessemo scritte, non séria stato per ignorantia, essendo nui beu
informate de 1' opéra fatta fin al présente per el predicto sermo signor
Re, nostro consorte, et anche per la Signoria Vestra, in favor de
-M. Petro; ma, ultra che non voriamo contravenir a S. Maestà ne a
la Sig. Via, glie anchora el rispetto del dicto M. Petro, quai ami-
amo, si per el grado tene apresso el sermo siguor Re nostro con-
sorte, si per esser ornato de virtù. E voriamo più presto aconzarlo
cha iuconimodarlo ne la ditta coadjutoria. Per laquai cosa, la Signo-
ria Vostra debbe esser certa nui nou haver scritto ne al predicto
R'"° et Iflmo signor ne ad altri contra Messer Petro : perilche non
ne accadde anchora dover rétractai' quello non havemo fatto. Per
testificatione pero che habiamo caro el commodo de M. Petro. scri-
viamo per la alligata ad lo predicto Rmo ed Illmo Signor in favor d'esso
e tanto più volentera per che la Signorio Vostra cognossa nui esser
prompte ad farli cosa da piacere.
M. Claudio de Wandre l'altro heri vene de Bergogna qui, per andar
poi verso el predicto sermo signor nostro consorte, e quello zorno et
heri fu a visitarne. Fraie altre cose, ne disse haver adviso de uuo suo
amico franzese chel Re de Franza era venuto de Bertagna a Lione,
tutto intento a la impresa contra la Signoria Vostra, e che gia haveva
mandato inanti verso Hast cinquecento lanze, con certa quantita de
artelaria, e doveva venire de le persone cinquanta miliia e venir lui
in persona a la ditta impresa. Delche, abenche tutto non crediamo,
ce perô parso advisarne la Sig. V., perche essendone advertita, halù
a star ben provista. A la Sig. V. se recommandiamo, certificandola
como, per la Dio gratia, siamo sane ; e che continuameute desidero
de quella intendere e cossi de li suoi figlioli.
Ex Friburgo, x junh 1499.
Bianca Maria manu propria. Ge. Gadius.
L.-G. P.
{A suivre.)
BIBLIOGRAPHIE
A. Jeanroy. —Règle des Chanoinesses Augustines de Saint-Pantaléon
ou des Onze mille vierges à Toulouse (1358), in-4° de 31 pages, Tou-
louse, Chauvin, 1901 (Extrait des Mémoires de la Société archéologique
du Midi de la France, tome XVI, sous presse).
L'intérêt du texte publié par M. Jeanroy consiste en ceci, qu'écrit
en 1358 et à Toulouse, il est pour nous un témoin authentique de la
langue parlée dans cette ville au milieu du quatorzième siècle. Aussi,
l'édition qui nous en est donnée est-elle essentiellement philologique.
L'inl ion nous donne bien quelques indications sur la fondation
du couvent auquel s'appliquait cette règle, mais l'on s'y est surtout
attaché à relever ce que le texte offre d'intéressant au point de vue de
la phonétique, de la morphologie, de la syntaxe et du vo :abulaire.
L'édition elle-même ne présentait pas de grandes difficultés : la
iction qu'elle reproduit, bonne en général, ne réclamait que de
loin en loin des corrections, le plus souvent assez simples. Voici
cependant quelques remarques ou corrections notées au cours de la
lecture *.
4. L'éditeur imprime dyagne et de même 750 archidyagne. Malgré
ce double exemple, je crois qu'il faut écrire dyague et archhhjague.
Cf. E. Levy. Provenz. Suppl. Woerterh. II. 233, qui regarde lui aussi
comme douteuse cette forme dyagne.
17. Rien ne peut justifier la graphie provesisccûaquo. La compa-
raison avec 196 montre qu'il faut écrire provezisca aquo. Cette cons-
truction du verbe provenir semble inconnue à Raynouard [Lex. Rom.
V. 537) qui ne mentionne que les constructions provezir ad alcuna re
et provezir ad alcu de alcuna re. Mais la construction directe p>roi'
alcutia re est toute naturelle et a dû exister à côté de prévenir alcuna
re. Les deux verbes provezir et prévenir sont trop voisins pour qu'ils
n'aient pas réagi l'un sur l'autre. Cela est si vrai qu'en ancien fran-
i On corrigera aussi un certain nombre de fautes d'impression: 221.
riger vesprasau lieu de vestras;2&i. corriger offici : 274. écrire adver-
n se en deux mol écrire endoctrinada en un seul mot: 373.
corriger sors; 511. écrire licencia; 675. corriger permetra; 721. écrire
aysso ; 743. corriger las au heu de lase.
BIBLIOGRAPHIE 3 79
çais, porveoir s'employait pour « prévoir » et pour « pourvoir ». Cf.
Dictionnaire général, s. v. pourvoir.
29. Rétablir devant psalm l'article défiai ; cf. 234. digua le psalm;
237. dïgan le psalm.
45. Corriger évidemment cor en cors; cf. 292. la eleratiu del ors
de J h es u ( ri st.
58. Rétablir [e] en sa absencia.
69. Ecrire vint e una en trois mots et de même 72. vint e duas,
75. vint e très. De même 1. 78, la graphie vinte quatre est à rejeter.
11 fallait choisir entre vintequatre et vint e quatre.
72. Rejeter la graphie rinteduas et de même 102. trcntadua's et
132. quaranta dua's. Ecrire vint e duos, trenta duas, quaranta duas.
On ne peut, eu effet, admettre que dua's soit pour duas es. 11 eût fallu
relever cet emploi des nombres cardinaux una, duas, très, quatre,
servant à former les ordinaux.
121. Uniformiser les sa laus, laun, launa. Cf. 9L, loi, 458
etpassim. Aucune des explications données (page 9) de ces formes ne
me parait satisfaisante. Ni le féminin la una, ni l'expression corélative
l'autre ne me paraissent pouvoir rendre compte du masculin laun.
L'explication véritable m'a été su par M. Chabaneau, qui
considère laun, launa comme formés sur L'analogie de cadaun,
cadauna.
187. Corriger psams en psalms comme le fait du reste M. J., à la
ligne 280. — 225. Corriger de'l dire. — 246. Corriger si n'avia et en
tendre »' = ne = en. — 258. Rétablir [e] que no demande. — 202.
Corriger d'après 36 que [la] empache. — 298. Rétablir d'après 47 [e]
a la messa.
442. Inutile de corriger vegan du manuscrit en vengan si, comme le
die ailleurs (p. 7) l'éditeur, la chute de n devant une consonne est
une des caractéristiques du texte.
447. Corriger ses qm n'agues. — 4^4. Corriger e las quatre. — 488.
D'après 145 et passim rétablir [las] quatre plu* antiquas. — ■ 516. Mettre
un point el virgule après despensar. — 517. Corriger fo eu so.
519. Corriger le dejuran du manuscrit non en dejunran, mais en
dejunaran.
535. Corriger o cantar ■> legir. Cf. 39. Comendaran o sia legir o
cantar.
544. Rétablir [de] mossenhe Cf. 422. La ténor del testamen de bona
memoria de mossenher le cardinal.
611. Corriger évidemment a lor en al cor. — 617. Ecrire laquai en
un mot et de même 711. lequel. — 661. Corriger processios en ,
cessio .
3 80 BIBLIOGRAPHIE
663. On pourrait rétablir mosaen au lieu de mosse[nher]. Cf. 756.
mossen et 782. mosen.
667 et 671. Rétablir [las] qutre sur*.
691. Inutile de corriger aquesta aja du manuscrit en aquestas ajan.
725. Rétablir [de] defora et de même à la ligne suivante [de]
dedins.
756. Corriger presencia[l]men.
758. La correction nos[lre\ est inutile et l'on peut très bien com-
prendre avec nos, pronom personnel.
L'étude linguistique qui forme la plus grande partie de Y Introduction
est telle qu'on la pouvait l'attendre de l'auteur. Exacte, précise, et en
général complète, elle relève ce que le texte présente de caractéris-
tique. En particulier je ne vois guère à ajouter aux cliapitres concer-
nant la phonétique et la morphologie. On eût pu cependant note: la
forme vials = vïïcx, présentant un traitement connu par ailleurs, mais
peut-être particulièrement fréquent dans le parler de Toulouse Cf.
les formes fiel etjfoZpour fil, citées par Noulet, Ordenansas et Coustu-
mas del Libre Blanc, p. 128. De même il eut fallu relever les formes
de cas régime du pronom personnel féminin de la 3e personne luy et
lu, d'ordinaire assez rares, et qui dans notre texte sont au contraire
très fréquentes. Cf. 204, 258, 527 et passim. Enfin, page 9, N° 22,
on corrigera al (en lo) en el (en lo).
Peut-être les remarques relatives à la syntaxe auraient-elles pu
être enrichies et certaines constructions être relevées. Mais surtout il
eût fallu se demander dans quelle mesure l'on pourrait faire fond sur
l'usage syntactique de ce texte. Il eût fallu rechercher si certaines
constructions, certaines tournures singulières ne trahissaient pas
limitation parfois servile d'un original probablement latin dont notre
texte ne serait que la traduction. L'autorité qu'on doit accorder à
notre texte dépend de la réponse faite à cette question.
Enfin dans la partie consacrée au lexique, voici plusieurs mots qui
eussent dû figurer, soit qu'ils aient été inconnus à Raynouard, soit
qu'ils se présentent ici avec des acceptions particulières et non don-
nées par lui.
Arrasigat (185) = enraciné. Le mot n'est pas dans Raynouard qui
ne cite que arasignar (Lex. rom., V, 30) du reste fautif et corrigé
avec raison par E. Lévy, en arasiguar.
Idonea (328), mot emprunté au latin et qui naturellement ne figure
pas dans Raynouard pouvait être relevé comme deposit et mora.
Orde (228). Pour ce mot Raynouard (Lex. roui. IV, 379) ne cite
qu'un exemple auquel il donne à tort le sens de ordinaire de la messe.
I
BIBLIOGRAPHIE ri SI
La comparaison de notre passage et de l'exemple cité atteste pour le
mot le sens plus général de liturgie.
Subte (428 et 598) est employé deux fois comme adjectif et devait
être relevé, car Raynouard (Lex. rom. V. 241) ne connaît que subte
adverbe.
Vespra (225). Raynouard ne connaît pas cette forme de singulier
d'autant plus curieuse qu'elle se présente ici avec le sens tout parti-
culier de veille. Le contexte indique en effet que l'on doit sanctifier
le jour de la fête dès la veille même, cf. de même e exceptât lot-: los
Saples j>er la revi rencia dt ! dim ntge. C'est du reste le même sens qu'il
I attribuer sans doute à avespre citépar Raynouard {Lex. rom. V.
et dont il nedonnequ'un exemple. C'est ce sens qui s'est conservé
dans les patois actuels. Cf. Honnorat. Diction. prov.-franç. s.v. vespra
donnant au mot le sens de la veille, le soir d'avant et Noulet, Libre
blanc, p. 185, citant plusieurs exemples du mot avec ce sens.
Mais, eu somme, .sous son apparence modeste, le travail de
M. Jeanroy est une bonne contribution à l'étude de l'ancien parler
toulousain. Il pourra être directement utilisé pour l'étude à laquelle
l'auteur nous convie et qui consisterait à comparer la Règle publiée
par lui, et les textes sensiblement contemporains des Leys oVamors
et des Deux manuscrits provençaux édités par MM. Noulet et Cha-
baneau en vue de fixer les traits essentiels de la langue parlée à
Toulouse au XIVe siècle.
Jules Coulet.
Hermann Kempe. — Die Ortsnamen des Philomena. Inaugural-
Dissertation, in-8c de 71 pages. Halle, a. S. 1901.
Cette dissertation de prétentions modestes complète utilement
l'édition du Philomena, publiée naguère par M. Schneegans1. Sous
son titre, qui n'est du reste qu'à moitié exact, elle nous présente
d'abord (pp. 7-20; une analyse du texte qui manquait à l'édition et
dans la seconde partie, la plus importante, elle nous donne l'Index
des noms de lieux que j'avais regretté de n'y pas trouver -.
De l'analyse elle-même, je dirai seulement qu'elle m'a paru faite
avec soin, peut-être trop détaillée, mais, somme toute, satisfaisante.
Quant au tableau (pp. 7-8) destiné à nous faire comprendre la com-
position des Gesta, c'est peut-être une description par l'extérieur des
1 Gesta Karoli magni ad Carcassonam et Narbonam, édition Schnee-
gans, Halle, a. S, 1898.
2 Cf. Annales du Midi, XII, 238
382 BIBLIOGRAPHIE
différentes parties du récit ; à coup sûr, il ne nous renseigne pas sur
sa structure même et sur ce qu'on pourrait appeler sa composition
interne. Ni M. Kempe, ni avant lui M. Schneegans, n'ont montré, à
mon avis, comment s'était développé ce récit où l'abondance et le
désordre apparent des épisodes semblent nier l'existence de tout
plan. J'espère du reste pouvoir bientôt reprendre la question et
apporter quelque lumière sur la véritable composition des Gesta.
Dans la seconde partie de son travail, l'auteurs'est proposéde dresser
la liste complète de tous les noms de lieux cités dans le texte, de donner
toutes les variantes de formes de l'original latin et de la traduction
provençale, enfin, autant que possible, de retrouver ces noms de
lieux dans la toponymie du temps ou de les identifier avec des localités
encore existantes, ~"e que l'on reprochera surtout à M. Kempe, c'est
d'avoir ainsi compris et limité son sujet. L'élément local a, dans la
composition des Gesta une telle importance, que l'étude des noms de
lieux cités pouvait nous aider à mieux comprendre l'œuvre et aussi à
mieux connaître son auteur. Elle eût permis de prouver ce que l'on
s'était surtout borné à affirmer, à savoir l'exactitude des descrip-
tions et la connaissance qu'avait l'auteur du pays où il fait mouvoir
toute son action. Un autre trait intéressant à signaler, c'est son em-
barras à trouver pour les lieux qu'il cite et qu'il connaît surtout sous
leur nom vulgaire et provençal la forme latine exigée par la rédac-
tion en latin de son récit. Il se traduit parfois par une diversité de
formes si étranges qu'on ne sait si certaines ne sont pas vraiment
fautives; parfois encore l'auteur se borne à donner une terminaison
latine à la forme provençale, parfois enfin, il la transcrit telle quelle.
D'autre part, il eut été curieux de voir comment l'auteur de la tra-
duction provençale traitait à son tour ces noms latins ou pseudo-
latins. Parfois, ils disparaissent totalement dans le passage du latin au
provençal, et si, dans certains passages, cette absence peut s'expliquer
par un désir manifeste d'abréger le récit, dans d'autres il est cer-
tain que le traducteur les a omis consciemment, parce qu'il ne les
reconnaissait pas. Ailleurs encore il se borne aies transcrire tels quels;
parfois enfin, il les déforme de telle façon, qu'il est certain qu'il ne
sait pas de quelles villes ou de quels pays il s'agit. Il y avait là des
comparaisons curieuses à faire et des remarques intéressantes
qu'on regrettera de ne pas trouver dans le livre de M. Kempe.
Ce travail, tel que l'a conçu son auteur, est, somme toute, satis-
faisant '. On ne relèvera dans sa liste ni omission, ni lacune im-
i Oi. endant à M. K. de n'avoir pas apporté un
suffisant u la composition matérielle du livre et a la correction de ses
BIBLIOGRAPHIE 3S3
portante et ses identifications, dont du reste la plupart B'imp
sont en général vraisemblables. 11 u'est que juste d'ajouter que le
travail avait été en partie préparé par M. Schneegans et que M. Kempe
a utilisé les indications réunies par lui pour les préciser parfois et
surtout pour les compléter.
P. 21-22 à propos du nom à'Albarras M. K. pense que l'identifica-
tion avec la Chaîne des Albères ue .-'impose pas et qu'il peut s'agir
tout aussi bien du petit village d'Albère (dép. «les i'yrén. -Orient.,
arr. de Céret, cant. d'A . Mais il faudrait d'abord attester au
treizième siècle l'existence de oc village. Déplus, la façon dont le texte
latin désigne cet endroit ubi vocalur ad Albarras indique que c'est
une dénomination imaginée par l'auteur pour indiquer un défilé, un
-âge conduisant vers les Albères. Au surplus, le village actuel
d'il Ibère est trop à l'écart de la route de France en Espagne, que
l'auteur du récit fait évidemment suivre à l'armée de Charlemagne.
P. 31. M. K. déclare qu'on ne voit pas de quel Clarum Montera il
s'agit à la ligue 2631, et il nous laisse le choix entre Clerniont- Fer-
rant! et un chef-lieu de canton du Tarn-et-Garonne, appelé de nos jours
Monclar de Quercy. On ne s'explique pas ce doute, car le texte latin
indique expressément qu'il s'agit bien de Cleimunt en Auvergne.
« Misitautem in Alvernia apud Clarum Montent. »
P. 31. A propos de la ligne 2630, misit.... apud Convenarum, au
lieu de se demander s'il s'agit des habitants du comté de Cominiuges
en général, si l'auteur a pensé k Lugdunum Convenarum ou à Aquae
Convenarum, M. K. eut mieux fait de déclarer le texte latin corrompu
et toute identification impossible.
P. 31. M. K. réunit en un même article CaucoUbrium dont il es
question à la ligne 2481, en provençal Cogliure, et une localité appelée
(1. 845 et 908) en latin Culieria et en provençal Culieyra. Il les identifie
toutes deux avec le village actuel de Collioure (Pyr. -Orient., arr. de
et, cant. d'Aigelès). Si, pour la première, cette identification est
certaine, rien par contre ne la justifie en ce qui concerne la seconde.
suves. Les fautes d'impression abondent dans son livre; en voici
quelques-unes, notées au cours de ma lecture, et qu'on voudra bien
:P. i, ô. lire Foncin au lieu de Foncier ; p. 20,5, lire Agde au
; ii. 24, 16, lire/bronau lieu m; p. 25, i\, lire Aix-en-P.
el Aix-les-Bains ; j>. 31, 18. Lire Saillagouse; p. 33, 8, lire Constantino-
fa?ia;i>. 12, 33, lire Limoux; p. 46, 27, lire cum au lieu de cam;
p. ">i, 20, lire Petragoricensium ; p. 56, 19, lire Prokenssals ; p. 56, 24,
Ure Raynaborc; p. 5S, 24. lire Bovinam; p. 59, 19, lire destruxerunt ;
]'■ 63, ;,'i. hre Th mias; p. 64, 32, lire paroccialis ; p. 61, :j, lire Taug au
lieu de Tang.
384 BIBLIOGRAPHIE
Au point de vue de la forme, le latin Culieria n'a rien de commun avec
Caucolibrium, ni le provençal Qulieyra avec Cogliure. De plus, dans les
deux passages où il est question dcl rey de Qulieyra, il semble bien
qu'il s'agit d'un roi sarrasin d'Espagne.
1'. 46. L'auteur eut dû réunir en un même article ce qui concernait
Garinus de Monteclario et Falco de Montesclario. Ce sont évidemment
deux personnages de la même famille et tirant leur nom d'une même
localité. Qu'en ce Garinus de Monteclario revive Garin de Montglane
ou de Monglan, l'ancêtre de la geste de Guillaume, c'est ce qu'on
aurait déjà pu supposer avec vraisemblance, si le traducteur provençal
n'avait pris soin de l'appeler expressément de Monglan. Ce qui était
intéressant ce n'était pas de chercher, vainement d'ailleurs , à identifier
ce Monglan, mais a retrouver le Montclar prononcé Moncla(r), qu'on
a pu ainsi substituer à M< onglan prononcé Mongla(n). L'auteurpensequ'il
s'agit encore ici de Montclar de Quercy. Il eut pu au moins mentionner
l'existence d'un autre Montclar plus voisin de Narhonne et de Lagrasse ;
c'est le village actuel de ce nom, situé dans l'arrondissement de
Carcassonne, canton de Montréal.
P. 55. Les noms de Prat-naout et Prat-vieil peuvent actuellement
servir à désigner une métairie sans qu'ils signifient, comme le dit
M. K., métairie haute et métairie basse.
Jules Coulet.
OUVRAGES ANNONCES SOMMAIREMENT
Baist (G.)- — Variationen liber Roland 2074, 2156 = Beitr. z. rom. u.
engl. phil., Festschrift fiir W. Fœrster, s. 213-232.
M. Baist cherche à préciser par divers moyens la date de la com-
position et le lieu d'origine de la Chanson de Roland. Il examine suc-
cessivement les noms des armes qui sont mentionnées dans le poème,
les noms géografiques, les noms etnografiques, puis la question de
la composition et des remaniements et il conclut ainsi : « Danach
wûrde sich ergeben, dass unser Roland von einem Normannen auf
franzischem Gebiet fiir Francier nach franzischer Voilage bearbeitet
worden ist, im ersten Viertel des 12. Jh.». Cet article est surtout un
travail de précision et il est émaillé de remarques fort intéressantes.
M. G.
Le Gérant responsable: P. Hamelin.
LE PARLER
DE BAGNÈRES-DE-LUCHON
ET DE SA VALLÉE
INTRODUCTION
Nous nous proposons d'examiner ici le parler de Bagnères-
de-Luchon et de sa vallée. Nous avons pu l'étudier sur les
lieux mêmes, principalement à Saint-Mamet, depuis 1892.
Bagnères-de-Luchon est un chef-lieu de canton du dépar-
tement de la Haute-Garonne. Sa population est d'environ
3700 âmes. C'est une charmante ville d'eaux thermales,
située au centre de la région pyrénéenne, dans une fraîche et
riante vallée qu'arrosent deux rivières, l'One et la Pique. Les
étrangers qui viennent la visiter se plaisent à lui donner le
nom de Reine des Pyrénées. Sa position géographique nous
indique déjà que son parler fait partie du dialecte gascon pro-
prement dit, qui comprend en gros, comme on le sait, tous les
pays situés entre l'Océan, l'Adour, le gave d'Oloron, les mon-
tagnes neigeuses et les cours de l'Arize et de la Garonne.
Dans le gascon ainsi défini, on peut maintenant distinguer
deux sous-dialectes, caractérisés par la forme de l'article. En
effet, tandis que les Gascons des plateaux et des plaines se
servent, comme les habitants de la Guyenne, du Languedoc
et de la Provence, des articles masc. le ou /u, fém. la 1, les
Pyrénéens du centre, depuis Oust, dans l'Ariège, jusqu'à
Lasseube et Aramits, dans les Basses-Pyrénées, se servent de
l'article masc. ez-, et ou etc/i (venant de illum et non de illûm,
et plus ou moins modifié dans sa finale), fém. ela ou exa. Le
i Voir au début de la première partie, pour l'alphabet adopté.
xi.v. — Septembre-Novembre l'J02. 25
S86 LE PARLER DE BAGNERES-DE-LUCHON
parler de Luchon appartient donc au sous-dialecte qu'on peut
appeler le gascon montagnard.
A leur tour, les patois du Haut-Comminges, de la Barousse,
de la vallée de la Pique et de l'One, de la haute vallée de la
Garonne ou du Gar, val d'Aï an compris, et des vallées d'Aure
et de Louron forment, dans le gascon montagnard, un groupe
qu'on pourrait désigner sous le nom de groupe des Vallées
(comme comprenant en gros les « Quatre-Vallées») ou mieux
de groupe onésien (du nom des Onésiens, anciens habitants du
pays de Luchon, qui occupe le centre de cette région). Ce
groupe est limité au nord par celui que forment ensemble les
parlers du Bas-Comminges et du Nébouzan (Saint- Gau-
dens, etc.). Ceux-ci se distinguent des parlers onésiens par
l'emploi de l'article fém. ela (au lieu de eza), par des pluriels
en -es de noms masculins terminés par une consonne (Ex. : ûs
« ours », pi. uses), etc.
On peut ensuite distinguer nettement, dans le gioupe oné-
sien, le parler du canton de Luchon de celui des pays immé-
diatement voisins. Il va sans dire que, du côté de Venasque
[Bendsk), les Pyrénées forment une limite décisive1. Bans le
groupe onésien: 1° La vallée d'Aran, à l'est, bien que pays
gascon, a subi assez profondément l'influence espagnole: ce
qui, ajouté à la diversité primitive, a amené des différences
notables dans le vocabulaire (Ex. : on dit en aranais: a kabnlh
« à cheval » ; kûchu « boiteux » ; g as tu « dépense» ; espantâ-s
« s'épouvanter » ; kedd-s « s'arrêter» ; on emploie le pronom
neutre 16 pour sô, etc.). Bailleurs (et ceci encore rapproche
l'aranais de l'espagnol], l'aranais a une tendance à préférer le
son u au son û (Ex. : brûcha « sorcière », luch. brûcho; bezûnh
«besoin» , luch. et larb. bejùnh) ; mais u existe cependant en
aranais (Ex. : ûa « une » , luch. yô, larb. ibâ ; arlùid « arrêter»
etc.). Enfin, l'influence catalane, elle aussi, s'est fait sentir
dans la vallée d'Aran, qui, comme on le sait, fait partie de
la Catalogne (province de Lérida, en catalan, Lhêyda), dont
i La Catalogne s'étend jusqu'au sud de la vallée d'Aran. La vallée de
Yénasque, au sud de celle de Luchon, fait partie de l' Aragon (province
de lluesca). Son parler est un parler de transition, à ce qu'il nous semble,
entre le catalan et Varagonais.
ET DE SA VALLEE 387
elle occupe l'extrémité nord-ouest. Ainsi, p. ex., le catalan
aime les gutturales, et l'aranais dit agi, agéso, agût, au lieu
du luch. a/ci, aioéso, awût (passé déf. , imparf. du subj. et
part. pass. du verbe awé, « avoir ») ; digi, au lieu du luch.
dichi ou did'i (pass. déf. du verbe dide, « dire »), etc. — 2° La
vallée de Louron et la vallée d'Aure suppriment y à la lin
des mots (Ex. : Ansiza «Ancizan», Sarraykuli « Sarranco-
liu »). Elles disent ù unie « un homme », comme le Béarn ;
à Luchon, on dit, au contraire, avec y gutturale, ùy ôme:
prononcez presque ûng orne; (bien qu'on dise cependant, par
exception, yâwte «un autre», ce qui suppose *û t'ucte, puis
* K'âwte). Elles disent ex- pour l'article masculin devant une
voyelle (Ex.: ex- ûs « l'ours»; cf. à Oloron ex-aiolhè «le ber-
ger »). Elles emploient y pour j (Ex. : yioén «jeune » luch.
jicén). Ajoutons encore que s finale est conservée dans la
vallée d'Aure, là où le luchonnais la laisse tomber (Ex.: exa
lits «l'avalanche», luch. exa lit; saùéls «vous savez»,
luch. sa/jét; pourtant larb. sabéts). — 3° Enfin, au nord du
pays de Luchon *, le parler de Marignac et de Saint-Béat,
très semblable au luchonnais, s'en distingue d'abord par
l'emploi fréquent de la terminaison tch là où le luchonnais
n'emploie que t (Ex.: Sem-Byâtch, luch. Sem-Byât, «Saint-
Béat»; y êteh anâlc/i? luch. y et anal? «y êtes-vous allé?»)
A Luchon, le t final est simplement prononcé avec force; la
terminaison tch existe bien en luchonnais, mais elle n'y ré-
sulte guère que du groupe 11 latin devenu final. De plus le
parler de St-Béat, termine, comme ceux de la Plaine, en -à,
•ùs, -on les mots terminés en luchonnais en -e, -es, -en (du
latin -at, -as, -ant) ; l'article féminin pi. y est exas (luch. es);
« une » s'y dit ûo (luch. yô, larb. iùâ). Enfin il possède des
mots spéciaux (daioâtch « sous», luch. debâtch; umpyâ « rem-
plir», luch. emplyâ, etc).
Maintenant, dans le langage du canton de Luchon lui-même,
il y a une distinction à établir entre le parler de la vallée de
Luchon (ancien lac desséché), arrosée par la Pique, et dirigée
du sud au nord, et celui des vallées de Larboust et d'Oueil,
(1) Dos qu'on sort du canton, à Gaziu-L -ivrisse, ;i Lège, à Guran, on
quitte le luchonnais. — La Barousse parle à peu près comme Saint-Béat.
388 LE PARLER DE BAGNERES-DE- LUCHON
arrosées par l'One et les Nestes qui la grossissent, orientées
de l'ouest à Test, plus élevées que la vallée de Luchon, moins
ouvertes pour ces deux causes aux influences du dehors, et
conservant, par suite, quelque chose de plus archaïque dans
la langue et clans les mœurs *. Le parler larboustois se sépare
du parler luchonnais proprement dit par plusieurs caractères:
1° Le larboustois (ainsi que I'aranais) conserve l'a final aione
du latin (féminins et impératifs terminés en a au lieu de o,
conditionnels en yâ au lieu de yô, etc.), ce qui donne quelque
chose de plus naïf à ce langage; ^° les noms, les adjectifs et
surtout les participes masculins font leur pluriel en i plus
souvent que dans la vallée luchonnaise ; 3° le son u est parfois
préféré au son ù (Ex.: brûcha, « sorcière»; à h\xc\\oxi,brûcho)\
ce caractère, comme le premier, rapproche le larboustois de
I'aranais et de l'espagnol; 4° le vocabulaire a quelque chose
de plus antique et de plus proche du latin (Ex.: baxâ « danser »,
bas « auge », kiréw « corral », arrûpa «robe », estuykà «arrê-
ter»; yêggwa «jument», pris au louronnais, etc.), et les mots
sont souvent moins modifiés que dans la vallée luchonnaise
(Ex.: larb. tivâ « tienne », swâ «sienne », luch. tyô, syô;
larb. wâ «une», luch. yô ou yù; larb. aketô «cela», luch'.
akrô; cep. larb. pyâ « pleine», luch. plyô ; dèntya «jusqu'à»,
luch. diykyo ou diyko; jâmès «jamais», luch. famés; mcâti
«nous autres», luch. nuzâwli, etc.), ce qui contribue encore
parfois à rendre le parler plus doux. Mais, ces réserves faites,
le larboustois (étudié déjà, comme on le sait, par un savant
archéologue, enfant du pays, Julien Sacaze) peut être consi-
déré comme ne formant qu'un seul et même langage avec le
luchonnais 2.
Enfin, dans le luchonnais proprement dit, parlé par envi-
ron 6,000 âmes, c'est-à-dire par plus des deux tiers des habi-
1 Voy. J. Sacaze, Epigraphie de Luchon, p. 4-6 ; Histoire ancienne de
Luchon, p. 3-6.
2 Nous aurons l'occasion de revenir plus d'une fois sur la compa-
raison du luchonnais et du larboustois. Cette comparaison sera plus
fructueuse, lorsque nous aurons remarqué les caractères distinctifs du
luchonnais pris dans son ensemble : les caractères spéciaux de chacune
: iux divisions pourront alors rire mieux discernés des caractères
généraux communs à toutes deux.
ET DE SA VALLEE 389
nuits du canton, peuplé d'environ 8.500 ;"i a >s, il convient de
mettre un peu à part les pari ers de Gouaux, d'Artigue et de
Sodé, villages élevés situés sur le flanc oriental delavalléede
Luchon. L'altitude et, par conséquent, l'isolement relatif de ces
vidages, a conservé à leur langage que que chose de plus ancien
(par exemple, on dit à Artigue eiadiû ou cxa di<''*, « le jour »,
en deux syllabes et fém. ; luch. ed dyô, larb. ed dyâ\ — on
dit atoji pour « entendre », bï pour « venir»), ce qui le rap-
proche un peu du larboustois. Cazarilli est aussi un peu à part,
par suite île sa situation élevés sur le liane occidental de la
vallée de Luchon. Le parler de Luchon est à classer avec
ceux des villages du fond de la vallée, c'est à-dire avec ceux
de Cier, de Salles, d'Antignao, de Moustajon, de Juzet, de
Montauban et de Saint-Mamet. Les différences sont minimes
entre tous ces parlers ; ils sont plus ou moins purs suivant les
villages1 et quelquefois même suivant les maisons 2.
Une chose tend, malheureusement, à altérer de plus en
plus le langage original de cette région : la grande vogue
dont jouit la station thermale de Bagnères-de-Luchon depuis
une cinquantaine d'années. La ville a doublé en étendue;
une foule de constructions nouvelles se sont élevées et la
la population a notablement augmenté, par suite de l'immi-
gration non seulement des gens de la vallée, ou même du
canton (d'où un certain mélange, à Luchon même, du parler
larboustois au parler bichonnais), mais encore des gens des
vallées plus septentrionales, de la Plaine ou de plus loin
encore; enfin, le contact des étrangers a fait négliger de plus
en plus le parler local.
Une autre cause d'altération, importante aussi, c'est le dé-
part d'un grand nombre de Luchonnais pour les villes de la
Plaine, notamment pour les régions de Bordeaux et de Cette,
1 Quelques mots ditièent : ainsi, à Saint-Mamet et à Luchon on dit
plutôt w-lii «ouvrir» que dawct] béy •< voir, que bédé; a Montauban
«traîneau» se dit, au lieu .1.' lu-, suték. Gouaux, Juzet, Montauban
■M plus lentement qi
- ('. parlenl i serre », l'autres d'un . Mieux
vaut 1^ premier, sans exagér is ou moins archaï-
que et plus ou moins mélange, suivant l'histoire delà maison.
390 LE PARLER DE BAGNERES-DE-LUCHON
le plus souvent à titre de petits employés. Quand ils revien-
nent (car ils gardent l'esprit de retour), ils ont un peu perdu
l'habitude de leur langage ; et leurs enfants peuvent ne savoir
que le français.
Ajoutons enfin l'influence de l'école, des journaux et des
livres ; mais elle est plus faible que celles du dépaysement et
des étrangers.
Malgré tout, si le langage de la ville s'est un peu corrompu ,
celui des villages ne s'est pas trop altéré. Cela tient avant
tout au genre de vie de leurs habitants : pasteurs et agricul-
teurs, ils n'ont pas trop de rapports avec la ville, et peuvent
conserver ainsi la pureté de leur parler. Ce fait est resté
longtemps vrai de Saint-Mamet, dont la population devait
même habiter autrefois, dans le délicieux vallon de Burbe, un
village écarté, aujourd'hui en ruine, du nom de Simadûs.
D'ailleurs, les habitants de Saint-Mamet sont ceux qui res-
semblent le plus, à tous les points de vue, à ceux de Bagnères-
de-Luchon.
Les gens de Saint-Mamet et de Luchon sont remarquables
parleurs caractères physiques et moraux1. L'abbé Ferrère,
dans son ouvrage intitulé Une voix des montagnes, publié
en 1869, s'étonne du « type singulier » des gens de Saint-
Mamet. « Depuis quelques années, dit-il (p. 110), il disparaît
peu à peu, à cause des nombreuses émigrations de la jeunesse.
Ce type faisait, de ce peuple de cinq cents âmes, quelque
chose à part, d'étonnant, d'impossible, quelque chose d'aussi
étonnant pour le moraliste que les rochers de granit d'Oo
pour le minéralogiste. On est à se demander d'où il vient.
Rien ne lui ressemble, ni à Luchon, ni dans les villages
voisins. Population unique, seule, isolée des autres comme
une île au milieu de l'Océan... . en dehors de tout mélange.
L'histoire est pour elle une page effacée Quoi qu'il en
soit, la pensée jaillit de l'esprit de ce peuple comme une
étincelle ; son langage est vif et saccadé ; il imite le torrent
dans sa course bouillonnante sur les rochers. Son caractère
1 Voy. aussi ce qu'en dit Taine dans <on Voyage aux Pyrénées. Il
trouve chez les Luchonnais quelque chose de plus vif, de plus alerte que
chez les populations voisines.
ET DE SA VALLEE 391
est pétri de salpêtre. Prompt à la colère et à la vengeance,
rien ne pourrait l'arrêter. Il est agile, fort, impétueux. Et ce
lion du désert, tout sauvage qu'il paraît, tout frémissant qu'il
est, a un coeur d'or. Quand ils aiment, c'est pour tout de bon ;
ils ne font rien à demi. Pour leurs amis ils se feraient mettre
en pièces. Dès qu'il s'agit de leurs intérêts, ils ne forment
qu'une famille compacte, et qui insulte l'un d'eux, insulte le
village tout entier.» L'auteur de ces lignes n'était pas un homme
étranger au pays : pour être ainsi frappé du caractère des
gens de Saint- Mamet, il a bien dû y trouver quelque chose
d'original. Il va trop loin néanmoins à notre avis, en distin-
guant aussi profondément qu'il le fait la population de Saint-
Mamet de celle des autres villages et surtout de celle du vieux
Luchon, à laquelle elle est, aujourd'hui du moins, physique-
ment et moralement semblable.
C'est donc des Luchonnais en général que nous dirons ce
que dit Ferrère des habitants de Saint-Mamet. Il y aurait ici
une importante question ethnographique à élucider, à l'aide
de mesures anthropométriques précises. Les remarquables
travaux de M. Collignon sur l'ouest et le sud-ouest de la
France s'arrêtent à la vallée de Louron. Ils ont révélé déjà
que, tandis que les habitants de la plupart des hautes vallées
des Pyrénées (Pyrénées Orientales, et Pyrénées-Occiden-
tales du pays Basque exclusivement à la vallée d'Aure inclusi-
vement) sont assez dolichocéphales, ceux du pays de Lanneme-
zan et de la vallée de Louron sont très nettement brachycé-
phales, et se rattachent ainsi, avec la plus grande partie de la
Gascogne (malgré quelque chose de plus allongé dans la face),
aux types du Plateau-Central, de la Bretagne, et, en somme,
à la grande masse de la population française. M. Bertrand,
dans ses études celtiques, classe le centre des Pyrénées dans
les pays brachycéphales. Mais il doit y avoir sans doute ici
des distinctions à faire. De même que la vallée d'Aure est
plus dolichocéphale que celle de Louron, de même le Larboust
est probablement plus dolichocéphale que la vallée de Lu-
chon. En tout cas, dans le Larboust, à côté de figures assez
carrées, on trouve des faces remarquablement longues;
dans tous le pays, les faces rétrécies vers le bas et les men-
tons pointus sont fréquents. Pour les habitants de Saint-
392 LE PARLER DE BAGNERES-DE-LUCHON
Maniet, de Luchon et de sa vallée, ils doivent être, à en juger
par l'aspect extérieur, nettement brachycéphales. Le type
observé par Ferrère a la taille haute en général ; il est plutôt
blond que brun ; la tête est assez petite relativement au corps,
le cou assez court; le front est large, découvert, un peu
fuyant ; le sommet et l'arrière de la tête sont assez déve-
loppés ; les yeux sont gris, le nez droit ou aquilin, le corps
un peu sec et les jambes longues. Ce type se retrouve, avec
quelques nuances et un certain mélange à un autre type
plus petit et plus brun, à Luchon même et dans tous les
villages delà vallée. On voit combien il se rapproche du type
dit celtique ; ce qui concorde avec les découvertes d'objets
et de monuments préhistoriques faites dans le pays (travaux
de MM. J. Sacaze, Piette et Gourdon). On peut donc penser
avec M. Lu chaire, que les Celtes s'avancèrent dans les
Pyrénées plus avant qu'on ne le croit d'ordinaire (ulongius
opinio e processerunt ») et qu'ils influèrent profondément sur
cette région. Sans doute, ce quelque chose de plus allongé
et de plus fin que présente la physionomie des Luchonnais,
comparée à ce le des habitants du Plateau-Central, dénote
quelque mélange avec les Ibères '; sans doute,, la langue bas-
que explique un grand nombre des noms de lieu du pays.
Nulle part cependant dans les Pyrénées il ne doit y avoir
plus de sang celtique que dans la région centrale, dont Lu-
chon fait partie.
Ces remarques sur la race, le tempérament et le caractère
des gens qui parlent le langage que nous devons étudier ne
nous seront pas inutiles; elles nous permettront d'expliquer
plusieurs des particularités qu'il présente. Contentons-nous,
1 Nous employons dans ce travail (bien qu'on ait contesté que les
Basques fussent les descendants des anciens Ibères proprement dits, el
qu'on ait supposé, d'autre part, que la langue qu'ils parlent aujourd'hui
pouvait ne pas leur appartenir en propre, mais avoir été emprun
eux, soit aux anciens Ibères, soit à d'autres) les mots Ibère et ibèrien
pour désigner, au point de vue de la race, une race semblable à la race
basque, et, au point de vue de la langue, une langue île même famille
que la langue basque. (Voy. l'étude 'le M. Collignon sur les Basqui •
— r en signifie par conséquent au ■ nous, aux deux points
de vue signalés, celto-basque.
ET DE SA VALLEE 30 3
pour l'instant, do faire ressortir que nous avons affaire ici à
une population originale et énergique. De lu un langage vif,
contracté, expressif, C'est à Saint-Mamet et à Luchon qu'i n
l'articule le plus nettement ; c'est là qu'on le parle avec le plus
de force el dans le rythme le plus i
Nous avons il inc '«'terminé la place du luchonnais dans la
langue d'oc et le dialecte gascon, et indiqué le caractère de
ceux qui le parlent. Il nous resterait à en faire l'historique,
B irnons-nous à dire que son histoire se confond, dans ses
grandes lignes, avec celles du gascon Le luchonnais B'est dé-
veloppé suivant les mêmes lois internes (voy. la Phonétique
et la Morphologie)^ et, d'une façon générale, sous les mêmes
inlluences externes [voy. surtout la Lexicologie). Nous aurons
d'ailleurs pins d'une fois l'occasion, dans la présente étude,
de mettre en lumière les transformations qu'il a éprouvées.
Venons-en donc à son examen direct. Voici l'ordre que
nous allons suivre :
1° Nous étudierons d'abord les sons du luchonnais, et nous
nous efforcerons d'indiquer les principales lois phonétiques
qui les ont produits et qui les gouvernent encore.
2° Nous passerons ensuite à l'étude de son lexique, exami-
nant successivement l'origine, la formation et la signification
des mots qui le constituent ;
3° Nous arriverons enfin à l'examen de sa morphologie et
de sa syntaxe, à l'occasion des diverses parties du discours.
Il nous restera, pour conclure, à envisager du point de vue
littéraire le parler de Bagnères-de-Luchon.
39 4 LE PARLER DE BAGNERES-DE LUCHON
PREMIERE PARTIE
PHONÉTIQUE
Dans l'étude des sons du luchonnais, par laquelle nous
commençons, nous examinerons successivement: 1° quels ils
sont; 2° quelle est leur origine, comment ils se sont formés;
3° quelles modifications ils éprouvent dans leurs rencontres
actuelles.
Dès cette première partie, nous pourrons voir comment
ceux qui parlent ce langage ont su le marquer à leur empreinte.
I
REVUE GÉNÉRALE DES SONS DU LUCHONNAIS
Il y a lieu de distinguer ici les voyelles d'une part, les semi-
voyelles et les consonnes de l'autre.
1° Voyelles
Nous examinerons d'abord leur timbre, puis leur accentua-
tion et leur quantité.
A) Timbre des Voyelles
1) Voyelles pures.— Il y a en luchonnais huit voyelles pures:
1° Fondamentale : a plus ou moins ouvert '. Ex. : mas,
makd.
1 Cependant a et h sont assez rapprochés l'un de l'autre pour que
nous puissions nous dispenser, dans tout ce qui suivra, de les distin.
guer.
ET DE SA VALLEE 395
2° Lourdes: o (o ouvert), o (o fermé), et u (ou français).
Ex.: tôs : dyô, kâzo ; s*'s.
3° Légères : è (e ouvert), e (e fermé), et t' (i français).
Ex. : mes ; arrés, sexe; bi\ — auxquelles il faut ajou-
ter: ù (u français), léger comme i, mais labial comme u.
Ex. : dûs.
Les voyelles à, o et e sont un peu plus ouvertes que les
voyelles françaises correspondantes ; o est un peu plus près
de ô qu'en français, c'est-à-dire est plus ouvert que l'o français
(c'est un son le plus souvent issu récemment de à ou de a) ; û
est, semble-t-il, plus près de i qu'en français (Cf. plus loin les
semi-voyelles). — Les voyelles o ouvert et ô fermé n'existent
point en luchonnais ; mais les Luchonnais les prononcent
dans les noms propres français.
2) Voyelles nasales. — Il y a en luchonnais sept voyelles
nasales :
1° Fondamentale: ay, plus ou moins ouvert. Ex. : m/iy,
maykâ.
2° Lourdes : ôy et uy. Ex. : tôy\ sûy.
§° Légères : èy, ey et iy. Ex. : mêy ; arréy, teygi; biy ; —
et ûy. Ex. : ûy.
Les voyelles nasales correspondent, on le voit, aux voyelles
pures : seul, o fermé ne donne point de nasale. En français
n'existent que ay, èy, ày ; et oy (avec ô ouvert) qui manque
en luchonnais comme ô.
Les voyelles nasales luchonnaises se distinguent des voyelles
nasales françaises par une prononciation assez différente. En
eff< t, quand on les entend prononcer, on perçoit (surtout
lorsqu'au lieu d'être suivies d'une gutturale, elles sont suivies
d'une voyelle) un son particulier, dû à un mouvement du
palais1 et que l'on peut appeler une n gutturale (son qui man-
que en français et que nous désignerons par le caractère y).
Ainsi, quand on prononce ûy ôme « un homme», on entend
1 C'esl L'énergie du son y qui explique sans doute les formes téyge
« tenir», béyye a venir ■>, piygulâ a;rand comme \m pin », "ù un (/s'esl
inséré après y-
396 LE PAHLER DE BAGNERES-DE-LUCHOX
presque ùng ôme1. — Cependant, il faut reconnaître que la
prononciation des voyelles nasales luchonnaises, surtout quan 1
elles ne sont pas suivies d'une autre voyelle, n'aurait qu'à
s'affaiblir un peu pour rejoindre la prononciation française.
C'est à peu près ce qui arrive dans certaines rencontres 2 ;
on prononce avec une y assez douce : ïnj tchibôxo, ùy tsala-
bânt ; y est ici, à l'égard de y devant une gutturale ou une
voyelle, à peu près ce qu'est k devant c ou i à k devant a, o
ou u; — mieux encore, on dit uni pas, un dit, et un fô/t (ce
dernier sans n sensible), tuais dans ces trois exemples on a
un u nasal prononcé comme les nasales françaises. (La véri-
table notation serait donc û"m pas, ùun dit, ùa fort). Ajoutons,
enfin, qu'on sent une légère nasalisation dans la voyelle qui
précède nh finale (Ex. : bânh «bain»), et les groupes nd ///
ou ns (Ex.: arréndo, « rente» ; sent, e cent »; mens, « moins ») ;
mais n se fait entendre.
En tout cas, l'existence de vojelles nasales dans le luchon-
nais le rapproche du français plus que bien d'autres parlers
méridionaux 3. Seulement, ce sont plutôt des nasales guttu-
rales, et elles sont prononcées en ouvrant la bouche plus
qu'en français.
B) Accentuation et quantité
1) Accent d'intensité et diphtongues.
1°) Toutes les voyelles luchonnaises psuvent être toniques
1 En français même on a écrit autrefois «un» ung; mais, selon Dar-
mesteter, simplement pour distinguer vn de vu. — La différence entre
les voyelles nasales françaises et les voyelles nasales luchonnaises est
indéniable, comme le montre ce fait que (sauf s'il s'agit d'un mot termine
par un suffixe existant déjà en bichonnais, comme -tion, hxch.-syûn) La
nasale française ne donne pas une nasale en luchonnais : Ex. : fr. moyen,
luch. muycn\ïv. chirurgien, luch. sûrjên.
2 Voy. ci-après, dans les rencontres des consonnes, les assimilations
des nasales.
3 En montalbanais, p. ex., y n'existe pas entre deux voyelles, mais
seulement (et affaiblie) devant des gutturales On remarque pourtant
une n prépalatale à la premièn pei lu singulier du p
faitdel'in licatif des verbes. Ainsi, kantéi « \ ai», betsêi ■ < ris »,
se prononcent presque kanténi, betséni.Les autres personnes ont après
une gutturale. Cf. Luchaire, Idiomes pyr., p. 225.
ET DE SA VALLEE 397
ou atones. Les voyelles ouvertes peuvent être atones (Ex. :
pour ô, larb. à : eskûtô-w « écoute -le », larb. eskûtà-w; pour
è, l'occasion ne se présente guère que dans des proclitiques :
/i'<? dit «j'ai dit » ; le larb. dit pourtant jâmès «jamais »).
2°) Il n'y a point en luchonnais de véritables diphtongues ;
chaque voyelle fournit une syllabe. Il y a seulement des com-
binaisons des voyelles avec les semi-voyelles îv, w et y. Seul
w ne peut se trouver devant une consonne, ni à la fin des
mots, ni entre deux voyelles. Quand 10 et y se trouvent devant
une consonne, ils appartiennent à la syllabe précédente;
devant une voyelle, à la syllabe de cette voyelle. Ainsi on
dit daw\x('i « dorer» ; on disait kaw\ftâ « chauffer » ; mais on
dit aujourd'hui ka\ioâ. De même ay\mâ «aimer», mais be\yô
«je voyais ».
3°) L'accent d'intensité est susceptible de deux degrés :
ainsi, dans les mots un peu longs, il y a souvent un accent
principal et un accent secondaire. Exemple: nêwcitût «nour-
riture ».
Nous ne marquerons que l'accent principal (neicxitùt).
Tous les mots portent l'accent principal d'intensité seule-
ment sur la dernière ou l'avant dernière syllabe. Pourtant
l'existence de l'accent mélo lique fait qu'il y a des mots non
seulement oxytons et paroxytons, mais encore perispomènes,
et même propérispomènes. (Voy. ci-après bas prononcé bâas,
Iles, fiées, et Hase, Hanse). 11 y a là comme une transition vers
l'espagnol, qui connaît les proparoxytons ou esdrujulos.
L'accent d'intensité est assez fort en luchonnais pour qu'il
fût possible, si l'on voulait, d'y faire des vers fondés sur cet
accent, comme en espagnol parfois, en anglais eten allemand.
Par là, le luchonnais se distingue du français, et des patois
de la Plaine, assez plats, si Ton peut dire, à cet égard, et se
rapproche au contraire de l'espagnol.
2) Quantité des voyelles.
Les différences de quantité des voyelles latines, on le sait,
se sont transformées, dès le latin populaire, en différences
de timbre (ainsi é a donné è, ë a donné e, etc.). Les diffé-
rences de quantité des voyelles romanes ont donc une autre
398 LE PARLER DE BAGNERES-DE-LUCHON
origine : avant tout, mais non uniquement ', la présence ou
l'absence de l'accent d'intensité. La quantité des voyelles est
bien plus apparente en luchonnais qu'en français et môme
que dans les parlers de la Plaine. Les voyelles qui portent
l'accent d'intensité sont longues en général , les voyelles
atones en général brèves 2. Les voyelles ouvertes sont tou-
jours longues, quand elles sont accentuées. Signalons enfin
l'existence, en luchonnais, de Ve fermé long (inconnu au fran-
çais, selon Darmesteter % mais connu à l'espagnol) Ex.: Dy&w
« Dieu ».
3) Accent mélodique.
L'accent d'intensité ayant remplacé l'accent de hauteur ou
accent mélodique, celui-ci, comme en français, flotte sur la
phrase, se pose sur les mots expressifs, interrogatifs, excla-
matifs, etc., et toujours (comme en latin, et malgré sa
mobilité) sur une voyelle accentuée 4. Il faut remarquer
pourtant qu'en luchonnais la voix peut monter et redescen-
dre sur une même voyelle longue, principalement dans les
mots qui terminent les phrases. Soit l'adverbe jâ « oui,
certes, déjà » terminant une réponse. Ex. : ja y bàio, jâ
«j'y vais, certes ». Il se prononce avec a long, porte
l'accent d'intensité et l'accent mélodique, ce dernier très
semblable à ce que devait être l'accent mélodique circonflexe
du grec et du latin anciens 5 : on dit presque jâa6 , la voix
s'élevant sur le premier a, s'abaissant sur le second, de
i Voyez plus loin la diphtongaison des voyelles libres.
2 Mais si l'on crie par exemple à quelqu'un : 'pàrtà-t! « écarte-toi !», o
est long, bien qu'atone. Dans kâp « tête », a est long ; mais dans kap
(négation), il est ordinairement atone et bref.
3 Cependant dans « aimé-je », il semble bien que é est long.
4 Si l'on crie : 'pàrtô-tl à peut être assez allongé, dans cette exclama-
tion pour porter lui aussi l'accent d'intensité. L'exception confirme donc
la règle.
5 Si l'accent circonflexe mélodique ancien peut ainsi se retrouver dans
le luchonnais, cela tient évidemment à la netteté avec laquelle les voyelles
toniques et longues se distinguent dans ce parler des voyelles atones et
brèves.
6 De la l'orthographe française « ôo » pour le village à'O. Cf. sans
doute les noms béarnais Puyôo, Morlaas, etc.
ET DE SA VALLÉE 399
manière à mettre entre les deux tons l'intervalle d'une tierce
environ *. C'est de même qu'on prononcera, en employant
parfois à moduler la voyelle plus d'une seconde, sii pour si
« si, oui» ; de sées pour de ses «le soir » ; prawbôôt/ pour
prawbôtl «pauvret!»; et, bien qu'un peu moins, buas, âêè,
lmu.se dans ta-um bas? «où vas-tu?», ke bulett lié? «que
voulez-vous faire?» et ke bulék ke base? « que voulez-vous
qu'il fasse?». — Le parler luchonnais est par suite un peu
chantant. Remarquons cependant que le langage de Saint-
Mamet et de Luchou traîne moins sur les voyelles accen-
tuées que celui des villages voisins.
Cet accent mélodique n'a pu être hérité du latin classique
parle luchonnais, car le latin populaire avait déjà transformé
l'accent mélodique du latin classique en accent d'intensité
avant même son introduction dans les Gaules ; il a donc
été refait par le luchonnais, ou mieux par